1979/2017 : Mercedes G, de la Gadoue au Glamour…
Par Marcel PIROTTE
Dans notre monde hyper socialisé où les relations sociales ont tendance à passer bien souvent au second plan de nos préoccupations journalières, le fait de revoir des amis de longue date revêt toujours pour moi une très grande importance…, c’est le cas avec la Mercedes “Classe G“ !
G pour Geländewagen, traduisez par “tout terrain” !
Rien que de bons souvenirs !
Il y a en effet quelques 38 ans, (j’étais en 1979 encore jeune, beau et mince), je faisais la connaissance de cet incroyable 4X4 qui aujourd’hui encore, avec plus de 300.000 unités au compteur, permet à Mercedes de produire un 4X4 de (petite) série parmi les plus puissant au monde : 612 chevaux et 1000 Nm pour le G 65 AMG, ne cherchez pas, il n’y a que la nouvelle Jeep Grand Cherokee 2017 qui fait mieux avec 707 chevaux…
Début 1979, Mercedes m’avait invité à découvrir, un tout nouveau 4X4 baptisé “G“, pour Geländewagen.
A l’époque, ce tout terrain entrait déjà par la grande porte dans le club sélect des 4X4, avec notamment la traction intégrale permanente !
Seules la Range Rover et la Lada Niva en étaient alors équipées (gag !)…, mais en plus, le “G” était pourvu (également) d’un très beau châssis séparé en échelle, avec deux ponts rigides ainsi que la possibilité de bloquer manuellement les trois différentiels : central, avant et arrière…
En plus du blocage manuel des trois différentiels, la transmission comportait un choix de rapports courts et longs ainsi qu’une boîte manuelle 4 rapports…., ne souriez pas, en 1979 c’était le TOP !
Quatre types de carrosseries d’aspect rustique, aux lignes taillées à la hache étaient proposées :
– version courte 2m40 2 portes fermé…
– version courte 2m40 2 portes cabriolet + hard-top…
– version longue 2m85 5 portes fermé…
– version maxi 4m40 2 portes tôlé…
Mercedes proposait un choix de plusieurs motorisations pour le “G” :
– diesel 4 cylindres 240 GD (2,4 l de 72 chevaux)…
– diesel 5 cylindres 300 GD (3,0 l de 80 chevaux)…
– essence 4 cylindres 230 G (2,3 l de 90 ou 102 chevaux)…
– essence 6 cylindres 280 Gi (2,8 l de 150 chevaux, injection mécanique)…
Mercedes avait un peu caché que ce véhicule avait été mis en chantier tout au début des années ’70 à la demande du Shah d’Iran (c’est vraiment loin) qui voulait doter son armée de 20.000 4X4 “Made by Mercedes”.
Du coup, le constructeur allemand s’était mis à la recherche d’un partenaire qui devait être un véritable spécialiste du tout terrain.
Il le trouvera chez le spécialiste autrichien Steyr Puch connu pour ses fameux 4X4 légers Haflinger et Pinzgauer qui équipaient avec succès les armées autrichiennes et suisses.
Fort de cette expérience, le G entièrement réalisé à Graz ne pouvait dès lors renier ses origines tout en dévoilant des talents d’incroyable franchiseur, grâce notamment à une garde au sol élevée (21 cm) mais également à des pneus très accrocheurs, sans oublier un angle d’attaque inhabituel… et bien évidemment une transmission spécialement conçue.
Sur les pistes d’essais Unimog, j’avais ainsi pu me rentre compte que les croisements de ponts s’effectuaient avec une incroyable facilité, que le G entrait ou sortait avec la même aisance de trous qui auraient pu accueillir une mini voiture et qu’il grimpait ou descendait tout aussi facilement des escaliers avec des pentes de 80 %…
Et s’il ne passait pas, aucun autre 4X4 ne pouvait alors franchir l’obstacle !
Sur la route et malgré un poids à vide compris entre 1820 et 2065 kg, son comportement était honorable, du moins en considérant ses ponts rigides… mais plutôt correctement guidés et assez bien suspendus.
Quant aux performances, prière de repasser…, les blocs diesel lymphatiques avaient du mal à s’exprimer, seul le six cylindres essence tirait un peu son épingle du jeu, mais pour cette version, il fallait compter avec un peu plus de l’équivalent de 20.000 euros, à convertir en francs de l’époque !
Malgré ce handicap, ce véhicule va pourtant très vite remplacer au sein de la Bundeswehr, la DKW Munga pas assez puissante, il sera aussi choisi par de nombreux pays dont ceux du nord de l’Europe (Finlande, Danemark, Norvège), mais également par l’Algérie, le Canada et même les Etats-Unis, sans oublier la Suisse et bien évidemment l’Autriche (où il portait le nom de Puch G), afin d’équiper les forces armées et les différents corps de police.
En France, on le connaît sous le nom de P4 mais seul le châssis austro-allemand était conservé, le moteur ainsi que la boîte de vitesses provenaient de chez Peugeot.
En Belgique, après de multiples tergiversations politiques guidées surtout par des compensations économiques, c’est le 4X4 Bombardier canadien, cousin du VW Iltis qui avait été retenu !
C’était (à mon avis) le plus mauvais choix imaginable, mais il était assemblé à Forest, en Belgique (tant mieux pour les pots-de-vin en retour… et tant pis si sa carrosserie monocoque ne pouvait supporter les contraintes dues à l’utilisation d’un 4X4)…
Durant 38 ans ans, j’ai donc retrouvé à plusieurs reprises ce Mercedes G dont la conception n’a jamais beaucoup évolué, si ce n’est le montage de moteurs de plus en plus puissants associés à une finition de plus en plus soignée qui lui ont pneu à pneu permis de s’aventurer dans les beaux quartiers.
Je me souviens également d’un essai réalisé au cœur du vaste domaine du Château Lastours en France, connu des amateurs de Paris-Dakar et théâtre de nombreuses étapes avant la grande plongée vers l’Afrique du Paris-Dakar, qui alors portait “normalement” cette appellation, alors que depuis quelques années c’est devenu un rallye friqué pour friqueux en Amérique du sud…, avant c’était un régal pour les amateurs de 4X4, maintenant c’est n’importe quoi pour faire du fric !
Et puisque nous en sommes à évoquer ce rallye-raid, faut-il rappeler qu’un 280 GE (entièrement sponsorisé par Texaco via son bouillant patron, le baron belge John Goossens), poussé à 220 chevaux, a remporté l’édition 1983 avec le tandem belgo-français Claude Brasseur et Jacky Ickx (qui deviendra peu après rédacteur en chef d’AutoChromes magazine)…
Si on continue épisodiquement de voir “cette” Mercedes G qui portait le dossard 142, parader près des toilettes dans diverses expositions (les gens n’en ont plus rien à f…), attention, c’est une réplique, mais très bien refaite à l’ancienne, avec moteur comme à l’origine, y compris transmission et amortisseurs, un travail de spécialistes qui est loué (de moins en moins) pour que la gloire de Mercedes ne s’oublie pas…
A l’époque, on avait beaucoup parlé de tricheries et de pièces non conformes…, on en a retenu que le duo de vedettes qui prétendaient qu’ils faisaient bel et bien partie d’une sorte de club réservé à quelques “spécialistes de la terre africaine” (sic !), dans les six participations suivantes, avec des pièces conformes, n’a jamais pu inscrire une seconde victoire à leur palmarès…
Ce n’est pas l’étoile du berger mais ça y ressemble !!!
En outre, après l’attentat de 1981 contre le Pape, le Vatican qui voyait dans l’étoile allemande une “certaine” protection, va (attention, vous allez éclater de rire)… remplacer la Fiat Campagnola par une Mercedes G blindée, mais cabriolet (le pape croyait aux miracles), qui a cèdé le pas à une autre Mercedes, une ML un rien modifiée mais nettement plus confortable en position “debout dans la bulle”…
Fi de ces stupidités…, je me souviens d’un rendez-vous au cœur des Alpes françaises avec “la nouvelle” Mercedes G de l’époque, c’était en 2012, Mercedes voulait relancer le mythe G !
“Une G, oui mais en version AMG…, sinon rien”… avais-je dit au gens des relations-presse Mercedes… !
Ils ont craqué…, j’en ai eu une…, oh rassurez-vous, j’avais presque l’impression qu’on me confiait une antiquité…, pas de révolution mais plutôt une timide évolution pour ce G toujours livrable dans les mêmes versions qu’à l’origine, toujours avec cet aspect de fin des années ’70, toujours des lignes taillées à la hache, toujours un design de camion avec un taux de pénétration dans l’air à peu près identique à celui d’une armoire normande…, sans oublier un look rétro de gare de chemin de fer (qui me faisait penser à celle de Schaerbeek en Belgique) !
Et bien oui, Salvator Dali affirmait que la gare de Montpelier était le centre du monde, pour moi c’est la gare de Schaerbeek…
Mais pour 2012, on l’avait rendu un rien plus élégant et encore plus fréquentable auprès de la Jet Set.
Le Mercedes G n’était alors toujours pas le symbole du véritable engin de baroudeur dans tous les sens du terme, comme la Jeep et la Land-Rover…, par contre le G était imposant, même à l’arrêt…
Pour l’époque, la nouvelle calandre et la présence de feux de jour LED, étaient un plus…, alors qu’à l’intérieur, l’équipement de série comprenait l’accès internet, la navigation 3D et des nouvelles aides à la conduite (comme un radar mesurant la distance de sécurité avec le véhicule précédent), de nouveaux détecteurs d’angles morts, ainsi qu’une aide au parking.
En outre, les fonctions ABS avaient été (re) calibrées, afin d’encore mieux gérer les déplacements en off-road, tout en facilitant l’utilisation d’une remorque de plus de trois tonnes ainsi que le démarrage en côte !
Au centre de la planche de bord, trois interrupteurs permettaient de bloquer les différentiels… alors qu’un mini levier de vitesses se chargeait de faire travailler la boîte auto, à 5 ou 7 rapports selon les versions.
Les motorisations n’étaient heureusement plus les mêmes qu’à l’origine !
– V6 diesel 3 l de 211 chevaux
– V8 essence 5,5 l de 387 chevaux et 530 Nm.
Pour les utilisateurs moins friqués de 4X4 purs et durs qui aimaient le G…, existait une version “Professionnel” diesel 3 l de 184 chevaux avec boîte auto 5 rapports longs et courts, un modèle qui m’avait pourtant bluffé par ses capacités à passer littéralement partout, sans jamais donner l’impression de forcer la cadence…
En revanche, dommage d’aller griffer la carrosserie d’une version longue à 4 portes, surtout badgée AMG (le département hautes performances de Mercedes).
Rien n’était trop beau ni trop cher en AMG (c’est toujours le cas en 2017)…, en 2012 il fallait dépenser un peu plus de 140.000 € pour la G 63 AMG… et 280.000 € pour la C 65 AMG…
Il fallait sans doute être sérieusement fêlé pour dépenser tant et tant pour acquérir un engin au look des années ’70…., mais si certaines vedettes du show bizz…, divers dictateurs sanguinaires, quelques cheiks, émirs et patrons d’affaires organisées…, étaient prêts à lâcher autant de blé, pourquoi pas…, Mercedes aurait eu tort de s’en priver…
D’ailleurs, en 2017 c’est 100% pareil…, cet engin est toujours au catalogue, mais proposé 50% plus cher qu’en 2012… et une version 6X6 a même fait son apparition “obtenable” (sic !) contre un montant stratosphérique (une présentation vous est offerte sur une page suivante, comme on l’écrit en presse papier) !
D’autant plus qu’avec son V12 de 612 chevaux et 1000 Nm de couple, le C 65 AMG n’avait et n’a toujours pas de leçon à recevoir d’aucun autre 4X4, sauf de la Jeep Grand-Cherokee de 707 chevaux (plus de 1000 en version Hennesey)…, ce sont maintenant les plus puissants et les plus chers, point barre !
En revanche, je me contenterais déjà de la version Mercedes “G” biturbo 5,5 l de 544 chevaux et 760 Nm…, car j’ai été envouté par le bruit inimitable de son V8 !
On l’entend arriver… et de loin…, titiller l’accélérateur revient à diriger un concert pour grandes orgues !
Ce mini camion de 2.550 kg accélère comme une Porsche, 5,4 secondes pour passer de 0 à 100 km/h, il pointe ensuite à 210 km/h !
Et même si je sais (maintenant) que la Grand Cherokee Hellcat pointe à 290 km/h : “Grand-cherokee-bien lui fasse” !
Avec la “G”…, si tout se passe bien sur route sèche (sic !) et en ligne droite (re-sic !), c’est une autre paire de manches en virages et surtout lorsque le revêtement devient glissant…, mieux vaut adopter une conduite humble…, le comportement dynamique ne fait pas partie des qualités intrinsèques du “G”… et de plus le freinage malgré des disques hyper dimensionnés avoue bien vite ses faiblesses !
Mais quelle gueule et surtout quelle présence !
Ici le fait de monter en voiture se justifie pleinement, mais pour ce qui est de la consommation, mieux vaut qu’un généreux mécène vous prête sa carte carburant… car malgré la présence d’une boîte auto 7 rapports et d’un Stop&Start (ce qui selon Mercedes se traduit par une diminution de 13 % d’Eurosuper), comptez en moyenne entre 15 et plus de 20 l/100 km !
C’est dit-on le prix à payer pour rouler différemment (je pouffe), mais également pour faire partie de la grande famille G… dont chaque année, près de 6.600 véhicules sont encore et toujours vendus à travers le monde !
Ca vous la coupe, avouez… et bien à moi aussi !
Marcel Pirotte, pour www.GatsbyOnline.com