1953 Lancia Aurelia B52 Spider Vignale…
Châssis B52 #1097 – Moteur B21 #4775
Posséder une automobile ancienne, ça devrait rendre heureux, donner l’envie de chanter, danser, se masturber et se balafrer le visage de larmes de bonheur. Ça devait être la fête, mais avec cette Lancia Aurelia B52, j’ai frôlé la dépression et terminé chacun de mes périples en me balançant des grosses claques en hurlant : “Jamais plus jamais !”... Ce qui a durablement traumatisé mes voisins englués dans des lectures politiquement trop correctes !
Pourtant j’étais (dans ma tête) bien parti pour être le King au volant de cette Lancia qui devait devenir le joyau de ma petite collection de “bagnoles-à-la-con” à une époque où on ne devait pas esquiver le Coronavirus via des masques de mort et subir l’absurdité carcérale des confinements grotesques à coup de discours gouvernementaux dictatoriaux et d’obligations sous contraintes d’amendes et poursuites judiciaires !
Cette carrosserie unique réalisée par la Carrozzeria Vignale sur un des 12 châssis B52 produits en 1953, est un “One-Off” au design assez “baroque et pompier”. Elle fut construite en 1954 et présentée pour la première fois au public au Salon de l’automobile de Bruxelles en janvier 1955. Prétendument acquise par un membre de la famille royale lors de cet “évènement”, elle a eu une vie secrète mouvementée jusqu’en 2007 ou, achetée à vil prix par un éditeur Belge (Chromes&Flammes ?), qui l’a revendue en 2012 à un Prince Italien qui l’a confiée pour restauration complète à la Carrozzeria Quality Cars de Vigonza.
Elle a ensuite été lauréate du Concorso d’Eleganza Villa d’Este en 2016, puis mise en vente peu après pour 1.000.000 d’€uros chez HK-Engineering Garage fin 2016, ou elle n’a pas trouvé preneur… Elle a ensuite été confiée à Gooding & Company pour la “The Pebble Beach Auctions” du 24 Aout 2018 (Lot 175, prix de réserve à 600.000 US$) et n’y a pas trouvé de nouveau Maître. Elle va migrer peu après aux bons soins de la compagnie Girardo & Co qui va me la reproposer en vente privée pour 800.000 €uros en 2019, mais je vais décliner cette offre et elle ne se vendra pas, non plus, auprès de quelconques enchérisseurs.
C’est RM Sotheby’s qui la reçoit en finale pour une vente aux enchères sans public nommée “Live Internet Auction”, la voiture étant définie fiscalement comme étant physiquement située en Suisse, mais pouvant tout aussi bien se trouver “Off-Shore” dans un cargo au milieu de l’Océan Pacifique, la vente “numérique” se déroulant “sur la planète Mars au centre de Hong-Kong qui est situé provisoirement au centre de l’Antarctique” (toujours pour des questions fiscales) lors d’un concept de vente numérique programmé pour le 11 Novembre 2020… Prix de réserve 500.000 euros ! Dans ce Micmac baissier, ni l’identité du vendeur ni celle de l’éventuel acquéreur n’apparaitront, la voiture de même (l’image de la bête en photos, vidéos et hologrammes n’étant physiquement pas taxable) le Covid19 a permis la création de ventes réelles mais fiscalement aussi imaginaires que le contenu d’une histoire !
La Lancia Aurelia a fait entrer Lancia dans l’après-guerre de 1950, dans l’espoir d’aider l’entreprise à cimenter (et non bétonner) sa réputation de qualité et d’ingénierie. Conçue par Gianni Lancia fils du fondateur de la marque Vincenzo Lancia et par l’ingénieur en mécanique Vittorio Jano, elle est actuellement considérée (malgré un look assez “dramaturgique” prédestiné aux dévots de la marque) comme un des 20 chefs-d’œuvre automobiles, devenant comme par miracle “un mythe des années 1950”, une dénomination qui est d’avantage une crapulerie destinée à enfumer les gogos qu’une reconnaissance planétaire pour sévices rendus (j’en ai été victime) !
La première version Lancia de cette série était la B10, une berline quatre portes et six places (assises), équipée du premier moteur V6 de série du monde entièrement en aluminium, alésage 70mm, course 76mm, cylindrée 1755cm3, puissance 56cv à 4400tr/min. Remplaçante des Lancia Aprilia, elle concurrençait directement Mercedes avec son luxe et son confort ainsi que les Alfa Romeo 1900 pour leurs performances (un des joyaux des voitures sportives de l’industrie italienne de l’époque). C’est à partir de ce modèle qu’ont été créés les études Lancia Florida I et II. La Lancia Aurelia a dominé quasiment sans partage le monde transalpin des courses sur route durant les années’50.
Palmarès détaillé annuellement de l’Aurelia entre 1950 et 1960.
-Rallye de Sestrières 1951, 1952 et 1955
-Coupe delle Dolomiti 1951
-Rallye Internazionali delle Alpi 1951 (ex-æquo)
-6 Ore di Pescara 1951
-Coppa delle Alpi Austriache 1952
-Targa Florio 1952 (triplé)
-Coppa della Toscana 1953
-Giro delle Calabrie 1953
-Liège-Rome-Liège 1953 (1re épreuve du Championnat d’Europe des rallyes)
-Stella Alpina 1953 (Salvatore Ammendola, seul triple vainqueur de l’épreuve 1950, 1951 et 1953
-Rallye automobile Monte-Carlo 1954 (Louis Chiron, copilote Basadonna)
-Rallye de l’Acropole 1958 (Luigi Villoresi, copilote Basadonna)
-Mille Miglia 1951-1952
-Carrera Panamericana 1952
-6e place aux 24 Heures du Mans 1952
-Rallye San Remo Historique 1989
La Lancia Aurelia fut la première de la marque à obtenir de nombreux succès sportifs importants au niveau international, après les résultats prometteurs de l’Aprilia cependant gâchés par les années de guerre. Les qualités (réelles pour l’époque) de la voiture se sont vérifiées dès ses premières participations avec (alors) la très placide berline B10 (au moteur de 1755cm3), mais le plein succès devint éclatant lorsqu’en 1951 sortit la version B20 Coupé 2 litres, puis s’enchaînèrent les succès de la B21 et, en 1953 ceux de la version B20 équipée d’un moteur de 2,5 litres.
Elle apparaît au cinéma en 1956 dans le film culte des années 1950 “Et Dieu… créa la femme” de Roger Vadim, aux mains d’un milliardaire interprété par Curd Jürgen qui tente de séduire Brigitte Bardot, en vain (cela se comprend), avec une Lancia Aurelia B24 cabriolet à Saint-Tropez ! Une autre B24 spider cabriolet a également été utilisée pour le road movie culte du cinéma italien des années 1960 : “Le Fanfaron” de Dino Risi en 1962.
Le dessinateur de bande dessinée Hergé s’est inspiré de sa propre Aurélia B20 Coupé, pour la dessiner dans “Les Aventures de Tintin : L’Affaire Tournesol”, avec Cartoffoli Arturo Benedetto Giovanni Giuseppe Pietro Archangelo Alfredo (sic !), stéréotype caricatural du chauffard italien, renversant le Capitaine Haddock au volant de sa B20 coupé sport, puis se lançant avec Haddock et Tintin à la poursuite des kidnappeurs de Tournesol qu’il rattrape et coince grâce à une savantissime queue de sardine (sic !) après avoir semé la panique dans le marché dominical du village frontalier de Cervens, en proclamant fièrement : “Les italiens sont les meilleurs conducteurs”. Dans “Tintin au pays de l’or noir”, le reporteur vedette conduit également une Aurelia B20 à la fin de l’album, et lors de sa course-poursuite avec le Docteur Müller à travers le désert.
Le châssis type-B50 de l’Aurelia a été vendu comme un châssis roulant et mis à la disposition des carrossiers de l’époque pour la production à faible volume ou pour la création de véritables “one-off coachbuilt”. Tout comme les automobiles d’avant-guerre, cela permettait aux clients de commander à des carrossiers une automobile à leurs propres besoins et goûts spécifiques. Malheureusement, en raison de réglementations de plus en plus strictes et de l’avènement des automobiles de production de masse, cette pratique qui était à son apogée dans l’ère d’avant-guerre, allait presque disparaître du paysage automobile à la fin des années 1960.
Équipé du moteur Lancia V-6 de 1,7 litre, le châssis B50 était beaucoup plus lourd que celui des autres Lancia et ses performances laissaient à désirer. En 1952, Lancia introduisit donc la B5 équipée d’un châssis largement amélioré et plus léger, équipée d’un moteur V-6 de 2,0 litres plus puissant. Comme le châssis B50, celui-ci était également destiné à la production à faible volume. Seulement quatre-vingt-six châssis B52 ont été construits pour l’année modèle 1952, et seulement douze seront achevés pour la deuxième et dernière année de production en 1953 !
Le châssis B52-1097 a été fabriqué par Lancia et répertorié le 6 février 1953. Il a ensuite été expédié à la Carrozzeria Vignale de Turin (fondée par Alfredo Vignale en 1948). Au moment où le carrossier avait reçu ce châssis, Vignale commençait à frapper l’imagination du public car produisant fréquemment des carrosseries exceptionnelles en faible volume pour des entreprises italiennes comme Ferrari, Maserati et Alfa Romeo. Malgré son air désuet, la carrosserie de cette Aurelia était incontestablement Lancia, facilement reconnaissable grâce à sa calandre traditionnelle et à sa face à quatre phares.
Terminée en décembre 1954, cette B52 Spider a été expédiée en Belgique où elle est apparue au Salon de l’automobile de Bruxelles en janvier 1955, l’un des temps forts du circuit européen de l’automobile. Plutôt que d’être affichée sur le propre stand de Vignale, la Lancia châssis numéro B52-1097 est apparue sur le propre stand de Lancia, un témoignage de l’appréciation de Lancia pour le travail de Vignale et surtout pour l’attrait de cette automobile spécifique qui devait attirer la foule sur le stand grâce également à sa peinture Metallic Lake Green et son intérieur “bordelais”, exactement comme elle se présente aujourd’hui.
Malheureusement, après le Salon de l’Automobile de Bruxelles, on ne connaît pas beaucoup l’histoire de la Lancia, bien qu’elle soit restée en Belgique, prétendument achetée par un membre de la famille Royale jusqu’en 2007 ou elle a été acquise par un éditeur collectionneur Belge (Chromes&Flammes ?) qui l’a ensuite vendue à un Prince Italien. De retour dans son Italie natale, la voiture a été confiée aux restaurateurs réputés de la Carrozzeria Quality Cars de Vigonza en 2012. Lors du démontage de la voiture pour la restauration, la Lancia s’est avéré être dans un état très proche d’à son origine, en conservant un grand nombre de ses composants uniques, qui se seraient avérés presque impossibles à reproduire.
Fait important, la voiture avait conservé également son moteur d’origine… et au cours du processus de restauration, des traces de la peinture originale et de l’intérieur en cuir ont été trouvés, aidant les restaurateurs ramener la B52 à l’image de son ancienne gloire ! La restauration a duré 2.450 heures, dont moins 2.000 consacrées au perfectionnement de la carrosserie, tandis que la révision et à la mise au point de la mécanique ont pris le solde !
Après la restauration, la Lancia a été présentée à la Villa d’Este 2016 Concorso d’Eleganza. Situé sur la rive du lac de Côme, il est considéré comme l’un des événements “premier concours” dans le monde de l’automobile… et l’invitation de toute voiture à cet événement se veut un témoignage de son importance et de son design exceptionnel. C’est purement une affaire de gros sous et de pédanterie crapuleuse qui attire un grand nombre d’escrocs et de Dames avenantes en quête de rédemption sexuelle… Les hôtels sont ainsi bondés… Là,dans ce souk hyper-chic, la voiture a été inscrite dans la classe “Âge d’or” patronnée par le magazine américain “Sports Car Design”, qui l’a glorifiée en lui attribuant le deuxième prix dans cette classification. Outre qu’elle a ainsi vu sa valeur multipliée par trois, la voiture a reçu une carte d’identité FIVA dans la classe A/3 assignée (véhicule historique restauré) et a également reçu un certificat d’identité ASI assurant à son propriétaire divers reportages dans la presse !
D’un coup, la belle et véritable petite horreur est ainsi devenue un “one-off” construit avec amour de l’art par l’un des carrossiers les plus célèbres d’Italie, cette B52 Spider présentant : “La flamboyance italienne d’après-guerre et le design à son meilleur niveau”... Son pedigree de salon automobile d’époque et son aspect contemporain ainsi primé au Concourso d’Eleganza Villa d’Este prouvant aux ignares et au Vulgum-Pecus que son design avait perduré au pinacle du fil du temps (sic !) et que “La beauté suave” était tout aussi attrayante (re-sic !) aujourd’hui (à la date de cet évènement mondain) qu’il l’était en 1955… sans doute grâce à son incroyable restauration (cette mention permet au carrossier de doubler ses tarifs).
La Lancia Aurelia a été conçue et construite alors que l’Italie luttait pour se remettre sur pied après la Seconde Guerre mondiale et faire oublier la dictature Mussoliniène, elle apparaissait incroyablement sophistiquée comparée aux Fiat Topolino et Ford Tens… une rationalisation de la sous-estimation générale de cette époque. Les fans de Lancia ont sauté sur cette occasion pour affirmer que l’Italie toute entière considérait qu’il s’agissait de l’une des trois plus grandes automobiles de tous les temps (Sic et re-sic !) et le modèle phare de l’entreprise suivies de la Lambda et de l’Aprilia, chacune devant être célébrée à la fois pour leurs sauts technologiques en avant (gag !) et l’effet qu’elles donnaient aux (intrépides) conducteurs qui les maîtrisaient “à l’Italienne”…
Mais contrairement à la Lambda et à l’Aprilia, l’Aurelia était surtout reconnue pour ses variantes sportives : la B20 GT et la “glamoureuse” B24 Spider (et Cabriolet). Dans cette euphorie, pas grand nombre de journaleux ne “causaient” de la Lancia qui fournissait la majeure partie (la plus cruciale) des ventes, donc des rentrées financières, mais qui est maintenant un spectacle très rare à voir, y compris la Berlina 4 portes et 4 places.
ll y a très peu d’informations sur la Lancia de cet article, surtout pas aux États-Unis. Elle est unique et la plupart des autres plus “communes” sont nichées en Europe et ont rarement été conduites par des gens de la presse. Je l’ai connue en 2012, elle m’a possédé durant un cauchemar d’environ 5 ans… Elle avait son moteur d’origine et la voiture était en état moyen mais tout aussi d’origine que son moteur fatigué. En fait, je l’avais achetée sans l’avoir vue, et j’ai direct regretté car il y avait trop de choses à faire et défaire. Quoique dans l’ensemble elle représentait un morceau plutôt délicieux de l’histoire du début des années 1950, elle n’était qu’une voiture “faite à la main” qui avait besoin de parcourir quelques centaines de kilomètres pour “se coucher” comme une belle dans un lit en attente de se faire besogner et de donner aux mâles en rut le sentiment qu’elle était une Dame plutôt qu’une Trainée, une reconnaissance qui ne vient quasi jamais instantanément.
Cette voiture fonctionnait plus ou moins correctement, chaque vis, bouton, raccord, tuyau, roulement, etc. rien n’avait été touché, en conséquence, tous les systèmes et les aspects majeurs fonctionnaient plus ou moins bien. Le moteur démarrait proprement après une dizaine de sollicitations haineuses, il tournait en hoquetant au ralenti. À chaque trajet, à chaque série de kilomètres, ça allait de mieux en pire, mais après quelques centaines de kilomètres, la boîte de vitesses s’est ouverte, la deuxième vitesse réagissait pourtant encore bien. Quand tout était chaud, la boîte de vitesses était comme du beurre fondu, mais froide la deuxième était récalcitrante voire têtue comme une Dame qu’on voudrait violer, mais la troisième et la quatrième fonctionnaient bien.
Les boîtes-ponts de la série de Lancia d’où a été extrapolée ce “One-off” donnaient aux intrépides conducteurs une étrange sensation plus mécaniquement masturbatoire que doucement voluptueuse dans un vagin sur-lubrifié, c’est dire que sur ce modèle les changements de vitesse ne décevaient toutefois pas. La direction de la voiture était par contre moins feutrée, plus directe et en zigzag… Je me suis donc dit que la reconstruction du boîtier de direction était recommandée, cette voiture avait en effet un énorme point mort tout droit, probablement dû à des engrenages usés dans la boîte. Il y avait toutefois très peu d’auto centrage, mais les freins avaient une bonne puissance, quoiqu’ils dussent être réglés manuellement de temps en temps pour éviter les freinages d’un seul côté (gag !), amenant à des toupies abracadabrantes… Un travail fastidieux !
La voiture était équipée d’amortisseurs à levier d’usine à l’arrière et ils fonctionnaient rudimentairement “assez bien-pire” (sic !) que les amortisseurs à tube des voitures plus récentes, mais pas assez pour suggérer un changement, bien que j’eusse reçu un kit d’époque pour mettre des amortisseurs de type plus récent sur la voiture. Je décrochais l’arrière même si j’utilisais de bonnes routes avec de longs virages. Mais pour les coupes rapides, il était impératif d’être prudent, cela était dû au poids, mais aussi à la suspension. Lâcher l’accélérateur sur toute courbe sérieuse était à éviter, car la Lancia Aurélia se soulevait du cul, tout simplement sur ses pneus maigrichons comme les jambes d’une pauvrette laissée pour compte dans le caniveau, et … tout cela sans vous parler des tensions nerveuses lorsque je repense à la petite zone de contact en caoutchouc… Pareil que pour un préservatif assez mince, c’est l’angoisse au moment d’éjaculer !
Je pouvais expulser (chier) l’arrière en relâchant l’accélérateur, c’était vivifiant, presque incontrôlable mais directement relevant quasiment de l’équitation de cirque. La relation était simplement plus tactile, plus en non-contrôle. C’est probablement pourquoi les pilotes de course devenaient fous – ils devaient répondre rapidement aux dérobades grâce à leurs compétences, la Lancia ne tolérant pas l’insuffisance – il faut en effet garder toute son attention pendant qu’on est encore réactif ! Sur une bonne route absolument plane elle roulait sur une ligne en zigzag avec un roulis infernal. C’était fascinant, différent (pour un écrivain) des voitures plus récentes. Conduire cette Lancia, c’était masochistement chercher les emmerdes. Cela pouvait prendre une dizaine de minutes pour y arriver, mais ce n’était qu’à ça que servait cette voiture !
Le plus grand plaisir était juste de savourer toute la connerie de l’expérience que j’avais à tenter de la conduire. Un changement de direction, et HOP ! Ça coulait ! “L’anti-directabilité” magique de cette Aurelia était permanente, je cherchais des virages, des endroits avec des courbes, des endroits juste pour revivre des sensations suicidaires. Cela ressemblait à celles que j’avais vécues avec une Gulietta. Ce n’était pas seulement la suspension, cela avait à voir avec toute la voiture !
C’était la conséquence des folies des ingénieurs tout-puissants de Lancia qui étaient connus pour apporter sans cesse des modifications aux modèles établis dans un programme d’amélioration continu et coûteux… Le moteur V6 conçu par Francesco de Virgilio et développé sous la direction de Vittorio Jano, était d’avantage une épopée hilarante constante, souvent fumante, bien qu’il soit passé au fil des ans de 1,8 à 2,5 litres. De plus, c’était une première mondiale pour une voiture de production d’avoir une boîte de vitesses qui se trouvait en transaxle entre les roues arrière, abritant également l’embrayage, une telle complexité allait à l’encontre de la simplicité de la voiture.
Tourner une dizaine de fois la petite clé et appuyer sur le bouton de démarrage finissait par donner vie au petit V6 dans un thrum-thrum légèrement décalé. Il fallait ensuite pousser le levier de vitesse (qui se trouvait sous la jambe gauche de l’infortuné conducteur !) vers l’avant en tirant légèrement vers le haut dans la première, et simultanément farfouiller sous le tableau de bord pour atteindre et libérer le levier de frein à main. Dès qu’elle roulait, la première chose que j’ai toujours remarqué était que la Lancia ne flottait pas comme une Citroën DS ou ni ne tanguait comme une Bentley MkVI, mais frappait brutalement ses amortisseurs qui rebondissaient tout heureux d’amplifier les tremblements mineurs tout en me tenant informé de la surface de la route, une sensation préoccupante obligeant à avoir un sang-froid total dans les virages rapides.
J’ai rapidement appris qu’il était contre-productif d’essayer de contrer la moindre glissade des roues avant dans les “tout-droits” des jours de pluie lors d’un freinage trop appuyé… la totalité de la Lancia se tordait alors (de douleurs effroyables) en gémissant, les portes pouvaient alors s’ouvrir et la capote se repliait quasi toute seule ! J’ai remarqué plus de flexion dans le châssis de cette Aurelia qu’en sautant en Trampoline !
Pour ce qui ressemblait à un design plutôt décoré façon Kitch, il était parsemé de caractéristiques intrigantes, comme les petits boutons brillants placés dans chaque seuil de porte, par exemple, ou un dipstick dans le bouchon de remplissage d’essence (un moyen de contrôle si la jauge de carburant échouait). Le volant était situé sur la droite, non pas parce que c’était une voiture destinée au Royaume-Uni ou à l’Australie voire le Japon, mais parce que les Aurelia étaient “à droite”. L’Italie était passée à la conduite sur la droite (volant à gauche) dans les années vingt, mais Lancia la plupart du temps restait coincé avec la conduite à droite dans les années cinquante. En fait, Lancia considérait la conduite à gauche comme une option à coût supplémentaire et les voitures ainsi conçues avaient un S dans leur numéro de châssis.
Les gens de l’époque où elle me possédait (gag !) aimaient clairement le regard de l’Aurelia, mais la plupart l’approchaient avec un léger froncement de sourcils ou avec leur tête sur un côté, en essayant de comprendre ce que c’était : “Est-ce une Saab ou une Volvo ?” m’a même un jour demandé un pompiste ! Elle est restée en 2020 l’exemple typique de la “bagnole-à-la-con” qui va fasciner les hurluberlu(e)s, bousiller leur cerveau plus efficacement qu’avec une seringue de vaccin anti Coronavirus directement plantée dans un de leurs yeux. Sauf qu’elle a souvent peiné à réellement hypnotiser les foules, tant sa radicalité faisait oublier une donnée simple : le plaisir de la conduire éclaté par l’alcool et la drogue, bouffé par la mémoire d’amours perdus !
Voilà, si cet article est trop court, lisez-le en boucle…