2010 Rolls Royce Coupé Shaheen, s’encanailler dans le bling-bling…
Les Émirats Arabes Unis constituent indéniablement l’un des marchés les plus importants au monde pour les marques de grand luxe.
Rolls-Royce l’a bien compris… et la marque au célèbre bouchon de radiateur a mis en place un programme spécifique pour cette région.
En voici un nouvel exemple : la Rolls-Royce Phantom Coupé Shaheen, est en effet issue du programme Bespoke, mis en place pour satisfaire les moindres désirs des clients.
Le Shaheen est un faucon célèbre dans la région des Émirats Arabes Unis.
L’auto lui rend donc hommage avec une finition unique à l’extérieur comme à l’intérieur.
La peinture blanche est accordée à un habitacle rouge qui pousse le détail jusqu’à broder des têtes de faucons sur les appuis-tête.
Dans l’histoire de Rolls-Royce, la formule “Coupé” a été utilisée avec parcimonie, seul Bentley, depuis son rachat par la noble marque en 1936, se réservait ce privilège.
Après la séparation des deux blasons en 1998, il fallait bien que Rolls-Royce conçût une descendance aux coupés Corniche et Camargue des années 70.
Il est vrai que la marque est placée si haut dans la hiérarchie automobile qu’elle n’est pas soumise aux impératifs de renouvellement et de nouveauté du commun des constructeurs.
La ligne du nouveau mastodonte orné de la Spirit of Ectasy, n’est une surprise pour personne puisqu’il reprend trait pour trait les lignes du Concept 101 EX présenté au Salon de Genève 2006.
Quatre personnes pourront avoir le privilège de se lover dans les sièges.
Rolls-Royce a tenu à assurer la dignité des passagers arrière en leur réservant une place “suffisante”.
“Suffisante” est également la puissance du moteur.
L’ancienne coutume maison qui consistait à en dissimuler le chiffre n’a plus cours : le V12 6L75 affiche 460 chevaux et 720 Nm de couple comme dans la berline.
Voilà qui lui permet de s’assurer des performances tout aussi “raisonnables” avec un 0 à 100 km/h abattu en moins de 6 secondes et une vitesse de pointe naturellement limitée à 250 km/h.
Il ne faudra pas attendre de ce nouveau coupé une sportivité échevelée, ce n’est pas sa vocation et, avec 2.5 tonnes sur la balance, une certaine tenue sera requise au volant.
Néanmoins, Rolls-Royce n’hésite pas à annoncer une agilité accrue.
Les ressorts et les amortisseurs ont été légèrement affermis et des barres anti-roulis de plus forte section ont été montées.
Un bouton “Sport” sur le volant fait son apparition : il permet une gestion plus sportive de la boîte de vitesse et de la réponse d’accélérateur.
Les Rolls-Royce, il y a ceux qui demandent combien elles consomment et ceux qui les aiment.
On a tous entendu au moins une fois ces remarques goguenardes à leur sujet : “j’espère qu’ils fournissent la station essence qui va avec ! Avant d’passer à la pompe, joue d’abord au loto !”…
Ces propos de comptoir m’ont toujours énervé.
La valeur d’une automobile iconique ne se mesure pas comme la consommation d’huile d’un Céquinze d’occaze.
Demande-t-on à une oeuvre d’art sa décote annuelle et à l’être aimé son prix de revient ?
Tout comme l’homo sapiens a dépassé ses racines animales pour devenir sujet pensant, la Rolls a dès l’origine délaissé sa condition d’esclave mécanique pour tendre vers l’objet culturel, sinon l’objet d’art.
La Rolls ne se chiffre pas, elle s’éprouve, se ressent.
Cela commence par un choc frontal, dès son entrée dans le champ visuel, la reine des voitures impose au regard son aristocratique stature et l’élégance altière de son radiateur.
Sur son passage, le pavé se fait scène et la descente de voiture, spectacle de rue.
Autour d’elle, les Mercedes rétrogradent d’une ou deux classes sociales et les Audi rasent les murs.
Le numéro de charme se poursuit dans le cocon intimiste de l’habitacle par une fête des sens.
Odeur et toucher sensuels du cuir Connoly…, épaisseur des moquettes invitant à se déchausser…, opulence des boiseries aux veines symétriques… et charme suranné des bouches d’aération chromées… : du grand art sans commune mesure avec le faux luxe clinquant d’une Cadillac !
Juste un bémol, l’espace à bord se fait rare, les intérieurs modulables, c’est pour les bétaillères à mioche.
Celui qui veut s’offrir cet environnement quotidien (et je ne parle pas là du doux rêveur qui pense pouvoir assumer cette envie juste parce qu’il a trouvé une Bentley T1 sur Le Bon Coin au prix d’un Kangoo), est nécessairement à l’abri des aléas de la survie au jour-le-jour.
Il est naturellement sensible a d’autres arguments que les données bêtement mesurables.
J’ai pressenti cela en rêvassant à mon adolescence, sur les pages d’un numéro ce Classic Car & Thouroughbread… Le déclic est venu d’une photo de Rolls Royce Silver Cloud I bordeaux et gris métal.
Avec son frontispice de temple grec, sa Victoire de Samothrace et la sévérité classique de ses proportions, elle m’en imposait autant qu’un Parthénon roulant.
Quel auguste auto !
Depuis lors, je n’ai eu de cesse d’accumuler revues et livres sur la “meilleure voiture du monde”.
Un beau jour, un article de l’Auto-journal me révéla l’existence de l’école de chauffeur Rolls-Royce, une école pour accéder enfin au volant et à tous les petits secrets de la plus désirable voiture du monde.
Un rêve de gosse était né.
En attendant, il me fallait mettre la main sur le graal absolu, la luxueuse brochure que l’on ne donne généralement qu’aux très riches acquéreurs potentiels.
Pas évident…
Je me souviens encore de l’humiliation subie au salon de l’auto quand une hôtesse me surprit au volant d’une Bentley : “On t’a pas dit qu’il ne faut toucher qu’avec les yeux ?”…
L’imbécile !
Qu’à cela ne tienne, je revins bientôt, fier comme Artaban, avec un magnifique catalogue Bentley grand format.
Même mon paternel n’avait jamais eu mieux dans ses dossiers que des prospectus Jaguar au format A4.
Plus tard, je lui cassais les pieds pour m’envoyer en séjour linguistique à Londres, officiellement pour relever un niveau d’anglais digne du formidable système éducatif que le monde nous envie, officieusement pour admirer et photographier un maximum de Rolls dans les quartiers stratégiques de la capitale britannique.
Je franchis bientôt les portes du concessionnaire de Berkeley Square, à Mayfair, le vénérable Jack Barkley. Le groom présent à l’accueil, en uniforme et casquette, semblait sorti de je ne sais quelle aventure de 007. Il m’ouvrit le plus naturellement du monde la portière de “ma” première Rolls, plus exactement une Bentley MKVI, une voiture où les expressions “monter en voiture” et “planche de bord” avaient encore gardé tout leur sens.
Autour de moi, Rolls et Bentley s’offraient pêle-mêle à ma curiosité désargentée sans que l’on me demande autre chose que d’avoir l’obligeance de m’y asseoir.
Dans les concessions françaises tout au contraire, nos hauts de gamme en toc étaient généralement verrouillés à double tour et les requêtes des curieux soumises au bon vouloir de non-vendeurs moins engageants encore que certains employés postaux.
Comme vous le constatez, nul besoin d’avoir une particule et le cheveu rare pour aimer les Rolls, mais de grâce, ne demandez jamais combien elles consomment, leur charme est ailleurs.