Elle s’appelait Elle, lui pas….
Ils m’ont écrit les internautes, comme un rêveur m’avait parlé de la forêt.
“Voilà, qu’il m’a dit. Vous ne pouvez pas vous tromper c’est juste en face de vous“.
Et j’ai vu les grands panneaux, des sortes de listes a lire sans fin, dans lesquelles on discernait des âmes à remuer, mais remuer à peine, comme si, elles, ne se débattaient plus que faiblement contre je ne sais quoi d’impossible.
C’était ça Internet !
Et puis tout autour et au-dessus de l’écran jusqu’au ciel, un bruit lourd et multiple et sourd de torrents de cœurs, durs et parfois tendres, l’entêtement des âmes à tourner, rouler, gémir, toujours prêtes à casser d’autres cœurs ou les englober.
“C’est donc ici“, que je me suis dit. Je me suis approché de plus près, jusqu’à la porte du site ou j’ai cru lire sur un message que j’étais bienvenu.
La première s’appelait “Vide”, elle m’écrivit que c’était très compressible les âmes qui cherchent leur peine, ce qu’elle trouvait bien ici c’est qu’on y embauchait n’importe qui et n’importe quoi.
C’était vrai, elle n’avait pas mentie.
Je me méfiais quand même parce que les miteux ça délire facilement, il y a un moment de la misère ou l’esprit n’est plus déjà tout le temps avec le corps, il s’y trouve vraiment trop mal.
C’est déjà presque une âme qui vous parle et ce n’est pas responsable une âme….
A peine entré on me hurla “ASV”…, à poil en fait pour commencer.
Une fois rhabillé, je fus tiraillé dans divers apartés que pour y être à nouveau déshabillé.
Un délicieux supplice, avec toujours en fond, le fracas des âmes en dérive.
Tout tremblait dans le site, et soi-même des pieds aux oreilles possédé par les vibrations, il en venait de l’écran en doses hallucinatoires….
J’en devenait virtuel aussi moi-même à force, dans ce bruit de rage énorme qui me prenait le dedans et le tour de la tête et plus bas, m’agitant les tripes et remontait aux yeux par petits coups précipités, infinis, inlassables.
A mesure que je les lisais, je les perdais les internautes.
Je leur faisais un petit sourire, un petit mot, quelques phrases, un texte, un poème, même un (je t’aime) avec des parenthèses, comme si tout ce qui se passait était bien gentil.
A un moment ce fut comme une fièvre de délires, on ne pouvait plus écrire que le fiel coulait à flots, un océan de méchancetés pour une Mer de bonté…..
Les internautes pseudo nommés soucieux de vous arracher l’âme finissent par écœurer, à se passer des messages fielleux et des messages débiles encore et encore jusqu’à la nausée.
C’est pas honte qui leur fait baisser la tête…
J’ai cédé à ce charivari comme on cède à la guerre, je me suis laissé aller à lire ces délires avec des idées qui restaient à vaciller tout en haut derrière le front de la tête….
J’ai aimé aussi.
Elle s’appelait Elle, elle rêvait aussi, trop, d’amour difficile, pour défier des amours faciles qui brûlent le corps pour effacer l’esprit….., lui pas, c’est moi….
C’est fini.
Trois ou quatre pages d’amours et de lèches, parlé aussi, pour l’infini du rien…..
Que du souvenir qui chauffe le cœur et fait pleurer aussi, l’esprit, les yeux et le cœur.
Maintenant ce que je lis et regarde, tout ce que je touche est froid et n’a plus de goût dans la pensée.
Quant l’ordinateur s’arrête, j’en emporte le bruit des âmes dans ma tête, j’en ai encore, moi, pour la nuit entière de fracas et fureurs, comme si on m’avait mis un nez nouveau, un cerveau nouveau pour toujours.
Maintenant que je commence à renoncer, peu à peu, je suis devenu un autre, un nouveau quelqu’un, qui retrouve l’envie de revoir des gens du dehors.
Pas ceux du site, sauf certaines en envies de corps et d’esprit….
En écho des bruits, les âmes hallucinent de viandes vibrées à l’infini…, mais moi c’est maintenant un vrai corps que je veux toucher, un corps en vraie vie…