Agnoslip…
Le journalisme mène à tout, à condition d’en sortir…
Accoudé sur le balcon, les yeux rivés sur un groupe de fêtards titubant en contrebas, je ne parvenais guère à entendre les quolibets que s’échangeaient les jeunes gens éméchés au-dessous de moi, tant la musique sortant de l’appartement dans mon dos semblait masquer tous les autres sons…, je n’entendis d’ailleurs même pas claquer les talons de la jeune femme venue me rejoindre et ne me retournais que lorsque celle-ci posa délicatement une main sur mon épaule, l’autre tenant un micro….
– Vous ne vous joignez pas à nous cher Quelqu’un ? Vous allez prendre froid à rester sur ce balcon.
– Non, je ne suis pas d’humeur. J’ai besoin d’un peu de calme, comprenez-vous… hmmm, Emmanuelle, c’est cela ?
– Ho, je vous en prie ! Vous êtes si formel. Je dirais même que vous avez l’air un peu… bougon.
– Vous savez Emmanuelle…
– Oui…
– Ecoutez, il faut que vous sachiez : je suis toujours un peu bougon. Mais effectivement, j’ai quelques contrariétés.
– Allons donc ! Vous voulez en parler ?
– Et bien par exemple je vois ce livre, là Fifty shades of Grey… des millions de gens l’ont acheté, alors que ce n’est qu’une repompe de l’un de mes vieux romans injustement méconnu, Fifty shades of Brown.
– Ho ? Était-ce aussi un truc vaguement sexuel ?
– Disons que c’était une œuvre érotico-scatophile, comme le titre l’indiquait plus ou moins. Je crois que celle qui m’a honteusement plagiée a surtout gardé le côté étron sans pour autant verser dans le coprophile.
– Je ne saisis pas bien.
– Ce n’est pas plus mal pour vous.
Délaissant l’ingénue, je tournais à nouveau vers la troupe en contrebas, dont les échanges tournaient peu à peu à la bagarre et m’apprêtait à demander à Emmanuelle de bien vouloir aller me chercher fourchettes, couteaux et autres ustensiles à la cuisine pour ainsi larguer du matériel aux belligérants, lorsque celle-ci reprit la parole :
– J’ai appris que vous avez un web-site….
– Il parait.
– Moi j’aime bien les blogs, j’en lis plein ! Ho dites d’ailleurs ! ça vous dirait pas de vous présenter aux Golden Blog Awards ? J’ai des copains qui le font !
– On prend les bloggeurs et les bloggeuses pour des imbéciles, lorsque l’on prononce le mot blog, les gens se mettent à pouffer, imaginant les déboires quotidiens que les beaufs se racontent en ligne…, mais mon web-site n’est pas un blog…
– Ah bon, tant mieux ! On m’a proposé d’écrire un article dans un blog, pour un tarif si bas que même un pigiste de Mickey Parade pourrait hurler au scandale : 10€ l’article, véridique, même pas le SMIC horaire. Un blog, ça ne fait pas vraiment sérieux, alors, si on commence à parler aux gens qui en ont comme à des êtres humains, où va le monde. Mais comme votre blog est un web-site, je peux vous parler, non ?
Elle sembla lire dans mon regard posé sur elle un mélange de mépris, d’incompréhension et de haine pluriséculaire… et tordit sa bouche en conséquence, comme inquiète de ma prochaine action…, bien qu’en effet, ce seul propos me donnait envie de l’envoyer explorer les limbes, je n’en fis rien, préférant l’éducation pour de sombres raisons inscrites sur mon curriculum vitae.
– Voyez plutôt… dis-je simplement à la jeune femme, l’invitant à venir observer les pauvres gens s’affrontant en contrebas pour illustrer mon propos… : crise financière, tremblements de terre, glissements de terrains, famine, maladie, neige en hiver, massacres, situation en Syrie, François Hollande, incertitude en Hindoustan oriental, la mévente des Vuhl au Pakistan, Porsche qui vient de sortir une berline diesel, la presse papier déchirée sur l’avenir de la forêt amazonienne… la litanie des malheurs s’abattant sur notre monde ne saurait s’arrêter à ces quelques exemples, mais il serait vain de vouloir se montrer exhaustif dans l’inventaire du malheur mondial.
– Régulièrement, je rencontre des amis au grand cœur qui n’hésitent pas à dire lorsque sont abordés, les tracas de nos contrées : Ne nous plaignons pas : c’est pire ailleurs !…, car comme chacun sait, à partir du moment où il y a plus malheureux que soi, il ne faut surtout rien faire.
– Il faut pouvoir rester entre soi pour se faire du bien, ce que de mauvaises langues pourraient appeler de l’onanisme.
– Mais je ne jette pas la pierre : l’onanisme n’ennuie personne, à l’exception de la bonde de la douche !
– Je lis sur votre badge que vous êtes journaliste…
– Oui, j’œuvre dans un magazine féminin !
– On dit que le premier homme qui en compulsa les pages s’effondra en hurlant et ne recouvra jamais totalement tant la vue que la raison. Au travers des siècles, on peut entrevoir son influence maléfique pour qui sait attarder son regard entre les lignes des grandes pages de l’Histoire. En -47, déjà, Jules César apprend la présence de cette chose en Egypte ptolémaïque ; il fait brûler sur le champ la bibliothèque d’Alexandrie par ses troupes afin d’en finir avec ce monstre de papier. En 1327, on retrouve la trace de cet ouvrage supposé perdu dans les réserves d’une abbaye bénédictine. Plusieurs moines se suicidant après avoir consulté ces écrits interdits, une enquête est diligentée qui s’achèvera par un tragique incident durant lequel de nombreux ouvrages seront détruits. En 1894, c’est un jeune officier français, le capitaine Dreyfus, qui est accusé d’avoir eu en sa possession le document et de l’avoir transmis aux allemands en vue de la création d’une nouvelle arme secrète. Au terme de 12 ans d’enquête, si l’homme sera innocenté, nul ne sera capable de dire s’il avait jamais véritablement eu en sa possession le fameux texte, cette œuvre est de retour : on l’appelle Magazine Féminin. Ouvrage multiple et polymorphe, le Magazine Féminin est un parasite de la femelle homo sapiens capable de s’adapter particulièrement rapidement aux évolutions de cette dernière race, parfois au point de les anticiper. Exclusif, comme l’indique souvent sa couverture, le Magazine Féminin ne s’attaque qu’aux femmes, qui sont d’ailleurs les seules à pouvoir supporter la lecture de ceux-ci. Mystère encore inexpliqué par la science actuelle, il semblerait que certaines rédactrices d’un nombre conséquent de magazines puissent sentir lorsque leur heure est venue.
– Précisez-moi…
– Un matin, après une longue carrière rythmée par les fashion weeks , les numéros spéciaux régimes de l’été ou les hors-série Comment retonifier son gros cul après les fêtes, la journaliste sent que quelque chose dans l’air a changé. De petits détails lui mettent la puce à l’oreille : l’acteur qu’elle a en fond d’écran n’a plus eu de premier rôle depuis un moment, son placard ferme chez elle, et pire encore, elle se demande si, en fait, les über-franges, ce ne serait pas moche. Alors qu’elle s’interroge afin de savoir s’il ne serait pas temps de reprendre ses études, et qu’elle commence donc à chercher le numéro de sa directrice d’école primaire pour voir si elle peut faire la prochaine rentrée en CM2, elle lâche brutalement le combiné, et soudain, elle réalise l’odieuse vérité.
– Vous alors, vous n’êtes qu’un affreux…
– Oui, je sais ! Ahhhhh ! Le fond d’écran qui date, les fringues en quantité raisonnables, les franges qui ne lui plaisent plus : elle est devenue ringarde dans son milieu. Ni une, ni deux, ses collègues repèrent instantanément sa manière inhabituelle d’agir car elle glousse 20% de moins que la normale… et sentent naturellement ce qu’il en est : avant qu’elle ne contamine tout le troupeau, les bougresses se ruent vers son bureau dans un tonnerre de semelles compensées, puis assomment la fautive à l’aide du classeur servant à classer les photos de Justin Bieber. Une fois la malheureuse ainsi estourbie, une camionnette faisant quotidiennement la tournée des journaux de ce calibre…
– Sûrement un métier difficile…
– …charge l’animal et l’emmène jusqu’à sa nouvelle destination : un vaste hangar de banlieue entouré de miradors, où se trouve un blog qui prendra soin d’elle, mais ne la laissera pas pour autant imprimer quoi que ce soit sur papier. Un lieu où l’on sent bien que si le cœur est encore à l’ouvrage, le reste ne suit plus…
– Vous voyez l’avenir ?
– Bien sur…
– Racontez-moi…
– C’est le cimetière des éléphantes, des rédactrices fatiguées, on peut ainsi y trouver quantité de conseils de mode !
– C’est trop…, mais je ne puis m’empêcher de partager quelques conseils avec vous tant leur qualité est tout simplement formidable. C’est prouvé : robes moulantes et décolletés plongeants n’ont pas la cote auprès de la gent masculine… et cela pour une raison très simple…
– Quoi vous dites, là ?
– Mini-jupes, mini-shorts, décolletés plongeants…, ce ne sont plus les rêves des hommes ?
– Non ! En fait, pas tant que ça : selon une étude récente, les hommes fuient les femmes qui en montrent trop.
– Pourquoi ? Comment ?
– Si l’on suit les conclusions de cette étude, la pauvre Rihanna n’aurait plus aucune chance avec la plupart des mecs…
– Si Kylie Minogue m’approchait en se dandinant dans son mini-short doré, je la complimenterais sur son corps de rêve !
– Oui, mais non…
– Faut savoir, oui ou non ?
– D’après cette étude, les autres hommes lui suggèreraient de remballer un tant soit peu la marchandise.
– C’est surréaliste !
– Cela peut paraître surréaliste, mais selon cette étude, seulement 31% des hommes apprécient les femmes en tenue sexy, tandis qu’ils sont plus de 54 % à préférer les femmes dans une tenue plus classe.
– Admettons…, mais alors, qu’entendez-vous par plus classe ?
– Eh bien, selon un sondage, 45% des hommes préfèrent les femmes qui s’habillent dans un style inspiré de celui de la Duchesse de Cambridge.
– En d’autres termes, 54% des mâles apprécieraient ne pas trop en voir, pour avoir un peu de marge pour fantasmer…, qui l’eût cru ?
– Plus de la moitié des hommes interrogés affirment qu’ils respectent davantage une femme qui s’habille de façon prude, tandis qu’un quart d’entre eux avouent que cela dépend de la femme… et ils ne sont que 22% à affirmer avoir du respect pour une femme qui a choisi de porter une tenue sexy…
– Sans aucun doute, dans l’esprit masculin, l’habit fait le moine…, mais c’est un jugement un peu hâtif, qui s’explique peut-être par le fait que les atouts féminins peuvent leur faire perdre leurs moyens.
– Ils sont 38% à reconnaître qu’une nana en tenue sexy, ça les intimide.., aussi étonnant que cela puisse paraître, la science a son mot à dire.
– J’ai toujours lu que l’attrait masculin pour les tenues sexy était conditionné par la génétique : plus il y a de chair visible, plus les mâles peuvent inconsciemment juger de la jeunesse et de la fertilité de la partenaire…, de longues jambes, une taille fine et une poitrine généreuse sont des indices biologiques de fertilité, ce qui explique, d’un point de vue purement scientifique, que l’œil masculin est naturellement attiré par les mini-jupes et les décolletés plongeants.
– Je vais tempérer l’étude en question, car d’après une autre étude, ce processus d’attraction est qualifié de très complexe : dans cette autre étude, des scientifiques de sexe féminin se sont postées dans l’un des plus grands nightclubs de la ville afin d’y observer discrètement le comportement des jeunes femmes…, le résultat est sans appel : les filles en tenues sexy, sans surprise, étaient beaucoup plus approchées par les hommes…, en fait, celles qui dévoilaient environ 40% de leur corps attiraient deux fois plus les mecs que les autres filles.
– En d’autres mots, la première étude contredit la seconde…
– Oui, la première étude ne s’est pas vérifiée sur le terrain, du moins en ce qui concerne les jeunes qui sortent en boîte de nuit, mais l’étude n’a pas non plus confirmé l’idée que plus les filles en montrent, plus elles ont de chance de trouver l’amour, parce que la popularité des femmes auprès des hommes commence à chuter à partir de la barre fatidique des 40% de peau dévoilés.
– Plus elles en montrent, moins elles auraient de succès auprès des hommes ?
– Oui, même les jeunes qui sortent en boîte n’apprécient pas tant que ça les tenues olé-olé.
– Que dire alors du reste de la population, si ce n’est qu’il est certainement encore plus conservateur ?
– Je ne sais pas…
– Mais pourquoi donc les hommes, fascinés par l’imagerie de la femme fatale et séductrice, se montrent-ils si hésitants en face de leur incarnation en chair, en os et en mini-jupe ?
– Eh bien, paradoxalement, les hommes aiment être séduits, mais ils ne veulent pas pour autant partager cette séduction avec les autres mâles de la pièce, d’où une mise en retrait volontaire…, il y a aussi la crainte de ne pas savoir gérer la séductrice potentielle.
– Dépassez les 40% de peau visible, et le signal dans la tête des hommes passe de femme charmante à future infidèle ?
– C’est cela, oui…
– Montrez un peu vos jambes, montrez vos bras, mais pas plus !
– En résumé, les hommes adorent les séductrices…, mais sont facilement intimidés, voire refroidis, lorsqu’ils ont affaire à un sosie de Rihanna.
– C’est parfaitement contradictoire.
– Mais ça, ça n’est pas nouveau.
– Bon, c’était une conversation inutile, je suis certain que personne ne va comprendre…
– Possible, n’empèche que…
– Donc les vraies femmes fatales sont celles qui ne montrent rien, alors quand va-t-on obliger toutes les femmes du monde a porter la Burqa ? Goujat ! Machiste ! Mec ! Simone de Beauvoir disait : On ne nait pas femme, on le devient…
– Jean-Paul Sartre, qui n’était pas le dernier pour la déconne, avait ajouté la première fois qu’il avait entendu la célèbre maxime dans la bouche de sa femme qui n’était plus toute jeune : On ne nait pas moche, on le devient ; le calembour lui valut un vigoureux coup de clé anglaise dans la margoulette, provoquant chez lui un strabisme qui devint sa marque de fabrique. Il ne fit, dès lors, plus de remarque désobligeante, et n’osa pas non plus demander ce que sa femme pouvait bien faire avec pareil outil de mécanique dans son sac à main ; parti bouder dans son coin en grommelant la pipe en bouche, la légende raconte que c’est en maugréant sur le fait qu’on ne l’y reprendrait plus qu’il inventa l’existentialisme.
– Ah, si seulement Jean-Paul avait eu internet ! Que n’aurait-il pas pu s’instruire et ainsi mieux comprendre sa douce et tendre, trouvant les mots les plus justes pour la faire rêver, rougir et rire et l’emportant dans un tourbillon de séduction !
– La femme est en réalité un caméléon : grâce à ses yeux habilement placés des deux côtés de son visage, elle peut vous observer même lorsque vous n’êtes pas en face d’elle.
– Attention donc à ne pas se curer le nez, tripoter sa braguette ou s’enfoncer des buritos dans les narines, je vous connais, pendant qu’on ne vous regarde pas !
– La bête vous regarde TOUJOURS. Heureusement, elle est comme le T-Rex : si vous ne bougez pas, elle ne vous verra pas.
– Et votre web-site, c’est quoi au juste ?
– La réussite sociale passe par d’innombrables voies, plus ou moins obscures selon les points de vue des sociétés qui les contemplent ; ainsi, si dans la nôtre un homme qui brise le crâne de son voisin avant d’uriner sur sa dépouille n’est guère perçu que comme un vulgaire galopin, à l’inverse, les groupuscules vikings peu répandus de nos jours, leur déclin allant de pair avec celui des monastères francs et de leurs habitants à violer…, l’idolâtrent et méprisent l’homme dont la vie consisterait à prendre du poids en faisant masser ses flasques bourrelets par un bain à bulles hors de prix.
– Je suppose que vous avez un jacuzzi… Bon, je voudrais savoir si les magazines masculins méritent un châtiment semblable à leurs équivalents féminins.
– Excellente question s’il en est. Car l’homme est un animal tant majestueux que mystérieux, qui ne cesse de faire la une de tous les journaux ; à part quelques magazines de seconde zone qui font leurs couvertures sur les marées noires, l’économie ou les animaux à bajoues tel le hamster ou même Carla Bruni, l’essentiel de la presse mondiale n’a de cesse de se concentrer sur l’homme.
– Tant de questions se posent au sujet de cet être pas comme les autres : Pourquoi est il si velu ? Quelle est cette odeur de houblon qui semble se déplacer avec lui ? Pourquoi met il tant d’ardeur à soutenir les sportifs quand il rechigne bien souvent à remuer son gras ?
– L’homme est un animal allotropique capable du meilleur comme du pire : il sait réaliser les peintures de la Chapelle Sixtine avec patience comme il peut faire la guerre avec ardeur ; il est capable de vous offrir des fleurs tout comme il peut claquer tout votre plan épargne logement dans le tuning de sa twingo. Oui, s’il est difficile à cerner, l’homme n’en continue pas moins de fasciner une autre espèce de la planète, la femme, qui, inconsciente, essaie malgré tout de le cerner.
– Cette dernière est par exemple capable de relire entre 5 et 6 fois le même SMS pour essayer d’analyser si bisous au lieu de bises est vraiment significatif d’une évolution dans la perception de la dite femme par l’homme…, c’est désespérant.
– Pourtant, il existe des magazines qui se consacrent uniquement à répondre aux vraies questions que se posent les mâles ; souvent entreposées sous les matelas…, un réflexe inné chez le mâle homo sapiens qui peut cacher quantité de choses sous son lit, maîtresses comprises…, ces revues abordent différentes thématiques spécifiques aux possesseurs de chromosomes Y : on y retrouve fitness, mode et autre lifestyle tout comme dans son pendant féminin, mais abordé d’une bien différente manière. Par exemple, là où chez nos amis du sexe faible, fitness signifie : comment perdre 2 kilos sur les fesses avant l’été…, le mâle lui préfère : comment perdre un peu de son bide à bière avant d’aller draguer… De même, la mode est plutôt portée sur les dernières sorties de voitures qui font vroum-vroum plutôt que sur les débardeurs, car l’automobile chez l’homme est ce que la semelle compensée est à la femme…
– Ahhhh ! Vraiment ? Je suppose que dans votre blog…, euhhhh, dans votre web-site, vous créez de tels articles ?
– Effectivement mon site comporte une rubrique sobrement appelée SecretsInterdits, puisque comme chacun sait, le mâle ne cherche rien d’autre dans la séduction qu’une bonne grosse partie de jambes en l’air, qu’il achèvera dans un râle avant de se tourner sur le côté puis de lâcher un petit pet pré-endormissement.
– On doit donc y retrouver quantité de fascinantes études qui nous en apprennent plus sur les aventures reproductives de nos amis les humains ?
– Ouiiiiiiii, prenez, par exemple, saviez-vous que les anglaises préférent faire l’amour saoules ? Bien que l’article détermine que cela serait probablement dû à un manque de confiance en soi, on peut aussi évoquer une autre théorie : les anglais étant particulièrement moches et parfois même roux, mieux vaudrait plutôt avoir deux grammes dans chaque œil avant d’espérer se trouver le courage de convoler avec l’un d’entre eux.
– Je vous rappelle que Lady Diana a tout de même réussi à avoir deux enfants avec le Prince Charles ; il y avait forcément un secret là-dessous !
– Preuve en est, c’est bien l’alcool qui l’a tuée…, indirectement, mais ne chipotons pas. Autre étude passionnante, dans un des milliers d’articles publiés, je vous laisse chercher…, vous apprendrez que les coureurs auraient une vie sexuelle plus active ; chose tout à fait compréhensible puisque l’homme habitué au jogging court plus vite et se montre bien plus endurant dès lors qu’il doit poursuivre sa proie dans les sous-bois ; là où nombre de jeunes filles parviennent encore à semer à la course quelques hommes bedonnants suintant le gras et la bière…, elles ne font que rarement un pli face à un jogger entrainé.
– Une fois encore, tout se tient.
– Vous trouvez que je survole le sujet ?
– Vous êtes sexiste !
– Là où les religions peuvent se déchirer entre christianisme, islamisme, judaïsme et Nicolas Cagisme, il existe d’autres voies : l’athéisme, bien sûr, mais aussi l’agnosticisme ainsi que l’apathéisme. L’agnosticisme étant l’incapacité à déterminer l’existence de Dieu, et l’apathéisme de s’en moquer éperdument. Il en va donc de même avec le sexe : machisme, masculinisme, féminisme voire priapisme voient aussi d’autres voies de dessiner de manière proche. Ainsi, pour des raisons de simplicité, nous mélangerons l’agnosticisme et l’apathéisme en un seul concept, à savoir l’agnoslipisme : l’art de ne pas aller voir ce qu’il y a dans le slip de son prochain et de ne pas en tenir compte en dehors des situations impliquant des échanges de fluides. Bon, et puis agnoslip, ça sonne quand même mieux que apaslip, qui ressemble plus au cri désespéré d’un député conservateur sur une plage nudiste.
– Vous êtes… Je passe… C’est quoi votre … agnoslip ?
– L’agnoslipisme est la capacité à ne pas prêter attention au sexe d’autrui en dehors des tentatives d’accouplement, la chose pouvant alors avoir une certaine importance. L’agnoslipisme n’existe bien évidemment pas dans le hentai, où, de toute manière, tout le monde n’a que des tentacules, alors on est plus à ça près. Mais tout de même ! L’agnoslip, terme désigné pour employer un suivant de la doctrine agnoslipe, est souvent l’ennemi des quotas, puisqu’il ne comprend pas trop en quoi le contenu d’un slip peut être essentiel dans une prise de décision n’ayant objectivement strictement rien à voir. De la même manière, l’agnoslip n’écrit pas agnoslip-e-s ou agnoslipE…
– Oui, j’ai découvert que maintenant, la mode était de rajouter un E majuscule à la fin de tous les mots pour ne pas paraître sexiste…quand un homme écrit quelque part, puisqu’il se fiche éperdument de connaître le sexe de la personne qu’il désigne et accessoirement, qu’il respecte la langue française, qui est un féminin, ce qui n’est pas une raison pour la violer dans des tournantes de barbarismes.
– Dans l’antiquité, l’agnoslipisme était relativement accepté, comme le prouve le commencement de la religion chrétienne, alors que l’on se contentait d’accepter que Dieu et les anges n’avaient pas de sexe, et que c’était très bien ainsi d’un point de vue tant religieux qu’hygiénique, même si cela donnait une image relativement chiante du Paradis comparé à d’autres religions où l’on parle de copulations à n’en plus finir plutôt que de gratter des tac-o-tac avec Saint Pierre pour gagner deux places pour le prochain concert de luth. Evidemment, si le temps a fini par effriter la foi d’une bonne partie de la population, plus guère convaincue par le fait que Dieu envoyait sa foudre sur quiconque couchait sans vouloir forcément se reproduire à la vue de Silvio Berlusconi toujours pas transformé en paratonnerre…
– Cette volonté de voir le monde par le prisme du sexe n’a pour autant pas disparu.
– L’agnoslip a une doctrine simple : Le contenu de mon slip ne regarde que moi et les personnes consentantes qui iraient bien regarder…, voire éventuellement les chèvres dans certains domaines militaires, mais nous entrons la dans des cas particuliers…
– L’agnoslip est donc généralement opposé à toute politique de quota de sexe qui, par définition, est sexiste ?
– L’agnoslipe français est donc très malheureux, puisque son pays est le seul à avoir ces curieuses pratiques visant à s’occuper de ce qui ne le regarde en rien pour tenter d’établir un principe d’égalité mathématique plutôt que celui d’égalité de droit…, généralement d’ailleurs, vous noterez que les militants pro-quotas sont les premiers à s’opposer à la politique du chiffre, ce qui est assez formidable. Et maintenant, il va pouvoir se retrouver à élire deux personnes à un poste, car les combattants du sexisme expliquent qu’ils refusent d’être représentés par un élu qui ne soit pas de leur sexe.
– Voyageant par monts et par vaux, traversant contrées civilisées comme sauvages, il doit être fort ardu pour vous de rédiger vos articles tout en écartant de vos pied lépreux : loups & autres mendiants, autant de créatures mystérieuses qu’il est inconvenant de rencontrer lorsque la nuit tombe sur le royaume de France… Je vous quitte donc et vous abandonne à votre sort…
– C’est donc fort logiquement que je vous laisse partir… ,afin de continuer à effectuer ma terrible mission, impliquant moult champagne, jeunes filles & shows automobiles, ce qui est comme vous l’imaginez un véritable sacerdoce… Je sais que ma seule présence fut-elle épistolaire réchauffe les coeurs engourdis par la banalité de leurs quotidiens misérables.
– Ah, que j’aime votre humilité naturelle…
– Enfin bon, c’est pas tout ça, mais on bavarde, on bavarde, et je n’ai pas encore publié mon dernier texte…