Le discours sur l’Art est en grande partie composé d’approximations oiseuses. De prétendues références historiques. De considérations générales ou au contraire extrêmement pointues. Bref, un ramdam érudit parfaitement arbitraire mais authentiquement verbeux plus ou moins consciemment fait pour impressionner le profane et suggérer une initiation au vaniteux.
Moi-même je me suis essayé à maintes reprises aux discours traitant de l’art. Textes aux apparences sérieuses faits de doctes allusions, construits sur de savantes fumées, tissés de phrases creuses tonnant comme des mirages pleins d’autorité conventionnelle, voire avant-gardiste… On l’aura compris, ce genre n’est qu’imposture. Le plus fort, c’est que ça marche !
Nul ne comprend rien ou presque, tous acquiescent. Personne au fond de lui-même n’est d’accord avec le critique d’art, et pourtant même l’esprit le plus indépendant adhère. C’est que dans le domaine de l’Art officiel le poids de l’autorité des “initiés” est si grand, l’impact psychologique de l’artifice verbal si puissant qu’ils annihilent tout esprit critique.
On a applaudi à mes textes sur l’Art, ce n’était pourtant que de purs exercices de style à la “Christie’s”. Il suffit de lire les brochures distribuées dans les galeries d’Art pour se rendre compte de la grande farce académique que constitue la critique d’Art. Personne n’ose contredire ces solennelles âneries écrites autour de la plupart des oeuvres d’art. Il y a beaucoup de vent dans la critique d’Art, peu de propos réellement pertinent, et c’est d’ailleurs ainsi que le système fonctionne : une bonne dose d’imposture (faite d’hypocrisie culturelle, d’effets linguistiques brillants et d’artifices phraséologiques recherchés) est nécessaire à l’élaboration du mythe des oeuvres d’art.
Certaines oeuvres d’art parmi les plus vides doivent d’ailleurs leur célébrité à tous les discours creux inventés pour leur servir de projecteurs. Discours longs, denses, difficiles d’accès émis par d’éminents clowns diplômés des grandes écoles des Beaux-Arts. Le vent est la composante la plus importante dans le domaine de l’Art. L’on s’extasie sur des pots de chambre, sur des toiles couvertes d’un blanc uniforme, sur des tableaux peints avec de l’excrément, sur des sculptures prétendument abstraites et qui en fait représentent le vide difforme et monstrueusement boursouflé de leurs auteurs…
Qui aujourd’hui est encore capable de se dresser contre ces statues de sable qui éblouissent autant les imbéciles que les esthètes ?
Raphaël Zacharie de Izarra
2, Escalier de la Grande Poterne
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