1948 Norman Timbs Spécial…
La Norman Timbs spécial apparue en 1948, est l’une des plus bizarre, étrange mais élégante voiture personnalisée jamais créée, un projet déjanté qui a pris plus de trois ans.
Norman E. Timbs, Ingénieur en mécanique, avait la trempe d’un designer d’exception.
Il avait travaillé avec Preston Tucker.
Lorsque le grand projet de Tucker a été stoppé dans les circonstances narrées dans cet article XXX, un peu plus tard, il a construit plusieurs Indy Racing Specials, des automobiles de course, avant de se lancer dans la réalisation de ce Streamliner dramatique.
Il lui a fallu plus de deux ans pour le terminer avec l’aide d’Emil Diedt qui lui a demandé 8.000 dollars pour façonner la carrosserie en aluminium.
Objet roulant parfaitement indescriptible, cet engin rappelle la ligne de certaines voitures de course qui battaient des records sur la piste allemande de l’Avus dans les années 30 …
Mais de vitesse de pointe il n’est pas ici question, puisqu’elle ne dépasse pas les 190 km/h !
Elle se savoure d’avantage dans ses glissements à basse vitesse…
Timbs a été influencé par l’Auto Union Type C et la Mercedes-Benz W25 Avus des années 1930.
La Norman Timbs spécial utilise le moteur d’une Buick 1948 avec son moteur 8 cylindres en ligne monté au milieu de ce “navire” de la route.
Ce bloc tout en fonte est équipé de deux carburateurs et d’un échappement double.
Le châssis est une structure tubulaire de type “aviation”, dans laquelle le moteur et la boîte de vitesse sont reculés au maximum vers l’arrière, la boîte étant accouplée directement sur le pont AR…, certains des autres éléments mécaniques ont été récupérés d’une Mercury !
L’arrière de la carrosserie se soulève en une seule pièce avec des vérins hydrauliques commandés électriquement depuis le tableau de bord…, pour révéler un grand vide dans lequel la roue de secours et le réservoir de carburant sont comme exposés et accessibles…, tandis que le moteur n’est pas pour autant d’un accès facile…
Vers le milieu des années 1950, la voiture avait été peinte en blanc et était sous la garde de la Force aérienne via le sergent Jim Davis de Manhattan Beach, en Californie…, son propriétaire d’alors… Cette voiture a passé une grande partie de sa vie à l’extérieur, et en finale, elle a terminé abandonnée à coté d’un hangar au milieu du désert, où elle s’est détériorée au fil des ans.
La voiture a été découverte à peu près intacte, en 2002.
Elle a été hâtivement restaurée par Dave Crouse pour la mettre en vente aux enchères quelques mois plus tard via Barrett-Jackson, au Petersen Museum Classic Car Auction ou elle a été vendue pour la somme de 17.600 $.
Le nouveau propriétaire a ensuite commencé une vraie restauration, la voiture restant à 90% d’origine.
En 2010, la voiture a fait ses débuts dans le monde de la voiture de collection “haut de gamme” au Concours 2010 d’Amelia Island où elle a remporté le trophée de la plus belle voiture décapotable.
Quelle ligne !
Le style paquebot (en anglais Streamline Moderne, parfois seulement nommé par l’un ou l’autre de ces mots), est une branche tardive du style Art déco.
Ce style architectural accentue les formes courbes et incurvées, les longues lignes horizontales et parfois les éléments empruntés à l’univers nautique, comme les balustrades et les hublots.
Son apogée fut atteint vers 1937.
C’est un mouvement esthétique caractéristique de l’Amérique du Nord des années 30, directement issu de l’aérodynamique et inscrit dans une démarche fonctionnaliste et moderniste annonçant la naissance du consumérisme américain.
Ce style fut le premier à incorporer les lumières électriques dans les structures architecturales.
Dans la salle à manger des premières classes du Normandie, aménagée entre 1933 et 1935, douze hauts piliers en verre de Lalique et trente-huit colonnes lumineuses illuminaient la salle.
L’hôtel Strand Palace (1930), préservé de la démolition par le Victoria and Albert Museum en 1969, a marqué la première utilisation de verre architectural éclairé de l’intérieur… et par la même occasion est aussi l’un des premiers intérieurs style “paquebot” à être entré dans un musée.
Ce style s’est appliqué à des appareils ménagers comme des réveils, des machines à coudre, des petits postes de radio et des aspirateurs.
Ils ont profité des développements de la science des matériaux, dont l’aluminium ou la bakélite.
Historiquement, aux Etats-Unis, qui furent son berceau, le streamline correspond à la Grande Dépression de 1929, au développement de l’esthétique industrielle et à l’apparition d’une nouvelle profession, celle de designer.
Par sa politique du New deal, le président Franklin Roosevelt avait cherché à relancer la consommation.
Les nouvelles formes épurées vont alors symboliser le progrès et la reprise économique.
Leurs lignes d’avant-garde permettent d’envisager l’avenir avec optimisme.
Emprunté à l’aéronautique, le streamline met à l’honneur de nouveaux matériaux comme l’aluminium, la bakélite et les premiers plastiques.
Qu’il s’agisse d’une modeste perforeuse, d’un plat à rôtir, d’un chauffe-plat à résistance fort astucieux à trois étages, d’une tondeuse à gazon ou d’un récepteur radio, on retrouve des constantes : les lignes sont galbées, arrondies, oblongues, parfois striées de fines lignes parallèles.
Énoncée un peu à la manière d’un théorème, Norman Bel Geddes, designer américain des années 30, a livré sa définition du streamline : “Un objet est aérodynamique, ou streamline, quand sa surface extérieure est conçue de telle sorte qu’en traversant un fluide comme l’eau ou l’air, il créé le moins de perturbations possibles sous forme de turbulences ou de vides partiels, qui ont tendance à créer une résistance”.
Synonyme d’élégance et de vitesse, le streamline est enfant du XX siècle.
Le streamline, qui est entré dans les foyers américains par la cuisine et la salle de bain, a rapidement investi tout le reste de l’univers familier, s’identifiant à un nouvel art de vivre.
Au début des années 30, les activités de loisir ont connu un essor considérable, sans doute en réaction aux incertitudes de la conjoncture économique et politique.
La danse, le patin à roulettes, le patinage artistique, le golf, le tennis, le bowling et le cyclisme avaient leurs adeptes fervents, prêts à investir dans les équipements de sport les plus aérodynamiques.
Jolis, drôles, gais et colorés, les sèche-cheveux, ventilateurs, vibro-masseurs, batteurs à œufs, auto-cuiseurs et autres presse-agrumes affichaient des formes ludiques, proches de locomotives, d’insectes, ou de petits robots humains.
Les designers qui les ont conçus s’appelaient Raymond Loewy, Donald Deskey, Henry Dreyfuss, Norman Bel Geddes, Walter Dorwin Teague… mais tous, aussi talentueux soient-ils, n’étaient pas toujours d’une grande notoriété.
Ils partageaient tous la vision d’un monde meilleur dominé par la science et la technique et ont cherché à faire rimer élégance et fonctionnalité.
A la fin du XX siècle, le Streamline a même connu un regain de faveur, notamment grâce au post-modernisme et au pop-art.
Dès la fin des années 1950, des artistes anglais et américains vont chercher leur inspiration dans la culture populaire, comme le peintre Roy Lichtenstein.
En Italie, le design radical des années 1960 a contribué à desserrer l’étau du mouvement moderniste et préparant ainsi la voie au post-modernisme, rééditant fidèlement les modèles des années 30, ou en revisitant ce style en gardant l’idée de vitesse et de dynamisme, comme en témoignent les œuvres de Jasper Morrison, avec la Thinking man’s chair de 1986…et de Michael Graves avec le Toaster for Target de 2000