2013 Lamborghini Gallardo STS-700 kitée RenM…
Est-ce bien raisonnable ?
En ce début février, Guy et moi avons écumé les concessions automobiles pour qu’il retrouve une bagnole inutile…, il faut dire qu’en roulant comme un con sur une route verglacée, il avait planté la précédente, une Ferrari 458…, la caisse était ruinée mais les airbags ayant bien fonctionné, il s’en était sorti sans rien, un peu comme un pilote de F1 qui sort de son cockpit comme une fleur en tenant son volant à la main après un méga crash.
Assuré en omnium, il ne se préoccupait pas de l’aspect financier de cette histoire, alors, comme autre voiture, il s’en tapait, du moment que ce n’était plus la même…, avec l’idée d’une Lamborghini Gallardo en tête… et nous voici tous deux partis à la chasse aux bonnes affaires.
C’est ainsi qu’un jour, c’était un vendredi, nous voici parvenu chez un spécialiste de voitures haut de gamme, tendance Ferrailleries, vu qu’elles semblaient toutes avoir été repeintes.
Bon déjà, l’établissement n’était pas super bien tenu et puis la surface de vente était merdique.
Peu de modèles exposés et une déco digne de l’ex RDA pour nous accueillir alors que tout frétillant Guy était prêt à payer cash sa nouvelle bagnole.
Bon, nous avons tourné tout de même, regardant les quatre ou cinq voitures exposées sans grand intérêt au milieu d’une masse de Golf et Mini… et le spectacle désolant nous a incité à changer de crémerie en s’orientant vers une Lamborghini…, Tartempion-Motors, s’obstinant de vanter avant tout les faux mérites de Ferrari.
Cent mètres plus loin, nous nous sommes arrêtés chez un autre marchand d’occazzzz’s de secondes mains (au pluriel parce qu’il y a de nombreuses secondes mains en jeu), Guy ayant été subjugué par une curieuse Enzo jaune… devant laquelle il est resté tétanisé !
On n’allait pas s’étendre sur le beau plastique du tableau de bord de l’Enzo et son moteur tout merdique ou les jantes en étoile, fallait avancer…
Guy attendait un vendeur.
Un vendeur, il y en avait bien un mais il était occupé avec un couple de client.
Même que ce devait être des hétérosexuels puisqu’il y avait un homme et une femme.
Bon, c’était peut être des cousins ou une soeur et son frère venu là se faire conseiller, à moins que ce ne soit le contraire parce qu’il ne faut pas être sexiste et qu’une femme de nos jours peut en connaître un rayon sur la bagnole.
Et là, nous on poireautait comme deux cons que le vendeur daigne bien lever les yeux sur nous.
Cela nous faisait rigoler vu que je regardais à ma montre, combien de temps il faudrait à ce pauvre con pour nous faire signe.
On n’attendait pas qu’il plante ses clients pour venir nous baiser la main et s’occuper de nous.
Non, juste qu’il se lève par exemple et nous dise un petit mot du genre : messieurs je termine et je suis à vous de suite.
Vous voyez le petit truc aimable qui signale que le mec est un vendeur, un mec aimable et prêt à remplir son office.
Ben dix minutes montre en main après, il n’avait rien dit.
Il avait juste levé sa tête pour nous regarder comme si nous étions deux roms venus lui piquer des autoradios.
Pourtant Guy était très élégant et moi rasé de la veille.
Et de toute manière, on n’a pas des têtes de roms.
Alors, nous on s’est dit que ça risquait d’être chaud et on s’est cassé.
Bon, j’avais une forte envie de pisser alors j’ai uriné entre deux Ferrari.
Vu qu’il n’y avait pas un rat dans ce putain de garage je n’allais pas me gêner.
Si j’avais voulu, enfin il aurait fallu que j’aie envie parce que ça se commande pas…, j’aurais pu couler un bronze tranquille entre une 512 et une 455 et me torcher le derche avec la documentation que j’avais prise à tout hasard…, je leur aurais laissé ma bouse et la doc merdeuse en souvenir.
Mais bon, suis pas le mauvais gars alors je n’ai fait que pisser un coup.
Bref notre visite chez Maranello-motors s’est soldée par une pause pipi pour moi mais Guy n’a pas fait de chèque.
Donc le solde pour la maison s’est avéré négatif puisqu’ils furent quitte de quelques Paris-Match d’il y a 5 ans, que j’ai balancé depuis… et d’une odeur d’urine dans le parc de véhicules d’occasions.
Comme la nouvelle concession McLaren n’était pas loin, on s’est dit qu’on pourrait jeter un coup d’oeil tant qu’on y était, quoique c’est d’une Lambo que rêvait de plus en plus Guy, qui entre-nous avait vraiment du fric à claquer en conneries !
Bon, la vieille McLaren en vitrine, ça faisait cheap…
La salle d’exposition était plus petite, mais de toute manière, la McLaren, on connaissait en gros.
C’est comme une Ford GT40 en pire, quoique moins basique sauf que Guy voulait la clim, la direction assistée et le toutim !
Sinon, pour le reste, je lui ai rappelé que je trouvais qu’une Smart d’occazzzz à 5.000 euros en faisait autant en ville, en plus que la Smart première série c’était classe et décalé alors que la vieille McLaren ça faisait caisse d’indigent…, certain par ailleurs que c’était un kit-car en vieux plastique gondolé…
Là aussi, on a attendu le vendeur qui n’est jamais venu.
Pour nous occuper, une toute jeune femme, sans doute originaire de la cité du coin, nous a demandé avec un accent wesh à couper au couteau si on voulait des renseignements.
Me fiant à mon bon coeur, et éloignant mes préjugés de classe comme un vrai libertaire-rebelle, je lui ai posé une question à laquelle elle m’a répondu que : “fallait voir avec un vendeur”.
Bref, elle devait occuper un emploi aidé quelconque, du genre : faire sembler de travailler chez Plucmuche-Motors plutôt que de se droguer dans la cité.
On a attendu et personne n’est venu.
Y’a bien un type qui est passé mais à peine lui avais-je fait signe, qu’il s’est barré dans l’autre sens.
Encore un mec qui courait après le boulot.
Alors, on s’est dit qu’en visitant le garage on tomberait peut être sur un quidam pour nous renseigner.
On est sorti de l’espace de vente et on s’est baladé…, on a même vu les stocks de pièces.
Guy m’a même demandé ce que c’était que ça en désignant des gros bordels en alu qui traînaient sur des rayonnages de fer.
Je lui ai expliqué que c’était des boites de vitesse.
On s’est même aperçu qu’on aurait pu gauler toutes les boites sans nous faire prendre vu qu’on était bien seuls dans ce garage.
Mais si Guy est un peu escroc, il n’est pas voleur alors on n’a pas taxé les boites de vitesse et on a visité le garage de long en large… et puis voilà.
Et moi, comme j’ai une grosse vessie que je venais de vider chez leur confrère, je me suis abstenu d’uriner entre les voitures.
Le bilan de tout cela, c’est que c’était bien beau de parler de stratégie et de conneries de finance mais que la base du métier, c’est de fabriquer des bagnoles correctes et d’avoir un réseau de vente performant pour assurer derrière.
Et manifestement, d’après ce que j’ai vu, ben c’est pas ça qu’est ça… comme on dit.
C’était merdique à tous points de vue.
Ensuite, quelques jours après, on est allé chez Jeff-Motors, un spécialiste Lamborghini où les mecs étaient vraiment pros et où le vendeur, un mec à l’ancienne avec de l’embonpoint et de la tchatche, était parfait aussi.
Et finalement, on est tombé sur le tôlier, un mec vraiment sympa qui a fait de bonnes conditions à Guy pour une toute nouvelle Lambo Gallardo STS-700 kitée Renm…, sûrement volée puisque Guy a obtenu 35% de réduction, mais quasi flambant neuve (ce qui arrive parfois !) malgré le compteur qui ne marchait pas…
Guy lui a signé un chèque pour l’acquisition de cette petite caisse rigolote qui ne ressemblait pas à grand chose mais qui était full option et bourrée d’idées pratiques.
Donc, voilà ce que je peux dire : mon idée serait de leur conseiller de s’arracher un peu les doigts du cul parce qu’on n’est plus dans les seventies du temps ou les bagnoles italiennes était de la daube.
Qui plus est, j’ai dit à Guy que la ligne entre elle et le tramway n’avait jamais été aussi proche !
Cette Lamborghini Gallardo STS-700 avait été transformée avec un kit prétendument aérodynamique en fibre de carbone, tandis que le moteur aurait été poussé à 700 chevaux pour un zéro à 100 km/h en 3,2 secondes et une vitesse de pointe de plus de 330 km/h !
J’étais pas emballé.
C’était moche, tellement, que j’ai demandé à Guy pourquoi des loustics s’obstinaient à dessiner des kits de carrosserie plutôt que de laisser les voitures fraîches comme elles sont conçues.
Et puis dedans c’était moche aussi, c’était plastoc et compagnie et c’était merdique.
La Gallardo avait beau avoir toutes les options possibles, elle faisait quand même caisse de prolo…
Je connais bien Guy et j’adore le chambrer.
Bon, je le fais gentiment parce qu’il est comme tout le monde, il croit aux mirages.
Peut-être qu’il aurait du acheter une Mercedes SLS.
Ceci écrit l’un dans l’autre, acheter un véhicule de luxe hyper cher pour rouler dans une ville merdique où on se pèle, c’est crétin…
Ça doit faire vingt ans que je ne m’intéresse plus aux automobiles débiles… mais bon, j’ai été l’éditeur de Chromes&Flammes et il en restera toujours quelque chose.
Mettez moi à un zinc et vous me verrez débattre des mérites comparés de telle bagnole face à telle autre.
Et puis, vous commencez à me connaître, je peux parler de tout avec autorité.
Ben oui, Guy il vire des caisses qui marchent pour les remplacer par des merdes qui ne marchent pas pas.
Prenez la Fiat 500, facile à faire et pas chère, on en voyait partout.
Qu’on aime ou pas, sa bouille sympathique la faisait aimer des jeunes comme des vieux, des pauvres et des riches.
Et ça c’était un putain de succès.
Et quelle daube c’est devenu, avant, c’était une caisse pratique, pas chère, le truc prisé par Madame pour aller au taff, chercher le pain ou les marmots à l’école.
Puis ils l’ont bodybuildé et zou, c’est devenu un truc super cher.
Bon, ce qu’on fabrique maintenant, c’est de la low cost, de la caisse roumaine, pas chère et pratique pour tous ceux qui s’en tapent de la voiture mais qui veulent juste poser leur cul dans un truc qui roule qu’on peut acheter neuf sans se ruiner.
Quand j’étais petit, c’était très segmenté la bagnole.
Si vous étiez un prolo tendance gaucho, vous vous traîniez la bite en Renault, les caisse de la Régie, c’était une manière de supporter la lutte sociale des camarades…, c’était de la caisse correcte, pas trop chère avec juste ce qu’il fallait dedans pour plaire au français moyen.
Et durant des années, ils ont produit des tas de modèles dont certains ont eu un joli succès.
Citroën, c’était le truc d’avant-garde, la caisse du gars bizarre que ne rebutaient ni les audaces stylistiques ni les solutions techniques hors normes.
Et ma foi, ils en vendaient, de la 2CV pour prolos, en passant par l’AMI6, une caisse moche, la Visa, une caisse encore plus moche, jusqu’aux DS et autre CX et BX dans lesquelles on avait mal au coeur à cause de la suspension hydropneumatique.
Et puis, y’avait Peugeot et là on rentrait dans un autre monde, celui du bourgeois conservateur qui voulait de la qualité.
Et chez Peugeot mazette, on vous filait de la bonne grosse tôle solide et des carrosseries bien conventionnelles.
Moi d’ailleurs mon oncle était Peugeot, c’était comme cela.
Sa femme roulait toujours dans des bagnoles étrangères parfois dispendieuses (c’est dans l’une d’entre-elles que j’ai appris les secrets de la sexualité féminine)…
Quand on vend des trucs, faut savoir se positionner justement entre le gros richard et le traine-guenilles.
Bref, c’était ma petite contribution au redressement productif.
Si les avocats peuvent se permettre de discuter de la stratégie de Peugeot ou d’Arcelor, je ne vois pas pourquoi je n’aurais pas mon mot à dire.