Gatsby et moi…
A l’heure du désintérêt croissant des citoyens du monde pour le cinéma au profit des séries télés, des jeux vidéo et de l’internet, il est temps de repenser les formes de la littérature pour les adapter à la volonté du peuple malade. Voici donc le scénario en projet d’une série qui pourrait être produite grâce aux produits toxiques issus des fonds spéculatifs sur les crédits hypothécaires à risque. Une espèce de mélange “patchworké” de clichés US et de “pentasexualité” faussement libérée, avec du no-sens structuré mathématiquement et des personnages attachants de connerie.
Gatsby et moi…
Série Heb-dromadaire en 12 épisodes.
Saison 1.
Mercredi 7 octobre 2009.
Episode 1. Titre de l’épisode : La Sagesse et l’Amoralité des fous amoraux…
Thème : Burlesque raffiné !
Préambule :
J’ai repensé la littérature à zéro, au coin d’un feu imaginaire, j’ai relu toute mon œuvre (quelques articles sur GatsbyOnline) et j’en suis arrivé à une irréfutable contingence : je suis le pire des meilleurs parmi les mauvais écrivains de ma génération. J’ai travaillé dur pour y parvenir, je suis un peu incompris aussi, car, finalement, la méditation du penseur échappe toujours au regard d’autrui. Je suis sévère avec moi, mais c’est pour mon bien, pour me forcer à conclure mon oeuvre historique. Pour me distraire, j’ai décidé d’entamer un feuilleton littéraire en 12 épisodes inspiré de l’œuvre de Karl Poppers, le célèbre philosophe des sciences, mais dans un soubresaut intellectuel après avoir ingurgité un Mojito, je me suis dit (sans me contredire) que le poppers ça sert à dilater l’anus pour un fist anal… J’ai donc décidé de miser à fond sur le cul pour le début de cette série.
Séquence 1
J’ai résolu d’écrire toute la vérité sur Anamary Del Miguel Saavedra afin d’exorciser une douleur sexuelle latente depuis presque 10 ans de web !
Anamary, au départ, c’était le genre de nana qui avait tout pour plaire. Après de brillantes études de droit et un corps parfaitement entretenu, à peine marqué par les nuits blanches passées sous amphétamine à étudier des lois insignifiantes, elle a largué son petit ami, celui qui l’avait soutenu pendant toutes ses études, pour se trouver un homme mûr, mûr dans sa tête et dans son pantalon, enfin, dans la poche de son pantalon, là où il mettait son portefeuille.
Grâce à ça, Anamary Del Miguel Saavedra vit dans une très belle péniche amarrée sur un quai de Seine, 400m², terrasse, cuisine super équipée, art-déco à la pointe de la tendance bon goût. Sa vie a été un combat farouche et sans merci pour obtenir ce confort surdimensionné.
Dans la vidéo du premier épisode, séquence 1, il faudra enchaîner des morceaux de séquences où on voit Anamary, enfant, se battre pour sa survie dans les quartiers malfamés du port de Cadix ou son père, marin-pêcheur, vivote en passant des cigarettes chinoises en Espagne via le Portugal et Cuba… puis, sur le plan suivant, on la verra jeune adulte, refiler des faux tuyaux-secrets à ses collègues secrétaires pour assurer sa victoire, puis un fondu progressif vers Anamary au volant de sa BMW décapotable bleue, les cheveux au vent, en route pour un week-end orgiaque à Montpelier avec l’inspectrice des impôts locaux. Anamary sourit à la caméra, la maquilleuse intervient, on retourne la scène, le bleu de la voiture ressort mieux avec son fond de teint. Parfait.
Séquence 2
Mon meilleur ami a un fils de 16 ans… et on l’a laissé dans une pièce sombre avec la fille de 11 ans du jardinier d’Anamary, enfin, l’actrice de 17 ans qui joue le rôle de la fille de 11 ans, mais le fils de mon meilleur ami n’a pas très bien cerné la différence car il est trisomique. Ce n’est pas le pire, il est frappé d’une leucémie aiguë myéloblastique. On a essayé la médecine chinoise, puis l’ARN-fragments, mais la chimiothérapie lui est devenue indispensable.
Mon meilleur ami s’en f… car il a rejeté depuis longtemps la faute sur sa mère, une vieille prostituée de 42 ans qui en parait 29 grâce à Lancôme. Je suis sensé aimer tout ce beau monde. Le fils de mon meilleur ami m’aide à relativiser la bêtise humaine et devenir meilleur écrivain.
Le téléphone sonne, c’est Rodolphe Trivers, l’adjoint du rédacteur en chef de ELLE, celui qui m’a infiltré dans une soirée V.I.P la semaine précédente.
J’y avais rencontré en vrac : la couturière Stella McCartney, le dessinateur caustique Tronchet, le fils de Pierre Bellemare (c’est dans son fauteuil de Paris Match qu’une administratrice réseau m’a tiré ma première pipe à 12 ans), la rédactrice en chef de Ciné Télé Revue (que j’ai embrassé dans les chiottes contre une vague promesse de m’acheter un Prowler), le boss du réseau voltaire Thierry Messian (très hypé en ce moment), Tome&Janry, Robert Del Naja de Massive Attack, Bruno Gaccio, Billy Corgan, Prince Laurent, Mylo, Avril Lavigne (toujours partante pour une ligne de coke), DannyBoon, le rédac chef de « Pour La Science » Philippe Boulanger, Kamel de Koh-Lanta, Kelly Osborne, le Professeur Jean-Louis Krivine, Gérard Pires… et d’autres dont j’ai oublié le nom…, puis on a bougé dans une limousine louée avec Laurent Baffie, Adriana Karembeu, Ramzy et le monsieur météo de TF1, on a terminé dans une “after” sponsorisée par Martini, avec Manu le Malin, le batteur de Kyo, Djibril Cissé et le frère de Patrick Timsit…
J’avais pris note de toutes ces rencontres dans un carnet que j’ai perdu ! Ensuite, on me tend un téléphone portable et c’est Anamary Del Miguel Saavedra qui m’annonce qu’en réalité elle n’est pas elle-même mais une autre elle-même. La sagesse me pousse à stopper la fête et à aller l’aider dans l’espoir d’une éjaculation faciale.
Séquence 3
Je monte un réseau chez Paris Match, on est un samedi de la fin du siècle précédent, l’immeuble est vide, puis l’administratrice, âgée de 33 ans, malaxe mes coucougnettes à qui je faisais prendrer l’air. On monte à l’étage, ce sont les bureaux appartement à la chaîne LTA, une chaîne de télé-achat aujourd’hui disparue, Pierre Bellemare en détenait 51% du capital, il avait un bureau à cet étage. L’administratrice me suce dans la chaise de bureau en cuir de Pierre Bellemare. Elle avale tout en beuglant que c’est acide, puis elle veut que je lui fasse la même chose, alors je dit non et on dégoupille des canettes de Pepsi Max qu’on boit en silence en regardant par la fenêtre du haut du 10ème étage…
Séquence 4
J’en reviens à mon meilleur ami qui commence à ne plus l’être, il me téléphone pendant que j’écris mon roman. Je dois m’arrêter là, ça fait 30 minutes que j’écris ! Suite au prochain épisode. En plus, normalement, un épisode ça dure 25 minutes. Le caméraman est déjà parti de toute façon, en laissant un mot tout de même : “Ce qui importe n’est pas le cri, mais la compréhension que l’hôte et l’invité sont la même personne. Qui est l’hôte ? Personne d’autre que votre être véritable“.
Un écrivain qui s’ignore, pauvre caméraman, tant mieux en fait, ça fait de la concurrence en moins.
Gatsby et moi…
Série Heb-dromadaire en 12 épisodes.
Saison 1.
Mercredi 14 octobre 2009.
Episode 2. Titre de l’épisode : J’ai ordonné aux saouls-marins de me donner à boire…
Thème : Assurance et ergodicité
Séquence 1
J’ai vraiment du mal à dormir seul. Quand on est habitué à dormir dans les bras d’une amante extraordinaire, une nuit en solitaire devient un véritable supplice ! Je comprends ces pauvres vieux qui crèvent de chagrin une fois le conjoint endormi définitivement sous les racines des pissenlits. Ma mère me disait que respirer un pissenlit ça faisait pisser au lit. Toute ma jeunesse j’ai travaillé à trouver une corrélation entre le pipi au lit et les pissenlits. Quand mon amante extraordinaire m’a quitté, elle avait choisi de partir en pleine nuit, pour que je comprenne clairement bien que, dorénavant, je devrais me contenter de mes seuls draps pour me tenir chaud. Elle m’a quitté parce que j’écrivais au lieu de tenir mon rôle d’homme. Quand elle est partie, je n’ai plus réussi à écrire une ligne. Je suis allé me perdre sur des forums prépubères sur internet où j’ai écrit des nouvelles en 12 épisodes sans queues ni têtes. Je n’arrivais pas à m’occuper de mon autre moi-même, je n’arrivais même plus à m’occuper de moi. Je laissais le four branché des journées entières, la baignoire débordait en permanence, je n’arrivais plus à me torcher le cul jusqu’au bout, lassé de tout, j’entassais anarchiquement vêtements sales et propres, parfois, je gardais le même pull et la même trace de freinage sur le slip pendant des mois. Les factures s’accumulaient, je suis resté des semaines entières dans le noir.
J’envoyais des e-mails de désespoir mais je ne recevais jamais de réponse, la facture adsl haut débit étant impayée depuis plusieurs trimestres. Après plusieurs semaines sans télé, je suis devenu has-been, la mode m’a filé entre les doigts, je suis devenu un dinosaure. J’espérais qu’un miracle allait remettre de l’ordre dans ma vie. La presse allait m’oublier, il fallait que je republie, même une merde, j’étais prêt à y mettre le prix. J’ai téléphoné à une présentatrice à moitié célèbre, sur MTV, elle avait déjà transformé des informaticiens affreux en playboy des campus. J’ai appelé vers 3h30 du matin pour être certain de l’avoir en ligne et d’être le premier de la journée ! Je n’arrivais pas à dormir, mon voisin d’en face faisait péter un cd de Metallica trop fort… Elle est arrivée une heure plus tard avec un pac de 6 bières, habillée en marcel, légèrement décoiffée, mais toujours pleine de classe. On a regardé “jeu de nuit” sur RTL, j’ai téléphoné 62 fois, j’ai été trois fois le 10ème appelant, la réponse était 7, comme le nombre de nains chez Blanche-Neige. J’ai perdu. Puis on a regardé des clips de R’n’B en boucle. C’est vers l’aube que je me suis souvenu qu’elle était venue pour faire l’amour… Quand j’ai réalisé, je l’ai cherchée, mais elle était partie sans laisser d’adresse.
Séquence 2
Vanessa Champetier de Rives, c’était le genre de nana qui avait tout pour plaire. Après de brillantes études de commerce, et un corps parfaitement entretenu, à peine marqué par les nuits blanches passées sous amphétamine à étudier la macroéconomie, la gestion des ressources humaines et le droit fiscal, elle avait largué son petit ami, celui qui l’avait soutenu pendant toutes ses études, pour se trouver un homme mûr, mûr dans sa tête et dans son pantalon, enfin, dans la poche de son pantalon, là où il mettait son portefeuille. Grâce à ça, elle vivait dans un très bel appartement à Montpellier, 384m², terrasse, cuisine super équipée, art-déco à la pointe de la tendance bon goût, jacuzzi. Sa vie avait été un combat farouche et sans merci pour obtenir ce confort surdimensionné. Le réalisateur enchaîne des morceaux de séquences où on voit Vanessa, enfant, se battre pour sa survie, puis, jeune adulte, refiler des faux tuyaux à ses collègues pour assurer sa victoire, puis un fondu progressif vers Vanessa au volant de son Opel Tigra, les cheveux au vent. Vanessa sourit à la caméra, la maquilleuse intervient, on retourne la scène, le reflet des jantes ressort mieux avec son fond de teint. Parfait.
La voiture de Vanessa Champetier de Rives rentre en collision avec la voiture d’Anamary Del Miguel Saavedra. Le volant de la BMW décapotable défonce ce qui était autrefois la jolie gueule d’Anamary. Une barre de métal traverse une cuisse de Vanessa, des éclats de verre lui lacèrent la figure, une clavicule et son sein gauche sont broyés par la ceinture de sécurité. Le réalisateur appelle le département casting pour trouver de nouvelles actrices pour les scènes de flashback…
Séquence 3
Quand je suis sorti des toilettes, j’avais changé de tête, j’étais devenu un type plus mince, plus jeune, barbu, mais assez mignon quand même.
Allez grouille, tu dois encore écrire 5 pages ! J’ai envie de m’arnarquer moi-même ! Je fais semblant d’écrire, je tape des mots aléatoirement, je ne me rends compte de rien. Esotérique, désopilant, malgré moi, je veux, je ne veux pas, pourquoi, et par ci, par-là… et je tourne en rond et voilà… et hop, allez, encore 5 pages. Je recopie un paragraphe en faisant copier-coller, j’ai juste changé un prénom ou deux. Le caméraman a tout capté à mon stratagème, mais cela semble l’amuser. Le facteur me tend, par la fenêtre de la cuisine, un dictionnaire pour que j’écrive encore plus de phrases aléatoires. Je suis pensif, j’ai peur de ne pas avoir confiance en moi, je compte insidieusement les mots écrits pour calculer combien ça me fera à la fin du mois… un salaire dans l’ombre de mes pensées tordues. J’ai écrit une phrase vide de sens : “Et l’hélicoptère névroleptique s’immola dans la pluie verte, la pilote a commandé un Orangina”.
Séquence 4
“Elle est grosse ta queue” me dit la fleuriste venue donner à boire à mes plantes. Elle m’énerve, elle semble prendre plus de plaisir que moi. En pensant très fort à des fantasmes oubliés, j’ai joui dans sa gorge, elle a tout avalé sans broncher, puis elle est allée se servir un Pepsi… et j’ai continué à coder une stupide page en javascript. Puis j’ai téléphoné à quelques amies pour leur expliquer mon viol chez Pierre Bellemare.
Séquence 5
J’en reviens à la fin d’Anamary Del Miguel Saavedra et dont je me suis souvenu de l’appel un matin, après une nuit blanche R’n’B devant la télé. Malheureusement, les 25 minutes de cet épisode sont écoulées. Je me souviens juste que sa voix tremblait, il s’était passé quelque chose de grave.
“L’action est très facile, mais les humains la rendent ardue étant donné les restrictions qu’ils s’imposent. C’est ainsi que le moindre souffle de liberté est étouffé“.
C’était le mot traditionnel du caméraman. Je l’ai plié et je l’ai rajouté dans mon roman, discrètement.
Gatsby et moi…
Série Heb-dromadaire en 12 épisodes.
Saison 1.
Mercredi 21 octobre 2009.
Episode 3. Titre de l’épisode : Carnage dans Gatsby…
Thème : Virulence !
Séquence 1
La célébrité m’est tombée dessus assez rapidement ; aussi abruptement qu’une secousse sismique en plein Pakistan, comme un poids supplémentaire dans ma vie déjà surchargée. Après la publication sur internet de mon premier roman, j’ai été invité pour parler quelques secondes chez Bernard Pivot. Pour ma première véritable télé, j’étais légèrement stressé, j’ai essayé de faire l’effet charismatique Amélie Nothomb (qui avait déclaré, lors de sa première télé, à 25 ans, qu’elle méritait le prix Nobel de littérature), mais ça a foiré, je faisais plutôt l’effet soporifique d’un Houellebecq ; très bon écrivain, mauvais orateur. J’ai quand même dit que j’aimais bien les fruits pourris. La rumeur s’est vite répandue, les ventes ont commencé à décoller 6 mois après la rentrée littéraire, une époque où je n’y croyais plus ; j’avais déjà retrouvé un job dans le développement web pour nourrir ma libido. Ardisson me voulait dans son émission, mais je n’avais aucune actualité, on a épluché minutieusement toutes mes nouvelles, tous mes poèmes, toutes les notes que j’avais laissé, étant jeune, sur les forums.
On a tout compilé dans un ouvrage de 100 pages : Quelqu’un contre le reste du monde. On a sorti ça en vitesse, il y avait encore des fautes d’orthographes à certains endroits, mais ce n’était plus important maintenant, ce n’était plus à ça qu’on me jugeait. A un certain niveau, la qualité des créations n’est plus importante. Chez Ardisson, qui commençait à devenir un peu sénile, à mon entrée sur le plateau, il y avait l’ex-femme de Nicolas Sarkozy, Patrick Bruel, Baffie et BHL autour de la table. J’étais déjà un peu saoul. Puis tout est allé très vite, j’ai raconté ma vie, on m’a confronté avec un théologien islamiste que j’ai descendu en flèche, j’ai déclamé, arborant un sourire léger mais indéniablement satisfait, quelques phrases chocs que j’avais préparées. Une petite “interview croyance“, puis, je suis resté jusqu’au blind test, j’ai trouvé in extremis “Black Eyed Peas” et “Janet Jackson“, offrant ainsi deux points à l’équipe de Bruel.
Après l’enregistrement de l’émission, on a été fêter le tournage, il y avait quelques gens supplémentaires : Mila Jocovich, Michael Yoün et sa femme ou son ex-femme Elsa Pataky, Larcenet, Jeffrey Eugenides, le mari de Kate Moss, Hugues Bersini, Patrick Besson, Heidi Slimane, Rock Voisine, Réné Angelil le producteur/mari de Céline Dion, Fred et Jamie, Laurent Garnier, Fred Berthet, Mr Scruff, Gérard Jugnot, Alizée, Karl Zéro, Thomas Bangalter de Daft Punk, le sosie officiel de Gregory, Mylène Farmer, Isabelle Sorente, le frère de Scorcese, Jordy, Chimène Badi, Philippe Geluck, Beigbeder, Dan The Automator (la tête pensante de Gorillaz), Sharon Stone, Gino Russo, Nagui, Sophie Marceau, Cyril Drevet (avec un t-shirt Hugo Delire top tendance), Pascal Vrebos, K-Maro, Alicia Key, tous les membres de Franz Ferdinand, Sofia Coppola, Wesley Snipes…
A l’aube, j’ai pris le Thalys vers Bruxelles, je devais donner une lecture de mes nouvelles dans une école de Uccle à 10h30. Totalement pété, j’ai eu du mal à articuler, ma mâchoire dansait toute seule, j’ai fini par m’évanouir devant une centaine d’ados. C’est passé au JT le soir même. Ma réputation était lancée.
Mon site accueillait 20.000 visiteurs par jour, j’y faisais des prépublications exclusives, ça avait un succès monstre. Je recevais plein de manuscrits de jeunes auteurs avides de conseil dans ma boîte aux lettres. J’ai été traduit dans 17 langues. Mon livre et mon recueil de nouvelles étaient lus dans les écoles. J’ai gagné le prix de Flore du meilleur premier roman, ça a bien reboosté les ventes. J’ai sorti mon album de musique électronique expérimentale dans la foulée, ça a bien fonctionné. On me demandait mon avis sur tout. Et puis ? Plus rien. 5 années étaient passées, et le monde m’oubliait. Il fallait me remettre au travail.
Séquence 2
Il fait terriblement froid, mon écharpe est insuffisante, le bonnet est juste là pour décorer, le froid s’infiltre à travers chaque étoffe de tissu. Sur le trottoir d’en face, une silhouette familière semble me faire signe, une charmante demoiselle se dirige à présent vers moi. Je lui prends une main. Elle s’appelle LO.
On marche ensemble quelques mètres, puis, on va boire un café. Je reçois un coup de fil. Je fais part de ma joie à peine contenue à LO, et je lui propose d’aller chez moi, manger un carpaccio Je vais stimuler son point grafenberg avec mon majeur, pendant que ma langue lèche, un vrai petit travail d’horloger. La température de la chambre dépasse largement les normales saisonnières, je m’attarde sur sa poitrine généreuse dont je malaxe les extrémités longuement.
Je la pénètre sauvagement… Le caméraman avec son sifflet autour du cou, m’encourage en clappant des mains puis fait un gros plan sur la bouche de LO exprimant la jouissance et le plaisir divin. La musculature du caméraman est impressionnante ; ses pectoraux saillants déjà huilés pour l’occasion, sa façon de se tenir bien droit et de mettre en avant ses quadriceps et ses abdominaux. Le visage carré, le regard profond, il soulève LO par les cuisses et commence à…
Je prends des notes, le caméraman me filme en train de prendre des notes. Le preneur de son approche le micro pour capter les sons de friction. Un beau travail d’équipe. LO semble pleurer de joie. Le preneur de son pose sa perche et vient rejoindre le caméraman. Dans un râle de plaisir surpuissant, je gicle par erreur dans la bouche du preneur de son. Le caméraman me met deux doigts dans l’anus et me stimule la prostate, je pousse des gémissements. Sous un oreiller, surprise, j’aperçois le visage de Patrick Bruel, heureux comme un poisson dans l’eau, LO lui lèche tendrement les testicules, ses cris de joie sont bientôt étouffés par l’énorme pénis du caméraman qui s’installe profondément au fond de sa gorge. Notre scène est interrompue par Anamary Del Miguel Saavedra en chaise roulante. Elle nous regarde avec sa figure déformée. Ses yeux de chienne battue. Elle verse une larme. Je lui demande de bien vouloir attendre dans le salon, je crois que j’ai dit aussi un truc du genre : “Ce n’est pas ce que tu crois ma poule…“. LO indignée se lève du lit et s’en va consoler Anamary, elle me jette un regard désapprobateur avant de la conduire dans une autre pièce. En me retournant, je constate que je suis nu et seul sur le lit. Le caméraman, le preneur de son et les autres acteurs me dévisagent. Je me sers un Mojito. J’allume la télé sur CNN et j’essaye de suivre les prévisions météos qui ne me font pas re-bander.
Séquence 3
Le fils de mon ex-meilleur ami (voir le premier épisode), le trisomique, sort avec la fille du jardinier d’Anamary Del Miguel Saavedra, enfin, je n’en suis pas sûr, mais il subsiste en moi quelques doutes. Elle semble inconsciente des choses. J’ai demandé à mon ex-meilleur ami d’éloigner sa progéniture dégénérée de chez moi. Il a fait semblant de ne pas m’entendre. Je lui ai lancé un regard éloquent. Je suis parti me branler aux toilettes, à mon retour, il n’était plus là.
Séquence 4
A la fin de la soirée V.I.P dans laquelle Vanessa Champetier de Rives, devenue demi tétraplégique, m’avait infiltré le slip de sa seule main encore valide, j’ai reçu un coup de fil d’Anamary, enfin, c’est ce qui était affiché sur le gsm qu’on m’a tendu, je ne l’avais pas précisé. En fait, ce n’était pas elle au téléphone, c’était une de ses amies. Elle m’a expliqué qu’Anamary était à l’hôpital, j’ai entendu les mots “grave“, “urgent“, “voiture“… J’ai couru comme un fou dans la rue, j’ai pris un taxi, mais j’avais envie de gerber, alors je lui ai demandé de me ramener chez moi. C’est LO qui m’a rappelé le drame le lendemain alors que j’écrivais une connerie dans le Forum de GatsbyOnline. Appel dont je me suis souvenu 24h après. Le plus triste dans l’histoire, c’était que sa voiture était rentrée en collision avec une autre fille connue du milieu, Vanessa, semi-tétraplégique maintenant plongée dans un coma éthylique pour un sérieux bout de temps. J’ai noté tout ça. La fille du jardinier d’Anamary et l’actrice qui jouait son rôle ont pleuré en même temps quand j’ai annoncé la triste nouvelle. Je n’avais qu’un mouchoir, j’ai hésité à le tendre vers la fille du jardinier ou son clone, finalement je l’ai remis dans ma poche, il me servira tôt ou tard. Le fils de mon ex-meilleur ami sautait sur place frénétiquement en riant. Le caméraman souriait.
Séquence 5
Un terrible accident. Anamary Del Miguel Saavedra fait pitié à voir dans son lit d’hôpital. Son nouveau mec semble dégoûté. Il me prend en aparté dans le couloir. Il a la mâchoire toute rectangulaire comme Mitch Leery, le père à Dawson. Son costume est magnifique, je le jalouse gentiment dans ma tête.
– Je ne pense pas que je peux continuer à vivre avec elle…, tu comprends…, son visage est tellement…
J’ai mis une main sur son épaule : “Oui, je comprends, je vais la reprendre, LO sera ravie de la revoir, ça ne me dérange pas, je te comprends, je suis son premier mec après tout, j’assume et puis je l’aime encore un peu tu sais”… On s’est remercié, j’ai annoncé la nouvelle à Anamary, qui ne savait plus parler, elle avait mordu et sectionné sa langue dans la douleur atroce qui avait suivi son accident. Le réalisateur a introduit une montée de doux violons pendant que le caméraman zoomait sur les yeux humides d’Anamary. Puis la caméra s’éloigne et zoome sur ma main qui sert très fort celle de Vanessa. Mon réveil a sonné, les 20 minutes sont écoulées, l’épisode prend fin. Je tente d’empêcher le générique de monter le long de l’écran, mais il est trop fort, je suis balayé dans les ténèbres du fond d’écran comme une vulgaire poussière. Le caméraman se roule une clope en marmonnant des trucs pas assez amplifiés en postprod pour que je puisse les retranscrire ici.
Gatsby et moi…
Série Heb-dromadaire en 12 épisodes.
Saison 1.
Mercredi 28 octobre 2009.
Episode 4. Titre de l’épisode : Déstabilisation circonflexe…
Thème : L’amitié intemporelle !
Séquence 1
Je prends le petit déjeuner avec LO, en arrière-plan, un jeu télé du temps de midi. Au menu : trois petits pains, deux piccolos, une boisson chaude (café, thé ou chocolat chaud), Choco Pops, un jus de fruit, de la confiture, du beurre, un yaourt nature, du fromage et des œufs brouillés au bacon, ainsi que d’autres aliments disposés e manière disparate en équilibre sur le coin de la table. LO est déshabillée dans un polo moulant signé Narsico Rodriguez et un training Kappa, un sifflet pendu au cou. Je suis vêtu de mon traditionnel peignoir Galliano, un peu vétuste, mais toujours furieusement élégant, et de mes pantoufles Valentino. Je lui parle de mon œuvre, de mon avancement misérable de ces dernières semaines.
– “Il faut trouver une solution pour la suite de la série, on ne peut pas miser sur le cul tout le long… et puis, avec l’orgie de la semaine dernière, je crois qu’on est vraiment allé au bout de la question, le public obsédé sera ravi… mais il faut autre chose”… me dit-elle.
LO a la tête plongée dans son bol de Choco Pops, elle se redresse lentement en marmonnant, le lait se délivrant de ses narines : “Je pense qu’il est temps de faire intervenir les forces du MAL… Elle a raison, il faut passer à la vitesse supérieure maintenant. Je me prépare une biscotte au miel en pensant à la phrase pleine d’intelligence et de sagesse qu’elle vient de prononcer. Il y avait du progrès ces dernier temps ! On a rangé un peu la péniche d’Anamary Del Miguel Saavedra, on a enfermé Anamary dans la cale humide avec les rats, on a taillé une petite fente dans la porte pour faire glisser un peu de nourriture ; LO va nettoyer les excréments d’Anamary tout le dimanche. On n’a pas encore pensé à lui changer ses vêtements, je pense même qu’elle est nue.. La fille du jardinier d’Anamary, accompagnée de l’actrice qui joue son rôle, a un sujet sérieux à aborder avec moi, elle est venue spécialement de Fleury-Mérogis pour m’en parler. Le son de télé s’évanouit en un fade out subtil. Je crois entendre des rires enregistrés : “Pourquoi mon père m’a-t-il appris les mathématiques, la musique, plusieurs langues, et m’a violé analement, si c’est pour me placer dans une institution de couture ?”… Mon sourire de bienvenue disparait brusquement : – “Ecoute, la culture est superflue quand on a un père célèbre, ne t’inquiètes pas, ton avenir est assuré”. … Elle passe un coup de fil à son ami trisomique qu’on a placé dans une institution, pour éviter que son père qui est mon ex-meilleur ami, le frappe ; toute forme de promiscuité avec cet être dégénéré et inutile provoque chez moi des spasmes violents.
Séquence 2
On doit introduire les forces du mal, j’ai commencé à plancher sur un nouveau personnage d’épouvante. Je peux écrire n’importe comment, de toute façon.
Je suis remonté dans mes souvenirs d’adolescence, dans mon école secondaire, il y avait un éducateur, un pion, insignifiant, habillé tout en noir, avec de longs cheveux sombres et gras, la mine ravagée par l’alcool ; il est mort et, deux jours après, personne n’en parlait plus. Sa mort fut aussi discrète que sa vie. Il n’existait pas. Son histoire et son nom étaient inconnus de tous, il errait dans l’école comme un fantôme, dans sa veste usée de vieux motard, le regard éternellement épuisé par la vie. J’étais adolescent et je me foutais de ce type qui inspirait tout ce que j’étais sûr de ne pas devenir : un alcoolique puant, célibataire, qui n’avait trouvé qu’un ridicule job dans une école perdue dans une région économiquement malade. Parfois, il tenait l’étude, endroit où étaient tassés les élèves qui n’avaient pas cours, pour cause de prof absent, de retenue, d’heure de battement dans l’horaire. Son autorité était fantomatique, ses injonctions, sensées interpeller la foule et imposer le silence, se perdaient dans l’air, se faisaient absorber, sans conviction, par les murs qui semblaient le fuir.
Le pion, dans l’école, n’avait de toute façon aucune force coercitive. L’obéissance qu’on lui accordait ne fluctuait que selon l’humeur du groupe. La seule punition possible était une note dans le journal de classe, une retenue au pire. Dans le bulletin, des points étaient accordés à la conduite en classe, cette cote n’avait aucune importance. Le fantôme noir m’avait surpris en train de parler, je me foutais sans doute de sa gueule et des vibrations cosmiques de moquerie avait sans doute atteint ses tympans, par une mauvaise combinaison stochastique de répercutions du signal sonore dans la pièce. Il avait pris mon journal de classe. A la fin de l’étude, il me l’a rendu, il avait dessiné une ligne, à la mauvaise date en plus. Une ligne rouge. Une ligne tremblante et rouge, une ligne fatiguée, qui n’avait aucun sens. C’était deux semaines avant sa mort. Avec quelques potes, on lui avait donné un nom : il était The Vampire, à prononcer avec un accent américain difforme, patate chaude calée contre le palais : Zssse VannePaïrwe. Le caméraman zoome vers mes mains. Il était temps de lui écrire une vie.
Séquence 3
The Vampire pouvait vivre le jour, contrairement aux autres vampires. C’était grâce à l’alcoolisme. Après avoir bu du sang d’alcoolique, The Vampire, enfant, a pu bénéficier de pouvoirs inédits grâce à sa configuration génétique qui laisse, bientôt 10 ans après sa mort, perplexe les plus brillants des scientifiques contemporains. Il pouvait vivre le jour mais il était devenu dépressif, en échange, en plus du manque de sang, il était perpétuellement en manque d’alcool.
Après avoir été éjecté de plusieurs groupes de métal (t’as le look, mais t’as vraiment pas de talent man), The Vampire était bien seul et sans diplôme. Il avait dévoré, sans conviction, ses parents, puis est parti tenter l’aventure dans la campagne. The Vampire s’est lancé dans l’enseignement, à la recherche d’un sang adolescent pur pour lui redonner sa vraie puissance de vampire d’autrefois. Le rôle de prof était trop limité, il n’aurait accès qu’à quelques classes de l’école, ce qui aurait réduit ses recherches. Il est donc devenu pion, pour avoir accès à tous les élèves de l’établissement. Sur plus de 1000 élèves, il trouverait sans doute le bon, l’élu. Manque de chance, à la suite d’une cuite mémorable, The Vampire est mort, carbonisé dans sa maison. On a rien retrouvé, excepté un enfant de 5 ans, qui avait survécu aux flammes. L’enfant était très beau et ressemblait The Vampire, la police a déduit que c’était son fils, aucune opération de logistique ADN n’a été requise par le juge et le môme a été transféré dans un orphelinat où il a subi de nombreux attouchements sexuels et plusieurs formes d’harcèlement moral.
Séquence 4
LO découpait des carottes dans son petit tablier rose. Je faisais semblant d’écrire pendant qu’on me filmait. Le preneur de son écoutait un album de Dead Can Dance sur son Ipod. L’actrice qui jouait la fille du jardinier d’Anamary Del Miguel Saavedra est rentrée accompagnée d’un jeune homme, vêtu de noir, mal coiffé, une longue chevelure noire et des mèches lui tombant devant les yeux. Il avait quelques traces d’acné sur le front et un duvet immonde en guise de moustache : “Je vous présente mon petit ami, Leandro, il a 16 ans, et il joue dans un groupe de black death métal core”… J’ai dégluti. LO m’a jeté un regard complice, a retiré son tablier et a commencé à se craquer les doigts. J’ai bien respiré avant de lui dire : “Tu n’es pas un peu jeune pour avoir un petit ami ? 11 ans, c’est pas un âge ça pour”… “On a fait l’amour hier, et il m’a demandé en mariage, il est génial, j’adore le sentir tout dur en moi”… LO a poussé un gémissement sourd. La fille du jardinier d’Anamary était en pleur repliée dans un coin de la pièce. Lo et moi, on foutait des coups de pieds dans la gueule de Leandro, son nez a fini par céder.
Je lui arraché des cheveux avec les dents. LO serrait les poings en bavant : “Allez, encule-le, vas-y”…. “Non LO, on a dit plus de sexe dans ma série”…
On a foutu le conard à poil et j’ai commencé à lui donner des low kicks bien puissants dans les testicules ! LO retenait les bras de l’ado pour éviter qu’il se protège : “Sale ado de merde, tous les mêmes, je vais t’apprendre”… Je lui perçais ses boutons d’acné avec une fourchette tout en broyant ses couilles avec mon genou, de toutes mes forces. Il avait maintenant 2 boules géantes entre les jambes, toutes bleues. J’en ai transpercé une avec la fourchette en hurlant de joie, un mélange de sang, de graisse et de truc blanc répugnant s’en échappait comme le pus de ses boutons. Le gosse a commencé à avoir des spasmes, il gerbait un machin vert, il a gerbé sur les cuissardes de LO, qui, énervée, lui a déboîté la mâchoire d’un coup de pied d’une rare violence. Le môme a rampé jusqu’à la porte qui donne sur le jardin, il s’est roulé dans la pelouse en hurlant comme un porc qu’on égorge, avec sa sale voix d’ado merdique ; on le regardait les bras croisés faire son cinéma. Il hurlait. Puis sa tête a explosé. J’ai poussé un cri d’effroi quand un de ses yeux s’est écrasé mollement sur le mur à quelques centimètres de moi. LO restait calme, dressée fièrement sur le pas de la porte, une carotte en main, trop sexy, nue, en cuissardes, sans son tablier rose…
Le caméraman avait une érection, mais ce détail étant insignifiant, on le coupera au montage final.
Séquence finale
Le sort de ma transformation d’écrivain méconnu en écrivain reconnu requiert un transfuge d’information à travers le temps, une information portant une trace de ma présence passée, c’est là que j’ai eu l’idée d’écrire cette série mort-née… Il suffirait pourtant qu’on en parle ne serait-ce qu’une fois quelques années plus tard, pour que je sois sûr de remplir la condition ultime : passer à la postérité. Je m’y attendais, dans ma forme précédente, les Mojitos me permettant de prédire l’avenir : je savais que j’allais devenir écrivain, condition primordiale, qui du fait de mon grand malaise intérieur, n’hésiterait pas à vivre en moi. Quel plan démoniaque, je n’avais rien compris de ce que je pensais, mais cela semblait terrifiant. LO serrait les dents et les poings en me regardant : “Quelle histoire tordue et mal écrite, tu aurais pu trouver plus simple” !!! Je soulève les épaules en guise de pardon. Elle prend un râteau, bien aiguisé, à deux mains, et se dirige en hurlant vers la cale ou se trouve toujours Anamary Del Miguel Saavedra, nue… L’équipe technique filme alternativement LO et mon visage effrayé. Le preneur de son enregistre la respiration haletante d’Anamary. La fille du jardinier d’Anamary s’enfuit en pleurant. Anamary hurle comme un t-rex de Jurassic Park mais à un volume 1000 fois plus élevé. Les hublots de la péniche volent en éclat, les effets spéciaux s’activent et le ciel devient sombre, les nuages défilent à toute vitesse, la foudre s’abat tout autour. L’eau rentre à gros bouillon…, la péniche coule, il y a des bulles partout… Glou, glou, glou….
Puis je crie : Fin de l’épisode. Tout le monde s’arrête de jouer sauf Anamary Del Miguel Saavedra qui continue de hurler. “C’est son string qui lui serre trop, je pense”… dit le caméraman avant de se faire décapiter d’un coup de griffe…