J’aime me brûler au contact de la beauté.
L’éclat vénéneux de certaines femelles désarme le sybarite que je suis. Je perds pied sous leurs regards cinglants et leurs sourires de crotales sont un onguent mortel et exquis qui me déplume : ma lyre chaste se transforme en trompette de feu… Leurs paroles douces claquent comme des talons, leurs yeux sont des diamants opaques, leurs lignes rappellent les courbes du serpent. De leurs lèvres minces sortent des vérités féroces : leur langue ressemble à des badines qui sifflent dans l’air. Hautaines et vulnérables, ces petites pestes à la voix aiguë sont en réalité des tempêtes cachées capables d’ébranler tout esthète de mon envergure. De toutes petites choses qui détiennent le plus grand pouvoir au monde.
Et qui le savent.
Ces femmes comme des flammes me séduisent, me ravissent, m’effraient. Venimeuse, terrible, dure et cassante à l’image du cristal, l’esthétique incarnation est mon plus cher enfer.
Sveltes, menues, redoutables, les femmes désirables sont le poison vital de l’homme de goût. Leur beauté acérée me tourmente, me caresse et me gifle, me vide de mes mots et me remplit de voluptueuse colère.
La beauté qui joue de ses toxines procède d’un principe supérieur : c’est grâce à ses effets que se perpétue le bel esprit.
De la toxicité des charmes de la créature tentatrice dépend la qualité de la descendance de l’homme de goût qui lui aura déchiré l’hymen.
Raphaël Zacharie de Izarra
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