Si vous regardez dans l’abysse, l’abysse vous regarde en retour…
Je suis trop riche, riche en choses grandes et formidables, les plus laides et les plus innommables !
A grand peine j’ai échappé à la cohue des miséricordieux, afin de trouver le seul qui, entre tous, enseigne aujourd’hui que la compassion est importune, que ce soit la pitié d’un Dieu ou la pitié des hommes : la compassion est une offense à la pudeur… et le refus d’aider peut être plus noble que cette vertu trop empressée à secourir.
Mais c’est cette vertu que les petites gens tiennent aujourd’hui pour la vertu par excellence, la compassion : ils n’ont point de respect de la grande infortune, de la grande laideur, de la grande difformité.
Mon regard passe au-dessus de tous ceux-là, comme le regard du chien domine les dos des grouillants troupeaux de brebis.
Ce sont des êtres petits, gris et laineux, pleins de bonne volonté et d’esprit moutonnier.
Comme un héron qui, la tête rejetée en arrière, fait planer avec mépris son regard sur de plats marécages : ainsi je jette un coup d’œil dédaigneux sur le gris fourmillement des petites vagues, des petites volontés et des petites âmes.
Trop longtemps on leur a donné raison, à ces petites gens : et c’est ainsi que l’on a fini par leur donner la puissance, maintenant ils enseignent : Rien n’est bon que ce que les petites gens appellent bon et ce que l’on nomme aujourd’hui vérité.
C’est ce qui est cause que depuis longtemps déjà les petites gens se dressent sur leurs ergots.
C’est de la compassion que s’élève un grand nuage, prenez garde, ô humains : Tous les créateurs sont durs, tout grand amour est supérieur à sa pitié.
Mais toi-même garde-toi de ta propre pitié, les profondeurs et les abîmes de l’homme, toutes ses hontes et ses laideurs cachées.
La pitié ne connaît pas de pudeur: elle fouille les replis les plus immondes des êtres.
Ma caverne est grande et profonde et elle a beaucoup de recoins ; le plus caché y trouve sa cachette… et près de là il y a cent crevasses et cent réduits pour les animaux qui rampent, qui voltigent et qui sautent.
O banni qui t’es bannis toi-même, tu ne veux plus vivre au milieu des hommes et de la pitié des hommes ?
Eh bien ! fais comme moi ! Ainsi tu apprendras aussi de moi ; seul celui qui agit apprend.
Commence tout d’abord par t’entretenir avec les animaux !
L’animal le plus fier et l’animal le plus rusé qu’ils soient les véritables conseillers !
Comme l’homme est misérable, comme il est laid, gonflé de fiel et plein de honte cachée !
On me dit que l’homme s’aime soi-même : hélas, combien de mépris n’a-t-il pas à vaincre ?
La pensée de Friedrich Nietzsche a questionné de nombreux champs de la philosophie et la plupart des valeurs associées à nos sociétés contemporaines.
Il y a 173 ans, naissait le philosophe allemand… en 2017 les questions soulevées par son œuvre philosophique restent très actuelles.
Refusant la transcendance divine, le monde métaphysique, il s’est intéressé aux raisons qui poussent les individus à agir comme ils le font et à croire ce qu’ils veulent croire.
Dans sa vision nihiliste, il a notamment fustigé l’idéalisme et questionné la notion de morale, revendiquant une approche relativiste de concepts érigés en règles absolues.
La morale n’est qu’une interprétation – ou plus exactement une fausse interprétation – de certains phénomènes…
Ce qu’il y a d’essentiel et d’inappréciable dans toute la morale, c’est qu’elle est une contrainte prolongée…
Les vérités sont des illusions dont on a oublié qu’elles le sont…
Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereux que les mensonges…
L’homme a besoin de ce qu’il y a de pire en lui s’il veut parvenir à ce qu’il a de meilleur…
On n’attaque pas seulement pour faire du mal à quelqu’un mais peut-être aussi pour le seul plaisir de prendre conscience de sa force…
Ce qu’on fait par amour l’est toujours par-delà le bien et le mal…
Il y a toujours un peu de folie dans l’amour mais il y a toujours un peu de raison dans la folie…
L’amour ne veut pas la durée, il veut l’instant et l’éternité…
A certains hommes tu ne dois pas donner la main, mais seulement la patte. Et je veux que ta patte ait aussi des griffes…
Souviens-toi d’oublier…
L’homme a besoin de ce qu’il y a de pire en lui s’il veut parvenir à ce qu’il a de meilleur…
Il faut avoir une musique en soi pour faire danser le monde…
Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereux que les mensonges…
L’art nous est donné pour nous empêcher de mourir de la vérité…
L’avantage de la mauvaise mémoire est qu’on jouit plusieurs fois des mêmes choses pour la première fois…
Souffrir de la solitude, mauvais signe : je n’ai jamais souffert que de la multitude…
Beaucoup parler de soi peut aussi être un moyen de se cacher…
Créer, c’est la grande délivrance de la douleur et l’allègement de la vie…
Dieu aussi a son enfer : c’est son amour des hommes…
Ceux qui dansent sont considérés comme fous par ceux qui ne peuvent entendre la musique…
On est comédien lorsque l’on a sur le reste de l’humanité un avantage: c’est de s’être rendu compte que ce qui doit produire une impression de vérité ne doit pas être vrai…
Mieux vaut ne rien savoir que beaucoup savoir à moitié…
Quand on vit seul, on ne parle pas trop fort, on n’écrit pas trop fort non plus : car on craint la résonance du vide…
Les hommes se pressent vers la lumière, non pour mieux voir, mais pour mieux briller…
La fatigue est le plus court chemin vers l’égalité, vers la fraternité. Et durant le sommeil s’ajoute la liberté…
À chaque âme appartient un autre monde ; pour chaque âme chaque autre âme est un arrière-monde…
Le remords est comme la morsure du chien sur la pierre : une bêtise…
Bienheureux sont les ensommeillés : car ils s’assoupiront bientôt…
Le philosophe se reconnaît à ce qu’il évite trois choses qui brillent et font du bruit : la gloire, les princes et les femmes : ce qui ne veut pas dire qu’elles ne viennent pas à lui…
A lire ou relire…