LOS ANGELES est une ville où les stars sont traquées comme des animaux de foire.
Dix ans après la mort de Diana, rien n’a changé ais-je appris en m’immisçant dans l’industrie des paparazzis pendant 10 jours.
À Los Angeles, capitale notoire des paparazzis les plus agressifs, des photos exclusives de Britney Spears peuvent valoir jusqu’à 250.000 $ US et un simple cliché de Paris Hilton 150.000 $ US.
Les images du corps d’Anna Nicole Smith ont rapporté 1.000.000 $ US.
«C’est la vidéo de paparazzi la plus chère jamais vendue!» se vante Gary Morgan, directeur de Splash News, la plus grande agence de paparazzis dans le monde.
Avec de tels montants, on comprend pourquoi certains paparazzis sont prêts à risquer leur vie et celle d’autrui dans des filatures à haute vitesse sur l’autoroute.
D’autres sont prêts à attendre 18 heures dans leur voiture, quittes à “pisser” dans des bouteilles d’eau, pour photographier une star.
«C’est plus dangereux aujourd’hui que ça ne l’a jamais été. C’est le chaos total», dénonce Blair Berk, avocate de Britney Spears et Lindsay Lohan, deux des stars les plus traquées.
«C’est clair que quelqu’un va bientôt être blessé ou va même mourir», affirme-t-elle.
Il y a 10 ans, la princesse Diana est morte à Paris dans un accident de voiture après avoir été prise en chasse par des paparazzis.
Ces derniers ont été sévèrement blâmés dans l’opinion publique et le marché européen, reconnu comme très agressif, s’est soudainement calmé.
Mais il y a cinq ans, l’industrie a redémarré à Los Angeles, jusqu’à devenir aujourd’hui d’une ampleur jamais vue, même en Europe.
«Ça coïncide avec l’arrivée de nouveaux magazines à potins, qui ont flairé l’intérêt du public pour ce genre de photos», explique François Navarre, directeur de l’agence X17 à Los Angeles.
Au même moment, le magazine US, alors bimensuel, est devenu hebdomadaire.
«Ça a fait exploser le marché», ajoute-t-il.
On estime à 450 le nombre de paparazzis dans la ville de Los Angeles.
La plupart sont des amateurs attirés par l’argent rapide.
On compte six agences majeures qui emploient en moyenne 100 paparazzis.
«Il y a 10 ans, on comptait moins d’une dizaine de paparazzis dans la ville», indique Gary Morgan.
Sur le terrain, la situation est devenue ingérable en raison de la forte compétition.
En 2005, les accidents de voitures entre vedettes et paparazzis étaient fréquents.
Lindsay Lohan, Scarlett Johansson et Reese Witherspoon ont toutes subi des accrochages.
Le gouverneur Schwarzenegger a tenté de limiter les dégâts en resserrant la loi «anti-paparazzis» déjà existante.
Mais deux ans plus tard, la situation sur le terrain ne s’est guère améliorée.
Aujourd’hui encore, les filatures sont quotidiennes et certains paparazzis, hors la loi.
«Non, ça n’a rien changé, il y a plusieurs poursuites illégales. Ce sont les situations les plus dangereuses de la profession, c’est très perturbant», déplore Elliot Mintz, publicitaire de Paris Hilton et de plusieurs autres célébrités, dont Yoko Ono.
Il était photographe de guerre pour Le Monde et Paris Match, au coeur des conflits au Cambodge et en Irak.
Puis, François Navarre a changé de cap pour une autre bataille : la chasse aux vedettes à Hollywood.
À 44 ans, François Navarre, Français d’origine, dirige une des plus grandes agences de paparazzis à Los Angeles.
En 10 ans, il est devenu aussi riche que certaines des vedettes dont il vend les clichés.
Sa maison est située à Pacific Palisades, un quartier près de Malibu où les maisons ne s’envolent pas à moins de 5.000.000 $ US.
Ses voisins s’appellent Steven Spielberg et Jennifer Garner.
Tout a commencé en 1992.
Le Monde l’envoie à Los Angeles pour couvrir une série d’émeutes.
À l’époque, il n’y avait pas de paparazzis à Hollywood.
Il flaire vite l’occasion de réaliser des affaires d’or.
Et par hasard, il empoche d’un coup 70.000 $ pour une photo de Sharon Stone avec son petit copain.
C’était assez pour le convaincre de rester.
Après les guerres, il a eu envie de légèreté.
Il fonde alors X17 (c’est le nom d’un espion de la Deuxième Guerre mondiale), une des premières agences de paparazzis.
Il gère aujourd’hui près de 120 photographes, la plupart sont pigistes, mais 60 travaillent jour et nuit.
«Je passe mon temps à signer des chèques!» dit-il.
Parmi son équipe, il peut compter sur sa propre femme, Brandy, une journaliste américaine qui gère le site Internet.
Bill Graham, un ancien journaliste du National Enquire, lui sert d’informateur.
Il a tous les contacts du milieu.
Pour les boîtes de nuit, une belle «infiltratrice» lui sert de taupe.
Elle appelle les paparazzis dès qu’elle repère une vedette.
Il a lancé récemment X17online.com, un site gratuit avec des vidéos de stars, qui compte près de 350.000 visiteurs uniques par jour.
Ça peut monter jusqu’à 1,2 million? Un peu l’équivalent de people.com.
Tout ça, c’est un peu grâce à Britney Spears, la star chouchou d’X17.
Une équipe de 10 photographes la suit 24 heures sur 24.
«On a toujours été de son côté et elle le sait, confie Navarre. Elle nous envoie souvent des messages pour nous remercier ou nous donner de l’info. Il y a des gens qui ont dit qu’elle nous payait, mais ce n’est pas vrai.»
Je rencontre François Navarre dans les bureaux de X17, une petite maison d’un quartier chic de Beverly Hills, où le gazon est vert «cryptonique» et où les haies sont taillées par Édouard aux mains d’argent.
Il arrive au volant d’un Porsche Cayenne, son téléphone cellulaire en permanence collé à l’oreille.
«Non, Britney est avec les enfants aujourd’hui. Suivez Criss Angels, ils vont sûrement se retrouver plus tard», dit Navarre à un de ses paparazzis.
L’entrevue est sans cesse interrompue par ce téléphone.
Au bout du fil : un magazine qui lui propose 15.000 $ pour une photo, ou un paparazzi qui lui rapporte une exclusivité.
«Quand on a eu la photo de Paris Hilton se faisant menotter par la police, François était débordé. Il négociait les prix de vente avec deux cellulaires comme une enchère, 30.000 $ d’un côté, 40.000 $ de l’autre», raconte Danny, un de ses paparazzis.
Le cliché a finalement rapporté 100.000 $US.
Quand ses gars tiennent une primeur, il exige qu’ils viennent sonner à sa porte en plein milieu de la nuit.
«Je suis viré si je ne le fais pas!» raconte Mathieu Paré, paparazzi de 29 ans.
Dans le brouhaha, Navarre garde son calme, l’air décontracté.
Il gère pourtant un business qui ne s’arrête jamais.
S’impose-t-il des limites ?
«Oui, parfois, on ne vend pas les photos parce qu’elles sont trop trash. Quand Anna Nicole Smith est morte, on n’a pas fait de photos du cadavre», indique François Navarre.
À l’opposé, son rival Splash News ne s’est pas gêné.
Résultat: 1.000.000 $ US de profits.
Mais avoir bonne conscience, ça n’a pas de prix.
250.000 $US en moyenne pour une photo, je comprends qu’ils soient 450, assoiffés comme des lions, à chasser les stars dans l’arène hollywoodienne.
Mais j’étais loin de s’imaginer dans quel Freak Show je m’embarquais, avec le photographe Martin Bouffard.
Dix jours en compagnie des paparazzis à Hollywood, la capitale mondiale du cliché volé.
Un monde où l’argent est maître des comportements.
Après avoir vécu 24 h/24 dans leurs baskets, l’attrait du fric s’évapore.
Attendre seul dans une voiture pendant 12 heures.
Attendre comme si la star dictait notre vie.
La suivre dans son quotidien banal qui se transforme en chasse à l’homme sous le soleil.
On se sent comme un vautour.
Les passants vous crient des insultes.
Poser des questions humiliantes aux stars pour provoquer une réaction et hurler comme si le Christ était en ville, tout ça est dégradant.
De plus en plus, les paparazzi sont de pauvres types attirés par la cagnotte.
Des immigrants illégaux venus du Sud, des valets de stationnements, bref des mecs qui veulent eux aussi leur part de billets verts imprimés par le star-system hollywoodien.
La limite entre le journalisme trash et le voyeurisme est mince.
Ce qui est réellement traumatisant, ce sont les méthodes qu’ils utilisent et leur agressivité.
«La façon dont ils chassent les stars, c’est du harcèlement, en europe, il y aurait des charges criminelles, là-bas il y a un laisser-aller total», conclut le photographe qui m’a accompagné durant mon reportage, il est ressorti de l’expérience un peu dégoûté de ses confrères de lentille.
À voir le chaos qui entoure certaines starlettes comme Britney, on comprend qu’elles perdent la raison.
Les paparazzis sont-ils responsables de leurs déboires ?
Pas nécessairement, mais ils contribuent à créer un climat surréaliste, une bulle de flash autour des stars qui les déconnecte encore plus de la réalité.
Après 10 jours à Los Angeles, j’en suis venu à m’ennuyer du mot authentique, constatant que Hollywood est réellement drogué à l’argent.
Tout est mis en scène, même les photos de paparazzis.
La plupart du temps, il s’agit d’arrangements pécuniers entre les agences et l’entourage d’une star.
Tout le monde y trouve son compte, les restos qui ont de la pub gratuite, les compagnies heureuses de voir les vedettes photographiées avec leurs produits et les consommateurs qui se régalent de magazines du type US Weekly.
Hollywood est aussi devenu un feuilleton quotidien que l’on suit sur le Net en direct, grâce à des sites comme X17, TMZ et Perez Hilton.
Attention, on devient vite accro.
En plus, c’est gratuit et anonyme.
Cette nouvelle tendance ne fait qu’accroître la demande pour plus de photos.
Bonjour le désastre.
Est-ce nous tous et toutes qui alimentons au bout du compte tout ce délire ?
Sans doute un peu.
Hélas, la soif de voyeurisme pour les stars n’est pas étanchable, encore moins réversible.
Et de toute façon, Hollywood ne veut pas que ça s’arrête.
Parce qu’au bout du compte, toute cette mascarade sert à faire acheter des billets de cinéma.
Il faut seulement en être conscient.
Vendredi. On arrive devant le salon de coiffure Estilo, où Jessica Alba est planquée depuis 9 heures.
– 15h… Dans la ruelle, une dizaine de paparazzis font le pied de grue, d’autres sont postés devant et attendent d’avoir le cliché de sa nouvelle tête.
Certains paparazzis se méfient de ma présence, ils ont peur que je leur vole leur gagne-pain.
Ils mangent des nachos pour passer le temps.
Ça discute teinture.
«Pourquoi ça prend six heures, changer de couleur?» dit l’un d’eux, impatient.
C’est drôle de voir ces durs à cuire parler traitement beauté.
Ça fait partie de leur métier, attendre les starlettes à la sortie des salons de bronzage ou de manucure.
Mathieu Paré a déjà attendu douze heures devant le salon de Ken Paves pour prendre une photo d’Ashley Simpson.
– 17h… C’est peine perdue, Jessica Alba a réussi à s’enfuir par une porte de côté pendant qu’une autre blonde a fait diversion en sortant par-derrière.
Elle a berné tout le monde.
Les employés du salon rient de nous.
Première règle du métier: le paparazzi doit être très patient…
La journée s’annonce tranquille, c’est samedi et les stars tardent à sortir.
“C’est plus calme depuis que Lindsay Lohan est en rehab en Utah“, indique Mathieu, notre paparazzi, en service en ce jour de sabbat.
– Bip !
– “Nicole Richie est au Real Food, boulevard La Cienega“, dit une voix dans son talkie-walkie.
On arrive tous en même temps devant le restaurant.
Difficile à manquer, un mur de plus de 20 paparazzis se dresse devant l’entrée.
Tous attendent calmement que la starlette enceinte de près de cinq mois fasse sa sortie.
Il leur faut cette photo.
Elle vient tout juste de sortir de prison, où elle est restée 82 heures.
C’est vendeur.
Dans la ruelle arrière, d’autres “pap’s” montent la garde si jamais elle filait par l’arrière.
Alex Turner, paparazzi au look de surfer, n’est pas content.
Depuis ce matin, il suit Richie avec trois collègues, en toute exclusivité, et voici que la ville entière débarque comme des mouches autour d’un pot de miel.
La valeur de sa photo vient de chuter.
Devant la porte, les deux gardes du corps de Nicole surveillent la scène.
La panique s’installe quand un des gardes vient déplacer son gros SUV à l’arrière du commerce.
Tous les chasseurs d’images se mettent à courir de l’avant à l’arrière comme des poules sans tête.
«What’s going on ?» se demandent les passants.
La tactique visait à les disperser pour que la star sorte.
Ça ne fait que rendre la situation encore plus tendue.
«Rester en avant ou aller derrière, c’est toujours la même histoire, on prend une chance», dit Mathieu.
– 17h… La frêle starlette aux lunettes rondes sort finalement par-devant.
Tout se passe en quelques secondes.
Les flashs crépitent et elle s’engouffre dans la voiture noire, où son petit chien l’attend.
Mathieu est satisfait de ses photos de profil.
«On voit bien sa bedaine !» dit-il.
– 3h… Au milieu de la nuit devant le club Area de Beverly Hills, Paris Hilton est de la fête, Mary-Kate Olsen aussi, il y a même Paméla Anderson…, le pied !
Un groupe de jeunes paparazzis attend devant avec des “pap’s” de fin de semaine, comme cette dame aux cheveux blancs et un monsieur bedonnant avec sa caméra «Fisher Price».
– 3h15… Les fêtards un peu éméchés sortent et déballent tout aux journalistes à potins.
«Paris est tombée par terre et a vomi», répètent-ils un après l’autre.
Les “pap’s” se frottent les mains.
– 3h30… On attend toujours Paris.
Un paparazzi refile en cachette un billet vert au policier qui assure la circulation des voitures devant le club en échange d’informations.
Il voulait probablement savoir par où Paris allait sortir.
Ce même policier se fait donner des cadeaux par des clients et des accolades par des filles à la poitrine plantureuse.
Ça sent la corruption.
On apprendra plus tard que c’est un garde de sécurité dans un uniforme de police (?).
Un vrai cirque.
– 3h35… Hilton est partie dans une grosse jeep Mercedes cachée sur la banquette, derrière les vitres teintées.
Personne ne touchera le gros lot ce soir.
Dans cette jungle des paparazzis à Los Angeles, à qui la faute ?
Magazines à potins et studios de films, c’est un peu la même famille.
À Hollywood, on parle d’un dirty little secret…
Sur le terrain, les stars sont traquées par les paparazzis, souvent de façon agressive.
Blair Berk, avocate de Lindsay Lohan et de Britney Spears, croit qu’il faut plutôt s’attaquer aux propriétaires de magazines comme People, Us Weekly, Star, Life & Style, etc.
«Ce sont eux qui font le plus d’argent, ce sont eux qui devraient être poursuivis pour avoir publié des photos prisent par des hors-la-loi», dit-elle.
Ironiquement, la plupart des compagnies propriétaires de ces magazines et émissions de télévision sont les mêmes qui produisent les films et engagent les vedettes.
«Paramount nous achète nos clips de stars…, nos clients, ce sont les mêmes qui font les films», explique François Navarre, propriétaire de l’agence de paparazzis X17, à Los Angeles.
Time Warner possède TMZ, un site Internet de chasseurs de stars très populaire qui est aussi une émission diffusée à FOX.
Time Warner est également propriétaire de l’émission Extra et du magazine People.
Entertainment Tonight (ET) appartient quant à elle à un autre gros studio, CBS.
Blair Berk parle de «dirty little secret» : «Ils font des profits des deux bords: avec les films, mais aussi en imprimant des photos dégradantes des vedettes», dit-elle.
Gary Morgan, propriétaire de Splash News, une agence de paparazzis, renchérit: «Ça arrange les studios quand les stars attirent l’attention sur elles même si c’est négatif, toute cette mascarade, c’est pour qu’au bout du compte, le client débourse 10 $ pour un billet de cinéma», dit-il.
Est-ce que le chaos actuel peut être contrôlé ?
«Non, bien sûr que non», croit Elliot Mintz, attaché de presse de Paris Hilton, qui est dans le milieu depuis plus de 40 ans.
Il travaillait pour John Lennon.
«Aussi longtemps que le public aura ce besoin insatiable de consommer ce genre de photos, il y aura des paparazzis prêts à les nourrir, c’est à la société de s’y opposer», croit-il.
«On ne peut pas fuir les paparazzis, alors la vitesse n’est pas solution, je suggère à mes clients d’engager des chauffeurs entraînés pour ce genre de situation», ajoute M. Mintz.
Après une suite d’accrochages entre paparazzis et vedettes en 2005 (dont un accident de voiture impliquant Lindsay Lohan), certains magazines se sont défendus.
Parmi eux, US Weekly, qui a publié un code d’éthique mentionnant qu’il ne publierait pas de photos prises par les paparazzis agressifs.
People Magazine, de son côté a refusé de commenter sa politique en matière de choix de photos.
«Les paparazzis ne sont pas responsables du malheur des stars, on ne fait que rapporter ce qu’elles font», martèle Gary Morgan, directeur d’agence.
«Lindsay Lohan, pendant des années, on a pris des photos d’elle dans des clubs même si elle était underage, on a voulu prévenir la catastrophe, mais personne ne s’est alarmé», se défend-il.
Gary Morgan, 43 ans, est un ancien journaliste du Daily Mirror de Londres.
Il a fondé Splash News il y a dix ans à Los Angeles.
C’est aujourd’hui la plus grande agence, avec un chiffre d’affaires de 20.000.000 $ et 900 traqueurs de vedettes éparpillés sur la planète.
Il n’a aucun remords à vendre des photos incriminantes des stars : «ce sont des personnalités publiques, tout comme les politiciens… et, que voulez-vous, les célébrités se mettent dans le trouble facilement», dit-il.
Alex Turner, 32 ans, était photographe professionnel avant de devenir paparazzi.
Pendant longtemps, il a suivi le couple de David et Victoria Beckham, un beat très stressant dû à la forte compétition.
Se sent-il responsable de certains des déboires des stars ?
«Non, nous, on observe et on enregistre leur quotidien, c’est tout.»
Et où sont ses limites ?
«Je ne prends pas de photos des enfants des stars : c’est ça, mon éthique», dit-il.
«Un des fils de David Beckham est épileptique, alors je n’utilise pas de flash en sa présence, mais la plupart des nouveaux paparazzis font quand même des photos», dit-il.
«Les stars demeurent des êtres humains, j’essaie de me mettre dans leur position, de ne pas être trop intrusif, il ne faut pas les frustrer parce qu’elles sont notre pain et notre beurre, plus on les agresse, moins elles vont sortir et moins on fera d’argent», dit Alex.
Vendredi, 21 heures, je me promène phares éteints dans une rue de Beverly Hills, à côté de chez Tom Cruise…, derrière le volant : Mathieu Paré, paparazzi de 29 ans.
On cherche David et Victoria Beckham, qui mangent chez des amis.
On aperçoit leur voiture et celles de leurs gardes du corps garées devant une maison.
On se cache deux coins de rue plus loin.
José et Danny Boy viennent nous rejoindre en voiture.
Les paparazzis travaillent toujours en équipe.
«Ils sont plates, ils ne font pas grand-chose», dit Mathieu des Beckham, qui viennent de s’installer à Los Angeles.
Les chasseurs d’images croyaient pourtant que le couple «royal» serait une mine d’or.
– 22h20… On baille, c’est long.
Les paparazzis sortent de leur voiture, s’étirent et se montrent leurs shots de la journée.
– 22h30… La Bentley sort entourée des deux VUS.
On saute en voiture en deux secondes.
Les Beckham savent qu’ils sont suivis, ils roulent lentement pour éviter le chaos, comme des pros.
Où vont-ils ?
Mathieu vise juste: «Le Chateau Marmont, les gars!» dit-il dans son talkie-walkie.
C’est un hôtel chic niché dans un ancien château.
C’est là où Jim Morrison s’est blessé au dos en tombant d’une fenêtre.
– 22h32… Le temps de le dire, les voitures sont abandonnées dans le milieu de la rue.
Les “pap’s” courent pour ne pas rater leur shot.
Les flashs crépitent dans le pare-brise des Beckham.
Un paparazzi devant un hôtel en attire d’autres : en quelques minutes, les compétiteurs comme TMZ, Fame et des freelance arrivent.
«Quand ça fait des heures qu’on babysitte une histoire et qu’un petit nouveau se pointe à la dernière minute, ça ne passe pas», dit Mathieu, agacé.
– Minuit… On attend que les Beckham retournent à la maison, plantés comme des vautours devant l’entrée de l’hôtel.
Robbie Williams sort du Château Marmont pour offrir quelques grimaces aux “pap’s“.
«Ça va peut-être se vendre en Angleterre», dit Mathieu en regardant son écran.
– 1h10… Branle-bas de combat, la voiture des Beckham sort de l’entrée précédée de celles des gardes du corps.
C’est l’orgie de flashs, David Beckham fixe la route,
Victoria ne sourit pas, mais pose sa main sur la joue de son mari.
Les “pap’s” sont heureux, ils ont eu leur money shot.
C’est le temps d’aller tout déposer à l’agence.
– Samedi 18h… Mission: trouver Criss Angels, le magicien.
Hier soir, il a passé la nuit à l’hôtel avec Britney Spears.
Les traqueurs de stars se sont enflammés.
La grosse Rolls-Royce noire du magicien est garée dans la cour d’un studio d’enregistrement dans un quartier un peu ghetto de Los Angeles.
Normalement, les paparazzis ne sortent que très rarement des rues dorées de Beverly Hills.
On baisse la vitre et on salue trois recrues paparazzis de l’agence X17 en poste sur le trottoir.
Ils mangent des Oreo roses.
Criss Angels sort de son bunker et vient offrir des bouteilles d’eau aux photographes.
Il les prévient que ça sera long.
– 18h40… Il sort du studio.
Les paparazzis sautent en voiture et font demi-tour.
La Rolls-Royce nous attend, signifiant qu’il veut être suivi.
– 18h55… On aboutit sur l’autoroute.
Les voitures le suivent en forme de triangle, c’est stratégique.
«Quand on file une vedette, il y a des règles à suivre», nous indique Mathieu tout en fixant la bagnole des yeux, les mains crispées sur le volant.
La Rolls-Royce prend une sortie.
Mathieu avertit par talkie-walkie ceux qui le suivent.
– 19h20… On finit par comprendre qu’il retourne à Las Vegas !
C’est à 4 heures de route…
– 19h45… Retour à Hollywood.
Direction casa Britney, ColdWater Road, à Bel Air.
Elle habite un quartier grillagé avec gardiens à l’entrée.
Ses voisines s’appellent Jessica Simpson et Gwen Stefani.
On sait qu’elle n’est pas chez elle parce qu’il n’y a aucune voiture de chasseurs d’images garée devant.
– 20h… On change de poste, direction casa Paris Hilton.
Elle habite une maison dans les collines de Hollywood, la porte donne à même la rue.
Ce n’est plus un secret, tout le monde sait son adresse et les badauds font le poteau sur son perron à toute heure pour un autographe.
Mathieu nous montre son gros garage deux portes: «Elle l’a transformé en garde-robe et là, c’est son gym», dit-il.
L’acteur Owen Wilson a tenté de se suicider la nuit dernière (26 août 2007).
Les paparazzis ont campé devant le Cedar-Sinai, hôpital de Beverly Hills, jusqu’au petit matin.
Les camions satellites de ABC et CBS sont aussi présents.
Les gardes de sécurité forment un mur, les bras croisés devant la porte principale.
Leur chef se dirige vers les paparazzis brandissant des papiers.
«C’est une propriété privée, vous allez devoir partir», leur dit-il.
La tension monte.
«Freedom of press, le trottoir est un domaine public !» scandent les journalistes et les photographes.
C’est peine perdue, ils doivent se rabattre deux coins de rue plus loin.
Personne n’aura de photo de la star mal en point aujourd’hui.
Les paparazzis se rendent donc à Malibu pour essayer d’avoir une photo de son frère, Luke Wilson.
– 15h… On continue notre ronde.
On passe à côté du bureau de Brad Pitt, où il se rend normalement en moto.
On passe ensuite devant le salon Neil George, où toutes les stars de la trempe de Cameron Diaz confient leurs cheveux.
Quand une vedette s’y trouve, les rideaux sont baissés.
Pas aujourd’hui.
On passe ensuite devant le salon de bronzage Portofino, le long de la chic Rodeo Drive, c’est là où Paris Hilton a ses habitudes, avant de filer devant la synagogue où Madonna s’adonne à la kabbale.
– 21h… On manque Michael Jackson de peu.
La star est en ville, au Louis Vuitton, pour une séance de shopping solo.
Quand on arrive, il est déjà parti, mais le valet confirme qu’il était bien là.
On se dirige vers son hôtel, le très chic Peninsula, où débarque George Bush normalement.
La sécurité est serrée, des paparazzis se cachent dans leur voiture devant la porte.
– 21h 20… On rejoint Glen le paparazzi devant le resto “IL Sole“, un autre hot spot de vedettes, boulevard Sunset.
Un petit groupe de paparazzis attend tranquille.
De l’autre côté de la rue, Teri Hatcher foule le tapis rouge d’une autre soirée mondaine.
Les photographes hurlent comme si Jésus-Christ était en ville.
Sheryl Crow sort seule du restaurant.
Elle est aussitôt aveuglée par les flashs.
Elle en perd le nord.
«Que penses-tu du divorce de Britney ?» lui demande un paparazzi.
«That’s crazy guys», dit-elle avant de retourner dans le resto pour finalement s’enfuir par la porte arrière.
– 22H30… On poursuit la tournée avec Glen.
Devant le Koi, un resto japonais très prisé des vedettes (qui veulent se faire voir), se tient en permanence un groupe de 15 paparazzis.
Toujours les mêmes : deux gros vidéographes de l’agence TMZ et un paparazzi qui débarque avec son gros ghettoblaster, ça met de l’ambiance.
Il vend aussi toutes sortes de bébelles aux vedettes.
Une grosse jeep noire arrive.
Les “pap’s” braquent leur caméra sur la portière, c’est Nick Lachey qui en sort, main dans la main avec la bomba latina Vanessa Minillo.
Puis c’est au tour de Mike Tyson de sortir d’une grosse bagnole.
Malgré sa corpulence, les “pap’s” n’hésitent pas à le croquer de très près.
Le portier fonce dans le tas : «La prochaine fois que tu me pousses, je te pousse», lance un des paparazzis au portier.
– Minuit… Plus loin boulevard Sunset, les terrasses sont remplies.
On aperçoit quelques paparazzis qui se cachent parmi les voitures.
Qui attendent-ils ?
On repère Keanu Reeves assis à une table avec un homme.
Il tient une rose…
Dès qu’il se lève, les paparazzis se jettent sur lui et forment un cercle de flashs qui crépitent.
Un paparazzi fonce dans un poteau.
L’acteur marche vers sa voiture.
Il se cache avec sa main, on le sent agressé.
Les clients fixent la scène, dégoûtés.
Reeves se rend derrière le restaurant, tente de descendre un escalier, aveuglé par la lumière.
«Laissez-moi tranquille ! Je sais que c’est votre job, mais laissez-moi tranquille !» dit-il.
Les “pap’s” n’arrêteront pas tant qu’il ne sera pas parti.
Une des scènes les plus spectaculaires de cette incursion dans le monde des paparazzis demeure celle de Paris Hilton.
– 22h50 mercredi soir, devant le restaurant Mr Chow, un des plus chics de la ville, tout près de Rodeo Drive. Paris est à l’intérieur avec sa soeur, elle célèbre l’anniversaire d’un autre héritier, Brandon Davis.
Une trentaine de paparazzis forment un demi-cercle devant la porte.
À chaque personne qui sort, les «pap’s» pointent leur objectif comme des guns.
La tension monte.
Après des heures d’attente, une tête blonde platine fait son apparition dans le cadre de porte.
C’est l’explosion de flashs.
La folie.
On se croirait en plein jour.
Ça dure au moins deux minutes.
Paris reste la tête droite, sourit à peine.
“Où est ma Bentley ?“, dit-elle, aveuglée.
Elle se dirige vers sa voiture, les paparazzis forment un cercle autour d’elle.
Elle s’avance lentement, garde son calme, on dirait un robot programmé pour ce genre de situations chaotiques.
Les paparazzis se bousculent, se donnent des coups de coude, les iPod et les casquettes tombent sur le sol.
Le civisme s’est évaporé, c’est la loi de la jungle qui domine.
Paris réussit à s’asseoir dans sa décapotable.
Les «pap’s» entourent sa Bentley, égratignent sa carrosserie.
Les autres voitures klaxonnent.
Pure cacophonie.
Elle monte le volume de sa chaîne stéréo.
«Let her go !» crient certains paparazzis.
D’autres continuent de shooter dans le pare-brise.
Elle s’avance lentement.
Les paparazzis courent jusqu’à leur voiture pour la suivre jusque chez elle.
Les pneus crissent.
En route, ils continuent de la prendre en photo.
Les flashes sont aveuglants, c’est dangereux.
– Minuit : la même scène se répète un peu plus tard quand elle arrive au club “Les Deux” près du Kodak Theater.
Cette fois, c’est à bord d’un gros SUV avec chauffeur.
Elle semble avoir appris la leçon…
La voiture entre dans le stationnement entourée de flashs, comme si c’était une étoile filante.
Toute la foule de curieux fixe la porte.
«C’est Paris !» crient certains.
Elle descend, on lui ouvre un corridor, elle embrasse le portier et s’engouffre dans la fête.
Les clubs peuvent la payer de 20.000 $ à 200.000 $ pour venir dans leur établissement, ne serait-ce que 20 minutes.
Dire que c’est comme ça chaque jour.
Il est 1 h du matin à la sortie d’une boîte de nuit.
Pendant que les autres ados dorment, Austin et Blaine, eux, attendent toujours Paris Hilton.
À 14 et 15 ans, ce sont les plus jeunes paparazzis de Hollywood.
Jeunes mais riches.
Blaine, 15 ans, vient de s’acheter une Porsche 911 Turbo avec l’argent amassé avec ses photos de célébrités.
Il devra attendre un an avant de pouvoir la conduire…
On les rencontre près de Hollywood Blvd. dans le stationnement d’un des clubs les plus courus.
Vous n’avez pas d’école demain ?
“Non, on fait l’école à la maison”
Et vos parents savent que vous êtes ici ?
“Ils sont cool avec ça, on fait ça pour l’argent de poche“, dit Austin, le blondinet de 14 ans.
Austin Visschedyk et Blaine Hewison sont deux amis d’enfance qui ont grandi à Hollywood dans un milieu très aisé.
La mère de Blaine les dépose normalement à la porte des restaurants pour rejoindre les autres paparazzi, en Mercedes.
À cet instant une voiture de police passe, Blaine et Austin courent se cacher.
Le couvre-feu est dépassé.
En Californie, les mineurs n’ont pas le droit d’être seuls dans les rues après 22 h la semaine et minuit le week-end.
Tout a commencé il y a six mois, quand ils décident de troquer une console vidéo pour des caméras high tech.
Austin possède une Canon Mark III (6.000 $) à faire baver les autres photographes et sort son iPhone de sa poche toutes les deux minutes.
Dans la rue, ils brandissent leurs engins comme des joujoux, mitraillent de flashs leurs collègues paparazzis et se moquent de leur équipement dépassé.
Ils doivent prendre au moins 1.000 photos par soirée.
La plupart sont floues.
Pour l’instant, ils ne connaissent pas tellement les lois de la photo, mais règlent leur caméra en mode automatique.
Blaine est plus discret, tandis qu’Austin est hyperactif et baveux.
Il dégage une confiance fascinante pour un garçon de son âge.
Il aborde les stars sans gêne et parle un jargon ghetto avec les rappeurs qui entrent dans le club.
Mais sa préférée demeure Paris Hilton.
Elle fait justement son entrée.
Il repère avant tout le monde le gros SUV qui s’approche du club.
Austin se faufile entre les paparazzis et parvient à s’approcher très près de la star.
Elle le reconnaît et lui fait un petit signe de la main.
«On adore Paris, on est amis avec toutes les célébrités», disent-ils fièrement.
Il est 1h15, c’est le temps de rentrer, ils distribuent les Hi Five aux copains avant de s’engouffrer dans un taxi.
Pour voir leur travail, allez sur : Austinseye.com et sur : pintsizepaparazzi.com.
À Hollywood, le paparazzi, c’est un peu le meilleur ennemi de la star.
Leur collaboration est étroite.
Derrière les photos des revues à potins se trament plusieurs mises en scène, coups de pubs et règlements de comptes.
Dix ans après la mort de Diana, les paparazzis ont pris le contrôle d’Hollywood.
Mais les stars ne sont pas que des victimes.
«Tom Cruise, c’est le plus difficile à avoir, s’il ne veut pas être pris en photo, vous ne le verrez jamais, explique Gary Morgan de Splash News à Los Angeles. S’il est en mode promotion, vous allez le voir partout. Il contrôle tout. Les photos de lui sur la plage, ce sont toujours des set-ups.»
À l’opposé, il y a Britney Spears.
«Quand elle est dans un bon mood, elle s’arrête au Starbucks, achète des cafés à tous les paparazzis qui la suivent et leur indique tous les endroits où elle va aller aujourd’hui», poursuit-il.
La star mentionne aussi les endroits où elle veut qu’on la laisse en paix.
Et vous respectez son choix ?
«Na…», dit-il avec un sourire narquois.
«Les gens ne réalisent pas que beaucoup de ces photos sont mises en scène par les célébrités elles-mêmes. Les attachés de presse, les agents ou même les amis des stars nous appellent», explique Gary Morgan.
Mathieu Paré, paparazzi de 29 ans, raconte : «Beaucoup de publicitaires nous appellent pour avertir que leur client sera à telle place. C’est un échange. Ça, le monde ne le sait pas, mais il y a beaucoup de mises en scène. Quand on voit Britney, Lindsay et Paris ensemble, c’est un coup de pub arrangé.»
Il arrive aussi que des célébrités appellent les paparazzis pour nuire à d’autres célébrités ennemies.
«Un acteur dont je préfère taire le nom nous a avertis qu’un autre acteur venait d’atterrir en jet privé quelque part, il voulait juste qu’on gâche ses vacances !» confie Gary Morgan.
La nouvelle génération à Hollywood, comme Nicole Ritchie, Mischa Barton et Hayden Panettiere, est préparée mentalement et physiquement à affronter les paparazzis.
«Elles savent que ça va les aider dans leurs carrières et les propulser, tandis que l’ancienne génération, comme Julia Roberts, nous voit comme une menace», dit François Navarre d’X17.
Les jeunes stars savent tirer profit de cette horde de photographes qui diffusent leur vie en direct sur le Web.
«Lindsay Lohan, c’est déjà arrivé qu’elle demande à notre caméraman de s’approcher pour passer son message contre Paris Hilton. Dans combien de temps ça va être sur le website? a-t-elle demandé. On lui a dit dans 20 minutes, elle était ravie», raconte François Navarre de X17.
«Paris ne serait rien sans nous et elle le sait, elle joue avec les caméras», dit Alex Turner, paparazzi.
À Hollywood, on appelle ça l’industrie.
«Les photos de rues, maintenant, ça fait partie de l’industrie, nos clients, ce sont les mêmes qui font les films», soutient François Navarre, directeur d’agence.
On le surnomme Danny Boy, il est vidéopaparazzi pour l’agence X17.
C’est lui que Britney Spears a attaqué avec son parapluie devant la maison de son ex, Kevin Federline.
Ces images ont fait le tour du monde et ont rapporté 150.000 $ à X17.
Spears, le crâne fraîchement rasé, au sommet de son délire, tentait d’aller voir ses enfants.
Elle a menacé Danny et a frappé sa Jeep.
Il nous montre fièrement les marques comme des artefacts de grande valeur.
Il ouvre son coffre et extirpe le précieux parapluie vert du Bel Air Hotel.
L’arme du crime !
Il a bien fait de le garder, même si le manche est tout démantibulé.
Il y a quelques semaines, il l’a mis aux enchères sur eBay, juste pour voir.
“L’offre est à 34.000 $ US !” dit-il.
Et tu vas le vendre ?
“Je ne sais pas encore, Britney a accepté de me le signer, ça va faire augmenter le prix“, dit-il.
Elle t’a frappé et maintenant, elle veut t’aider ?
“Oui, elle s’est excusée dans une lettre qu’elle m’a remise“, dit le paparazzi qui veut devenir acteur.
Danny, 40 ans, a des anecdotes avec chaque vedette.
Il s’entend très bien avec Tom Cruise, ce dernier lui a d’ailleurs demandé de lui graver un DVD du but marqué par sa fille au soccer.
Danny a fait un joli montage avec générique et musique.
“Tom m’a remercié et m’a dit que ça faisait maintenant partie de leurs souvenirs de famille“, raconte Danny, fier comme un paon.
Et Paris Hilton ?
“Je ne l’aime pas.”
L’an dernier, il l’a filmée à son insu en pleine discussion téléphonique, la tête sortie d’une limousine Hummer.
“Paris pleure et insulte tous ses amis. Elle parle à son petit ami grec, Stavros, qui se trouve en ce moment dans une chambre d’hôtel avec Lindsay Lohan, je ne l’avais jamais vue dans un tel état, ce n’était pas la Paris que je connais“, dit-il.
Derrière sa caméra, Danny jubile, ce qu’il voit devant lui peut rapporter 500.000 $.
Au dernier moment, elle l’aperçoit, prend son plus beau sourire et lui dit de venir filmer l’intérieur de la limousine.
Il s’avance.
Au même moment, elle agrippe la caméra.
Les deux tirent chacun de son côté.
Les autres paparazzis accourent,
Nicky Hilton est affolée de voir sa soeur si déchaînée.
“Paris m’a fixé dans les yeux en m’ordonnant avec une voix d’homme de lui donner le tape. Je n’ai pas eu le choix“, dit Danny, encore traumatisé.
Un demi-million de dollars venait de s’envoler en fumée.
Son patron n’allait pas être content du tout…
Jody, mi-trentaine, le look un peu tomboy, est une des seules paparazzis femmes du métier.
Ça bouscule fort quand une vedette sort d’un établissement.
“Au début, c’est difficile de se faire accepter en tant que femme, mais aujourd’hui ça va“, dit-elle.
Avant, elle était fan et campait devant les restaurants et les tapis rouges à la recherche d’autographes.
Elle est ensuite devenue paparazzi, elle fait de 5.000 $ à 10.000 $ US par mois.
Elle fait ça tous les soirs après le travail.
Elle est fière de la photo prise de Brad et Angelina dans un musée.
“J’étais là par hasard !” dit-elle.
Henry Trappler est le pionnier des vidéopaparazzis.
Ça fait 13 ans qu’il est à la sortie des restaurants de Beverly Hills chaque soir.
“Il m’a appris comment filmer, c’est mon mentor“, dit un jeune collègue.
Avec ses lunettes et son ventre rond, il a plus l’air d’une proie que d’un prédateur.
Il parle tout bas et se fond dans le décor.
C’est lui que Tommy Lee a agressé en 1996 à la sortie d’un club.
Le rockeur l’a poussé au sol.
Henry a été hospitalisé pendant quatre jours pour une blessure au pelvis.
Lee a dû lui payer 17.500 $ en dommages, en plus de subir 250 heures de travaux communautaires et deux ans de probation.
Michel Boutefeu est paparazzi freelance à Los Angeles depuis cinq ans.
Il fait partie de la vieille école, celle des paparazzis qui respectent les vedettes.
Il n’hésite pas à aller sonner chez Ben Affleck ou Marcia Cross pour leur remettre des photos en main propre.
Il a toujours dans sa poche une caméra espion, au cas où il devrait faire des photos dans une boutique.
Son meilleur coup ?
“Une photo de Jennifer Aniston qui se fait refaire le nez, ça m’a rapporté 67.000 $ US, et une autre de Brad Pitt qui faisait du Kart sur deux roues.”
Combien ?
“45.000 $.”
Et le métier vous plaît ?
“Non, je n’aime pas faire ça, à cause des amateurs, ce n’est plus respectueux.”
Glen, 32 ans, est un ancien bodyguard de célébrités reconverti en vidéopaparazzi.
C’est probablement le plus calme du métier.
Physiquement, on dirait la copie conforme du rappeur Eminem.
Glen a fait le saut dans le métier pour le cash.
Il a tous les contacts à la porte des boîtes de nuit, c’est lui qui les a engagés !
Ces derniers lui envoient des messages textes des vedettes attendues ce soir-là.
Résultat : il a constamment le nez dans son écran de cellulaire.
Son meilleur scoop ?
La vidéo de l’accident de voiture de Lindsay Lohan avant qu’elle soit arrêtée pour conduite avec facultés affaiblies.
Prix de vente: 60.000 $ US.
La Mercedes blanche aux vitres teintées file à 140 km/h sur l’autoroute, en plein trafic.
Quinze VUS la suivent de près, se collent aux parechocs et brûlent les feux rouges pour ne pas perdre sa trace.
C’est Team Britney qui suit sa cible.
Team Britney désigne le groupe de paparazzis qui suivent la chanteuse.
Ils sont les plus déchaînés et redoutés du milieu.
Britney Spears reste à l’heure actuelle la star la plus photographiée à Hollywood.
Elle est suivie constamment par un cortège de 15 voitures, à faire pâlir un homme d’État.
Qu’elle aille au Starbucks ou au salon de bronzage, elle est pourchassée, nuit et jour.
Les membres de Team Britney travaillent pour plusieurs agences, certains travaillent en équipe et communiquent par walkie-talkie.
Leur vie bat au rythme de celle de la star, qui leur rapporte en moyenne 20.000 $ US par mois.
«Si elle déménageait dans l’Utah, il y en aurait au moins six d’entre eux qui partiraient habiter là-bas», indique Mathieu Paré, paparazzi.
L’agence X17, qu’on dit «spécialiste» de Britney, a une équipe d’une dizaine de paparazzis affectés exclusivement à la chanteuse.
Une autre suit son ex, Kevin Federline.
Le prix des photos a monté depuis qu’elle s’est rasé la tête et que la garde de ses enfants est devant la justice.
À titre d’exemple, les photos où on la voit avec le rasoir ont rapporté 250.000 $ US à X17.
Pas étonnant qu’ils réservent un traitement royal à la star sur leur site Internet (X17online.com).
Les commentaires sous les photos sont toujours très flatteurs.
Ils s’assurent ainsi une collaboration de Spears.
On y voit d’ailleurs des vidéos d’elle s’exclamant : “I love X17“.
Dans le métier, on se méfie de Team Britney, nous ont confié plusieurs paparazzis.
Certains renoncent d’ailleurs à traquer la star parce que l’ambiance est trop tendue.
Ça prend des nerfs solides pour suivre une star aussi imprévisible.
Ce sont des durs à cuire, des mecs baraqués qui ne sourient jamais, des Latinos pour la plupart, qui roulent en Mercedes et en gros SUV noirs.
«C’est affreux de voir le convoi qui suit Britney, ça brûle les rouges, c’est l’horreur», dit Michel Boutefou, paparazzi professionnel.
Il appelle ce genre de paparazzis les rats.
Ils agissent comme si Britney était leur domaine protégé.
Ne s’approche pas de la star qui veut.
C’est leur gagne-pain et ils la pourchassent en même temps qu’ils la protègent.
Quand la star tombe en panne sèche en plein boulevard, ils courent à sa rescousse pour lui apporter un bidon d’essence.
Ils lui ouvrent souvent la portière et l’attendent même à la porte des toilettes publiques.
D’autres photographes et journalistes ont essayé, à plusieurs reprises, de rentrer dans leur cercle.
«Get the f… out of here», ont-ils lancé.
UN ÉPISODE DANS LA VIE DE BRITNEY SPEARS
– 10h… Team Britney arrive sur ColdWater Road dans les collines de Bel Air.
Une dizaine, parfois 20 voitures, se garent en bordure de la route étroite.
Ils fixent en permanence la grille qui clôture son quartier pour ne pas la manquer.
Pas facile parce qu’elle change aussi souvent de bagnole que de couleur de cheveu.
– 12h… Ils attendent toujours.
Le soleil est cuisant.
Team Britney connaît la routine de la star par coeur.
Normalement, elle ne sort pas de chez elle avant 16 h.
– 17h15… Les voitures démarrent en trombe, certains font des virages à 180 degrés, les pneus crissent.
La Mercedes blanche vient de sortir.
À son bord, Spears qui conduit, ses deux enfants derrière et son bodyguard à ses côtés.
– 17h30… Les paparazzis font du slalom à toute vitesse dans les routes sinueuses des collines.
Ils brûlent les feux rouges pour ne pas la perdre.
– 17h45… Sur l’autoroute, Spears file à 140 km/h, même si ses deux enfants sont sur la banquette arrière.
Les paparazzis traversent les doubles lignes jaunes.
Certains roulent sur l’accotement dans des nuages de poussière.
Ils n’aiment pas que je les suive et essaient de me tasser dangereusement en me criant des insultes.
Ils pensent que je veux voler leurs photos.
– 18h… La star fait 20 km, pour finalement revenir sur ses pas.
Son cortège coupe les autres voitures pour accéder à la bretelle de sortie.
Retour à Beverly Hills.
Elle s’arrête au Starbucks, son bodyguard descend.
Elle attend dans la voiture, les paparazzis l’entourent.
Les piétons crient et se demandent ce qui se passe.
«Il y a des règles, on ne shoote pas quand les enfants sont dans la voiture», gueule l’un d’eux.
Ce n’est pas vrai du tout, puisque plusieurs s’exécutent.
– 18h30… Spears retourne finalement chez elle.
Team Britney retourne à son poste.
Tout ça pour un café.
Et dire que c’est comme ça chaque jour.
«J’ai de plus en plus de clients qui ne peuvent plus vivre leur vie en sécurité à cause des paparazzis. Ils ont dû déménager avec leur famille loin de Los Angeles parce qu’ils ont peur.»
Blair Berk, avocate de célébrités, comme Britney Spears, Lindsay Lohan et Cameron Diaz, est catégorique : «La police doit être plus agressive. Les paparazzis ne suivent plus les règles, il y a une hausse dans l’agressivité et dans la tendance à commettre un crime pour avoir la money shot», dit-elle en entrevue.
Les enfants de Reese Witherspoon, une de ses clientes, ont été attaqués par un paparazzi en 2005, pour une photo.
Elliot Mintz, attaché de presse de Paris Hilton, croit aussi que la police doit être plus présente.
«Poursuivre une voiture de star est illégal. Ils devraient recevoir des tickets et être arrêtés», dit-il.
Et que fait la police ?
«On peut seulement agir quand on est témoin d’une scène de violation du code la route», répond l’officier Karen Smith du LAPD.
D’autres croient qu’il faudrait renforcer la loi «anti-paparazzis» pour freiner le phénomène.
«Cette industrie est pleine de pommes pourries, il faudrait un autre amendement, ce n’est pas suffisant», croit Richard Walton, avocat de célébrités à Hollywood.
Valets de stationnement, chauffeurs de limousine, itinérants, ados de 14 ans, les nouveaux paparazzis ne sont plus nécessairement photographes de métier.
«Le problème sur le terrain, c’est qu’il y a beaucoup de faux photographes, déplore Gary Morgan, directeur de l’agence Splash News. Certains sont membres de gangs de rue, d’autres fument du pot dans leur voiture en attendant. C’est normal qu’il y ait de plus en plus de batailles.»
C’est devenu très facile d’être paparazzi à Hollywood depuis l’apparition des agences et des caméras numériques.
«On est plus détective que photographe. Ça prend des contacts avant tout, plus que du talent», confie Louis, un chauffeur de limousine reconverti en paparazzi.
On le rencontre en pleine rue pendant qu’il attend le magicien Criss Angels.
Il travaille en équipe avec Mike, ex-agent d’immeubles et Leo, livreur.
Pourquoi avoir changé de profession ?
Parce qu’ils peuvent gagner 10.000 $US par mois.
C’est l’agence X17, reconnue pour engager des débutants, qui est en partie responsable de cette nouvelle vague de paparazzis.
Danny, 40 ans, est de ceux-là.
Avant d’être vidéographe pour l’agence X17, il travaillait comme valet de parking.
Son atout : avoir des tas de contacts dans les restaurants.
«Beaucoup n’ont jamais fait de photos, mais ont de l’info, comme ce vétéran de la guerre du Vietnam qui était mendiant», explique François Navarre, directeur de X17.
«Il nous appelait tous les jours pour nous donner des renseignements. Un jour, je lui ai passé une caméra, je lui ai dit Au lieu de nous appeler, fais les photos. Maintenant, il a une voiture et un appartement.»
Les méthodes d’embauche d’X17 ne font pas le plaisir de tous.
«C’est eux le problème, ce sont des amateurs qui sautent devant les vedettes avec leur flash à deux centimètres de leur face, dénonce Alex Turner, 32 ans, paparazzi et photographe de métier. Ils ruinent le business. Il y a beaucoup d’immigrants illégaux là-dedans qui se font payer sous la table.»
Gary Morgan, directeur de l’agence Splash News, poursuit : «Dans le temps, on restait dans notre auto, on shootait à travers la vitre. Maintenant, ce sont tous ces nouveaux photographes inexpérimentés qui causent des problèmes, ils ne connaissent pas les lois et repoussent les limites chaque fois. Les autres n’ont pas le choix de suivre.»
Les bodyguards de vedettes, eux, doivent concilier avec les nouveaux «cow-boys» de la profession.
«C’est rough avec certains paparazzis, surtout les nouveaux, qui se bousculent beaucoup plus. C’est comme ça tous les jours, parfois ils sont 56 à attendre Nicole», confie un des gardes du corps de Nicole Ritchie, rencontré à la sortie d’un restaurant.
Voici quelques cas célèbres d’altercations.
1998 Deux paparazzis ont été emprisonnés pour avoir coincé l’acteur Arnold Schwarzenegger, sa femme Maria Shriver et leur fils à la sortie de l’école avec leurs voitures, à Los Angeles.
Le couple a cru à un rapt d’enfant.
Cet incident a mené à la loi “anti-paparazzis” en Californie.
1999 François Navarre, directeur de l’agence X17, a payé Jennifer Aniston 550.000 $ en dommages.
Il avait pris une photo d’elle seins nus lorsqu’elle se faisait bronzer dans sa cour.
La photo violait la propriété privée.
Avril 2005 Le paparazzi Todd Wallace a été accusé d’avoir usé de la force pour prendre des photos des enfants de Reese Witherspoon dans un parc thématique.
Pour d’autres infractions aussi commises, Wallace n’a pas le droit de s’approcher de certaines boutiques à Hollywood.
Mai 2005 La camionnette du paparazzi Galo Ramirez de l’agence Fame a foncé dans la Mercedes-Benz de Lindsay Lohan, qui tentait de fuir les paparazzis en faisant demi-tour.
Ramirez a été arrêté et accusé pour assaut.
Août 2005 L’actrice Scarlett Johansson accuse un paparazzi de l’agence JFX pour une collision survenue dans le stationnement de Disneyland en Californie.
Octobre 2006 John Rutter, un paparazzi américain, a été condamné à 44 mois de prison en Californie pour avoir fait chanter l’actrice américaine Cameron Diaz.
Le photographe la menaçait de publier des photos d’elle totalement nue.
Août 2007 L’acteur Jude Law a attaqué un paparazzi posté devant chez lui à Londres.
Ce dernier s’est retrouvé à l’hôpital.
Jude Law a été interrogé au poste de police, puis relâché.
Il doit se représenter devant les autorités en octobre.
Devenir paparazzi, ça rapporte
1.000.000 $ US: Vidéo du corps d’Anna Nicole Smith sur une civière.
“La vidéo de paparazzi la plus chère jamais vendue“, dit Gary Morgan, directeur de Splash News, février 2007.
250.000 $ US: Michael Jackson qui se rend à la police à la sortie de son jet en Californie (suspecté d’abus d’enfants), novembre 2003.
L’ABC du paparazzi
– Le terme paparazzo a été inventé par le cinéaste Federico Fellini dans Dolce Vita en 1959.
Il désignait un personnage toujours en quête de photos de vedettes.
– Un bon paparazzi qui travaille pour une agence gagne en moyenne 15.000 $ par mois.
S’ils ont des scoops, ils touchent des bonis pouvant atteindre 30.000 $.
Une photo de paparazzi peut rapporter de 250$ à 500.000 $.
– On compte six grandes agences de paparazzis à Los Angeles : Splash News, Fame, GFX, X17, Bauer-Griffin et TMZ.
Elles engagent en moyenne une centaine de paparazzis.
Certaines agences roulent sur l’or, avec un chiffre d’affaire de 20.000.000 $ US.
– La loi “anti-paparazzis” a fait son entrée en 1998 en Californie.
Elle stipule qu’un photographe ne peut violer la propriété privée pour prendre une photo de star.
– En 2005,Arnold Schwarzenegger, alors gouverneur, a fait amender la loi “anti-paparazzis” pour la rendre plus sévère.
Grâce à la proposition 381, il est plus facile pour les stars de réclamer de gros dommages aux agences qui engagent les paparazzis fautifs.