Elle possède de magnifiques cheveux blonds et bouclés, de grands yeux bruns et tristes, deux petits grains de beauté sous l’oeil gauche, et une ravissante gueule d’ange pouvant passer en une fraction de seconde de l’état d’euphorie à une profonde mélancolie.
Elle semble sûre d’elle, décidée, indépendante, prête à conquérir le monde ; elle est paumée, souffre en silence et noie ses douleurs enfantines dans un excès de Vodka.
Elle incarne à tour de rôle la femme fatale et la femme enfant, immature, chieuse, rebelle.
Enfin rebelle…
A sa manière…
Une rebelle qui fume des joints avec sa mère, qui prône essentiellement un mode de vie libéral (sexuellement parlant) et qui pense que tous les ouvriers sont des “branleurs“.
Incroyable le nombre de conneries que l’on peut sortir à 18 ans, avec une assurance et une désinvolture capable de fustiger toute intervention divergente.
Elle possède toutes les contradictions, elle y croit fermement et c’est ce qui la rend belle.
Elle déteste les chevaux, les matières scientifiques et “les gens superficiels“.
Pourtant, les dernières Converses aux pieds, le petit top moulant, les piercings au nombril et sur le téton gauche, le jeans taille basse et le string dépassant, elle ressemble à toutes les fashion victims qui se prélassent l’après-midi sur une terrasse et qui finissent la nuit en boite.
Minimum de fringues, minimum de pudeur, minimum de décence, mais maximum de débauche, d’alcool, de drogue et de sexe.
Après quelques verres, elle devient incontrôlable, complètement incapable de résister à la moindre langue (masculine ou féminine) et se réveille parfois dans des draps d’hôpital ou à côté d’un inconnu.
Elle assume difficilement son nouveau corps de femme, mais commence à prendre réellement conscience du pouvoir qu’il lui octroie.
D’ailleurs, elle se plait à réveiller mère, frères, voisins, veaux vaches et cochons lors de ses jouissances nocturnes.
Elevée au Difool, Skyblogs et language SMS au milieu des cités racailles, elle ne craint pas le stop seule à 4h00 du matin et adore raconter les moindres détails de ses parties’ fines à ses meilleures amies ou à des oreilles sensibles.
Par pure provocation, émancipation, elle décrit la nature de ses positions et note ses partenaires proportionnellement à la largeur de leur phallus.
La sonnerie de son téléphone dernier cri, câlée sur “Femme libérée“, retentit régulièrement : Elle gère à la perfection son carnet de rendez-vous, ses amants, amis, amants-amis et ses diverses activités. Effectivement, elle reste avant tout une femme débordée, multipliant les associations et contacts pour meubler le vide de son existence, pour oublier de s’interroger sur sa vie, sur son avenir et sur ses douleurs.
En fait, elle souffre beaucoup, ses blessures remontent à sa naissance même.
Abandonnée par un père névrosé, élévée dans un certain rejet des hommes par un mère italienne et battue par un beau-père dont elle conserve encore le patronyme, elle recherche un modèle masculin à travers une longue succession de mâles virils et directs.
Adepte de baises sauvages contre le mur ou dans la voiture, elle a perdu les notions de douceur, tendresse et amour.
Elle croit aimer, elle se trompe, et elle le sait.
Elle dépend.
Elle comble ses besoins.
Elle brûle la vie par les deux bouts par crainte de l’avenir, elle est devenue une “addict” : sex-addict, smoke-addict, alcool-addict, cofee-addict…
Plus sa vie semble régie par ses dépendances, plus son mal-être est profond.
Fugue et tentative de suicide à base de médicaments confirment son fragile état psychologique.
Avant tout, son caractère parait déterminé par sa blessure d’abandon si bien qu’elle recherche essentiellement le soutien des autres.
Sa plus grande peur se nomme solitude, sa plus grande émotion tristesse.
Elle ressent un besoin inoui d’attention, d’admiration et de présence des autres, de se sentir à la croisée des regards, et le théâtre est ainsi devenu sa thérapie hebdomadaire.
Seule sur la scène, elle se sent le nombril du monde, son corps se réveille, l’adrénaline se décharge, et pendant un instant elle vit à travers un personnage illusoire, un mirage pour oublier la réalité du quotidien.
Voilà le sombre et subjectif tableau que je me déplais à peindre !
Elle vit au jour le jour ce qui la rend pétillante, fraîche, drôle.
Lorsqu’un rayon de soleil pénètre dans une pièce, il l’illumine instantanément par sa présence, son charme, son aura.
Ses expressions, ses interrogations ou encore son regard espiègle dégagent une naïveté intelligente, désarmante.
Tel un petit électron libre, bourré d’énergie, elle fusionne facilement avec moi, ses sujets de conversation oscillent avec une grande amplitude, allant de la philosophie leibnizienne au XVIIIème siècle jusqu’à l’utilisation des anneaux vibrants pour un maximum de plaisir, en passant par des interrogations métaphysiques.
Elle se confie et cela donne envie aux hommes de jouer à Pygmalion. Toutefois, malgré l’innocence juvénile de son attitude, c’est elle qui contrôle et manipule consciemment ou non.
Dans le triangle infernal “Bourreau – Victime – Sauveteur“, elle incarne le rôle de victime et les circonstances de sa vie se concentrent dans le rôle du bourreau.
Elle ne dit ni oui ni non, les interrogations sont continuellement balayées d’un peut-être.
Vendredi, dernière tentative, dernière chance, dernier espoir.
Lieu : Cinéma.
Film : “Ensemble, c’est tout“…
Heure : 22h00.
Comment mettre mal à l’aise une fille ?
En se taisant tout simplement, c’est fou comme elles craignent le silence…
Arrêt sur image. L’instant parait à la fois durer une éternité et en une fraction de seconde, c’est un moment hors du temps, que le conscient ne digère pas immédiatement, le genre de séquence dont vous doutez dans vos souvenirs, cela s’est-il réellement passé ? Puis dans un geste tout aussi précipité, elle quitte l’étreinte et lance avec un immense sourire sur le visage : “Un jour, peut-être“, avant de se fondre dans la pénombre de la rue.
Une scène digne de la comédienne qu’elle tente de devenir… Une scène qui se ponctue par une incertitude. Une scène qui laisse un gout amer !
“Lo-Li-Ta… lumière de ma vie, feu de mes reins. Mon pêché, mon âme. Lo-Li-Ta… le bout de la langue fait trois petits bonds le long du palais pour venir à trois cogner contre les dents… Lo-Li-Ta…. Elle était Lo le matin. Lo, tout court. Un mètre quarante huit en chaussettes debout sur un seul pied. Elle était Lola en pantalon. Elle était Dolly à l’école. Elle était Dolorès sur le pointillé des formulaires. Mais dans mes bras, c’était toujours Lolita.“
Vladimir Nabokov