1992/1997McLaren F1…
Chez McLaren, les succès en Formule Un ne cessaient de s’accumuler.
Après le premier titre en 1974, McLaren était revenu au sommet dans les années ’80 d’abord avec les moteurs Tag-Porsche turbocompressés, puis ensuite avec des moteurs Honda turbocompressés, puis atmosphériques 3,5 litres, correspondant à la réglementation en vigueur. Chez McLaren, sous la coupe de l’inflexible Ron Dennis, tous les meilleurs acteurs étaient réunis pour ces succès annoncés : Pilotes de renom (Ayrton Senna, Niki Lauda, Alain Prost), motoristes efficaces (Honda, Porsche et Ford), ingénieurs talentueux (Gordon Murray…).
Mais, ce dernier commençait à s’ennuyer et se lasser de tant de succès, qu’il avait alors connu déjà chez Brabham du temps de Bernie Ecclestone et Nelson Piquet.
L’idée de concevoir une GT pour la route germa alors chez McLaren.
Quelque peu émoussé par le succès en compétition, le board du groupe McLaren (Mansour Ojjeh, Ron Dennis, Bob Hillman, Gordon Murray et Creighton Brown) tenta de trouver de nouveaux projets fédérateurs, porteurs d’image et qui pourraient maintenir la motivation des troupes.
Comme d’autres auparavant, la décision fut prise de concevoir une GT qui pourrait être immatriculée sur route.
Le chef de projet désigné fut Gordon Murray qui trouva là un terrain idéal pour exprimer sa créativité et son talent sans contraintes réglementaires.
En effet, en compétition, il faut innover, mais en s’exprimant dans le cadre d’un règlement.
Ici, c’était la latitude totale.
Pour le design, c’est Peter Stevens qui fut désigné.
Ils ont ainsi eu tous deux la chance unique de pouvoir partir d’une feuille totalement vierge et sans contrainte.
Comme pour de nombreuses supercars, McLaren construisit une usine sur mesure toute neuve à Woking en face du siège de McLaren.
Une société fut également créée spécifiquement en 1989 pour l’occasion : McLaren Cars Ltd.
Puisque étudiée sans contraintes, la McLaren F1 fourmille de nombreuses idées et innovations. Gordon Murray a exploité de très nombreuses technologies et techniques utilisées en Formule Un.
Ainsi, l’ensemble monocoque châssis-carrosserie est intégralement en composite.
La structure se compose de 94 éléments moulés, soit sous forme de sandwich carbone-Nida, soit en simples panneaux de fibres de carbone, unidirectionnelles ou tissées, selon les besoins.
Ceux-ci ont été élaborés à l’aide de programme informatique CAD à éléments finis.
La coque est encadrée par des solides longerons et des massifs caissons latéraux enveloppant les sièges des passagers.
L’ensemble de cette structure est une véritable cellule de survie à la manière d’une coque de Formule un.
A l’avant, une structure à déformation a été ajoutée en cas de choc… et la direction à crémaillère passe dans un tunnel en magnésium sur lequel se fixent les attaches des suspensions.
L’habitacle est très particulier, avec 3 places de front, avec le conducteur au centre avancé vers l’avant… et les deux passagers de chaque côté en retrait.
Cette disposition particulière des sièges permet de réduire la largeur de la voiture puisque les sièges se chevauchent très légèrement. En outre, chaque passager bénéficie ainsi d’une longueur aux jambes appréciable.
Peter Stevens l’avoue encore maintenant volontiers, c’est l’aérodynamique qui a dicté sa loi pour le design de la McLaren F1.
Très tôt dans l’élaboration de la voiture, les études en souffleries ont été menées et ont été décisives dans le dessin de Stevens.
Pas moins de 1130 séances en souffleries ont été passées à étudier et déterminer les appuis et lignes de la McLaren F1.
Le résultat est que sans aucun artifice aérodynamique, la McLaren F1 peut rouler très vite et générer de l’appui.
En effet, tout le travail de l’équipe a consisté à lutter contre la portance à grande vitesse et aussi à déterminer le l’emplacement idéal pour le centre de poussée, qui est le point où convergent les forces aérodynamiques agissant sur le véhicule.
La McLaren F1 présente en outre la caractéristique d’un empattement long avec des portes à faux très raccourcis, notamment à l’arrière.
Gordon Murray avait d’abord demandé à Honda de fournir un moteur V12 correspondant à ses desiderata, mais ses partenaires japonais avaient alors décliné l’offre.
Il s’est donc rapproché de BMW et de Paul Roche, qu’il connaîssait bien pour avoir travaillé avec lui du temps de sa période Brabham.
Gordon Murray avait alors des idées bien arrêtées sur le moteur qu’il recherchait : un V12 atmosphérique puisqu’il n’affectionnait pas particulièrement les moteurs suralimentés.
Cela tombait bien car BMW abandonnait alors son projet de M8 (une super série 8 dotée d’un V12 diabolique).
BMW cèda donc l’exclusivité de ce V12 à McLaren Cars Ltd pour sa F1.
6 litres de cylindrée, plus de 600 chevaux et plus de 66 mkg de couple !
La distribution à 4 ACT comprenait un système de variation continue du diagramme d’ouverture des soupapes d’admission… et le système de gestion, qui fonctionnait à partir d’un ordinateur surpuissant, était conçu par TAG Electronics, une filiale du groupe TAG McLaren.
Le V12 BMW fut totalement intégré dans la conception de la McLaren F1 puisqu’il était porteur comme en Formule un.
Il fut complété par une boîte six vitesses transversale réalisée sur mesure par la firme américaine Weismann avec des synchros fabriqués par Getrag.
La boîte était située sous le moteur, comme sur les moteurs Boxer des Ferrari pour permettre d’abaisser le centre de gravité de l’auto et donc optimiser la tenue de route.
Le différentiel et le pont étaient décalés sur un côté de telle sorte que la transmission du couple aux roues ne s’effectue que 5 cm en arrière de la face postérieure du moteur, avec des arbres de longueur égale.
Le poids réduit de la McLaren F1 qui se maintient à la tonne, offre un rapport poids/puissance record pour une auto de route de 1,87 ch par kg.
Le moteur V12 BMW de 6,1 litres et ses 610 ch offre une sonorité nettement plus présente et virile que le V12 des série 7 et 8 contemporaines.
Vivant et efficace, il propulse la McLaren F1 à des vitesses inavouables (plus de 360 km/h !) et procure des accélérations dantesques avec moins de 20 secondes au kilomètre départ arrêté.
Les suspensions et la rigidité de la caisse donnent un comportement routier très équilibré, sain et efficace.
La position de conduite centrale donne une vision de la route jusqu’ici inconnue qui désarçonne au départ.
Dotée d’un véritable tempérament d’auto de course, la McLaren F1 dispose en outre d’un freinage ultra-efficace qui résulte du freinage généreusement dimensionné, du poids contenu et des aérofreins qui se déploient lors de la phase de freinage pour permettre aux quatre roues de conserver toute l’accroche nécessaire au freinage.
En 1992, au Grand Prix de Monaco en mai, un petit groupe de privilégié pu assister à la présentation de la McLaren F1.
Mais l’auto était en phase finale de développement.
En janvier 1993, la McLaren F1 fit ses premiers tours sur circuit, et dès 1994 la production démarra lentement.
Mais à 1 million de dollar, dans un marché morose, les commandes se firent rares.
McLaren rebondit alors comme de nombreux constructeurs de GT et supercars sur le championnat GT nouvellement créé.
Ainsi, la McLaren F1, conçue au départ pour un “usage routier”, fut adaptée pour la compétition et fit des merveilles sur les circuits européens.
Ce fut même la consécration en 1995 avec la victoire absolue aux 24 Heures du Mans.
Par la suite, des constructeurs comme Mercedes et Porsche aligneront de fausses GT (CLK GTR et 911 GT1) exclusivement conçues pour la course qui surclasseront la McLaren F1.
En 1996, McLaren réagit en présentant la version LM de sa F1.
Totalement allégée, elle perdait 80 kg, gagnait quelques chevaux et améliorait très nettement ses performances.
Cinq autos seront produites toutes en livrée orange papaye.
Mais cette version spéciale, destinée à la compétition n’était toujours pas suffisante pour lutter à armes égales… et dès 1997, McLaren dévoila sa F1 GT dont la carrosserie était allongée pour permettre des vitesses de pointe supérieures à 380 km/h.
Ce fut le chant du signe de la généalogie de la McLaren F1 qui aura rencontré un succès d’estime, mais très relatif sur le plan commercial puisque les 300 exemplaires initialement prévus ne seront jamais produits.
La McLaren F1 est une auto exceptionnelle et très rare.
Si on parlait au départ d’une production de 300 autos, le marché peu propice aux supercars à l’époque et un prix dissuasif de 1.000.000 de dollars ont réduit les chances de succès.
C’est finalement les 24 Heures du Mans et les courses de GT qui ont relancé la carrière de la McLaren F1 au milieu des années 90.
Certainement moins d’une centaine d’autos ont été produites, dont la plupart pour la course.
Certaines personnalités comme Mister Bean ont roulé en McLaren F1.
On recense deux ou trois autos détruites sur route, sans parler des versions compétitions.
Vous l’aurez donc compris, même avec un portefeuille bien garni, cela ne suffira pas.
Il vous faudra vous armer de patience pour attendre la venue de l’oiseau rare, scruter les ventes aux enchères prestigieuses et vous battre ensuite à coup de centaines de milliers d’euros.
En 2008, l’un des premiers exemplaires de 1994, très peu kilométré, a été vendu 2,5 millions d’euros, partant d’une mise à prix à 1,5 million !
Donner un prix pour une telle voiture d’exception est donc mission impossible car la cote de cette rareté n’a eu de cesse de grimper jusqu’à doubler ces 10 dernières années…
Mercedes SLR, Porsche Carrera GT ou Ferrari Enzo, toutes tutoient l’exceptionnel, mais devant une McLaren F1 vieille déjà de quelques années, elles ne réussissent pas réellement à la faire tomber dans l’oubli.
Très rare, exceptionnelle à plus d’un titre et surtout intégriste et sans compromis dans sa conception, la McLaren F1 demeure à ce jour la perle rare dans le monde des Supercars.
La référence de son époque tout simplement, à peine détrônée plus d’une décennie plus tard par la superlative Bugatti Veyron…
1990 : Lancement du projet McLaren F1 avec Gordon Murray à la tête du projet.
1992 : En mai, présentation officielle à Monaco de la McLaren F1 à un petit groupe de privilégiés.
1993 : En janvier, premiers tours de roue sur circuit de la McLaren F1.
1994 : Démarrage de la production.
1995 : La McLaren F1 remporte les 24H du Mans.
1996 : Présentation de la McLaren F1 LM, dans une livrée orange (couleur papaye), totalement allégée et V12 BMW amélioré ; 5 exemplaires produits.
1997 : Présentation de la McLaren F1 GT, dont la carrosserie a été modifiée et allongée pour une meilleure stabilité et une vitesse de pointe accrue (plus de 380 km/h).
1998 : Arrêt de commercialisation et de production de la McLaren F1.
F1 (1993-1998) : 69 exemplaires
F1 LM (1995-1996) : 6 exemplaires
F1 GTR (1995-1997) : 32 ex (dont 9 F1 GTR “queues longues”)
F1 GT (1997) : 3 ex.