2012 Chevrolet Volt/Opel Ampera Le courant a du mal à passer !
Par Marcel PIROTTE
Inutile de se voiler la face, les réserves d’hydrocarbures ne sont pas éternelles !
Bien malin cependant, celui qui pourrait prédire le moment où les sources seront taries !
Dans vingt, trente, cinquante ans … ?
Certains experts en savent sans doute un peu plus, mais comme ils sont très bien payés par les grandes compagnies pétrolières “pour se taire”, impossible de leur faire cracher le morceau…
Les constructeurs automobiles, conscients de l’enjeu qui se joue, planchent bien évidemment sur de nouvelles alternatives en matière d’énergie.
Si à terme la pile à combustible devrait s’avérer la solution, alors que les voitures électriques pourraient représenter 5 à 10 % du parc automobile, le bon vieux moteur thermique, qu’il soit alimenté par de l’essence ou du gazole, n’a pas encore dit son dernier mot.
Et si en plus, on lui adjoint un bloc électrique lui permettant d’accomplir une bonne cinquantaine de kilomètres en mode “zéro émission” et que l’on puisse le recharger chez soi ou au bureau, n’est-ce pas là une bonne solution intermédiaire ?
Nous avons voulu savoir…
A ma gauche, les berlines électriques du type Renault Fluence ou Nissan Leaf !
Chères, trop chères et de plus leur rayon d’action de 100 à 150 km les cantonne à un usage urbain… et prière de bénéficier d’un point de recharge au rez-de-chaussée et non au cinquième étage !
A ma droite, les voitures hybrides, autonomie illimitée pour autant que l’on refasse régulièrement le plein d’Eurosuper ou de gazole !
Avec deux moteurs, thermique et électrique, “les fulls”, du style Toyota Prius et consorts, sont capables de rouler quelques petits kilomètres en mode électrique alors que les “mild hybrides” chères à Honda, procurent davantage de tonus tout en permettant de réduire les consommations… et par voie de conséquence les émissions polluantes.
Il y a aussi les “hybrides rechargeables”, Toyota Prius Plug-in et Volvo V60 Plug-in, de 20 à 50 kilomètres en mode électrique, au delà c’est le bloc thermique qui prend le relais !
Et si l’on mélangeait tout cela afin d’obtenir une “hybride série” du genre Volt et Ampera avec cette fois l’inverse, soit un moteur essence rechargeant un bloc électrique entraînant les roues, l’ensemble permettant de parcourir près de 550 kilomètres sans devoir remettre une seule goutte de carburant !
Le rêve, oui, sans doute, mais avec quelques sérieuses contraintes dont le prix de vente très élevé !
On fait une pause, Marcel, arrête ton char, explique-nous !
En fait, il s’agit de voitures électriques à prolongateur d’autonomie mais qui ne sont pas considérées comme des voitures 100 % électriques.
C’est compliqué mais vous allez mieux comprendre à travers l’essai d’une Chevrolet Volt, mais également de sa cousine, l’Opel Ampera, deux berlines identiques à quelques détails près, pensées et fabriquées aux States mais vendues sur le Vieux Continent par les deux marques…, ce qui constitue déjà en soi une aberration !
Imaginez notamment la formation obligatoire et coûteuse des concessionnaires, engendrée par l’arrivée de cette nouvelle technologie, mais également le “pognon” que le marketing de chaque marque va devoir dépenser, tout cela pour essayer de vendre au total un peu moins de 10.000 unités par an sur le Vieux Continent…
Le jeu en vaut-il la chandelle ?
Trois moteurs, sinon rien !
Chevrolet Volt, Opel Ampera, même combat : faire triompher cette nouvelle technologie de voitures électriques équipées d’un prolongateur d’autonomie !
D’où une première déconvenue pour ces modèles qui ne sont pas considérés comme des voitures 100 % électriques, ils ne peuvent bénéficier d’aucune fiscalité verte octroyée par le Gouvernement !
Mais nous sommes en Europe, et dans cette Europe existe un petit pays qui fait tout différement…, pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Un acheteur particulier résidant en Wallonie se voit octroyer un “éco bonus” de 2.500 €, alors qu’un acheteur particulier résidant en Flandre ne paiera pas la taxe de mise en circulation, la TMC, soit un gain de 1.239 € !
C’est toujours ça de gagné sur des véhicules affichés, sans les options : 42.950 € pour la Volt et 45.600 € pour l’Ampera…
Un montant élevé, trop élevé on le verra plus loin, qui sans aucun doute va freiner la diffusion de ces modèles, aussi écologiques soient-ils avec seulement 27 g/km de CO2 !
A cela, General Motors, le maître d’œuvre, rétorque (et c’est vrai) que la Volt et l’Ampera constituent une belle avancée technologique.
Ces berlines hatchback de 4,50 m de long reprennent la plate-forme de l’Opel Astra, mais en l’adaptant, afin de faire entrer sous le capot pas moins de trois moteurs.
Un premier, électrique, livrant 111 kW ou 150 chevaux mais également 370 Nm dès le démarrage, afin d’entraîner les roues avant…
Un autre, électrique lui aussi, de 73 chevaux, fait office de générateur et se charge (c’est le cas de le dire !), d’approvisionner les batteries Lithium ion (200 kg), composées de 288 cellules disposées en forme de T dans un tunnel central sous le plancher.
Enfin, un troisième, thermique essence celui-là, un bloc Opel 1,4 l de 86 chevaux, joue le rôle de groupe électrogène au régime presque stationnaire, afin de produire de l’électricité destinée aux batteries via le générateur ou directement au moteur électrique.
Une transmission automatique via un ensemble de trains planétaires permet de sélectionner quatre modes de conduite : Normal pour des conditions de roulage au quotidien… Sport pour davantage de peps…, Montagne afin d’assurer une réserve de courant conséquente… et Garde permettant de conserver toute l’énergie stockée dans les batteries afin par exemple de rouler en ville en zéro émission.
En plus de la position D du pommeau de changement de vitesses, le levier sur L (low) garantit un bien meilleur frein moteur.
La planche de bord se caractérise par une présentation un peu futuriste avec de nombreuses touches tactiles parfois récalcitrantes, mais surtout par un ordinateur de bord affichant les différentes phases de fonctionnement des moteurs électriques et essence, leur autonomie ainsi que la consommation de carburant sans oublier un témoin de conduite éco.
Compte tenu du prix, l’équipement de série aurait pu être un peu plus complet !
Il faut en effet mettre la main au portefeuille afin d’obtenir un système d’aide au stationnement avec caméra de recul (700 €), le GPS n’est pas gratuit non plus :1.850 €…, tout comme les peintures métallisées.
La finition bien américaine aurait pu être mieux soignée, mais que dire alors de ce cache-bagages tout à fait ridicule qu’il vaudrait mieux jeter aux orties.
Uniquement 4 places et non cinq avec un petit coffre modulable (310 à 1000 L de volume), la Volt accuse sur la balance un poids largement supérieur à 1730 kg.
Il n’y a pas de miracles …
Vivre en Volt au …quotidien !
A plusieurs reprises, j’ai eu l’occasion de conduire, mais pendant une journée seulement, la Volt tout comme sa cousine Ampera !
J’avais été assez emballé !
Ca roule l’une et l’autre comme une voiture normale, s’inscrit à merveille dans le trafic, correctement suspendue, chacune ne manque pas non plus de dynamisme lors des accélérations : de 0 à 100 km/h en un peu plus de 9 secondes, un silence de roulement assez impressionnant et, surtout, un très bon confort de marche.
Bref, j’étais assez conquis…
D’où mon impatience de rouler une semaine avec une Volt, très prometteuse.
Première constatation, les deux témoins m’indiquent que je peux parcourir 51 km en mode électrique et un peu plus de 500 km avec le plein d’Eurosuper, le réservoir contenant 35 L.
Pas mal !
C’est en mode Normal que je débute l’aventure et effectivement, une bonne cinquantaine de kilomètres plus loin, plus de jus dans les batteries, automatiquement le bloc essence prend le relais, mais ce n’est plus du tout le même silence de fonctionnement, ça chahute nettement plus.
Après un peu plus de 150 kilomètres, retour à maison !
Comme Chevrolet prétend que l’on peut recharger l’auto sur une simple prise électrique, c’est le moment de vérifier tout cela (en râlant tout d’abord que les ingénieurs n’aient pas prévu un enrouleur pour ce câble de recharge bien difficile à recaser dans son logement).
Et puis problème, la voiture refuse de charger, certains fusibles se font aussi la malle…
Comme mon installation électrique n’est plus de toute première jeunesse, j’en profite pour demander à ma voisine qui habite une maison nettement plus récente de venir à mon secours.
Là aussi, même constat, la Volt ne veut pas de son courant, elle nous refera le même coup une troisième fois !
Petit coup de fil à l’importateur pour apprendre qu’effectivement, Volt nécessite une installation nettement plus performante et que manifestement, la recharge sur une simple prise de courant ne peut la satisfaire. Moyennant un supplément de 500 à 700 €, un électricien peut installer une sorte de “Wall box”, mais pour l’heure, c’est une entreprise de dépannage routier situé au bout de ma rue qui est venue à mon secours…, j’ai pu recharger les batteries dans ses installations !
Cela a pris quatre heures, j’en ai été quitte pour 20 €, c’est probablement cher mais je voulais me montrer grand seigneur !
Le lendemain, chez mon fils, son installation avait l’air performante…, mais au bout de deux heures de charge, le système s’est subitement déconnecté, je pouvais seulement rouler 31 kilomètres sur les batteries.
Le reste de l’essai en mode essence, s’est soldé par une consommation moyenne un rien supérieure à 7l/100 km, pas du tout avantageuse pour cette hybride !
Du coup, j’ai un peu râlé tout en étant fortement refroidi… car c’est seulement en électrique que la Volt s’avère la plus intéressante.
Et de constater que la Volt tout comme l’Ampera, ne se rechargent pas sur une simple prise de courant ! Mieux vaut en effet vérifier l’installation et au besoin investir afin de la renforcer.
Du coup, les futurs acheteurs et surtout les particuliers vont devoir en plus s’acquitter de frais supplémentaires, alors que la voiture est déjà si chère…
Et là, ça se corse car, en faisant un tout petit calcul, on se rend compte que par rapport à une berline diesel ou essence de même catégorie, coûtant quelque 30.000 € avec 130-140 chevaux sous le capot, ainsi qu’une consommation moyenne de 7 à 8 l/100, l’acheteur d’une Volt/Ampera va devoir dépenser beaucoup (trop) d’argent pour faire partie de ce club sélect d’écologistes convaincus…
Ce qui me fait penser que le profil idéal d’un acheteur Volt/Ampera, c’est celui qui s’en tient à un trajet matinal de 50 km au maximum !
Qu’il peut ensuite recharger la voiture dans son entreprise, cela ne lui coutera que 2 € de jus, un montant identique pour la même opération le soir mais à la maison.
En revanche, au-delà de 50 kilomètres, la facture carburant va égaler celle d’une berline thermique.
Et puis d’autres questions ?
La valeur de revente ainsi que la durée de vie des batteries par exemple…
Certes, elles sont garanties huit ans ou 160.000 km, la voiture bénéficiant d’une garantie/assistance entièrement gratuite de trois ans ou 100.000 km, le passage à l’atelier devant s’effectuer une seule fois par an.
Mais comment la voiture va-t-elle vieillir ?
Le mot de la fin !
Sacrée “Voiture de l’année en Europe” pour 2012, le duo Volt/Ampera ne pouvait mieux rêver comme cadeau de baptême.
Sauf que le jour de la remise du prix, c’était au début mars, l’usine américaine de Detroit annonçait que la production de ces modèles était arrêtée pendant cinq semaines !
La cause : le désintérêt des acheteurs US pour ces véhicules novateurs, à peine 15.000 depuis décembre 2010…
D’où des stocks importants d’invendus qu’il fallait absolument écouler.
Aujourd’hui, la production a repris mais les prévisions ont sérieusement été revues à la baisse.
Ce sont sans doute des petites merveilles de technologies, des voitures d’ingénieurs, mais qu’il faut vendre !
Mais pas à ce tarif-là, c’est peine perdue !
Il n’y a pas d’autre explication !
Un prix totalement dissuasif pour la toute grande majorité des particuliers, seules quelques sociétés voulant se donner une bonne conscience écologique pourraient être intéressées…
Pour que Volt et Ampera connaissent le succès commercial, le prix des batteries Lithium-ion doit sérieusement baisser, à moins que l’on découvre de nouvelles batteries encore plus performantes mais moins chères.
Ce serait en effet dommage de rejeter une technologie aussi prometteuse…
Mini fiche technique : Chevrolet Volt/Opel Ampera, berlines quatre places
Dimensions en m : Lxlxh : 4,5 x 1,79 x 1,57 – Empattement : 2,69 m
Poids : 1.732 kg
Moteur : trois
1 – électrique synchrone de 111 kW/150 chevaux et 370 Nm entraînant les roues avant
2 – électrique de 73 chevaux faisant office de générateur
3 – essence 1,4 l – quatre cylindres – 1398 cc – 86 chevaux/130 Nm, faisant office de groupe électrogène
Transmission : automatique aux roues avant – train planétaire
Vitesse maxi : 159 km/h – 0 à 100 km/h en 9,1s
Consommation moyenne : usine : 1,2 l/100 km (moyenne mesurée de l’essai : 7,2 l/100 km)
Consommation moyenne de la voiture essayée, Volt, sur son cycle de vie : 5,6 l/100 km
Autonomie réelle en mode électrique : +/- 50 km – temps de recharge : +/- 4 heures
CO2 : 27 gr/km
Prix de base : Chevrolet Volt : 42.950 € – Opel Ampera : 45.600 €
Marcel Pirotte, pour www.GatsbyOnline.com