Y a d’la joie…
Chaque fois que je me réveille, il y a un cauchemar qui se met en route : comme à son habitude Scarface nous réveille tous en chœur, sans cœur, l’un après l’autre, comme une vrille qui écrase ses noix.
Le soleil fainéant refuse de nous darder de ses purs rayons, il se cache derrière une muraille de pierres âcres, nous sommes l’ombre de notre ombre, rien de plus, rien de moins, un numéro de chambre, un numéro de dossier médical, un simple numéro.
Je suis là parce que j’ai écrit un livre…
On m’a traité de fou.
Un matin, “on” est venu me chercher, un gars en blouse blanche m’a dit que j’étais fou d’avoir écrit ce livre, il en a fait rapport.
Un juge après l’avoir lu a confirmé que j’étais fou furieux, c’est pire…
On a hésité entre Guantanamo et ailleurs.
On m’a amené ici.
Ça fait vingt ans.
Hier j’ai réussi à voler un crayon de couleur et un cahier à colorier.
J’ai résolu d’écrire exactement le déroulement d’une journée.
J’ai pris celle-ci au hasard, de toute façon ce sont toutes les mêmes.
Si vous lisez ces lignes, venez me chercher, c’est facile, c’est une grande forteresse, avec des grands murs gris, le ciel est gris lui aussi, de temps en temps des corbeaux traversent le ciel.
C’est là.
Maintenant que j’écris, j’ai de l’espoir.
Voilà, j’écris… :
L’heure c’est l’heure et la routine de plus belle chaque matin, un Scarface monstrueux de sa somnolence effectue son tour de garde et en tant que garde, nous allume au petit matin comme de faibles bougies ; illuminés dans notre ténébreuse chambre, nous émergeons à peine de notre dernier refuge, le lit. Cédant d’un bras de colère, lancinant mais juste, la porte s’ouvre, un sourire cannibale apparaît : “Il est temps messieurs, il est l’heure messieurs“, on se lève, rien ne résiste à l’irrésistible rappel au jour ; chaque jour est plus fatidique, mon corps endormi crée la surprise à mon esprit éveillé, nous nous remettons difficilement de nos émotions, celles-ci vont à la panique, un jour de plus, un jour de trop, l’horreur est là, sans effort, omniprésente, étouffante ; le couloir est prêt, les portes les unes après les autres s’entrebâillent, les visages grimacent, se croisent et se décroisent, aucun ne se fixe, ils ont tous envie de s’ignorer, seulement concentrés sur leur misère : misère solitaire, dégoûtés, écartelés, chacun s’achemine dans son trou, les douches ne sont pas loin.
En route pour l’étalage de viande : les douchards fous répondent tous présents.
Tout le monde à poil devant l’autre monde.
En présence insistante et insistée des infirmières, tout le monde tout nu, en avant pour le grand chambardement et le bandage est de rigueur pour faire plaisir à ces dames.
D’ailleurs, à propos de bander, le bandard fou est-il présent ?
Eh bien oui, les petits, les longs, les maigres, les obèses, les surdéveloppés, les sous-développés, les laids, les beaux, les adonis, tout le monde vous dis-je, les gentils, les méchants, les psychotiques, les jaunes, les blancs, les noirs, black is beautiful, tous bandent, certains se branlent….
A propos de beauté : c’est Katrin, la cinquantaine bien sonnée qui une fois ; plusieurs fois même, me tapote les fesses, puis le sexe, palpant les couilles, en me disant bien clairement, droit dans les yeux : on ne résiste pas à ça, hein Monsieur…
Et la tendresse, bordel, dans ce chaos chaotique de nus dénudés ; c’est un véritable bordel de désir voyeuriste où chaque infirmière se rince l’œil.
Voyou sans voyelle, tout le monde en profite.
En particulier l’infirmière en chef Katrin la vicieuse, point à la ligne.
Tout le monde descend !
En fait, tout le monde se rhabille serrés en petits oignons, en oignons que nous sommes véritablement.
Sortie jardins, que non, sortie salle-à-manger pour un infect déjeuner composé d’infectes tartines avec un infect sirop, et du très, très bon mauvais café.
Tout cela servi sur une table roulante par un Scarface servant de garçon râleur.
La tête dans un nid de coucou, la gueule ouverte, les oisillons coincés dans leur cage, engloutissent l’infect de l’infect à la vitesse d’un éclair au chocolat sans chocolat ni pâte.
La gourmandise est une bonne maladie, soyez donc bon avec les malades mentaux !
Le petit, tout petit déjeuner est terminé, tout est bon quand on a faim.
Les mâchoires se referment.
Les caresseurs de nombrils peuvent commencer très tôt le matin, je veux dire de grand matin, leur délires affectivo-délirants.
Après le petit déjeuner avalé englouti, la cage se referme sur nous et pour être certain qu’elle est fermée, on l’enterre sous une chape de plomb.
Les serrures sans sourire clignent de l’œil, le délire barbaro-merdique commence.
“Alain Delon et Mireille Darc sont à eux seuls deux la sainte trinité du capitalisme sauvage. Ils sont époux sans poux et mon ventre me dit qu’ils sont les deux mamelles du destin. Je les aime. Ils sont beaux, talentueux“, me dit un hirsute en se branlant.
On le surnomme Nougat, on n’en sait pas plus que ce qu’il dit, pareil depuis des semaines, des mois, des années… une vie à se souvenir !
C’est le plus délirant de tous, parfois il entre littéralement en larmes en racontant en boucle l’amour esseulé qu’il vouait à sa Julie : “Une merveille de tendresse, et d’une bonté infinie“…
Sans nul doute faisait-elle partie de la liste de Schindler, exponentiel 10, sans point de retour !…
“Je suis amoureux d’elle depuis l’âge de 20 ans …, 20 ans c’est l’âge où je me suis fait interner pour la première fois et aujourd’hui j’ai 61 ans… Julie était sensible à mon appel et disait qu’on allait se marier. Pour se venger de sa peine lacrymale son père l’a envoyée voir intimement un ami docteur gynécologue qui a décidé que son j’étais fou. Les gendarmes sont venus me chercher avec le curé et un ministre, tout le monde a décrété que j’étais fou pour le fils d’un mineur d’engrosser la fille d’un sénateur, je me suis retrouvé interné à vie !”.
Un glandouillage intégral, intégré à une chronicisation stérile typique des années soixante.
On l’a oublié, et il en est devenu fou, pire que la prison à vie.
A coté de Nougat, se tient Kosovo, un grand black muslman.
Kosovo s’assume, une fois, deux fois, dix fois par jour si Dieu le veut Allaaaaah akkkk barrrr s’il le faut, l’Islam s’étripe et Kosovo le grand, s’extirpe de son sommeil somniféerique.
La paix s’éclate en mille morceaux.
Le Coran est grand et incréé et Mohamed est son prophète.
Kosovo ouvre les grandes portes du djihad islamique tandis que la sœur sourire infirmière ferme petit à petit les fenêtres.
Les musulmans s’étripent, et Kosovo du haut de sa tour d’ivoire, appelle les fidèles à la prière.
Les carpettes peinent à la tâche mais suffisent au grand désir mégalomaniaque de Kosovo le prophète, on prie, donc on respire et le grand souffle passe comme trépasse l’ange qui passe.
La prière terminée, le quartier général de guerre s’organise.
“Et si on faisait la guerre sainte ?” dit-il dans son verbe impétueux et intarissable…
Scarface qui n’aime pas les musulmans cesse le jeu des grands guerriers de l’espoir en chantonnant sa chansonnette offensive : “mon pyjama et moi“, l’air ne fait pas la chanson et l’embrumée armée jusqu’aux dents s’étiole dans la clarté pâlissante du jour qui n’en finit pas de se lever.
Arrive la grosse vaisselle, grosse embrouille avec Kosovo le prophète, celui-ci s’emmêle les pinceaux et fredonne un marché minable avec Nougat…
“Ecoute, je suis prêt à partir de pied en cap pour le Kosovo si Dieu le veut, mais la vaisselle je ne la ferai pas. Prends ma place, je suis un lâche de la vaisselle, je déserte et je te branle en échange“…
Et une tournée vaisselle pour le minable parmi les minables.
Et une branlette aussi !
Venons-en à ce cher François Ier d’Angleterre, le plus médiocre des fous de hôpital, le plus médiocre des médiocres, concentré de merde ambulant, médiocrate surtitré et argenté, François Ier racole de téléportation en téléportation, depuis une vieille génération de vingt-cinq ans, il philosophe prétend-t-il, en fait, grand dévoreur de livres devant l’éternel, l’éternel le lui rend bien ; il est inspiré par son ami François Ier !
Voilà ce qu’il prétend haut et fort !
Entre l’inconnu et le connu, il n’y a pas de frontière.
S’il n’y a pas de frontière, c’est qu’il y en a une.
Enfoiré de merde, merci pour l’ambivalence.
François Ier, à longueur de vie, hante, racole à qui veut l’entendre, sa philosophie de pacotille, mais personne n’est dupe alors il parle tout seul, et un homme seul a toujours, raison !
François Ier, pour bien faire, fait parfois médiocrement la manche, mais il est trop riche pour ce tour-là, alors, il rentre sagement, bredouille de son bonnet éternellement coiffé, de son couvre-chef…
François Ier est barbu, une barbe hirsute, et avale dans sa gueule d’hirsute, une médiocre cigarette qu’il coiffe d’un fumet de cancer des poumons, car il tousse, François Ier, il tousse comme un beau diable, d’ailleurs diabolique ne l’est-il pas ?
Le conseilleur, n’est pas le payeur, la critique est aisée, l’art est difficile.
François le Ier pourri, consume ses cigarettes, comme il consume la société, dont il profite allègrement.
Un jour, il toussait sans conscience et sans retenue, ça m’agaçait, j’ai voulu lui donner une leçon, et c’est lui qui me répliqua “MERDE“, en m’infligeant deux magistrals et forts coups de poing à la figure : le mouton trompeur avait encore un cœur de lion.
Avec tout l’argent, qu’il avait avant que sa fille ne le fasse déclarer fou pour capter prématurément ses biens, il aurait pu s’offrir le monde et donner l’univers à sa fille.
Mais voilà, il préférait dormir sur son tas d’or, rapiat, sans dépenser une miette, toujours garder, tout, même sa pisse, ses merdes, dans des bocaux qu’il admirait…
Et toujours, à sa fille promettre, François Ier de le promettre : la semaine des quatre jeudis il lui donnerait 100 Francs…
Enfin, quand le soleil se couche, c’est l’heure du vieux-Gilbert, qui avant de s’étaler, n’arrête pas, de caresser le sommet de son crâne hirsute, pour calmer une tempête intérieure… : “Apocalypse Now, Colonel Kurt, a vos ordres…” crie t’il !
C’est un pulsionneur de pulsions de mort, un ex-adjudant-chef de gendarmerie, parait-il le seul qui a découvert qui étaient les tueurs du Brabant Wallon…
Cela l’aurait rendu fou, c’est la version officielle.
Ses dents remplies de chicots l’empêchent de se tartiner les croûtes.
“La société est pourrie, mais le Docteur est le plus pourri d’entre-tous“, dit-il sans cesse, 240 fois par heure, si pas plus.
Le docteur Peutin, lorsqu’il passe, en arrivant dans ce service, s’entend dire par François Ier le malheureux, comme à son habitude : “Point de non retour Dr Peutin. Point de non-retour. Philosophons toujours, il n’en restera de toute façon rien du tout, ashes to ashes, François Ier vous souhaite une bonne nuit“.
Et voici Ivan le Terrible, le pédo, qui fait du pédo comme d’autres bien connus philosophent.
Car la philo du pédo, c’était de s’enfiler (pour ne pas dire s’enculer !) six petites jeunes filles, vierges si possible, à dévierger si ceci n’est pas impossible.
Et de plus, Ivan le pédo, ventouse de sa bouche immonde (car il est immonde de la tête aux pieds) d’un atroce baiser sur la joue immaculée de salive d’immonde, immondice parmi les immondes, Ivan le pédo courtise tout le monde de ses “bonjour” et “au revoir“, l’un lui serrant la main, l’autre lui rendant un bisou ventouse…
Ivan le terrible, pédo, s’assure ainsi qu’il ne sera jamais abandonné par ses compagnons d’infortune qui embarquent avec lui dans la barque du pauvre petit grand pécheur qu’il est en finalité.
Car en plus, il se présente de bourreau à victime, victime du système carcéral dont il s’innocente déjà depuis plusieurs années.
“Victime du système“, dit-il en sortant entre deux immondes plaisanteries dont il a, en tant que pédo, le grand secret.
Il se déclare innocente victime du système : “Quand je pense qu’il y en a qui ont fait plus grave que moi, et qui sont libérés avant moi“, car Calimero et pédo rythment bien ensemble.
Tête de nœud, nœud têtu !
Et savez-vous, quel est le nec le plus ultra pour Ivan le terrible pédo ?
Lorsqu’il prend sa douche, quand il en prend une, il saisit sa bite, le dévergeur précoce et expérimenté (qui en a vu d’autres, des vertes et des pires) et de s’enfoncer un doigt dans son anus s’imaginant ainsi (car c’est un grand malade imaginaire, comme tous les pères verts obtus), qu’il pénètre le vagin d’une fillette qu’il attend toujours et qui ne viendra jamais plus, il l’a écartelée, déchirée, elle n’avait que 5 ans !…
Enfin intervient après cette parentouze directe, le Grand Epinard qui n’a pas arrêté de mentir et qui grâce à son long membre concurrencerait bien Alex le Pinocchio sous la ceinture….
Aujourd’hui que je vous en parle, il a vraiment quitté la maison des vivants pour de bon ; il est fou pour de bon…, les deux pieds devant.
Car on est ici, à vie, à mort.
Certains en vivent très bien comme le cas précédent, d’autres, sans doute, plus lucides en crèvent, la gueule ouverte sur un dernier râle au doux pays des râleurs.
Son long membre lui servait à une seule chose, son érection permanente était un bilboquet imaginaire, il s’attachait un vieux beignet avec une ficelle autour des couilles et s’amusait sans cesse à y faire rentrer son pénis… et chaque fois que le vieux beignet roulait sur sa queue d’enfoiré, il se régalait d’une grande rasade de rire.
Et il n’arrêtait pas de s’étaler, s’étirer, s’esclaffer le Grand Epinard, toutes les cinq minutes, pratiquement, d’une blague idiote, d’un vilain jeu de mot, d’un amalgame ridicule, irradiant sa face de trou perdu, toutes les cinq minutes, du lever au coucher.
Il en est mort…
Crise cardiaque en éjaculant sa connerie !
Arrive en grande pompe, la grande foire aux médicaments : “Médicament ! Médicament !” crient, hurlent les Scarface’s et consorts, les infirmes infirmiers enfermés à vie en psychiatrie par droit de vocation.
Les cafards grouillants se réveillent un court instant, s’agglutinent, s’humanisent, s’agglomèrent en agglomération de pilules et de gélatines : pilule tue toute couleur.
Le silence se tasse dans la salle tandis que s’entasse la foule de délirants, d’hallucinés, de voyants, de sous-lucides, de tarés quoi !
Les petits verres sont fins prêts, concoctés par les finesses expérimentées d’un licencié qui ne licencie personne sauf lui-même, quand son travail est terminé.
A la queue-leu-leu, à heure fixe, quand tout le monde se compresse, tout le monde fait la file, bien rangés, réveillés, soulagés, en extase presque, attendant chacun leur tour d’hostie comprimée.
D’un geste de la main le malade avale le médicament qui a son tour avale le malade.
Aucun effet, un goût incertain, le rituel des médicaments est respecté.
Un court instant d’intelligence lucide, on nous carie aux médicaments.
Les poissons empoisonnés continueront bien à faire des bulles dans l’aquarium, à chacun sa bulle, rien de neuf sous le soleil.
Après la séance pause médicament, vient l’heure du dîner où globalement, les mâchoires mâchent afin que la faim touche à sa fin.
Vite digéré, l’infect de l’infect, vient la pause sieste où tout le monde sauf les membres du staff se réfugient dans ses plumes.
Plume-plume et le marchand de sable ne passe pas.
Chacun somnole d’une fatigue imaginaire ou seul le plus paresseux maintient sa position fœtale entre quatre draps régressant comme un légume.
Dans ce potager de plantes humaines, intervient le grand jardinier noir, Scarface, qui vient à votre insu, pénétrer dans votre lourd dingue sommeil afin de soutirer dans vos affaires personnelles des preuves indélébiles de votre poly-intoxication aux substances psychotropes.
Elémentaire mon cher Scarface, dans mes propres affaires, il n’y a rien que du linge sale, non lavé en famille.
Il en prend pour son grade, et Big D. le surprend dans ses ébats amoureux.
Le pot de fer contre le pot de terre persiste et signe.
Scarface aux aveux nie tout.
Aucun coupable, les mains propres, celles de Scarface sont insolentes d’intolérance et de curiosité malsaine.
Il revient bredouille, un petit tour et puis s’en va, les soupçons ne font pas des coupables, dormez bonne gens, Scarface se dépasse et nous on trépasse à petits feux.
Le sommeil troublé par de troublantes mains de père fouettard, la pêche infructueuse, tout le monde se rendort à sa place jusqu’à ce que la sieste en eaux troubles touche à sa fin dans le milieu de l’après-midi la digestion est terminée.
Revenons à Grand Epinard.
En pleine forme ou en pleine déforme je ne sais, ses blagues idiotes glaçaient telle une banquise, une ambiance déjà lourde d’anges qui passent.
Ils cassaient sa tête, ses méninges à coup de contrepèteries.
Son seul public, c’était lui.
Chaque pétard mouillé était automatiquement suivi d’une rasade de rire dont il était le seul auteur.
Et ça ne s’interrompait pas.
Des cheveux longs et crades, parfumaient son air ahuri, ses longues guiboles supportaient un corps aux allures efféminées.
Il parcourait la cage de long en large, ponctuant sa croisade de bilboquet sexuel, de fous rires qui le comblaient au sommet de l’hilarité.
Personne à défaut ne l’écoutait.
Seul, il se gavait, seul il attrapait des indigestions de complexes décomplexés.
Aucun scrupule, ce gars.
Maintenant je sais qu’il est mort, il doit encrasser les écoutilles du bon Dieu qui n’existe pas, de farces et attrapes plus salaces les unes que les autres.
Que les dieux lui pardonnent, parce qu’il ne savait pas de quoi il se marrait.
Venons-en à Alckaseitzer : “Mais je n’ai rien fait moi, qu’est-ce que j’ai fait moi, je n’ai rien fait moi“.
En fait de rien, il avait juste poignardé son frère qui le taquinait alors jusqu’à l’extrême.
A bout, un coup saignant de cutter avait mis fin au dialogue.
Il est innocent dans son genre, mais joue bien la comédie du coupable.
Seul sa conscience questionne le médecin qui le libérera bien un jour.
Hyper nerveux, une véritable boule de nerf le conduit à des interrogations sans fin : “Mais je n’ai rien fait moi” clame-t-il à longueur de journée.
La journée, elle se poursuit, à longueur d’ennui, un ennui qui me conduit invariablement à m’intéresser à Alibaba.
Il a un énorme bide : “un bide de merde“, comme il dit lui-même… et moi de lui rectifier : “on ne s’insulte pas, on se respecte“.
Quant à son cerveau, c’est du fromage, comme il aime à le répéter, s’esclaffant en ce moquant de lui-même.
Il est là pour des raisons de polytoxicomanie, il a déjà essuyé trois overdoses, le troisième risque d’être fatale.
Il ne comprend pas pourquoi, à son insu, il dort, comme la plupart d’entre nous, se réfugiant dans ses plumes.
Il parle toujours de ses projets farfelus et délirants, de s’installer à Sao Paulo et hurle : “Carioca’s” et se répond à lui-même en lançant son cri de guerre, “Polista“, et ainsi de suite jusqu’à la tombée de la nuit.
Puis vient, ou plutôt survient sa Sainteté, moine moitié défroqué, moitié en odeur de sainteté, ayant toujours dans sa poche, les mémoires de sainte Thérèse de Lisieux, les mains jointes, il prie à longueur de longueur, psalmodiant un discours pseudo théologique, bénissant d’une huile aussi sainte qu’imaginaire (sa pisse), les pauvres pêcheurs qu’il se représente en lui-même comme les brebis égarées du troupeau de Dieu.
Il s’affole, s’étire, s’allonge.
Nougat lui reproche son inertie chronique, il lui répond que seuls les médicaments sont responsables de son behaviorisme.
Lent de réaction, son credo c’est Dieu, commencement et fin de toute chose sauf de sa Sainteté.
Une fois béatifiés par sa sainteté, nous rejoignons la grande éminence grise, de John Tumeur Jaune.
Celui-ci donc, doué d’une grande nervosité, n’arrête pas de trembler de tout son corps, et clame malgré son amour pour les mots croisés, qu’il se trouve : “trop de momo dans le b2“.
Il a, pour des raisons que j’ignore, un doigt coupé.
Son allure de grand dandy, détonne dans l’ipséité moyenne de la communauté psychiatrique.
Il parle peu, ne se plaint jamais, mais dans son délire de répliquant, il proclame haut et fort que Charles Darwin s’est trompé et qu’il se souvient de ses vies antérieures.
Sa formation intellectuelle est celle d’un expert-comptable.
En tant que tel, avec la tolérance-autorisation des pouvoirs locaux, il cumule le sort de convoyeur contrebandier de cigarettes et les vendant pour des sommes réduites avec tout intérêt.
Il ne prend jamais note, et enregistre toutes les commandes mentalement.
En fin de carrière, quand un libraire déposa plainte contre lui pour trente-six délits, il se soumis sans aucune autre plainte, ne se défendit même pas, préférant tomber, simultanément à ses ennuis judiciaires, éperdument amoureux d’une laideronne ayant physiquement l’aspect d’une sorcière sans aucun charme maléfique, l’envoûtant des pieds à la tête…
Dès lors, il se calma et devint plus sage, plus tolérant.
L’amour est fou et aveugle, donc il décida un jour de faire justice !…
John Tumeur Jones se creva les yeux lorsqu’il eut le réflexe ultime d’une comparaison, après toutefois avoir tué le libraire responsable de sa déchéance, de la manière la plus abominable, il lui ouvrit le ventre à vif, en pleine rue, et attacha le bout d’intestin au pare-choc d’un camion stoppé à un feu rouge….
Il est maintenant aveugle et fou et le monde intérieur de ce dernier est ainsi éternellement amoureux de la plus affreuse des laideronnes de cette partie du monde qui en est morte de chagrin, mais ça il ne le sait pas.
hôpital nous libère de temps à autre d’une “sortie jardin“.
Dans ce jardin d’Eden à l’ombre des jeunes arbres en fleurs, se promène Rastopopoulos.
Hirsute dans la tête, il complexe des préjugés enfantins.
Un peu enrobé il se mire tel Narcisse dans une image aux mille préjugés : “Regardez comme je suis fort, regardez comme je suis fort“.
Et comme pour se rassurer, il prend la pose, roulant des mécaniques rouillées jusqu’à la moelle.
De plus, orthodoxe jusqu’à la même moelle, il est mystique…
Tel un moustique il se pique de visions angéliques d’apparitions de la Vierge Noire.
Celle-ci l’aide à obtenir chaque après-midi au jardin, une érection merveilleuse destinée à engraisser les plantes… car selon lui il est l’élu et le nouveau Messie naitra d’une des fleurs arrosées de sa semence.
Ce couple, semi réel (lui) et semi virtuel (la vierge noire réincarnée dans sa main droite) avoue de sa seule bouche, en confidence, aux oreilles condescendantes, l’apparition magique de sa propre transcendance. De plus, il demande toujours autour de lui l’autorisation de l’accès à la cafetière.
C’est l’Abbé qui lui accorde sa bénédiction : café à volonté.
Comme il a peu de volonté, il se trouve peu de café, consommé jusqu’à l’épuisement…
Rastapopoulos est alors au paradis.
Nul n’ignore son délire mystique.
Le problème c’est qu’il s’adresse toujours à des athées, sauf à l’Abbé, une sorte de fantôme qui n’apparait que pour mieux disparaitre en disant ; “Que Dieu bénisse Rastapopoulos ainsi soit-il“.
Parlons de Spéculoos ou plutôt laissons-le parler, 50 ans de vécu 25 ans d’abonnement à hôpital.
Le fou par excellence.
Son litron de Coca dans la gorge journalière et il est heureux comme un glaçon dans un coca.
Vraiment, vraiment, il pétille d’un fou rire à faire disparaître sa dernière dent qui décolore son petit palais.
Il est en copinage avec Big D qui le lui rend bien, un demi-siècle de bonne humeur criblant tous ses propos par un vivant : “Malheureux toi“.
Avec lui, c’est faute à pas de chance.
Son dernier coup, braquer une banque, commettre un hold-up armé d’un pistolet en chocolat et Spéculoos, de m’expliquer que Dieu lui-même le prend en pitié (Dieu ici est son litron de Coca), raison pour laquelle il le garde, le mettant en sécurité, car vraiment en dehors de cette partie du monde, je veux dire hôpital, il est vraiment très vulnérable.
Tout nu devant le monde des adultes.
Au dernier écho, il prétend tenter obtenir une place de novice chez les moines, mais ici il fait plutôt office de moinillon.
Dans ce paradis des âmes perdues pour eux-mêmes et pour tout le monde, apparaît Graine de réglisse, qui constamment a un doigt tripotant son anus tout rose…, et de l’autre doigt, le portant à son nez, sniffant sa trouvaille odorante avec délice.
Autre moinillon tombé du nid, il est une espèce en voie d’apparition.
De plus, sa formation d’ornithologue permet à Grain de réglisse, de gazouiller, de parler aux oiseaux.
Il piaille de délire en délire : “Albert le ki- né, il est au pa- lais” gazouille-t-il faiblement.
La grosse merde qu’il se glisse en poche chaque matin, selon lui, le protège maternellement, c’est un oisillon très fragile, qui ne parvient plus à s’envoler, alors il s’envole dans sa tête.
Il sniffe sa dope de caca comme d’autres respirent.
Et voici qu’arrive Lucky Skywalker le schizo.
Molière a eu la subtilité d’écriture d’intituler une de ses plus belles pièces : “Le malade imaginaire“, exprimant de suite que le malade est un réel malade en s’imaginant être malade.
C’est le cas de Lucky Skywalker, il n’arrête pas d’énumérer tous ses handicaps moteurs et locomoteurs de son agglomérat de molécules corporelles.
Au souper, quand arrive le souper, il dévore de son intelligence de scalpel toute son anatomie d’opéré à cœur ouvert.
Il n’est pas cardiaque, mais à de terribles problèmes de cœur.
Chaque soupir dévaste un désir d’être guéri.
Il est en constante convalescence.
Sauf qu’ici, le malade et son imaginaire duo angélique, ne jouent pas la comédie, mais se jouent en brûlant les planches, nous prenant en public et tous de sourire de ce délire plus que délirant.
Une fois le souper gobé, il faut gober le crépuscule et la bataille des fauteuils est engagée pour la meilleure place devant la téloche.
La machine à rêver se contente de diluer de faibles gouttes d’opium du peuple.
Seules les infos passent et des émissions à tire larigot cul-cul la praline en veux-tu en voilà, style Drucker recevant Patrick Bruel, c’est l’idole de l’hopital.
A chaque fois qu’il chantonne, tous reprennent en chœur et avec cœur ; “Y a d’la joie…“.
Pathétique !
Les pédos, car ils sont plusieurs à empester l’atmosphère, s’autocensurent et jouent aux grands hypersensibles, regretant l’émission “Bonjour Dimanche” de Jacques Martin durant laquelle ils se branlaient tous…
Maintenant, ils regardent des dessins animés…
Une affaire qui pue.
L’ambivalence est mortelle, les délires font absence de silence.
Tous écoutent avec une sorte de voyeurisme malsain.
Le programme finalement s’arrête comme un déclic lumineux.
Tous sont armés de pied en cap pour passer une nuit de plus dans les sombrinesques chambres de l’asile.
Tous logés à la même enseigne.
Encore vingt mètres de trépignement, et tous se réfugient à qui le plus vite, dans le fond des plumes où le dieu Anon, dieu de l’onanisme, reprend régulièrement ses droits, jusqu’à ce que tout l’hôpital tout entier se branle avant de se réfugier dans un sommeil réparateur…, après un dernier soupir de soulagement…
La journée est gagnée et terminée pour se fondre dans d’éclatantes ténèbres.
Demain, ce sera la même chose, après demain aussi, et ainsi de suite jusqu’à la mort…
Pensez à moi.
Je ne me souviens même plus du livre que j’aurais écrit et qui m’a amené ici…
N’oubliez pas, venez me chercher, c’est facile, c’est une grande forteresse, avec des grands murs gris, le ciel est gris lui aussi, de temps en temps des corbeaux traversent le ciel.
C’est là.