1956 410 Ferrari-Ghia SuperAmerica Wilke…
A la date ou tout ce qui suit a été écrit (en 2009), seulement 12 élus parmis les rares véritables aficionados reconnus par la très sainte confrérie des Ferraristes-Illuminatis, pouvaient disposer de la “folle reconnaissance Maranéllienne” (seulement accordée aux “sages parmi les sages” qui possèdaient au moins une 166F2, une 250GTO, une 410SuperAmerica, une 500Superfast, une F40, une Enzo… et avaient signés pour une LaFerrari)…, leur permettant :
1° de consulter une fois dans leur vie, la totalité des chapitres sanctifiés du grand livre sacré d’Enzo Ferrari, conservé pieusement dans le coffre-fort personnel de Luca di Montezemolo…
2° de recevoir un exemplaire relié en cuir beige surpiqué de rouge des versets sataniques de Fitzgerald et Merritt, un livre rare et béni par le Pape en personne, communément nommé “Ferrari : Le sport et les voitures de Gran Turismo”, généralement considéré comme la bible de la marque au cheval cabré.
Excepté ces 12 apôtres qui étaient des initiés disposant du savoir suprême de tout ce qui est Ferrari, quasi aucun Tifosi, même parmi les plus fanatiques du Cavalino ignoraient la réelle et fantastique histoire de la 1956 Ferrari-Ghia SuperAmerica Wilke et étaient incapables d’identifier cette voiture très particulière, la seule et unique 410 surnommée dans certains cercles Ferraristes élitistes aux USA, comme étant “La 510-Wilke”…
L’existence de cette voiture mythique seulement connue des initiés, a commencé en mars 1955…, Robert C.Wilke, un amateur de voitures rapides bien connu par son sponsoring des compétitions Indy 500, était avant tout un entrepreneur hors-pair…, conscient d’être hors-norme… et menant la vie de château dans le Wisconsin (USA), respecté par ses ouvriers pour ses compétences humaines et professionnelles, mais craint par son beau-père banquier…, un couard qui n’osait pas assujettir les femmes “comme elles devraient l’être”…, dixit Robert C.Wilke !
Bâtir, c’est ça la vie…, le développement de cette vision du monde rapprochait d’ailleurs Robert Carl Wilke de la démarche d’Enzo Ferrari et de tous les dictateurs sévissant ou ayant sévi dans le monde…, l’entourage de ces despotes, pas toujours éclairés, ne faisant qu’encenser leurs prétendues qualités fondamentales auxquelles les gens épris de libertés sont insensibles.
La construction de leurs biographies, généralement de leur vivant, parce que morts, les langues des opprimés se délient (sic !)…, se voue à démontrer à quel point ces héros sont géniaux, que non seulement leur folie est légitime, mais qu’en plus elle est un cadeau pour l’humanité…, un stratagème que les “merdias” complices emploient dans des articles dithyrambiques auto-psychanalytiques et autres divagations souvent non-sensiques, qui assurent à elles seules un bon quota du potentiel hallucinatoire du public.
Il n’y avait aucun domaine où Robert Carl Wilke ne pouvait asseoir avec fermeté sa suprématie naturelle, quoiqu’il résistait de plus en plus difficilement aux assauts insistants de son égo : il voulait plus que posséder une Ferrari hors-pair et hors-norme pour compléter sa collection de Ferrari : il voulait customiser une Ferrari 410 SuperAmerica…, un désir trouble qui finira quelques années plus tard par avoir raison de sa fragile santé mentale…
Donc, après avoir longuement soliloqué sur les troubles métaphysiques d’une telle situation (parfois en présence de son chien Enzo, son confident privilégié), il va sauter le pas et partir à Maranello rencontrer Enzo Ferrari…
Nous sommes en plein milieu des années ’50, en plein centre d’une décennie à servir la cause du capitalisme triomphant, Enzo Ferrari n’a plus trop envie de rigoler, il s’est essayé à la création d’utopies roulantes et compte tenu du succès commercial grandissant, il aimerait bien poursuivre dans cette voie et broder des histoires sur les mêmes canevas narratifs qui l’obsèdent alors : la quête de l’amour véritable des automobiles sportives, hors des convenances d’une société dont il exècre les hypocrisies bienséantes, la sacralisation de la figure de l’homme italien “vavavoum, avanti”, qu’il faut choyer avant que le temps n’ait fait son désastreux office… et, last but not least, se construire un sur-moi à la hauteur de son ego insatiable.
Lui et Robert C.Wilke sont fait pour s’entendre, ils sont partis de rien, ils vivent le quotidien quelles que soient les circonstances, sans faillir, avec la même constance, à la pointe du combat, toujours on les aperçoit sachant remonter leurs manches, s’il le faut même le dimanche…, ils se battent pour gagner un maximum…, c’est ça leur honneur, c’est ça leur loi : être patron d’entreprise… et être entourés de jeunes femmes venues des terres lointaines, le sourire aux lèvres, l’âme sereine et les cuisses écartées…, avec courage ils œuvrent pour eux, portant leurs ambitions…
R.C.Wilke subjugué par Enzo, qui est subjugué par les millions de Wilke, commande un châssis roulant avec moteur/boîte/et trains roulants d’une Ferrari 410 Superamerica qu’il compte confier à Ghia pour créer une voiture de rêve.
Pendant que les techniciens et ouvriers de Ferrari, dans le début des années ’50, s’affairent à construire des voitures de compétition, une partie des ingénieurs de la marque travaille sur des automobiles de luxe produites à l’unité…, la cadence est très faible : moins d’une Ferrari par mois pour la première d’entre elle, la 342 America.
Présentée en 1952 la voiture, carrossée par Touring, est équipée d’un moteur dérivé de la 340 de course et d’un châssis un peu rallongé pour donner de l’espace dans l’habitacle…, seulement six Ferrari 340 seront construites, dont les plus remarquables sont celles carrossées par Pininfarina…, c’était la première fois que Ferrari travaillait avec ce carrossier turinois.
Au salon de l’automobile de Paris de 1953, deux voitures routières sont présentées au public, toutes deux équipées du moteur V12 de l’ingénieur Lampredi…, la première, la plus petite, est une 250 Europa…, l’autre, beaucoup plus impressionnante est une 375 America sur laquelle a été monté le moteur de 4,5 litres utilisé en formule 1 et sur les voitures de compétition de la marque…, extrêmement puissant ce moteur fait de la Ferrari 375 America la voiture de luxe la plus rapide du monde…, dix Ferrari de ce type seront fabriquées pendant les deux années de production et c’est encore Pininfarina qui réalisera la carrosserie de la majorité d’entre elles.
En 1955 Ferrari présente, au Salon de l’Automobile de Paris, une nouvelle GT, mais cette fois sous forme d’un châssis seul…, la voiture complète faisant ses débuts au salon de Bruxelles un an plus tard : une 410 SuperAmerica carrossée par Pininfarina…, la voiture est très imposante : l’empattement a été porté à 2.800 mm, les voies avant et arrière sont respectivement de 1.455 mm et 1.450 mm, quant au moteur V12 à 60°, réalisé entièrement en alliage léger, il dispose d’une cylindrée de 4.962cc…, alimenté par trois carburateurs Wéber il délivre une puissance maxi de 340 chevaux à 6000 t/mn…, la 410 SuperAmerica pesant aux environ de 1200 kg, la vitesse maxi annoncée est de 260 km/heure.
Trois séries de SuperAmérica vont être produites…, la première en 1955 comprendra 16 exemplaires principalement carrossés en “silhouette-coupé” par Pininfarina…, la seconde en 1956 et 1957 comprendra seulement cinq exemplaires…, la troisième en 1958, avec une nouvelle carrosserie de Pininfarina, comprendra douze exemplaires…, parmi les modèles de la première série des 410 SuperAmérica, trois ne furent pas carrossées par Pininfarina…, deux l’ont été par le carrossier Boano et une par l’italien Ghia, c’est ce modèle qui est présenté ici.
Robert Wilke va prendre possession de sa voiture en 1956… et il va la conserver près de vingt ans…, pendant cette période il continuera à acheter d’autres modèles Ferrari pour augmenter sa collection et tenter de devenir “Sage parmi les sages”…, mais il ne sera jamais l’un des 12 élus parmi les rares véritables aficionados reconnus par la très sainte confrérie des Ferraristes disposant de la “folle reconnaissance Maranéllienne”…, car, lassé des pannes de sa chère Ferrari, il finit par vendre sa 410 Ghia vers la fin des années 1970.
Après être passée en plusieurs mains elle est achetée en 1991 par Gary Wutke, le propriétaire actuel.., grand amateur de Ferrari, ce collectionneur possède également un autre modèle 410 SuperAmerica carrossé par Boano, ce qui lui permet d’obtenir le statut ultime qui était le rêve inaccessible de Robert.C.Wilke !
Ce coupé unique carrossé par Ghia avec un style assez extravagant, est très rarement présenté au public, une exception fut faite en 2010 pour le Concours d’Elégance de Peeble-Beach qui avait pour invité d’honneur le carrossier italien Ghia.
Au premier regard, cette Ferrari semble être un amalgame un peu bizarre des concepts stylistiques de 1950, il lui manque seulement une paire de dés recouverts de cuir Gucci, qui pendent au rétroviseur…, mais un examen plus approfondi révèle l’existence d’une conception beaucoup plus complexe, basée sur la combinaison de plusieurs éléments différents dans un seul ensemble intégré…, Robert C.Wilke lui-même a joué un rôle clé dans l’élaboration de la conception de cette horreur roulante, faisant plusieurs voyages en Italie avant et pendant la construction de la 410.
Afin de mieux comprendre pourquoi ce one-of-a-kind-Ferrari a vu le jour, il suffit de regarder l’homme responsable de ce massacre : Robert Carl Wilke, propriétaire d’une entreprise leader à Milwaukee, qui a joué un rôle actif dans la course automobile depuis 1935…, et dont son implication directe avec le Commendatore Enzo Ferrari a commencé en 1952, quand il a acheté sa première Ferrari : une 250 Mille Miglia.
Passionné d’automobiles… et ce de longue date, Robert C.Wilke a acheté plusieurs créations d’Enzo Ferrari qui avaient participé aux courses de Monza en 1958 et 1959…, il a lui-même participé aux courses Indy racing de 1959 à 1970, simultanément au fait que son fils assumait la responsabilité pour le programme de course de son entreprise…, en 1959, R.C.Wilke a remporté les 500 miles avec Rodger Ward au volant…, Ward a répété cette performance en 1962 avec Bobby Unser et une fois de plus en 1968 avec Sheldon Kinser et Billy Vukovich.
Il a fallu environ un an à Ghia pour terminer la 410 Superamerica de Robert Carl Wilke…, la calandre surdimensionnée est l’oeuvre de Mario Buono, toute la partie avant n’est pas sans rappeler la Dual-Ghia et les scooplike des ailes avant ressemblent étroitement à ceux du prototype à turbine de Ghia de 1955…, la carrosserie est en aluminium “handformed” avec de nombreuses et complexes courbes composées qui représentaient le défi le plus difficile à réaliser (ces mêmes lignes fluides en lame de couteau sont apparues plus tard sur la Chrysler Ghia Dart de 1957).
Robert C.Wilke était furieux de cette duplication, surtout quand il l’a vue devenir la base de la “Flight-Sweep” de Virgil Exner…, ironiquement, cette Dart se trouve aujourd’hui dans une résidence permanente au fond de l’océan Atlantique, victime du naufrage de l’infortuné paquebot de luxe italien Andrea Doria.
La Ferrari 410 Ferrari-Ghia-Wilke est hybride, construite sur une version modifiée d’un châssis de production, le cadre tubulaire/plate-forme en aluminium conserve les ressorts hélicoïdaux de suspension avant de la 410, ainsi que l’essieu arrière fixé en direct par des entretoises de support latéraux et des ressorts semi-elliptiques…, les freins à tambour aux 4 roues utilisés à l’origine sur la 410 ont été remplacées à l’avant par des freins à disque plus puissant.., tandis que les roues à rayons Boranni 16 pouces sont des knock-offs sur lesquelles sont montées des pneus d’origine course Engelbert.
Le cœur de la 410 est son 5.1-litre SOHC V-12 de 340 chevaux, une conception d’Aurelio Lampredi sur base d’un moteur 4.5 litres Ferrari modifié pour une utilisation urbaine mais réalésé à 4,9 litres.., fidèle à son héritage de course, le moteur a des têtes de cylindres hémisphériques, deux distributeurs et deux bobines… et les deux pompes mécaniques sont assistées aux reprises par une pompe auxiliaire électrique pour alimenter un double-trio de Weber 40 DCF…, les arbres à cames sont entraînés par une chaîne à rouleaux triple…, le bloc et le carter sont moulés en alliage léger et utilisent des inserts en acier. .
Bien que le tableau de bord, très kitch et blingbling, ressemble à quelque chose issu d’un casino de Las Vegas…, le massif quadrant solaire central chromé abrite divers contrôles complexes pour le chauffage, la pompe à carburant électrique, le témoin de parking (gag !) et celui des phares…, alors que l’instrumentation comprend la température et la pression d’huile, un indicateur de température d’eau, une horloge, un compteur de vitesse gradué jusque 180mph, et un compte-tours indiquant 8000 rpm maxi (qui a vu son aiguille enterrée plus d’une fois)…, un assez grand volant a été utilisé pour aider à contrôler la direction “par intérim”…, non assistée (c’est pas drôle !)… et la transmission à 4 vitesses est accouplée au moteur via un embrayage mécanique triple disque.
La voiture semble aussi à l’aise dans les airs et sous la mer, que sur terre…, mais ce n’est qu’illusion…, la direction est lourde à toutes les vitesses… et c’est suicidaire de dépasser les 100 mph en restant relativement calme et tranquille en attente d’une mort affreuse et douloureuse dans une sortie de route catastrophique…, tandis que le taux d’adrénaline à tendance à augmenter à mesure que le compteur de vitesse pousse dans des lectures hasardeuses de plus en plus élevées à 3 chiffres…
La 410 Superamerica Ghia de Robert C.Wilke est aussi laide que dangereuse, instable et caractérielle, lourde et imprévisible, mais elle est restée unique… et c’est son seul point positif : être une attraction de foire relativement inconnue…
Avant d’arriver en Amérique en 1956, cette Ferrari a été exposée au salon automobile de Modène, puis Robert C.Wilke durant plusieurs années, épisodiquement, a tenté de l’utiliser normallement, sans grand succès, la voiture affichant un taux de panne record…, furieux et dépité, Robert Carl Wilke a finalement enfermé la belle dans son garage-blokhaus sécurisé… puis a finalement décidé de la vendre !
Après être passée entre plusieurs mains souvent sales…, elle a finalement échoué, tel un cachalot en fin de vie, entre les mains de Gary Wutke…, qui n’a jamais eu aucun autre plan que d’exposer cette voiture à Pebble-Beach en 2010, alors qu’elle n’avait que 7.600 miles au compteur et une valeur estimée, hautement improbable, de 1.000.000 de dollars…
Depuis il se tââââte : va-t-il la garder, va-t-il la revendre, va-t-il la garder, va-t-il la revendre, va-t-il la garder, va-t-il la revendre, va-t-il la garder, va-t-il la revendre, va-t-il la garder, va-t-il la revendre, va-t-il la garder ?