2012 XXX Performance Audi R8 V10
Est-il une automobile moins technologique, moins cybernétique et moins robotique que cette Audi R8 V10 ? Tout est une question d’image: l’Audi R8 V10, a été perçue du public en tant que véritable bombe dès sa commercialisation…, mais elle n’a pas réussi à supplanter l’anti diluvienne Porsche 911…, ni même la Lamborghini Gallardo qui est motorisée du même V10…
Les prix en occasion s’en ressentent, la cotation des Audi R8 V10 est médiocre… et sur ce marché de la seconde main, la “petite” Audi R8 est plus “populaire” avec le 4.2 litres V8 de 420 chevaux de l’Audi RS4…
Elle se négocie aux alentours de presque 50.000 euros.
Constructeur particulièrement actif et régulier (sortant en moyenne une nouvelle voiture chaque année, et ce depuis ses débuts), Audi est principalement connu pour ses nombreuses sophistications mécaniques… et l’humour tout germanique de ses dirigeants, un humour caustique destiné en priorité à la bourgeoisie intellectuelle automobile… et ce avec une verve de dialoguiste olympien (eu égard au logo Audi, car s’il eu été question de Citroën, j’aurais écrit : “chevronné”), peuplée d’aphorismes en tous genres…, saupudrés des névroses de ses ingénieurs et designers. Ainsi, les aficionados de la marque “olympique”…, peuvent immédiatement reconnaître le grandiose, le sobre et l’excellence automobile dans toute sa splendeur.
Au programme, le plus souvent, les clients s’avèrent être : des érudits brassant leurs références culturelles au détour d’une galerie d’art contemporain…, des couples interchangeables prisonniers de leurs frustrations libidineuses… et des Geek fortunés ayant un amour inconditionnel pour la technologie teutonne. A priori, ces machines soi-disant douées de raison, ces inquiétants vaisseaux équipés d’ordinateurs et autres futurismes pas toujours fiables…, semblent totalement étrangers aux conducteurs lambda qui peinent chacun à payer les mensualités de leur boite à rouler de moins de 8.000 euros… Seul un érudit en automobiles rarissimes, assez méconnu et a fortiori pratiquement anecdotique dans son parcours journalistique, ose affronter directement ce genre d’automobile.
Ancré dans une période burlesque, ou j’incarne volontairement l’image d’un crétin bénévole (cryogénisé à mon insu), j’ai décidé de porter ici le journalisme d’investigation automobile à son paroxysme… Mais je l’avoue tout de go : ma tentative destructrice fut un ratage comique intégral, peinant à faire sourire et plus encore à faire rire…, car cette Audi R8 V10, quoique absurde, est une excellente machine à jouir… XXX-performance a eu l’idée de présenter une version reconstruite de l’Audi R8 à destination de ceux (et celles, quoique c’est rare) qui veulent en imposer au reste du monde (qui s’en f…) !
Pour frapper l’imagination, le premier exemplaire du savoir-faire (des Euros) de XXX-performance a été présentée en vert-macht-pomme, dans un cadre glauque et bilieux, une vinaigrette acidulée qui est censée faire avaler toutes les salades imaginables…
L’emballage des carrosseries fait partie du domaine d’expertise de XXX-performance.
Les lames latérales et les rétroviseurs extérieurs ont été affinés et réalisés en feuille de carbone pour créer un contraste avec le vert bilieux de la carrosserie.
Les logos et emblèmes Audi ont été enlevés pour obtenir un faux mystère, la calandre a été peinte en noir… tandis que les phares étaient “obscurcis”.
Les capteurs oculaires que sont les jantes ont été intégrées dans les passages de roues pour donner l’apparence de rouleaux. C’est là une exclusivité assez coûteuse obtenue grâce aux jantes Oxrock en 8.5×20 (avant) et 11×20 (arrière), équipées de pneus Dunlop SP Sport Maxx de 235/30R20 et 295/25R20.
Un kit H et R coilover hydraulique modifié d’un système Airride G-bus assure un abaissement massif du véhicule pour la route et à l’arrêt…, un simple click au tableau de bord dur le bouton toc, permettant de remonter l’ensemble de 15cm afin de surmonter les casses-vitesse et les dénivellations de garages et autres mesquineries routières…
Les tuners de XXX-performance n’ont également laissé pratiquement aucune pierre non retournée dans le moteur 5,2 litres V10…
Le logiciel du moteur a été optimisé et la boîte à air a été remodelée en carbone pour faire plus joli…
Un échappement sport avec système de contrôle du débit donne un coup de pouce aux performances permettant d’affirmer que ainsi la puissance est passée à 650 chevaux.
L’entreprise de Bochum a en outre réalisé un nouvel intérieur pour la R8 V10, en Alcantara et en cuir avec coutures blanches. Un petit coup de première avec un tintement bien connu des “Ferraristes” grâce à la grille de sélection en aluminium… et la R8 V10 s’élance en souplesse. Hormis une largeur imposante en ville, cette GT se caractérise par une étonnante douceur de conduite : embrayage doux à la course un peu longue, direction légère à basse vitesse et suspension étonnement conciliante. Certaines familiales sont moins confortables…
A bas régimes, le V10 martèle un peu à la manière d’un V8, mais surtout il grogne comme les dernières générations de Flat Six Porsche. Une sonorité atypique sans doute due à l’injection directe. Souple et disponible à bas régimes, ce bloc reprend de manière plus tonique que le V8, mais sa puissance, impressionnante dans l’absolu, déçoit de la part d’une telle mécanique. Une franche pression sur l’accélérateur suffit toutefois pour se rassurer sur le potentiel de la bête fauve ! Le V10 s’éclaircit alors la voix en émettant un cri rauque caractéristique, puis donne un premier coup de collier vers 3.500 tr/min. L’ascension du compte-tours se poursuit avec une poussée vigoureuse jusqu’à 6.000 tr/min. Au dessus de ce régime, il en rajoute une couche : les dix pistons deviennent alors hystériques, se déchaînent dans un concerto bien plus aigu et vous plaquent littéralement contre les sièges. Avec un seul but en tête : aller chercher la coupure d’injection fixée à 8.700 tr/min !
A ce niveau, tout s’enchaîne très vite : pas le temps de s’attarder sur une aiguille de tachymètre qui semble prise de spasmes ni sur le paysage qui défile en accéléré, il faut déjà enclencher le rapport supérieur avec le petit claquement caractéristique de la grille en aluminium poli. Une manœuvre qui ne manque pas de charme, mais qui demande une certaine accoutumance en décomposant bien son geste. Difficile, voire impossible alors de passer les vitesses à la volée, d’autant que le levier de vitesse en aluminium ne facilite pas la tache. Mais finalement peu importe tant le plaisir ressenti au volant est immense. Plus encore que les montées en régime tonitruantes du V10, ce sont en effet ses qualités routières exceptionnelles qui font de la R8 une GT à part.
Dotée d’une stabilité et d’une tenue de cap impériales et bien aidée par une direction qui se durcit avec la vitesse, elle avale les grandes courbes d’autoroute avec une facilité déconcertante à des allures irréelles. En revanche, le fait qu’elle soit également capable d’avaler une petite départementale bosselée avec l’aisance d’une GTI l’est beaucoup moins ! Agile et précise grâce à un train avant ultra-mordant, l’Audi R8 V10 transforme le moindre tracé sinueux en spéciale de rallye, oubliant au passage ses dimensions imposantes (1.600 kg sur la balance pour 1,90 m de large). Le tout sans jamais maltraiter vos vertèbres grâce à un amortissement piloté Magnetic Ride absolument exceptionnel. Capable d’encaisser de gros appuis sans mouvements de caisse parasites, la R8 V10 oublie également les trous et les bosses sur des routes défoncées en offrant un compromis confort/efficacité absolument bluffant.
Attention toutefois de ne pas se laisser griser tant les vitesses atteintes sur route relèvent de la balistique. Je vais terminer cette litanie de louange en soulignant un freinage absolument parfait et indestructible, grâce aux disques en céramique. Au final, sous une facilité de conduite apparente, elle cache en son sein une efficacité irréelle… Toutefois, même à 146.800 € l’unité (soit 36.600 € de plus que la version V8), elle ne court pas les rues, mais pire, elle décote de près de 65% en occasion ! Mais pour ce prix, en ajoutant le coût (prohibitif) du kit-tuning de XXX-performance, on a l’équivalent d’une Audi R8 V10 neuve ! Attendez…, je re-calcule : 1+1=2…, 5+5=10…, 1.000 x100= 100.000… Ok, le compte y est, c’est ahurissant…
Il est évident que je n’ai jamais eu autant la main lourde qu’avec cette voiture en matière de burlesque : tentant de glisser littéralement des peaux de bananes géantes devant ses roues…
Saugrenue avant tout, l’Audi R8 V10 modifiée/tunée par XXX-performance reste à part dans le monde, puisqu’il s’agit également de la seule proposition futuristico-hippie de cette société…, à ce jour. Présentée comme une contre-utopie dérisoire et chaleureuse, elle aurait pu prétendre à symboliser la science-fiction automobile : une farce grossière de mauvais goût qui tombe résolument à plat, embarrassée d’une esthétique tout à fait tarte et d’effets visuels surannés. Comme il n’y a rien de plus ridicule qu’une automobile débilitante qui ne fait pas rire, il va sans dire qu’il n’y a rien de plus ringard qu’une voiture tunée… et sa couleur pomme confirme cette terrible vérité : elle se regarde, l’air ahuri…, dans la plus constante des indifférences. En effet, dans l’opinion publique, l’image des voitures modifiées est de plus en plus négative, les gens sachant de plus en plus que les prétendus outils technologiques des tuners basiques ne sont que des sottises qui, dans leur idée… leur permettraient de vainement sortir du lot des voitures avec des balais-brosses en guise d’amortisseurs… et des freins automatiques électroniques robotisés. Au solde de cet essai, j’ai pensé à Jacques Tati pour le design fait d’abstractions géométriques…
Et pour les relations purement fonctionnelles liant l’engin à l’humain, dans une absurde modernité consumériste…, j’ai eu la vision des machines euphorisantes à la féminité pneumatique, décrites dans “Le meilleur des mondes”…