1948 Bentley MK VI Roadster by Vesters & Neirinck…
Histoire d’une “enroule” ! (une “enroule” est, en argot, une arnaque minable, exécutée rapidement)
Cette histoire véridique est celle d’une “enroule“, minable, à la fois sur la nature de l’objet et sur le manque de respect à une parole donnée…. et aussi de la constatation d’un incroyable “manque de couilles”, après ces deux faits, de la part de son auteur, le propriétaire de la “chose“… !
Ce que je répète inlassablement à mes proches, c’est qu’il ne faut JAMAIS se laisser faire, ni manipuler, dans la vie…, il faut TOUJOURS garder la tête haute, TOUJOURS rester soi-même et ne pas avoir peur de dire la vérité, en toutes choses et quels que soient les gens qui tentent de nous baiser profond…
Mardi, 10h23 : Mon “ex-ami” Roland P. (qui mourra peu après dans d’atroces et immondes souffrances) me téléphone concernant une Bentley Cabriolet 1947 très spéciale, propriété de Michel B. l’archétype du multimilliardaire fauché dont la famille ne l’est pas encore mais dispose toujours d’un nom très connu dans le monde de la construction de bâtiments et ponts en Belgique…, Michel B, donc, désire vendre rapidement cette automobile rarissime de collection, sous le motif que sa villa située dans le Golfe du Bercuit, endroit ou il résidait … est vendue pour d’obscures raisons qui changent au fil des heures (qui sont comptées par le fisc)… parce qu’il part définitivement s’installer temporairement et vivre à Cadiz en Espagne qui est, comme tout le monde le sait, un village situé en Argentine pas loin de l’ile de Pâques…
Mardi, 10h47 : Il m’affirme que c’est une affaire “exceptionnelle“, que cette voiture vaut au moins 100.000 euros, que Michel B. l’a payé le triple à Steve McQueen lorsqu’il était venu en Belgique pour tourner “Le Mans” sur le circuit de Francorchamps…, mais que je peux l’avoir pour le quart de ce prix : “25.000 environ…, je crois, oui, environ, je sais plus exactement, on verra, viens voir… Prend 5.000 euros avec toi pour bloquer l’affaire” !
Rendez-vous est convenu pour le lendemain 11h00…
Mercredi, 11h04 : J’arrive à la taverne de la Grand-place de Wavre que dirige Roland P. et nous partons en direction du golfe du Bercuit. Roland s’est installé dans ma Smart avec un antique casier de bouteilles et me demande d’effectuer un “crochet” vers une firme : “Troc“, qui revend les secondes, troisièmes, quatrièmes mains et plus… des “ceusses” qui désirent gagner quelques euros sur des choses qu’on jette généralement dans des poubelles…
Roland P. profite vraiment de tout et n’importe quoi…, il reçoit 8 euros pour son casier en vieux bois après une demi-heure d’attente ! (A titre de comparaison, mon avocat me demande 85 euros de l’heure)… Que soit…
Mercredi, 11h32 : Nous arrivons à la villa de Michel B… où “on” me montre une Bentley MKVI semi pourrie, toute poussiéreuse, dans le garage…. et, malgré le léger crachin de pluie et les vociférations charretières du multimilliardaire… nous poussons la voiture devant la villa afin de l’examiner en détails et nous discutons… Le prix de base est indéterminé, sauf que “ça devrait tourner dans les 40.000, mais ça dépend si vous payez de suite en cash”…
Mercredi, 11h41 : On ne sait comment me présenter et commenter cette voiture assez bizarre dans son style arrière, sauf que cette Bentley aurait été achetée neuve en 1948 (et non en 1947) par le Grand-père, Emile B. (ou Ado B. je ne sais plus) qui aurait fait carrosser le châssis d’usine chez un grand carrossier de l’époque, puis qui aurait circulé avec elle seulement durant une soixantaine de milliers de kilomètres entre la Suisse ou il possédait une propriété et sa villa belge…
Mercredi, 11h45 : Le nom de Vesters & Neirinck est cité brièvement pour laisser croire que c’est lui… qui… la preuve étant que cee cabriolet 2 portes 2 places est construit sur le châssis Bentley # B374DA… “On” me cite enfin le prix “pour moi” : 40.000 euros…, possibilité à 35.000 si je me décide de suite et donne 5.000 cash pour “bloquer“… Ce laxisme est suspect ! Je téléphone à Grégor Werner de chez Coys pour commenter cette voiture, il me répond que cette auto n’existe pas… Roland P. et Michel B. font absolument tout pour me pousser à l’acheter, ne fusse qu’en la bloquant avec un acompte de 5.000 euros : “Pour les 35.000 restants, on s’arrangera, même 30.000, pas grave, mais donne de suite 5.000 pour bloquer“...
Mercredi, 11h49 : Il n’y a nulle-part de plaquette du carrossier “Vesters & Neirinck”..., même pas une qui aurait été réalisée récemment à l’identique d’une plaquette de sonnette d’entrée d’appartement… il n’y a d’ailleurs aucune plaquette d’identification en dehors d’une plaquette “usine” qui se résume au seul numéro de châssis
Mercredi, 11h53 : Soudain, un flash et ce n’est pas celui de mon appareil photo (on me voit photographier la plaquette)…, c’est le Grand Mickey Maître de l’univers qui me chuchote que mon horoscope m’invite à la prudence financière…, que je ne dois pas acheter cette voiture mais réaliser une “contre-enroule” en proposant un dérivatif fumeux et fumant destiné à enfumer les deux fumistes : mettre cette rareté (sic !) dans une vente Coys : “Je me contenterai d’une commission !”…
Mercredi, 11h59 : Je baratine plus qu’il n’en faut, à mon tour : “Risque zéro… Ascott où aura lieu la vente est un endroit très prestigieux, c’est la vente la plus “classe” de Coys en Angleterre, la date n’est pas trop éloignée, c’est le lieu idéal pour obtenir un “juste” prix de cette rareté”… j’ajoute très diplomatiquement, que je ne suis pas là pour “faire une affaire sur leur dos” (ce qui s’avèrera un double-sens très approprié).
Mercredi, 12h04 : Je propose de placer cette extraordinaire rareté dans la vente Coys d’Ascott fin octobre, proposant de m’occuper de sa vente moyennant une commission de 25% comprenant le “fee” retenu par Coys… Ils acceptent, on tape dans les mains à l’ancienne et ils décident alors que je réalise de “bonnes” photos immédiatement, d’autant que fin de semaine Michel B. sera définitivement en Espagne en Argentine… Michel B. et moi convenons que tout est acquit et approuvé et on se tape dessus (les mains) en riant.
Mercredi, 12h38 : Après avoir repoussé la voiture dans son box, nous partons déjeuner chez Roland P. qui téléphone à Philippe D. pour qu’il effectue le transport le lendemain jeudi du Bercuit à mon garage… de mon coté, en forçant un peu, je parviens à obtenir une photocopie des documents (dont par acquit de conscience j’ai réalisé une photo peu avant sur le capot de la Bentley)… Michel B. m’inscrit toutes ses coordonnées pour établir les documents “Entry-fee” pour Coys et on se quitte dans la bonne humeur.
Mercredi, 09h27 :Je retouche et re-cadre les photos, prépare un article historique, le place sur mon site www.GatsbyOnline.com et en envoie une copie à Coys et à un expert Britannique en voitures anciennes, Anthony Godin. De retour chez moi, vers 15h00, je re-contacte Coys, on se confirme tout. Il est 20h30, ce travail m’a pris la tête tout l’après-midi…
Jeudi, 11h34 : Je téléphone à Philippe B. qui me confirme avoir chargé la Bentley et qui sera chez mon garagiste avant midi.
Jeudi, 11h48 : Coup de tonnerre : Je reçois un é-mail d’alerte de l’expert Britannique, Anthony Godin qui œuvre avec Coys, me signalant qu’en fonction du numéro de chassis # B374DA , des photos que j’ai envoyé la veille en soirée et des renseignements obtenus par lui, la voiture ne serait pas une Bentley achetée en châssis nu motorisé et carrossé en cabriolet 2 places par Vesters & Neirinck en 1947 ou 1948, mais une simple berline sedan de 1948 qui a été gravement accidentée à l’arrière dans les années cinquante et reconstruite à l’arrière en cabriolet avec un minimum de moyens par un obscur carrossier très connu comme receleur d’épaves volées, un margoulin réutilisant des pièces d’autres véhicules… Son alerte m’informe de ne surtout pas acheter ou m’aventurer avec ce qu’on nomme vulgairement “un Bitza” qui ne vaudrait pas plus de 18.000 euros. Je téléphone alors à Roland P. pour lui en faire un résumé…, il me dit : “Ah bon, je vais voir, je rappelle plus tard, je vais dîner…“.
Jeudi , 14h00 : Rien !
Jeudi, 14h30 : Rien !
Jeudi, 15h30 : Rien !
Jeudi, 16h00 : Rien !
Jeudi, 16h30 : Rien ! Le téléphone de Philippe B. sonne mais ne répond pas.
Jeudi, 17h00 : Rien !
Jeudi, 17h30 : Rien ! J’appelle chaque demi-heure… rien !
Jeudi, 18h00 : Rien ! Je téléphone à chaque intervenant, plus personne ne répond…
Jeudi, 18h27 : Mon garagiste m’avise que la Bentley n’est jamais arrivée, qu’il a perdu son temps tout l’après-midi à attendre et que maintenant, il en a ras-le-bol et qu’il ferme, on verra demain !
Jeudi, 20h36 : J’ai enfin Philippe B. en ligne en l’appelant via un autre téléphone (il ne sait pas que c’est moi qui l’appelle)…, il me dit que vers midi (juste après mon appel signalant les commentaires de l’expert de Coys), Michel B. lui a demandé de ne pas me livrer la Bentley et de la parquer chez lui… Je lui demande pourquoi plus personne ne m’a répondu téléphoniquement, il me prétend qu’il a eu des ennuis avec son téléphone et qu’en plus il y a eu une panne de réseau… couplée à un virus téléphonique qui l’a obligé à attendre pour ne pas être contaminé ! Il me laisse sous-entendre dans cette conversation que cette Bentley aurait transité par lui qui y aurait effectué des travaux…, comme si, en fait, cette voiture n’aurait jamais appartenu à quiconque, mais aurait été “bricolée” puis vendue à Michel B. par Roland P.
Jeudi, 20h54 : Je téléphone à Roland P. qui me dit ne rien savoir.
Jeudi, 21h13 : J’appelle Michel.B qui me dit qu’il dîne et qu’il me rappelle dans le quart-d’heure…
Jeudi, 23h47 : Michel B. ne rappellera plus ! Je subodore une “enroule“, je flaire que Michel B. aurait acheté cette voiture à Philippe D. via Roland P., que cette voiture ne lui aurait pas apporté de satisfaction et qu’il la renverrait à ses anciens revendeurs, à charge pour eux de la négocier au mieux… Quoi de mieux que de m’attirer dans le site prestigieux du golfe du Bercuit dans l’ex-villa de Michel B. pour me raconter une histoire avalisée par lui, qui s’en f…. puisqu’il part définitivement fin de semaine en un endroit qu’il ne désire pas divulguer pour des raisons fiscales…
N’a t’il pas donné les documents d’immatriculation à Roland P. et la voiture à Philippe D. ? Ayant découvert l’affaire peu avant midi d’hier, ils ont décidé que ce n’était pas la peine de me confier la Bentley…, autant chercher quelqu’un d’autre… et me laisser tomber comme quantité négligeable !
Vendredi, 10h32 : Je téléphone à Michel B. avec un numéro masqué… C’est un répondeur automatique qui m’informe qu’il faut le joindre via un numéro USA (Californie).
Vendredi, 10h36 : Michel B. me re-sonne quelques instants plus tard (touche appel reçu en absence) et, se rendant compte que c’est moi, bafouille qu’il va me rappeler de suite…, énervé il me répète deux fois qu’il va me rappeler de suite !
Dimanche, 12h08 : Au moment ou j’écris ceci, Michel B. n’a jamais rappelé, il n’appellera jamais plus malgré l’é-mail que je lui ai envoyé la veille peu après minuit… Plus personne de cette “équipe” (pour ne pas écrire “bande de connards“) ne m’appellera… leur “enroule” n’a pas fonctionné !
Conclusion…
On a tout simplement cherché à “m’enrouler” pour un “Bitza”, une Bentley “ordinaire”, Sedan 4 portes “usine” accidentée puis transformée en cabriolet-roadster avec un minimum de moyens techniques, comme en témoignent les vitres latérales en plastique et la réalisation plus que “légère” de l’arrière de la voiture… Ces malfaisants cherchaient à se faire du “pèze” facile tout comme les “ceusses” que je rencontre au hasard des shows ou j’expose, la seule volonté de me l’enfoncer bien profond…
Historique des vraies Bentley MKVI…
Après la deuxième guerre mondiale, Rolls-Royce reconnu un changement dans la volonté de sa clientèle et passa de la voiture conduite par un chauffeur aux limousines “propriétaire-conducteur“.
La Bentley Mark VI Standard Steel Saloon était la première voiture entièrement construite par Rolls-Royce avec une carrosserie standard, avant elle seuls les châssis étaient construits par la firme, le reste était sous-traité.
La Bentley MKVI a été dessinée pour être la plus compacte possible à cause du rationnement d’acier d’après guerre, elle fut équipée de l’excellent et très fiable nouveau B60, un 6 cylindres en ligne de 4257cc. Toutes les voitures avaient une boîte manuelle.
La Mk VI “Standard Stell Saloon” (berline de série tout acier) d’une cylindrée de 4257 cm3 apparue en mai 1946, se caractérisait par des lignes typiquement britanniques, elle était basée sur la Mk V produite en dix neuf exemplaires de 1939 à 1941, avant que la guerre n’entraîna l’arrêt de toute construction automobile.
Ce fut la première voiture “rationalisée” à être fabriquée en série, avec un châssis conçu pour accueillir les caisses des Bentley et des Rolls Royce de différentes tailles.
Malgré que des châssis motorisés pouvaient encore être acheté par des particuliers pour que des carrossiers réalisent “LA” voiture unique qu’ils désiraient avoir, comme c’était le cas avant guerre, Bentley produisait normalement et pour la première fois, la voiture toute entière, obtenant ainsi un véhicule particulièrement bien assemblé, car le constructeur de Crewe maîtrisait l’ensemble du processus, de la conception jusqu’à l’assemblage final.
A noter toutefois que sa caisse en acier embouti était produite par la Pressed Steel Company.
La Mark VI demeurait assez conservatrice, même si quelques uns virent dans certains de ses éléments tels que les projecteurs intégrés des innovations radicales !
Son moteur 6 cylindres en ligne datait, quant à lui, de 1938, il développait une puissance de 132 ch. La Mk VI était appréciée pour sa maniabilité, son confort, son silence, et pour ses performances honorables, elle atteignait la vitesse de 145 km/h.
Le modèle ne fut commercialisé que tardivement en Grande Bretagne, le gouvernement de l’époque souhaitant privilégier les rentrées de devises en cette période d’immédiat après guerre.
La cylindrée du moteur fut accrue à 4566 cm³ en mai 1951, sa puissance atteignait désormais 160 chevaux.
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