BMW E92 //M3…
Chez BMW, on aime l’atmosphérique, le vrai, le pur, l’himalayen : le 6 en ligne rendu mythique par les dernières générations de M3…, le V8 des M5 et celui des Z8… sans oublier les fabuleux V10 des M5 et M6. Et pourtant…, déjà en 1973, BMW présentait la 2002 turbo, voiture légendaire gardant encore aujourd’hui une belle estime auprès des collectionneurs.
En 2009, BMW nous ressort le concept des cartons… et pour fêter dignement l’arrivée d’un N-ième nouveau coupé, colle dans ce dernier un 6 cylindres bi-turbo.
Double événement donc, et quand on me demande gentiment si je veux l’essayer, , je comprends mal la réalité du propos et réponds “oui” à la vue de la miss dénudée qui me fait un show sexy… me voyant mal refuser un don de sperme.
Le sens du sacrifice, machin tout ça…
Rendez-vous est donc pris samedi matin de bonne heure pour un premier contact.
Le jour dit, tout émoustillé et le sexe bandé, me voilou à l’adresse indiquée qui s’avère être celle d’une carrosserie flambant-neuve…
Point de galipettes au programme, seulement mater la belle, prendre des photos, puis s’envoyer en l’air au volant de la belle et non avec la belle !
Frustration…
Que soit, je ne suis plus à un sacrifice (humain) près… : “Clarisse, regardez-moi dans les yeux… Sluuuurppp !“…
Une voiture, ça s’apprécie d’abord avec les yeux.
Et de ce côté là, je n’ai pas été déçu, je dois l’avouer, bien que mollement convaincu par la berline E90 ainsi que par le coupé aux lignes taariscotées.
Malgré son nom, le coupé est plus long que la berline, plus bas aussi, mais curieusement moins large, gardant cependant la même largeur de voie.
Au final, les proportions ne choquent pas trop, la couleur passe-partout du modèle aidant certainement en gommant les raccords de carrosserie.
Je fais un peu chauffer la voiture, ce qui me permet au passage d’apprécier la sonorité de l’échappement au ralenti…, pas désagréable.
Je ferme la porte, et… pouf, plus rien.
L’insonorisation du modèle semble donner la couleur, ça verse dans le confort bourgeois.
Bref, je démarre et me hâte de voir ce que donne ce fameux moteur!
Démarrage, accélération, le grondement se transforme en un bruit rauque et métallique, avec une belle balance entre le bruit d’admission et d’échappement, agressif, sportif.
Le six en ligne pousse fort, tout à son aise à prendre des tours, l’aiguille du compte tours se ruant sur la diode orange logée entre 7500 et 8000 t/min.
Légère côte, grande courbe à droite, prise d’appui impeccable, une épingle rapide se dessine, rétrogradage, le pédalier présente de bonnes dispositions au talon pointe, je sens à travers la jante charnue du volant les roues avant mordre le bitume, pas une once de sous-virage… et la motricité permet d’ouvrir dès la corde pour ressortir comme une balle dans le hurlement du moteur.
Du potentiel, de l’équilibre, un cocktail largement au-delà des limites du raisonnable sur route ouverte si on déguste sans modération.
Le couple est phénoménal pour la cylindrée et sa plage d’utilisation est immense : 400Nm de 1300 à 5000 tr/m!!
Sur la route, je me surprend à traverser des villages au ralenti, ensuite, j’accélère un peu en pensant naïvement que… et là, surprise, rien d’autre qu’une poussée immédiate et impressionnante.
Pas vraiment de son non plus d’ailleurs.
Non, pour profiter pleinement du moteur, il faut attendre la 2ème moitié du compte-tours pour commencer à entendre un son rauque bien agréable.
La voiture ayant à peine 1000 km, je n’essore pas le compte-tours, mais monter à 5000 tr/m (il en reste encore 2000 à taquiner) est déjà enthousiasmant et garant d’une bonne puissance de feu, que ce soit sur autoroute ou route de campagne.
L’amortissement est ferme mais pas sec, je découvre à chaque feu rouge un gadget de plus alors que la voix cristalline de Sheryl Crow me raconte via les baffles des histoires de cœurs solitaires et de fleurs sauvages.
Le confort sur autoroute à allure légale est remarquable pour une sportive, le 6 en ligne se fait oublier, le niveau sonore est faible.
Au premier freinage pour sortir faire le plein, première surprise : les freins font un grommellement bizarre, mais en plus ils vibrent.
La voiture est pourtant neuve.
La conclusion s’impose : j’ai voilé les disques suite à un freinage appuyé de 225 à 80 km/h.
Ma M-experience commence bien.
Le châssis, “sport” semble bien équilibré, mais il faudrait sans doute des conditions un peu plus extrêmes pour juger définitivement la bête.
La direction ne m’a par contre pas du tout emballé : trop légère à mon goût.
Sur les routes de campagne, elle “lit” le relief de façon exagérée et oblige régulièrement à réajuster le cap par de petits coups de volant.
Rien de dramatique, mais désagréable.
Sans doute une question d’habitude, à confirmer lors d’un essai plus long.
Pour ce qui de l’intérieur, la forme est celle déjà connue de la berline : on a perdu l’intérieur orienté conducteur pour un design qui se veut plus zen.
Question de goût, mais mon côté narcissique aime bien être au centre de la voiture, je trouve ça plus flatteur et plus impliquant.
Attention louable, mais un peu à contre courant, l’économètre disparaît (enfin!) au profit d’un thermomètre d’huile.
Autre petit gadget que ne renieront pas les paresseux: les petits bras électriques qui avancent automatiquement la ceinture pour les passagers avant.
Ca évite les tours de dos.
Mais c’est surtout à l’arrière que le fond change : on perd la 5ème place (qui était plus une place de secours à réserver à vos pires ennemis, ou à votre belle-mère, au choix, mais qui pouvait dépanner à l’occasion, surtout connaissant la vocation polyvalente des Coupés Série 3), mais on bénéficie en contre-partie de plus de place, que ce soit pour les jambes ou aux épaules.
Au quotidien, la M3 se révèle être docile et polyvalente, même si la longueur des portes force à des contorsions dans les parkings… et quelques détails d’ergonomie irritent : certains contacteurs sont mal disposés, comme les commandes d’antibrouillards cachées par le volant, le bouton de DSC et de mode Sport qui ne sont pas côte à côte.
Un DSC très doux par ailleurs, remarquable de discrétion et d’efficacité dans ses interventions, ça change du comportement binaire de l’ASR des Ferrari Modena et Maranello, où, expérience faite, je recommande une certaine circonspection si l’index droit vous démange : de placide et contenu avec le DSC enclenché, on passe à des réactions valant leur pesant d’adrénaline, même en ligne droite.
Toutefois, je mets en relief une mauvaise volonté évidente à froid, avec des à-coups perceptibles à bas régime et une boîte 6 qui cumule presque tous les défauts concevables, son étagement mis à part.
Incroyablement dure, pas vraiment précise, lente même à chaud, on est loin, très loin de ce qu’on peut attendre d’une sportive contemporaine.
Renseignements pris auprès des aficionados, le défaut est reconnu, cette boîte Getrag peut être considérée comme un ratage.
Si vous êtes prêt à vivre avec une boîte séquentielle au quotidien, une SMG2 semble rester le meilleur choix pour une M3 à moins qu’un remède n’existe.
Première tentative pour remédier à cette affaire, le remplacement de l’huile de boîte et de pont par des nouveaux lubrifiants spécifiés par BMW, respectivement MTF-LT-2 (PN 83220309031) et SAF-XJ+FM Booster (PN 83222282583).
Résultats: une facture de 251 euros… et aucune différence selon l’aveu du chef mécanicien du concessionaire local, la boîte se comporte selon lui comme toutes les M3.
Je réserve mon jugement, ça n’a pas l’air pire en tous cas.
Les options qui se présentent alors sont :
– L’ablation de la CDV (Clutch Delay Valve), un simple restricteur de flux qui retarde l’action de l’embrayage, pas étonnant que ça gratouille lorsqu’on passe les rapports un peu vite.
– Une purge du circuit hydraulique obligatoire sous peine d’altération du point de friction (Il semble que BMW a conçu cette pièce pour rendre l’embrayage moins sensible et plus facile pour une clientèle d’outre-atlantique aussi ignare en matière de boîtes manuelles que de géographie européenne)…
– Monter un kit de sélection courte SSK (Short Shifter Kit)…
Pour parler d’entretien ou de fiabilité, quelques gremlins sont à signaler :
– Un indicateur de pression de pneus impossible à recalibrer, le bidule semblant être caractériel, malgré des pressions correctes et équilibrées.
– Un radar de recul qui se met à biper de manière ininterrompue sans raison…
– Un petit “schgling-schgling” irritant à gauche du tableau de bord dont la cause m’échappe…
– Un ordinateur de bord est très optimiste, 1.8 à 1.9L en dessous de la consommation moyenne mesurée à 11.13L/100km sur 3.000km, avec des maximas/minimas à 11.95 et 9.8L/100km (sur des pleins complets).
L’autonomie dépasse ainsi facilement les 500km en conduite normale.
Les coûts d’entretien sont contenus, chaque BMW étant vendue avec les “services gratuits” sur 10 ans ou 100.000km.
S’il doit rester un (bon) souvenir, c’est celui d’une sortie sur autoroute durant une nuit de pluie…, un pied monumental à drifter entre les murs d’eau.
Une propulsion, un équilibre précaire et une adhérence approximative, la recette d’un des côtés les plus ludiques de l’automobile.
Pour le reste, erreur dans le produit ou erreur sur la personne.
Alors que j’attendais une sportive pointue et dévergondée, j’ai découvert un coupé cossu à l’esthétique valorisante mais aux prestations en demi-teinte.
Inutile de revenir sur la boîte, mais le moteur est creux et manque de souplesse, les performances n’ont rien de renversant et le comportement routier laisse transparaître une inertie significative liée au centre de gravité haut perché.
En termes d’agilité et de performances moteur, le passage d’une Porsche 996 à une M3 rend le contraste flagrant, la M3 gardant à son avantage son avant accrocheur en entrée de virage.
Une déception, peut-être amplifiée par des attentes irréalistes.
Décidément, je n’aime pas trop les BMW…