Le transhumanisme, une autre vue sur le 11 septembre 2001…
Les préliminaires…
J’entrais, totalement nu, avec mon paquet de vêtements sous le bras, d’un pas nonchalant, dans l’ascenseur, c’était le matin du 11 septembre 2001, enfin, c’est relatif, 13h, c’est le matin pour moi.
Dans l’espoir de combler le silence intolérable, une jolie blonde qui se trouvait déjà dans l’ascenseur, a commencé à me raconter, pendant notre descente vers le rez-de-chaussée, son dernier rêve sordide : J’ai rêvé que j’avais des couilles…
Ah bon ? …, ais-je répondu avec l’air du grand carnassier qui sens qu’une dinde va lui tomber toute rôtie dans les mains…, ne sachant pas si je devais me rhabiller ou profiter de ma nudité pour assouvir un besoin copulatoire de plus en plus pressant…
Oui, je le jure et je ne sais plus pourquoi… et je les ai perdues… m’a-t-elle rétorqué en minaudant avec un air d’invite à vérifier…
C’est fou ça, plutôt original même…, ais-je susurré à son oreille en vérifiant…
C’est vrai que ça me ressemble… a-t-elle conclu en m’embrassant…
Après, par un jeu de l’esprit et d’association qui serait trop long à décrire ici, j’ai envisagé la possibilité d’acheter un billet de Win For Life, un super jeu à gratter belge où on peut gagner 1000 euros par mois, jusqu’à la mort… et je me suis pris à rêver soudainement d’une vie rassurante, paisible, qui, grâce au gré du hasard, serait financée, sponsorisée, par l’état, j’en aurais presque eu le vertige.
L’action…
C’est à ce moment-là que la jolie blonde a marché dans un excrément de chien qui gisait là miraculeusement… et tout le monde sait que marcher dans la merde, ça porte chance, ce qui m’a renforcé dans ma conviction qu’il était temps pour moi, de m’adonner à l’Euromillions, car je le rappelle, pour les lecteurs les moins attentifs, il était bel et bien 13h13 et 13 secondes !
Je peux donc dire qu’il ne manquait plus que le trèfle à 4 feuilles pour fléchir le destin en ma faveur… et comme ce que je suis occupé à écrire, et que vous lisez…, est une œuvre littéraire, je puis me permettre de rajouter un évènement fictif : à ce moment précis, un trèfle à 3 feuilles, car je veux rester réaliste et crédible malgré les quelques faits imaginaires que je saupoudre méticuleusement dans mes récits, est venu délicatement se poser sur mon nez.
En guise de conclusion, je vous rassure, en noble serviteur de votre appétit de lecteurs sadiques, j’ai royalement perdu au Win for Life et je n’ai pas pénétré la jolie blonde…
Une belle leçon d’humilité.
Les explications…
Début 2001, comme je ne l’ai pas avoué dans l’extraordinaire texticule nommé Frigo.com que vous pouvez relire (car je suis certain que vous l’avez déjà lu) dans les sections Forum et Ataraxie de GatsbyOnline.com…, je m’étais soudainement épris du post-humanisme en cause d’Anamary Del Miguel Saavedra…, enchaînant les lectures et les recherches sur internet, je me suis retrouvé propulsé “chapter-officer” d’un groupe MSN Belge affilié à la WTC, non pas le Word Trade Center, mais la World Transhumanist Corporation…, après avoir écrit quelques articles de vulgarisation de bonne facture.
Tout un programme.
Comme je suis plus ou moins allergique à tout ce qui ressemble à une communauté d’humain, j’eus vite fait d’espacer de plus en plus mes visites sur ce forum virtuel, si bien qu’un an plus tard, je ne le visitais, tout au plus, qu’une fois par mois.
Le 11 septembre 2001, à l’aube, voilà que je reçois un mail amical de Mohamed Atta, se présentant comme un brillant chercheur d’Arabie Saoudite au CV interminable, directeur de la WTC, membre des extropians, ayant travaillé au MIT, ayant rencontré les plus grands futurologues, scientifiques, écrivains de S-F du globe… et grand ami d’un pauvre hère en dernière phase hémodialyse : Ossama Bel Laden.
Il m’y expliquait que j’étais cordialement invité à la première rencontre entre transhumanistes dans un hôtel 4 étoiles de Bruxelles le même jour à 13h13, exactement le même hôtel que celui ou Anamary voulait me voir, quelques mois plus tôt, gambader à poil dans les couloirs avec elle et toute une série de jeunes et moins jeunes salopes dont certaines désireuses d’expérimenter des pratiques zoophiles avec des fourmis…
Cette réunion était multiple, car Mohamed Atta prévoyait des réunions simultanées dans différents hôtels, tous situés dans les derniers étages de building de diverses capitales dans le monde…Au départ je comptais rester au chaud chez moi, mais mes aspirations d’aventurier burlesque eurent vite fait de me pousser à accepter l’offre.
J’ai hésité à enfiler ma chemise Hubo Goss et ma veste Prada, mais finalement, un bête pull de prolétaire fit l’affaire, ça faisait un peu plus scientifique.
Je me suis tartiné en toute hâte un sandwich, mis dans mon sac quelques cannettes de Fanta, la boisson qu’un nazi entrepreneur a inventé pendant la seconde guerre avec les restes des restes des fruits pourris et dont Coca-Cola a racheté les droits dès l’armistice… et je me suis envolé par le premier train au point de rendez-vous en me préparant psychologiquement au pire.
Une fois devant l’hôtel, il me restait à patienter 20 minutes… avant ce qu’on m’avait décrit comme une gigantesque explosion orgasmique planétaire…, alors je suis monté à l’avant dernier étage ou je me suis f.. à poil pour gambader dans le couloir…
J’ai bien fait, car une jolie brune qui venait d’ouvrir la porte de sa chambre au moment où je passais en sautillant, a poussé un cri hystérique, ce qui m’a rappelé que mon rendez-vous était dans moins de 5 minutes… (l’enquête démontrera plus tard qu’un terroriste belge avait tenté de s’écraser prématurément à un temps déterminé mais resté inconnu, sur l’avant-dernier étage, avec son ULM, mais sans occasionner d’autres dégâts qu’une crise d’hystérie auprès d’une cliente aux cheveux bruns) …
Je me suis dès-lors précipité à nouveau dans l’ascenseur ou j’ai fait exactement l’inverse qu’à ma montée au septième ciel… et ce à l’admiration “générale” d’une dame blonde présente dans cet endroit confiné…
Quand tout va bien, il devient nettement plus délicat de remplir, même sans le faire exprès, mes fonctions d’écrivain.
Quand tout va bien, on n’a strictement rien à raconter, car le roman se nourrit, tel un parasite, de la pauvre vie de son auteur… et si cette dernière tourne en rond, on risque fort de lire les mêmes propos jusqu’à l’étourdissement.
Un auteur n’ayant rencontré personne en dehors d’une accorte dame émerveillée dans un ascenseur…, n’ayant rien vécu d’autre si ce ne sont d’exceptionnels moments que je ne tiens pas à divulguer ici…, est-il capable de narrer une histoire originale ?
Peut-être, car quand tout va bien, on n’a rien à raconter, on est à l’écoute des autres, on peut donc s’inspirer de la vie d’autrui, on devient alors une sorte de biographe, de nègre, de caméra.
Je ne dois pas être de nature très altruiste car je préfère, et de loin, écrire sur moi.
Lorenza, à mon retour, m’avait préparé un divin Nescafé et une petite ambiance jazzy…, elle regardait, bouche-bée, une sorte de téléfilm, remix de “La tour infernale” mais sans Steve McQueen…, que, curieusement toutes les chaines TV passaient en boucle…
Elle était assise gracieusement, de toute sa féminité, dans l’aquarium… et moi, au bureau, devant l’ordinateur, à la lueur de l’écran et des bougies, je me remettais à la tâche après plusieurs mois d’interruption ; je m’étais en effet consacré à un projet scientifico-sexuel… entre autres choses…
On peut noter aussi que je flânais, la plupart du temps, en essayant de planifier des activités que je ne ferai sans doute jamais, dans l’espoir de me réconcilier avec moi-même.
Il était bon de me redécouvrir des sensations littéraires résumant à merveille mon état dépressif du moment.
Les conséquences…
Quand l’armée de docteurs militaires armés jusqu’aux dents de seringues…, a pénétré dans mon bureau en hurlant “Al-Quaïda, Ben-Laden, WTC, Mohamed Atta, terrorisme”…, je n’ai strictement rien compris de ce qui m’arrivais…
12 heures plus tard, j’étais dans une chambre de style cellule à Guantanamo-bay, un paradis de beauté Cubanoméricain…, j’étais affalé en combinaison orange sur le lit-paillasse, puant le vieux malade cramoisi…
Le chef du lieu, tenait en main un ouvrage d’intelligence artificielle, on ne pouvait pas le rater, c’était écrit en gros sur la couverture, pour que les infirmières le voient bien.
Histoire de simuler un intérêt quelconque à ma vie, un des médecins accompagnant le grand chef m’a lancé un : Ca a l’air intéressant ce que tu as fait le 11 septembre à 13h13…, qu’est-ce que tu fais dans la vie, exactement.
Là, j’ai pris une décision primordiale dans mon existence, dorénavant, ne plus répondre : “Je m’occupe d’informatique” à toute question me paraissant explosive…
Pendant un instant, j’ai eu envie de dire que j’étais écrivain, car il me semblait que je devais absolument éviter le mot “informatique“.
L’informatique de base m’ennuyait déjà tellement que mon cerveau aurait envoyé, inconsciemment, un signal pour déformer ma mâchoire et rendre la prononciation du mot, tant redouté, absolument niaise, totalement fausse, mon corps aurait adopté une contorsion ridicule pour que ce mot, ignoble, émerge de mes lèvres piteusement, confortant ainsi le stéréotype mondial, l’étiquette public, de l’informaticien autiste, peu sûr de lui, et au final, irrémédiablement abruti par sa discipline de jeune mal comprenant.
Alors j’ai dit : j’étudie l’Intelligence Artificielle.
Directement, ça faisait plus classe… et au final, ce n’était pas un mensonge.
Plus tard, ce même médecin est repassé, en dehors de ses heures de service, et nous avons discuté intensément, de longues heures, de programmation et de bio-informatique lié au terrorisme.
Ma première poignée de main alla pour mon plus proche voisin, c’était sans doute la plus importante de l’après-midi, par ce geste, voilà que je n’étais plus qu’à une seule poignée de main d’Arthur C. Clarke, de Marvin Minsky, de Nick Bostrom, d’Isaac Asimov, et j’en passe…, un grand moment.
Après cet instant émouvant, je remis pied sur Terre et je pris enfin la peine de regarder les autres personnes présentes à ses côtés, toutes habillées comme moi, d’une ample combinaison orange…
On était douze.
J’ai parlé en premier à un loustic qui avait une tête à parler français, il ne venait pas loin de mon bled, j’ai alors paraphrasé Bouga, un grand rappeur contemporain : Tout ça sort de la zone, hein ? Qui l’eut cru ? Pas eux en tout cas…
C’est à ce moment-ci que j’ai décidé unanimement avec moi-même que ce passage de ma vie deviendrait un chapitre de mon roman… et j’ai commencé à prendre des notes personnelles à l’intérieur de mon cerveau sur ces curieux personnages, tout en faisant mine d’être un transhumaniste.
Comment avoir l’air d’un transhumaniste me direz-vous ?
Il suffit de sourire et d’avoir un air de joie et de positivisme infini, comme un jour de rentrée des classes à l’école primaire.
Tout ce beau monde a été tranquillement s’installer de l’autre côté de la cour entièrement bordée d’un mur de fils-de-fer barbelés…
J’ai demandé un cappuccino à un des docteurs qui passait de l’autre côté du mur avec un énorme chien… mais après une heure, je n’avais toujours rien reçu…
Le soir, nous étions tous rassemblés dans un long couloir avec un tas d’infirmières lubriques, on pouvait quand même y trouver de très jolies pièces.
Les jeunes infirmières étaient délicieuses, pleines de joie, pas encore recouvertes de varices, ne souffrant pas encore de douleurs aux dos, des infirmières fraîches, sorties de l’emballage, des nouvelles infirmières, qui étaient peut-être parfois nues sous leur tablier blanc.
Toutes les 4 heures, une d’entre elle passait me piquer le bout d’un doigt, pour mesurer ma glycémie, des fois on m’envoyait les vieilles laides désagréables, parfois de jeunes femmes, parfois plus jeunes que moi, toutes innocentes… et qui ne manquaient jamais de faire un peu d’humour d’hôpital.
Le plus chiant, c’était la mesure glycémique nocturne de 3h du mat.
On venait me réveiller, m’interrompre dans mes rêves, pour mesurer mon pénis en érection…
Un soir, un des derniers soirs de mon séjour, je commençais à m’y habituer, vers 3h, mon sommeil se faisait plus léger… et j’entendais l’infirmière s’approcher de mon lit… et sans avoir besoin qu’elle me secoue la tige, je bandais seul.
Anecdote marrante, le soir où se fut une des plus belles infirmières du service qui était chargée de me branler, je me suis levé d’un bond, elle a eu un peu peur, et tel un fou, je me suis retourné vers elle, le sexe érigé telle une des tours défuntes du Word Trade Center… et la fixant droit dans les yeux, j’ai hurlé : Oui… maintenant, je suis prèt…
Délicieuse enfant.
Les aveux…
Suite à ce fait, j’ai été déféré devant une Cheffe-Doctoresse-Colonelle qui était bien plus belle que le chef docteur…, trentenaire intacte, toute propre sur elle, mèches millimétrées, uniforme à peine froissé, sourire colgate écarlate… et très bon oratrice, espagnol, anglais, français, elle parlait tout à la perfection.
Après une poignée de main équivoque, parce qu’elle était venue s’inquiéter de mon sort…, elle m’a filé un pin’s World Transhumanist Corporation, que j’eus vite fait de mettre dans ma poche.
Elle m’a vu et m’a dit : Ha non, en échange de ce cadeau, il faut me parler, tout me dire !…
Je me suis exécuté, je lui ai parlé : Ma chère Colonelle, bien aimée Cheffe-Doctoresse, je déteste les individus d’humain, les logos et les symboles…. J’ai toujours détesté les repas de famille… Etudiant, quand je me suis retrouvé dans les logements étudiants de l’Université des pépères Jésuites, je ne supportais pas la fausse ambiance gentille solidarité de voisinage…, j’ai ensuite vite échappé à l’ambiance des cercles étudiants quand a été lancé un forum pour l’entraide des cours, j’ai alors vite mené ma guérilla pour me faire éjecter au nom de la liberté d’expression, qui n’était peut-être qu’un prétexte pour foutre le bordel… Quand je fréquentais les communistes et qu’ils m’ont proposé de se réunir dans un beau château pour refaire le monde, je me suis enfui en pensant à la scène d’orgie de Eyes Wide Shut… et quand on m’a enrôlé dans une dream team pour élever Electrobel, la plateforme musicale virtuelle belge, vers les hautes sphères, j’ai vite pété un plomb et j’ai craché dans la soupe…, rebelote avec plein de trucs, et au final, quand j’ai décidé de monter mon propre forum sur internet, ma propre communauté, ça n’a pas été mieux, j’ai tout détruit en grand dictateur mégalo… Et là, voilà que je me retrouve ici, dans cet hôpital, avec un pin’s WTC qui ira sans doute, rejoindre, au fond d’un carton pourri, mes vieux pin’s Piscou Magazine. Je hais cet hôpital, ma très chère Colonelle-Cheffe-Doctorese… Mon voisin de cellule est un vieux con, d’au moins 80 ans, ne parlant pas français et passant ses journées (et surtout ses nuits), à se plaindre en arabe. Au début je compatissais ! Dur dur d’être vieux ! Quelle tristesse d’être vieux ! Dire qu’un jour ce sera mon tour ! Puis, j’en ai eu vraiment marre de ce pleurnichard, quand il allait pisser, on l’entendait gueuler comme si on le sodomisait avec son propre bras, puis on entendait quelques gouttes tomber, puis il regueulait… et ainsi de suite, pisser était un supplice sans nom pour lui, une torture d’au moins 10 minutes. Le pire, c’est le jour où j’avais gentiment nettoyé nos chiottes communes, une fois mon œuvre terminée, le vieux croûton n’a pas eu meilleure idée que d’aller gerber sur la planche… et à côté aussi, plus moyen d’aller chier là dedans… Les premiers soirs, je n’arrivais pas à dormir, il toussait, chantait son désespoir, se levait toutes les 5 minutes pour aller pisser. Un soir, dans la pénombre, il est tombé de son lit après un ultime gémissement, d’un coup, comme ça, et puis silence complet, j’ai hésité, je me suis dit qu’il fallait appuyer sur le bouton, appeler l’infirmière, aider ce pauvre monsieur Zamir Boughadir, un nom Arabe. Je me suis retourné et j’ai bien dormi ce soir là, silence complet dans la cellule, ô bonheur. Je vous rassure, il n’est pas mort, du moins pas mort de suite…, il a agonisé en silence dans d’atroces souffrances jusqu’au petit matin…
A l’écoute de mon récit, la Colonelle-Cheffe-Doctoresse a applaudi et a ensuite crié : Tous dans le couloir, chacun doit se présenter aux gardiens et avouer ses crimes…, si pas d’aveux, les chiens viendront vous bouffer les couilles, bande de chiens galeux…
C’était comme dans les clubs d’alcooliques anonymes.
L’idée était formidable, j’ai décidé de tout avouer : Oui, je suis devenu transhumaniste, il me faut ma nano-dose de cyber-connerie chaque bio-matin…
En plus, il fallait se présenter en anglais, ça s’annonçait “hard for me“.
Je comprends très bien l’anglais, je lis parfaitement l’anglais, mais pour parler, je ne vaux pas un poil de couille.
Tamara venait de l’Iowa, trentenaire, bien conservée, très beaux seins, un cul rebondissant, le visage un peu destroy quand même, habillée en espèce d’altermondialiste gothique, avec plein de decorations, c’était une spécialiste des technologies et de la futurologie…, elle ligotait les “ceusses” en combinaison orange et leur donnait des grands coups de pieds dans les couilles en riant, pour venger les tours du WTC…
Vincent, rouquin moche, 20 ans tout au plus, ne parlait qu’anglais, il étudiait la biologie à l’université de Dallas quand il a eu la stupide idée de s’engager pour défendre les “valeurs” américaines…, sa mission était d’enfoncer une sorte de plug dans l’anus des patients et de tourner une molette…
Dans ce cas, on voyait toutes les lumières clignoter pendant qu’une odeur de saucisse brulée, très appétissante, envahissait le couloir…
Après ce fut mon tour, j’ai dit : sorry for my pitiful english, avant de dire que j’étudiais l’Artificial Intelligence, ça fait plus classe, et là direct, je sentais que l’assemblée se voulait plus à l’écoute, ça a marché du tonnerre de dire que je faisais de l’IA, j’ai dit que j’étais compositeur aussi, que j’écrivais, puis j’ai fait des fautes d’anglais et j’ai terminé par un pathétique : that’s all…, et j’ai demandé un cappuccino.
Un bonhomme en combinaison orange se faisait tripoter par une blonde superbe dont je n’ai pas encore parlé, quelle classe, avec son sourire de salope, elle devait aussi faire du transhumanisme pour chauffer les coucougnettes de ses patients, on devait être du même bord….
Après ce fut le tour d’Akir, 25 ans tout au plus, sicilien d’origine mais look suspect, étudiant en économie, master business school, agenda surbooké, a voyagé au Canada, en Italie, aux States, anglais parfait, super mignon, j’avais presque envie de lui mettre une main dans le pantalon, l’italien parfait, la classe…
Vincent a tourné la molette trop loin et trop longtemps, Akir a vécu une sorte d’auto-combustion accélérée…
Un Sous-Chef-Docteur, habillé d’un Condom géant, mais avec le pénis en érection… est arrivé en hurlant comme quoi il faudrait maintenant l’incinérer pour cacher qu’on l’avait mortellement brûlé…, on aurait dit un ancien agent de la gestapo déguisé en woody Allen…
Au vu des traitements inhumains subis à Gantanamo, j’ai décidé de porter plainte à l’ONU et d’apprendre le chinois, la langue du futur, pour bien marquer mon opposition au Nouvel Ordre Mondial…, j’ai ainsi commencé à préparer doucement mon exil.
Ni l’Amérique, ni l’Europe n’auraient bientôt plus rien à offrir.
En attendant, j’écrivais en français, faute de mieux.
Tout ce qu’il me restait, c’était le souvenir de Lorenza, elle m’inspirait, une qualité rare.
Son passé de jeune néo-punk gauchiste lui avait permis d’être ouverte à tout, même aux idées les plus décalées, avec un don très fin de psychologue, bien plus qu’une de mes ex-démoniaques diplômée de psycho… et dont je me suis interdit de parler car elle m’a menacé d’un procès si j’osais encore écrire la moindre phrase, même gentille, ce qui serait improbable par rapport à ce qu’elle m’a fait subir, à son sujet.
Lorenza a toujours à l’avance d’une guerre sur la pensée contemporaine, prévoyant les modes, les attitudes.
On avait réfuté pas mal de conceptions basiques du couple traditionnel, par exemple, on évitait tous les pseudos bidons tels : “bébé“, “chouchou“, “mon ange“, “ma chérie“, “boudi“, on s’appelait par nos prénoms, sans les raccourcir à leur plus simple expression ; appeler Quelqu’un par son prénom complet, en niant le diminutif, le pseudo, le surnom, l’appellation rose bonbon, le raccourci clavier, le synonyme…, voilà quelque chose qui se faisait de moins en moins, dans ce monde de vitesse haute voltige, chacun voulant nier sa réalité, fuyant dans des titres, cherchant à oublier sa propre existence, à devenir malhonnête avec soi-même, à éprouver un ressentiment injustifié avec ses origines.
Rien de plus fort que le prénom, qui soulève chez l’interlocuteur des sensations lubriques, qui esquisse sur le visage l’expression jubilatoire enfantine d’être interpellé par sa vraie étiquette, l’étiquette primordiale ; faire le moralisateur en terminant sa phrase par le prénom, ça a toujours plus d’effet, directement, les propos prennent plus de corps.
Après un an de souffrances, Lorenza est venue me visiter à l’hôpital de Guantanamo, j’étais tout content, elle était désolée de me voir si amaigri.
On a été manger un hot-dog froid qu’elle avait spécialement amené pour moi…, en regardant les gardiennes du camp s’entrainer…
Lorenza en était toute excitée, au point qu’elle est ensuite allée se renseigner sur les formalités pour devenir cheffe à Guantanamo !
Ça devait être dur, car elle est revenue assez triste.
Je l’ai consolée comme j’ai pu, tendrement, en tête à tête, romantiquement, derrière un grillage barbelé…
Je la trouvais plus belle que jamais, elle faisait terriblement femme, ses formes étaient devenues affolantes, son cul était hypnotique.
Elle m’a offert un cadeau, le plus beau cadeau qu’on m’ait offert lors de ce séjour forcé : Un nounours avec un pansement…
La résurrection…
L’année suivante, la Colonelle-Cheffe-Doctoresse m’a fait dire que je pouvais rentrer chez moi…
Dès ma sortie, j’avais envie de Lorenza, comme un porc, je bandais comme un fou…
J’ai du mettre des Pampers remplis de glaçons durant le voyage du retour… : L’esprit peut arrêter d’aimer, mais le corps a bien meilleure mémoire… ai-je prononcé malgré mon alcoolémie Mojitosiène avancée, à hôtesse de l’air, pour justifier cette érection impressionnante mais néanmoins sauvage… qu’elle m’a proposé d’atténuer sur la dernière rangée de sièges vides…
On s’est accouplé, comme des bêtes…
Débarquant à l’aéroport de Zaventem, j’ai été prié de participer aux discours de re-bienvenue pour me féliciter de mon long voyage d’étude qui allait servir la cause Transhumaniste aux Nations-Unies et à la Commission Européenne…
Après un échange de cartes de visites et autres petits documents de propagande transhumaniste, José Happart qui officiait encore dans l’Internationale Socialiste Wallonne de la Belgitude patrie… a commencé un long discours qui n’a rien apporté de neuf dans mon existence.
D’une anecdote parlant d’un mec qui a réussi à écrire un mail par la pensée grâce à un implant dans sa cervelle, aux rats qui restent éternellement jeunes, rien de bien extraordinaire par rapport à ce qu’on peut lire dans le NewScientist de Liège.
Le public de la conférence était déjà éduqué, on est vite passé au sujet de l’immortalité.
J’ai exposé ma théorie de la mort qui s’adapte à la technologie : La mort existera toujours, elle s’adaptera à nos progrès technologiques, il suffit d’imaginer des nanos-robots destructeurs ou des logiciels qui trufferont d’erreurs l’upload de l’esprit dans les machines…
Puis j’ai demandé quelle était la différence entre les extropiens et les transhumains.
La question avait l’air d’embarrasser José, alors il m’a répondu n’importe quoi pour tenter de m’endormir, ce qui a fonctionné à merveille, après j’ai regardé les gens parler, de manière enthousiaste, de leur futur improbable de transhumain, j’en suis ressorti absolument abasourdi…
José nous a encouragé à nous revoir chaque mois et à persévérer, car j’étais l’avenir du transhumanisme en Belgique
On s’est levé.
José m’a proposé de le rejoindre au Venezuela, faire de la plongée sous-marine.
J’avais envie de répondre, mais je me suis contenté esquisser un sourire genre “cours toujours pour me mater en maillot vieux transhumain pervers“.
Je me suis ensuite enfui dans le brouillard en courant avec mes dépliants transhumanisants entre les dents.
La conclusion…
Depuis mon aventure à Guantanamo, je tapotte de plus en plus mon ordinateur, je rencontre sur divers sites, le futur de l’avant-garde de demain, l’arrière-garde de l’avant-garde actuelle.
Les idées qui planent ne sont vraiment pas neuves, c’est du recyclage névrosé, c’est un mélange de punk-écolo-altermondialisme provocateur, égocentrique, individualiste, c’est un gala d’égos baignés dans une fausse auto-dérision hilarante.
Je m’y occupe de détruire la crédulité et la bétise inhumaine, on doit tout casser avant la disparition de l’espèce humaine, unique valeur qui nous relie tous.
J’ai lu dernièrement qu’avoir la grosse tête avant de devenir célèbre, c’était le seul moyen de ne pas l’attraper en devenant célèbre…
Ca me parait évident.
Je n’ai pas besoin des autres pour aimer ce que je fais, la célébrité me parait donc légitime, une conséquence logique de la création.
Donc, je me permets de me la péter encore plus que d’habitude en sirotant noblement mon N-ième Mojito…
Avoir la grosse tête, ça permet de se protéger contre la critique, de plus en plus sévère et aveugle, les critiques sont des gens incompétents et frustrés, mais d’un point vue neutre et froid, ils ont souvent raison, tout est (facilement) critiquable, mais ils oublient qu’une œuvre, une création, une découverte, peut prendre tout son sens dès qu’on la plonge dans une situation bien précise.
Si on n’est pas habitué à être immergé dans l’univers englobant l’artiste, le chercheur, le créateur, l’artisan, on peut passer totalement avec côté des plus belles choses.
Je crois que plus on avance, plus le consommateur d’art recherche des choses qui le confortent dans ses idées, on aime une réalisation parce qu’on s’y retrouve, et non parce qu’elle est géniale, mais la validation du génie est devenue tellement ardue, que même le mot génie perd son sens, le génie humain a été banalisé, soldé ; la société de consommation nous a tellement fait passer de la merde pour du génie, qu’elle a embrouillé tout le public… et elle se permet même, un autre crime odieux, de réécrire l’histoire.
Regardez ces rétrospectives quasi mensuelles, “Les meilleurs morceaux des années 70“, “Election du plus grand français du 20ème siècle“, qui sont-ils pour oser résumer les années 70-80 à Claude François, Coluche ou le Banana Split de Lio ??
Et c’est ainsi que la machine capitaliste fabrique de l’oubli.
Ecrire la vraie histoire du 20ème, démystifier les légendes, voilà un métier qui a de l’avenir.
Au 21ème siècle, il faut être rapide.
Les gens hésitants, lents, les peu ambitieux, qui ne vont pas au bout des choses, n’ont aucune place dans ce siècle.
Si vous trouvez une idée, vous pouvez être sûr qu’un type l’a déjà trouvée aussi quelque part, ou s’apprête à la dévoiler au public.
Dès qu’une idée vous tombe dessus, le compte à rebours se met en marche, vous pouvez vous dire que vous avez maximum 1 mois pour la concrétiser et la répandre.
Quand on a une bonne idée, on le sait immédiatement, cela procure une sensation particulière, un émerveillement et un enthousiasme frôlant l’orgasme, on vibre, ça ne s’explique pas mieux que ça.
De là, il faut redescendre sur terre et vite… et foncer.
A l’époque de la surmédiatisation, cette époque d’uniformisation globalisée, cette époque où l’information voyage à une vitesse folle, on peut dire, sans exagérer, que l’on est tous soumis aux mêmes stimulis, aux mêmes flux de tendances, il n’est donc pas surréaliste d’affirmer que plusieurs individus avancent dans la même direction, aussi originale puisse-t-elle paraître, au même moment.
Encore plus horrible, les bonnes idées sont encore meilleures quand elles débarquent à un âge relativement jeune, après le cerveau devient moins plastique, moins ouvert, on s’enracine dans nos certitudes gâteuses.
Notons tout de même que le vrai génie, quel que soit son âge, n’aura aucun mal à balayer ses préjugés pour se reforger une pensée, une théorie, un conglomérat d’hypothèses, une approximation de la réalité de son époque.
L’avenir sera pire…
J’effectue, actuellement, des recherches sur la bioéthique masturbatoire réciproque…, ce qui n’est pas trop éloigné du transhumanisme.
En fait, Lorenza est plus transhumaniste que moi, elle pense que ce serait bien d’imposer une deadline globale, genre : à 80 ans, on flingue tout le monde.
Une date de mort programmée pour ceux qui seraient passé entre les mailles du filet mortel naturel, pour éviter la surpopulation et la gangrénisation de la société par les vieux, qui avec leur pension, pomperaient les ressources des jeunes.
Je pense que la gérontophobie va s’accentuer avec le vieillissement de la population.
Quelques signes avant-coureurs, telle cette étrange boîte de nuit qui reprend l’ambiance de Guantanamo et dans laquelle des stars de pacotilles comme Madona, Britney Spears et Paris Hilton viennent se montrer, démontrent que notre monde se rit de toutes, tous et de tout…
Inquiétant !
Les gens y sont truffés de fausses prothèses électroniques qui ne servent (encore) à rien, portent des t-shirts électroniques… et dansent au milieu d’une sorte de cour des miracles entourée de boutiques de mode, car oui, de plus en plus, discothèque, club échangiste… et magasin de vêtement à la mode ne font plus qu’un.
On y danse sexuellement au milieu des rayons sous-vêtement sur une espèce de gabber-techno-trance-sex-hardcore-new-age… avec des fashions coiffures sophistiquées et des cybers lunettes qui clignotent comme celles des soldats américains en Irak.
Le transhumanisme est déjà le prochain mouvement populaire, sa philosophie est tellement simpliste, après tout, une fois qu’on enlève le terme nanotechnologie, que je ne vois pas même pas comment ça ne pourrait pas toucher le mainstream.
Mais avant ça, il faut que MTV termine d’imposer l’hédonisme primaire de la fausse liberté sexuelle ; plus que quelques années avant que le clip de R’n’B se fonde parfaitement avec la réalité, que les cerveaux soient lavés définitivement, que tout le monde devienne bien mal comprenant et bien superficiel, que toute la planète bouge son cul sur le même beat, et que Lorenza et moi, on commence sérieusement à prendre nos “choses” en main pour bâtir l’enfer des cons et connes, car l’espèce humaine ne mérite peut-être que ça après tout…