1969 Holden Hurricane…
En 1969 le monde pouvait bien s’engouffrer dans les ténèbres, il y en avait au moins un, qui, arpentant les routes et les terres, pour venir l’y soustraire, frêle espoir par la primarité, par une sorte de transcendance… eut l’idée de créer une folie !
Vivant près d’une mare (celle du diable ?), dormant au sol, ne craignant pas même le feu, exorciste parfois, il s’agenouillait souvent pour prier, invoquer, réunissait ses mains devant lui comme prêt à donner ou à recevoir.
Suivant ses pas (dans tous les sens du terme), une équipe d’ingénieurs donnait l’impression d’apprendre, de s’absorber à ses actes, tout en voulant se donner à lui…, chassant l’inhumain qui traînait, qui s’infiltrait dans les âmes, une équipe dévote, transportée au ciel de l’extase, puis revenue des morts.
Et quand l’Enfer sembla s’ouvrir soudain en un gigantesque brasier ravageant l’horizon, l’Australie fut sauvée par la présentation de la Holden Hurricane…, une automobile qui demande beaucoup de résistance, voire d’abnégation, un concept-car travaillé par le vide, hypnotique, insaisissable et en même temps prégnant, qui questionne sans cesse notre appréhension face au sacré, à l’inconnu, à notre humanité et sa large complexité…
Cela suffit à calmer la fureur des éléments !
Rétrospective…
Holden, la marque Australienne de General Motors, a voyagé dans le temps pour en ramener son concept car, la Holden Hurricane de 1969.
Non seulement, 40 ans plus tard ce concept-car est encore magnifique (si ce n’est la peinture or métallisé), mais les technologies de pointe qu’il affiche : une caméra de recul, un système de navigation appelé Pathfinder, reposant sur un système d’aimants intégrés le long du réseau routier afin de guider le conducteur…, démontrent qu’il avait de nombreuses années d’avance sur son temps.
Ce véhicule “futuriste”, conçu à l’origine comme une expérience, a été restauré tel qu’il se présentait au salon automobile de 1969 à Melbourne/Australie.
Codifiée RD-001, l’Hurricane (l’ouragan, en français) est équipée d’un moteur central expérimental V8 de 4,2 litres (253ci) avec un carburateur quatre corps, le résultat final étant une puissance de 262 chevaux.
Ce moteur a été le précurseur du programme des Holden V8, qui est entré en production fin 1969 et a duré les 30 années suivantes, jusqu’à ce que la série des Holden Commodore VT-II sortie en 1999 soit équipée des V8 Gen-III importés des États-Unis.
Rien n’arrête la passion.
Depuis que l’auto se consomme (et se consume !) en masse, il y a toujours eu une demande pour des modèles à hautes performances en séries très limitées, mais selon des critères et des designs bien différents suivant les continents.
Ainsi, les disparités topographiques nous ont donné à cette époque (fin des années soixante), des sportives antagonistes… dont la Holden Hurricane est un des concept-cars parmi les plus futuristes de la fin des années ’60.
C’est la fascination exercée par la culture yankee durant les “Trente Glorieuses” et les débouchés prometteurs du marché américain, qui ont inspiré aux ingénieurs de chez Holden, cet engin aussi sulfureux que bien des voitures aussi mythiques que la Ford GT-40.
De même qu’il existe une définition du western spaghetti, il reste quelques raccourcis à éviter en matière automobile.
La culture automobile d’un pays est dans sa géographie, on ne peut comprendre les péniches mollement suspendues d’outre-Atlantique sans avoir à l’esprit la linéarité sans fin d’un réseau routier à l’échelle d’un continent fait pour circuler à des allures de sénateur, le régulateur de vitesse calé sur 70 MPH et le V8 bourdonnant à des régimes de croiseur.
Point de lacets pervers ni de sinuosités alpines pour mettre à mal les suspensions de landau et les pneus à flanc haut !
Pour susciter la frénésie consumériste des plus ardents baby-boomers, les Big Three Yankee se sont donc contentés de greffer leurs Big Blocks à d’honnêtes coupés populaires (les pony-cars), sans vouloir singer Lamborghini avec sa Miura en commercialisant une GT-40 de route en série.
Ils y ont apposé des peintures de guerre, des excroissances viriles et des monogrammes tapageurs.
Les freins restaient à tambours et l’essieu arrière rigide…, cela suffit à engendrer quelques “muscle cars” d’anthologie au plus fort des sixties : Pontiac GTO, Dodge Charger et Challenger R/T, Chevy Camaro SS, Ford Mustang Boss, Plymouth ‘Cuda…
Pourtant, mise en rime par Gainsbourg, immortalisée par Lelouche sur la plage de Deauville au petit matin, l’emblématique Ford Mustang n’a connu chez nous qu’un succès d’estime.
Par ailleurs, la plupart des versions irrégulièrement importées ne peuvent prétendre au titre de muscle cars, entendons par là qu’il ne s’agit pas des plus “gonflées”, même s’il suffit d’avoir huit cylindres pour rouler des mécaniques à Saint-Trop’.
Autre continent, autre héritage géo-historique, autres voitures.
Pour nombre de petits constructeurs à petit budget, l’Amérique qui produit des V8 en masse est le supermarché de la puissance à bon compte.
D’autant que les USA représentent un débouché tout indiqué pour les grosses cylindrées en même temps qu’une source précieuse de devises dans les années d’après-guerre.
Aux states, la répression routière et les lois antipollution ont eu raison des muscle cars, mais leur influence a perduré encore dans cet anachronisme roulant qu’est la Holden Hurricane, car en Australie, cet immense continent très peu peuplé et aux routes interminables, une sorte de Lamborgini Countach au moteur V8 américain de Muscle-Car semblait l’avenir de l’espèce.
Par le charme subversif de son profil sous stéroïdes, son bon vieux carbu quadruple corps et le grondement de son moulin à réveiller un mort, elle mariait à merveille luxe et brutalité.
Sauf qu’il ne s’agissait pas littéralement d’une muscle car, mais d’un monstre décadent, démesurément cher s’il avait fallu la mettre en production (limitée) car assemblé à la main…
C’est à cette suite qu’est arrivée en 1970 la DeTomaso Pantera…, la plus mauvaise voiture de ce style jamais imaginée…