1969 BMW-Bertone Spicup 2800…
Grâce à mes contacts disséminés aux quatre coins du globe, j’ai pu reconstituer l’histoire d’une BMW quasi inconnue, datant de 1969, dont l’auteur n’était autre que l’icône quasi fondatrice du design italien, le seul et unique : Bertone.
La mise en lumière d’une automobile jamais produite, même si les rumeurs ricochant ça et là, au gré des confidences, évoquent une volonté un temps murmurée, que Sophia Loren aurait été intéressée d’acquérir cette verte chose (il y avait aussi en lice Aldo Maccione et Gerardo Placido, un acteur de roman-photo), vous vaut le présent texte, porté par deux aphorismes porteurs de larges promesses : “On peut tout faire par amour, tout, même l’impossible” et “Seul le vent connaît la réponse”…, un charabia qui aurait pu vous dévoiler très partiellement une intrigue mécanique ou apparaîtrait une ex-strip-teaseuse émancipée, sous fond de conspirations châtelaines et autres coucheries de mauvais aloi…
Peu avant le Salon de Genève 1969, les exégètes BMWistes d’un coté et Bertonais de l’autre, sont tombés de leur chaise, de leur lit ou de leur armoire (c’est selon), en découvrant la BMW-Bertone Spicup 2800 via quelques photos diffusées dans la presse “papier”….
Au bout de quelques jours d’angoisse, l’objet est arrivé au salon et s’est fait violemment dévorer, laissant les visiteurs groggy.
Ses plus visibles défauts, ont immédiatement assuré à cette automobile étrange de couleur pomme verte, un statut très particulier qui est immédiatement passé de bizarrerie psychédélique à horreur vomissible…
Mon récit va rapidement déployer ici, avec une densité incontrôlée (comme souvent), divers termes dramatiques se chevauchant à la diable.
Vous allez ainsi, découvrir avec bonheur (et gratuitement), ma description d’un nombre incalculé à ce jour, d’éléments récurrents de la geste Pallardesque constituant le style de cette voiture : une lubricité généralisée des lignes, les habitudes bourgeoises des BMWistes mises à mal, un dédain pour le bon goût, sans oublier la patte Bertonienne connue pour ses détails abracadabrants de carrosserie.
L’extérieur n’était qu’une fusion de courbes et de droites, d’arêtes et d’angles…, l’œil étant immédiatement attiré par le toit pointu en forme de pagode…, tandis que l’intérieur semblait inspiré d’une salade verte…, le tableau de bord (grotesque), rempli d’une quantité hallucinante de commutateurs…, parachevant le délire !
Le châssis d’une BMW 2500 de 1968, avait servi de base et d’élément porteur après avoir été raccourci… et, un six cylindres en ligne de 2800 cc remplissait le compartiment moteur (classiquement à l’avant).
La comparaison de base s’établissait avec un autre chef-d’oeuvre de Bertone : l’Alfa Romeo Montréal de 1967.
Sur le stand, à coté de cet engin, on pouvait admirer un autoportrait du célèbre carrossier, dans la pose figée de l’homme accompli que tout le monde jalouse…
Le tout avec un style pour le moins brut de décoffrage, valeur ajoutée non négligeable à l’hallucination permanente ressentie, autre élément à ne pas prendre à la légère pour distinguer cette voiture du tout venant mélodramatique
Pourtant, presque à ses cotés sur le stand BMW, trônait la nouvelle Berline Six qui représentait une aube nouvelle pour la marque, avec une ligne simple qui soulignait une qualité de construction ambitieuse.
Techniquement, la berline BMW E3 engendrait la BMW coupé E9, qui a donné ensuite naissance à une excentricité préfigurant le Tuning : la “Batmobile-3.0 CSL”.
Et comme si ce n’était pas assez d’excitation pour la gent plouquesque en dérive surveillée, le modèle 2500 de base avait offert ses fondements pour ce vaisseau spatial, vert pomme : la BMW-Bertone Spicup 2800, dont le six cylindres produisait 170 chevaux aux roues arrière via une boîte manuelle à 4 vitesses.
Le nom venait de la forme particulière du toit, en ce sens qu’il avait été conçu pour être à la fois un spider et un coupé.
C’était le point culminant de sa conception : trois-pièces de coulissement en acier inoxydable…, mais cela n’a pas empêché la Spicup d’être un échec relatif, étant totalement hors de propos et pas adaptée ni adaptable, même à une production limitée.
Le travail bizarre et martelé de Gandini et Bertone ne cadrait pas avec la direction commerciale voulue par BMW…, de sorte que la voiture a été supprimée du carnet de croquis et rayée de l’agenda de la société de production puis tranquillement vendue à un propriétaire privé, plus prompt à décaisser une somme rondelette que Sophia Loren, Aldo Maccione ou Gerardo Placido.
Ce propriétaire, de façon surprenante, a utilisé la BMW-Bertone Spicup 2800 comme voiture quotidienne, parcourant (avec bonheur) plus de 100.000 kilomètres.
A un certain moment de son histoire, la peinture vert pomme a fait place à un somptueux orange vif.
En 2007, la voiture a été acquise en même temps qu’une Indra Intermeccanica, par un nouveau passionné : Paul Koot aux Pays-Bas, qui l’a fait restaurer chez Roland D’Ieteren en Belgique, selon les spécifications d’origine : en vert pomme !
Après presque deux ans de travaux de restauration, la BMW-Bertone Spicup 2800 a été présentée par ses soins et à son coût, à l’édition 2009 du Concours d’élégance de la Villa d’Este, entre bimbos vaporeuses et bellâtres, les vieux beaux et soupirantes décaties enfilant les fautes de goût esthétiques comme des perles, avec un entêtement désarmant mais fascinant.
Et c’est elle que vous voyez ici, restaurée, vierge, assez étrange… et très verte !
J’aime assez le Concours d’élégance de la Villa d’Este ou la majorité des propriétaires des automobiles extraordinaires qui y sont exposées sont de fringants sexagénaires ayant fait fortune de diverses manières pas toujours honnête, qui affrontent, la tête haute, les jalousies et autres perfidies dont ils font l’objet, en cause de leur compte en banque turgescent et d’une ou plusieurs accortes jeune femmes à leurs bras, qui, insolentes, se rient des querelles de clocher et trouvent réconfort dans les bras d’amants divers (et d’hiver parce qu’en été, le yacht familial est incontournable pour les ripailles comploteuses de ces Cougar femelles)…
Rassurez vous si vous ressentiez une gène…, vous constatez à me lire que même en goguette à Villa d’Este, mon pétulant bordel narratif est toujours là, voguant d’innombrables fausses pistes vite abandonnées en digressions graveleuses.
L’enchaînement entre la BMW-Bertone Spicup 2800 et les ripailles d’un monde glauque, nourrit ici (et je n’en peux rien), un contexte de plus en plus nébuleux, ou les personnages apparaissent et disparaissent avec une constance à en faire pâlir plus d’une… et comme si ça ne suffisait pas, tous les protagonistes agissent selon une logique qui n’appartient qu’à eux.
Cet art du contre-pied permanent joue pour beaucoup dans la singularité de la trame de mes textes, mais, cette suite de marivaudages crapuleux et de manipulations incongrues va prendre définitivement une ampleur inattendue dès l’entame du prochain paragraphe, alors que toute votre attention s’était cristallisée sur de possibles digressions sexuelles, au détriment de tout le reste…, l’érotisme, des entre-lignes atteignant alors son apogée, pour se voir totalement annihilé par la description d’une partie de sexe saphique entre les deux passionarias jouisseuses et individualistes.
Je me suis mâle heureusement censuré…
Grâce à mes méritoires efforts, la quasi totalité des rares photographies de cette voiture est désormais publiée sur GatsbyOnline.
Sacre inespéré pour Bertone, décédé il y a quelques années, désormais considéré par certains comme un authentique carrossier créateur, frondeur, paillard, buté, mais qui fut malheureusement trop longtemps souvent retranché derrière une absence totale de recul sur son œuvre.
Ses interviews imposent l’image d’un artisan pragmatique, sautant sur la moindre esquisse d’opportunité pour réaliser les voitures du futur qui lui trottaient dans la tête ; lesquelles, en autant d’instantanés des différentes périodes de sa vie, trahissaient de façon inconsciente ses obsessions et ses opinions sur la vie, l’amour, les femmes, les gosses, les chiens, la bouffe italienne, le ciel, la mer et les jolies brunettes aux gros seins pendouillants (chacun ses choix) !
En faisant abstraction de son usage forcené du système D à grands coups de passages en force cataclysmiques (j’en ai eu des cauchemars avec quelques-unes de ses créations : quelques Lamborghini Espada et Miura, ainsi que trois Alfa-Romeo Montréal…, toutes ces données pourraient favoriser une certaine appréhension.
Bertone avait décrit sa Spicup de manière magistrale : “Les dimensions considérables des composants mécaniques ont été traitées par la création presque excessive, je vous l’avoue, de lignes fluides verticales. Dans le même temps, la partie arrière relativement importante et les ailes deviennent le point focal de la voiture. Les arceaux ont dû satisfaire à un besoin de sécurité combinées à des critères de conception très stricts mes techniciens ont résolu le problème avec un mécanisme automatique qui contient également les éléments pour la transformation du spider en coupé et inversement”…
Un baratin qui ne voulait pas dire grand chose !
Voilà pour la première couche d’appréciation.
La deuxième, non des moindres, repose sur ma façon de voir…
Dans les années soixante, les voitures créées par les carrossiers italiens étaient toutes des poèmes s’enfermant chacune dans un contretemps permanent.
Mais le meilleur et/ou le pire surgissait à chaque apparition d’une nouvelle voiture de salon…
Je vais arrêter de tout révéler.
La seule chose à retenir, c’est que ces carrossiers ne se souciaient d’aucune réalité, menant leur barque en emmerdant puissamment les lazzis critiques.
Chacune de leurs créations était une Nième représentation par l’absurde du paradoxe insurmontable entre la foi candide du designer dans son projet… et les approximations désinvoltes de l’exécution.
Qu’on ne se méprenne cependant pas : ces voitures météoriques, apparues de nulle part pour s’écraser dans diverses mains dans des proportions spectaculaires : je les adore.
Considérez donc qu’avec leur mode de fonctionnement foutraque, ces carrossiers avaient tous une personnalité fascinante… et le public d’alors était prêt à tout pour qu’ils continuent à lui asséner des objets aussi déviants, qui finissaient par avoir leur propre valeur, au-delà de toute logique.
Oui…, c’était avant les crises du pétrole…, tout le monde était prêt à tout…
Tout, même l’impossible !