On nous parle souvent de crimes terribles, je ne vais pas vous en parler ici, les crimes sont assez ignobles pour qu’on les laisse où ils sont et qu’ils ne viennent pas polluer si ce n’est pas nécessaire… on sait aussi qu’en dessous des crimes, il y a les délits et parmi eux la contrefaçon !
En droit, la contrefaçon est la reproduction ou l’imitation d’un objet, d’un document (en particulier officiel), d’une œuvre ou d’une marchandise, soit en indiquant ou en laissant présumer que la chose est authentique, soit en violation d’un droit de propriété intellectuelle ou du droit d’auteur.
Ces choses étant posées, je vais pouvoir m’ouvrir du drame que j’ai vécu… comme chacun le sait, je suis de nature affable, plutôt froid quand on ne me connait pas, on a tôt fait de se dire dès que la glace est rompue que je suis décidément charmant et que ce fut un drame atroce que de ne pas m’avoir connu car j’enjolive la vie d’absolument tous les gens que le destin a mis sur ma route… je suis aimable et gentil et bourré à ce point d’empathie que le chien le plus fidèle vous apparaitrait comme le chat le plus distant à côté de moi.
Un charme à toute épreuve, une vaste culture et une vive intelligence me permettent d’être une personne avec laquelle on aime deviser gaiement ou avec laquelle on peut aborder des sujets plus sérieux, car je sais m’adapter, ainsi, tandis que je me sentais “Shelbyman”, ayant en ma possession une authentique véritable Mustang Shelby GT350 et une authentiquement fausse Shelby Cobra 289, je ne pouvais voir un véhicule de de ces types croiser ma route sans faire un petit signe de main discret de manière à en saluer l’heureux propriétaire… même assis à la terrasse d’un café, je ne dérogeais pas à cette règle sacro-sainte : entre “Shelbyman”, on s’estime et on se salue !
C’est ce que j’ai souvent expliqué à mes amis et amies surpris de ne me voir jamais saluer quiconque, pour la bonne et simple raison qu’on ne croise jamais de “Shelbyman” authentiques, sains et biens nés, personne n’est aussi inconnu pour un “Shelbyman” qu’un autre “Shelbyman” puisque la possibilité que deux se rencontrent en France chacun au volant d’une de leurs Shelby authentiquement véritablement vraies est proche du néant absolu… mais ça, la plouquesque des “ceusses” qui ne possèdent pas de véritables et authentiques Shelby… ne peut le saisir.
Hélas, trois fois hélas, ayant peu l’occasion de sortir mes Shelby, je me suis décidé à céder ma vraie fausse Cobra 289 à une personne docte, érudite et bien-née qui saurait mieux en profiter que moi… en contrepartie d’un solide montant conséquent… je suis donc rentré dans un processus de deuil que tous les possesseurs d’automobiles rares et plus ou moins authentiquement authentiques connaissent bien.
Ma grande humilité n’ayant pas triomphé d’un mauvais penchant pour le luxe, force m’est ici indispensable d’avouer à nouveau que ma Cobra 289 était authentiquement une réplique, je ne pouvais pas continuer ma vie en me contentant d’une Cobra 289 Réplica et j’ai donc décidé d’acquérir une authentique Shelby 289, qui devrait et s’avèrerait plus authentiquement authentique qu’une 427 S/C, ce sont d’ailleurs les 289 qui ont mis la pâtée aux Ferrari 250GTO…
Autant vous dire, que les Cobra authentiques sont basiques, les équipements, s’ils existent, sont pléthoriques : pas de radiocassette avec commandes à palettes au volant (sic !), pas de climatisation, pas de lève-vitres électriques, pas de direction assistée ni de freins assistés, pas de chauffage, pas de confort… j’en reste là, tant il y aurait à en dire… les passionnés, et je me doute qu’il y en a, seront avisés de ne rien ajouter!
Si le possesseur d’une réplique de Cobra 289 est généralement joyeux, le réel possesseur d’une authentique Cobra 289 est frustre… car ce n’est pas un oisif lascif comme l’est tout possesseur de Kit-Cars, ils ne se saluent donc pas, pas de temps à perdre entre le pestiféré de sévices et sa fausse breloque… et le Saint-Homme au volant de son authentique bétise… le vrai “Shelbyman” possesseur d’une authentique Cobra étant un homme pressé et affairé qui va d’une occupation à l’autre, qu’il s’agisse du travail ou d’aller baiser des putes… car la Cobra 289 est une sorte d’utilitaire en faire valoir !
Néanmoins de la même manière qu’une femme enceinte remarque toutes les femmes enceintes alors qu’habituellement elle n’y aurait pas prêté attention, le possesseur d’une Cobra 289 authentiquement vraie remarque évidemment toutes les fausses Cobra d’un seul coup d’œil et ne peut s’empêcher de sourire en se disant que ce monde est décidément stupide !
Et bien sur, en parfait connaisseur comme vous aurez pu le constater au cours de cette longue introduction qui n’aura pas manqué de vous passionner, je reconnais maintenant du premier coup d’œil une authentiquement vraie Cobra, à de tous petits détails que le béotien serait bien en mal de distinguer tant le sublime ne le passionne pas.
Car si tout un chacun peut reconnaitre une Cobra tant sa ligne tranche dans ce monde fade et banal, il n’est pas si aisé pour la plouquesque de reconnaitre une authentique par rapport à une réplique, c’est une affaire de spécialiste pour laquelle aucune formation n’existe, c’est du vécu, il faut avoir possédé une vraie Cobra pour les reconnaitre dans la masse des fausses encore en circulation !
Je suis évidemment devenu un spécialiste, aidé en cela par un sens de l’observation aiguisé et une sagacité de tous les insistants… dans ma tête s’allume une petite lumière qui me fait me dire : “Tiens un Shelbyman”… ou “Tiens voilà un qui se la pête d’un coup, d’un seul”… je me dis que quelle que soit la crise morale que l’on vit, il est satisfaisant de constater qu’il existe encore des gens qui le moment venu sauveront l’humanité.
La Cobra 289 est l’objet ultime qui m’oblige à croire en l’homme et me permet d’affirmer que Dieu a un grand dessein pour nous et qu’il ne nous laissera pas tomber (sic !)… c’est même assez étonnant que Saint-Jean n’en parle pas dans l’apocalypse… car mes bien chères sœurs et mes cons de faux-frères, je vous le dis : “La Cobra sauvera le monde”…
Et puisqu’on est là pour tout se dire, je vais vous avouer que, bien que je nage dans le bonheur le plus parfait, il m’arrivait parfois d’avoir du vague à l’âme de n’avoir qu’une Cobra 289 Réplica… cela m’a attristé un moment parce que je me suis dit qu’il fallait absolument que je la vende pour acheter une authentique d’époque…
Je sais que c’est idiot mais je ne voulais pas un jour avoir à subir le sourire dédaigneux d’un puriste… j’ai beau me dire stoïcien, le chemin est long pour devenir Épictète… je me dis souvent que c’est une épreuve que des fantômes m’infligent pour venir à bout de mon orgueil.
Mais revenons à nos moutons… feuilletant le catalogue numérique de Barrett-Jackson, tombant nez-à-page sur une Cobra 289, je me suis soudain senti un peu comme un étudiant puceau de l’École du Louvre au musée des Offices à Florence : éperdu devant tant de beauté… et j’ai manqué faire un syndrome de Stendhal : “Accélération du rythme cardiaque, vertiges et suffocations”.
J’en ai ressenti tout et plus, à la limite de l’hallucination, car confronté à cette merveille… j’ai senti que le besoin de plaire et d’être admiré devait-être tel chez certains esprits faibles, qu’ils ne devaient reculer devant rien pour contenter leur égo bouffi : une rage folle m’a alors saisi, une envie d’aller l’acheter !
Je me suis dit devoir me souvenir que les choses ne sont pas toujours ce qu’elles sont et me défier des illusions ou des transports des sens… devant admettre que certaines personnes parmi les plus nuisibles que compte la création, sont prêtes à tout dans l’assouvissement de leurs noirs desseins.
Satan est toujours là prêt à tromper les âmes pures… grâce à lui, d’un coup ça y était… j’ai enfin pu vendre ma Cobra Réplica, finalement elle est partie assez vite et a un bon prix, je n’en espérais pas autant, je me suis ensuite dis que j’aurais même pu en demander plus…. que je devais être content mais toutefois ma joie s’est assombrie par le fait que j’ai du fréquenter, l’espace d’un instant, des gens que je déteste à peu près autant que les cyclistes : les collectionneurs.
J’avais eu l’occasion d’en parler voici quelques temps, lorsque pour faire plaisir à des amis, j’avais participé à un rallye de voitures anciennes et que j’avais du les fréquenter toute la journée…
Hallucinant… j’avais du me taper une cohorte de médecins et de dentistes et autres cadres supérieurs, ne jurant que par leurs bagnoles qu’ils bichonnaient sans cesse, ne s’en servant que l’espace de réunions de ce genre… toute la sainte journée, il avait fallu que je feigne de m’intéresser aux caractéristiques de leurs voitures et à leurs mille et unes péripéties leur ayant permis de découvrir, qui le boulon manquant, qui l’accessoire d’origine.
S’agissant d’une Cobra 289, elle a évidemment intéressé les fameux collectionneurs mais en catégorie “Radins et/ou fauchés”… le pire ayant été un type âgé d’une soixantaine d’années, venu en superbe Mercedes et tout habillé de blanc, son truc ayant été de me demander s’il s’agissait d’une vraie couleur “Cobra authentique”.
Fort benoîtement, je lui ai répondu que vu que c’était une Cobra réplica et que j’en déduisais qu’il s’agissait d’une couleur “répliquante”…
Mais qu’à cela ne tienne, le crétin a tenu à vérifier en notant les références figurant sur la voiture… et là, s’agrippant à son portable, ce gros débile s’est mis en tête de retrouver la référence, qui selon lui devait être inscrite quelque part sur ou dans la voiture.
Ensuite, il m’a fait un cours, m’expliquant que les pires voitures étaient celles ayant trop de kilomètres ou pas assez, la mienne n’ayant que 45.000 km faisait donc partie des véhicules pas assez kilométrés… je lui ai alors donné le carnet d’entretien dument signé et tamponné, mais lui ce qui l’intéressait, c’était de savoir le pourquoi du comment !
Ensuite, après l’avoir auscultée sous toutes les coutures, mais sans jamais demander à faire un essai routier, il m’a déclaré qu’elle était en trop bon état et que cela lui posait problème : “Pour être franc”, m’a t il dit : “On dirait presque un véhicule maquillé” … c’est à ce moment que j’ai vu rouge… le prenant par le coude gentiment mais fermement, je l’ai raccompagné en lui souhaitant un bon dimanche… les passionnés peuvent être pénibles mais les obsessionnels sont encore pire… je déteste vraiment les “connectionneurs”.
Aux USA l’ambiance était tout autre entre gens “du même monde”… et chez Barrett-Jackson, la vraie authentique1964 Shelby Cobra Stage 289 typeIII Street Roadster… m’est apparue telle le Saint-Graal… c’était l’une des plus fabuleuses jamais construite par Shelby American, elle avait été commandé par Frye Ford de Belleville, Kansas, spécifiant le maximum d’options possibles, ce qui avait rempli de bonheur le département comptable de Shelby, qui, énumérant chaque article a pu justifier un montant stupéfiant pour cette époque) de $8,684.05 dans le registre de la société… CSX2416 avait été commandée d’usine en “Princess Blue” avec un intérieur noir, la liste d’extras optionnels a commencé avec un stade III, c’est-à-dire un V8 Small Bloc 289ci monté avec quatre carburateurs Weber “downdraft”, ajoutant ainsi un supplément de 2,595 $ au prix de base de la voiture, soit 5,195 $ (moins un crédit de 608 $ pour le moteur 289ci standard)…
La facture datée du 6 août 1964 énumérait une prise d’air de dessus de capot en aluminium, un refroidisseur d’huile moteur, jes jantes American Racing en magnésium, un entourage de calandre et des pare-chocs avant et arrière, des visières solaires, barres anti-roulis, des vitrages latéraux souples, un chauffage, des ceintures de sécurité, une radio avec antenne, un système d’échappement personnalisé qui réacheminait les gaz d’échappement sous la voiture avec les quatre tuyaux se terminant par des finitions chromées… ces articles, ainsi qu’une charge de fret de 200 $ pour l’expédition de Shelby American à Los Angeles au garge Ford de Frye, amenaient la facture à un total à couper le souffle (à cette époque) de $ 8,684.05.
Bien que cette Cobra avait été été spécialement commandée par et pour le concessionnaire Ford de Frye, CSX2416 a été vendue à Brent Ascough Jr. de Topeka, Kansas, qui a immédiatement renvoyé la Cobra à Shelby American pour la faire repeindre en Ford Rangoon Red…. après son achèvement, le légendaire photographe de Shelby : Dave Friedman a photographié CSX2416 en face du bureau de Shelby au 3221 Carter St., adjacent à la célèbre boutique originale Shelby du 1042 Princeton Dr. à Venise, en Californie… la photo est par la suite apparue à la page 86 du livre de Friedman, “Shelby Cobra : The Shelby American Original Archives, 1962-1965”, et à la page 20 de “The Complete Book of Shelby Automobiles” de Colin Comer.
Toute l’histoire ensuite est inconnue, de 1964 à 1972, année ou Les Lindley d’Anaheim, en Californie, a acheté CSX2416 y faisant ajouter des gadgets et repeindre la voiture en bronze métallique, échangeant les jantes American Racing originales contre des jantes à rayons chromés plus larges, ajoutant des échappements latéraux chromés et une barre de rouleau chromé, et remplaçant l’intérieur noir d’origine par une sellerie en cuir bronze…
C’est dans ces teintes affreuses que CSX2416 a terminé à la deuxième place au classement général lors des premières Monterey Historic Automobile Races en août 1974, puis est apparue dans le numéro d’automne 1975 de “Old Cars Illustrated” avec “des plaques de vanité” Californiennes “SUNCAR”…
Lindley a gardé CSX2416 jusqu’en 2011, année ou il l’a tranquillement vendue avec la fameuse Gumball Rally 427 Cobra CSX3243 à Donnie Gould qui a rapidement revendu CSX2416 à Donn Vickrey de Carlsbad, en Californie, avec l’odomètre à 49.830 miles.
Après une restauration mécanique achevée fin 2011, CSX2416 est apparue à la vente aux enchères Monterey Motorsports 2012 à Laguna Seca, toujours en peinture bronze, Donn Vickrey avait initialement prévu de restaurer davantage CSX2416, mais l’a vendu en l’état à David Lerian de Los Angeles en avril 2014.
À cette époque, Steven Juliano, avec l’aide de Ned Scudder et Colin Comer, s’est rendu compte que cette 289 Cobra de couleur bronze était une très rare Cobra stage III comportant diverses spécifications ultimes voiture présentée dans les livres de Comer et Friedman….
C’est tout ce qu’il a fallu pour Steven Juliano pour se déplacer, rapidement, afin d’acquérir CSX2416 et se lancer dans ce qui serait sa dernière (peut-être ?) restauration, la plus importante de toutes… en effet, pour Juliano, une restauration/remise en état méticuleuse était primordiale, non seulement pour déterminer exactement comment CSX2416 était quand il a quitté le hangar de fabrication Shelby American !
Après quatre années intenses d’efforts minutieux, CSX2416 a été achevé et était de retour dans le garage de Steven Juliano quelques semaines avant son décès… Juliano a écrit quelques moments avant de décéder avoir eu durant ces 4 semaines, les quatre plus exceptionnelles Cobra dans sa collection, un moment qualifié d’ultime : “Enfin toutes réunies sous un même toit, c’est une joie indescriptible”…
A ce stade, mes efforts financiers pour l’acquérir devaient être pharaoniques, prudent j’ai renoncé et en ai acheté une autre !
COMMUNIQUEZ AVEC ROB WILLIAMS DIRECTEMENT PAR TÉLÉPHONE OU PAR SMS AU (262) 236-7705 OU PAR COURRIEL RWILLIAMS@MECUM.COM