Nos voitures vont devenir des Smartphones sur quatre roues ! Par Marcel PIROTTE
La quatrième révolution industrielle, celle du numérique, est bel et bien en marche. Sinon comment interpréter les nouveautés automobiles dévoilées il y a quelques jours aux Etats-Unis. Au CES (Consumer Electronics Show) de Las Vegas tout d’abord, ensuite au salon automobile de Detroit quelques jours plus tard. Une belle occasion d’en savoir un peu plus à propos d’un futur parfois très proche.
Qui sera en effet responsable, la voiture et/ou le conducteur, un fameux casse-tête pour les juristes ?
C’est un peu la tarte à la crème du moment, la voiture autonome et connectée ! Mais avant cela, il faudra notamment légiférer afin de définir lors d’un accident par exemple les différentes culpabilités.
En attendant et rien qu’aux Etats-Unis, le gouvernement a cependant décidé d’investir plus de quatre milliards de dollars sur dix ans afin d’adapter les infrastructures du pays à ces nouvelles voitures.
Autre indication toute aussi importante, le service de cartographie avancé HERE, propriété de Nokia, vient d’être racheté par les trois grands constructeurs allemands, Audi, BMW et Daimler qui ont un grand besoin de cartes de grande précision mais surtout actualisées régulièrement. Au CES, le groupe franco-nippon Renault-Nissan vient d’annoncer que durant les quatre années à venir, plus de dix modèles autonomes seront dévoilés alors que dans deux ans, les Tesla électriques seront complètement autonomes. Google et Ford vont également s’associer alors que l’équipementier français Valeo renforce sa position dans cette course en rachetant la société allemande Peiker spécialisée dans la télématique embarquée et la connectivité des véhicules.
En plus de la BMW Série 7 qui dès le salon de Francfort avait déjà fait un pas de géant avec des systèmes particulièrement innovants dont le pilotage quasi-automatique ainsi que le stationnement sans conducteur télécommandé via le Smartphone sans oublier la commande gestuelle des systèmes audio et du téléphone par un simple balayage de la main, Mercedes vient de frapper encore plus fort avec la classe E dévoilée à Detroit. Une véritable révolution non pas en ce qui concerne le design toujours très classique mais en plus de perdre 150 kg par rapport à la version précédente et d’étrenner notamment un tout nouveau bloc diesel de 1950 cm3 et 192 ch accouplé à une boîte automatique 9 rapports, cette nouvelle berline (un break suivra durant l’été) possède tous les ingrédients pour devenir une voiture semi-autonome.
Avec notamment un pilotage automatique qui sur les voies rapides (comme les autobahnen non limitées) est capable de suivre et de maintenir une distance de sécurité avec le véhicule précédent et ce jusque 210 km/h, le même exercice peut aussi s’exercer sur des routes non balisées mais à vitesse moindre. Cette Mercedes E pouvant aussi gérer elle même sa trajectoire dans les carrefours, ajuster la vitesse en fonction des panneaux de signalisation, faire attention aux obstacles, les contourner s’il le faut ou freiner automatiquement et se garer toute seule via une application sur le Smartphone. Par une simple action sur le clignotant, la voiture peut aussi changer automatiquement de voie. A bord de cette classe S en réduction, présence de deux écrans géants de 12,3 pouces et de multiples commandes qu’il faudra apprivoiser. Tout cela va se retrouver sur ce modèle vendu dans le commerce dès le mois de mars prochain, le futur, c’est déjà demain.
Ce futur à court terme, on va également le retrouver sur la nouvelle berline Volvo S90 qui vient d’être présentée à Detroit et qui sera lancée en Europe dans le courant de l’automne. Cette grande limousine d’un peu moins de 5 m utilisant la plate-forme du SUV XC90 et qui sera suivie d’un break devant être dévoilé à Genève, sera sans aucun doute l’une des voitures les plus sûres de sa catégorie, incorporant notamment de multiples aides à la conduite tout en faisant également la part belle à la voiture semi autonome. Avec notamment le pilote semi automatique capable de « corriger tout en douceur la trajectoire de la voiture et de la maintenir automatiquement dans sa file sans avoir besoin de suivre un autre véhicule ».
Toujours au stade de prototype, l’Audi h –Tron Quattro permet de constater que tout comme Toyota, Honda et Hyundai, le constructeur bavarois s’intéresse lui aussi à la voiture « hyper propre » fonctionnant à l’hydrogène. Mais il faudra encore attendre quelques années.
Mais revenons au CES de Las Vegas, il a permis de découvrir pas mal de nouveautés intéressantes. Comme la Faraday FFZERO1 électrique de 1000 ch., un concept car issu de l’imagination d’une Start up californienne fiancée par des capitaux chinois. Une formule un électrique, un seul siège, 301 km/h, de 0 100 km/h en 3 s, on croit rêver…Ford dévoilait son modèle Fusion autonome, Kia s’intéresse également de très près à cette technologie, Valeo propose des lunettes capables d’atténuer l’éblouissement lors de la conduite de nuit, Audi présentait le planche de bord virtuelle de demain ainsi que des phares au laser avec 400.000 points lumineux par phare.
En revanche, le spider BMWi8 présenté ici sous forme de concept car devrait être dévoilé à Genève sous sa forme définitive, incorporant notamment des caméras à la place des rétroviseurs extérieurs. Quant au VW Budd-e, il s’agit d’une ébauche d’un futur mini monospace électrique.
Aux States, le salon de Detroit semble enfin avoir retrouvé de « sa superbe ». Finies les années noires et les risques de faillites car après avoir durement restructuré l’industrie automobile, les « Big Three », les trois grands constructeurs US, General Motors, Ford et le Groupe Chrysler (englobant maintenant le Groupe Fiat) semblent enfin avoir retrouvé des couleurs. Plus de 17 millions de véhicules vendus l’année dernière aux USA, soit les mêmes chiffres qu’en 2000, une progression de 5,7 % par rapport à 2014, c’est bon signe. Et pour fêter cela, Ford réintroduit sa marque Lincoln avec la berline continental équipé d’un V6 trois litres biturbo de 400 ch et 542 Nm de couple, la transmisison étant cpnfiée via les quatre roues motrices. Superbement équipée, elle serait vendue à un prix défiant toute concurrence.
Buick lance une Avista, un coupé concept de 405 ch, un modèle qui enfin n’est pas une Opel rebadgée. Alors que les meilleurs ventes aux States passent toujours par le trio des grands pick up Ford F150/Dodge RAM/ Chevrolet Silverado de plus en plus puissants, ce sont une nouvelle fois les constructeurs étrangers qui tiennent la vedette dans les allées du célère Cobo Hall. A commencer par les Japonais avec deux coupés de caractère, Lexus LC 500 de 467 ch grâce à son V8 de 5,0 l et sa boîte automatique 10 rapports alors que la division prestige de Nissan, Infiniti dévoile le coupé Q60 à V6 trois litres biturbo de 405 ch et transmission intégrale.
Tout comme d’ailleurs la Porsche 911 turbo de 540 et 580 ch pour la version S alors que Genesis, la marque de prestige de Hyundai fait ses débuts officiels avec une très grande berline , la G90 de 5,2m de long et 480 ch. BMW nous rappelle à son bon souvenir avec le coupé M2 de six cylindres turbo de 370 ch et 500 Nm en overboost, ça va déménager. Tout comme d’ailleurs les Mercedes SL et SLC reliftées alors que le cabrio S quatre places est désormais disponible avec le bloc V12 de 6 l fort de 630 ch et 1000 Nm de couple, excusez du peu.
Mais à Detroit, d’autres nouveautés nettement plus sages sont aussi présentes. Avec des modèles d’avenir comme le concept Hyundai Ionic, totalement ou partiellement électrique alors que la Chevrolet Bolt de la taille d’un Renault Captur vient d’être dévoilée. 203 ch. pour le bloc électrique, 360 Nm, de 0 à 100 km/h en 7 s, autonomie de 320 km, prix à moins de 30.000 dollars, soit moins de 28.000 €, la production devait débuter fin de l’année, cette mini électrique pourrait être exportée vers l’Europe sous le badge Opel mais rien n’est moins sûr.
Et pour rajouter « de l’huile sur le feu » à propos de la voiture électrique dont le groupe Renault Nissan serait le leader mondial, notre ami Bob Lutz, octogénaire ancien vice-président de GM, figure respecté de l’industrie automobile mondiale ( il a aussi bossé pour Ford, Chrysler et BMW ) ne semble pas « porter » Tesla dans son cœur, cette Start up fondée par l’énigmatique Egon Musk . Selon Lutz, Tesla n’a jamais dégagé en 13 ans d’existence le moindre bénéfice, la société perdrait 35.000 dollars (un peu plus de 30.000 €) par voiture vendue, 50.000 exemplaires ont été livrés en 2015 de par le monde. Intox ou réalité ? Voilà une info émanant d’un ancien ponte de la GM prétendant également que l’électricité n’est viable que sur des véhicules utilitaires légers ou des pick up. A noter que Bob Lutz est président de la société Via Motors, spécialisée dans la conversion en hybrides de grosses voitures produites par la GM.
Et pour terminer avec les « potins » de Detroit, notons que deux marques importantes et pas n’importe lesquelles n’avaient pas de stand dans l’ancienne capitale US de l’automobile, Cadillac ainsi que Ferrari. Dans ce dernier cas, l’introduction en bourse à New York mais également à Milan du « Cheval cabré « ne semble pas correspondre aux attentes du bouillant « patron « de FCA et de Ferrari, Sergio Marchionne. Qui avec cet argent frais doit en effet revitaliser et industrialiser ses trois marques italiennes, Fiat, Alfa Roméo mais également Maserati dont le futur SUV Levante serait enfin dévoilé à Genève.
Et maintenant, place à quelques nouvelles belgo-belges, il se passe toujours quelque chose dans ce petit royaume. Comme par exemple l’ouverture du salon de l’automobile très attendue par un public qui pour rien au monde ne voudrait rater le plus grand show room automobile de Belgique. Plus de 100.000 m2 sur une bonne dizaine de palais situés sur le plateau du Heysel ! Suffisant pour accueillir jusqu’au 24 janvier quelque 500.000 visiteurs, énorme. Mais tous veulent repartir avec un souvenir : un sac, des posters, des catalogues, des sucettes, bref n’importe quoi, tout est bon. N’allez cependant pas croire que ce public se contente de babioles ou simples gadgets, au contraire, il exige des remises les plus élevées possibles, des financements à moins de 1 %, des garanties extra-longues, bref, cette expo est avant tout un salon de ventes.
En ce qui concerne les nouveautés importantes, celles que les journalistes n’ont pas encore pu découvrir, elles se comptent sur les doigts d’une seule main mais le public s’en fiche, il veut en effet voir les nouveautés qui ne sont pas encore exposées dans le show room de son quartier et là, il est véritablement gâté. D’autant que les organisateurs gèrent bien cette exposition qui malgré les intempéries et les mesures de sécurité liées à de possibles attentats ne semblent pas décourager les visiteurs. Et c’est très bien ainsi, ces derniers pouvant également jeter un œil sur les motos et autres scooters sans oublier cette année, une mini exposition de « Youngtimers » des années 80.
Evidemment, le salon de Bruxelles sans anecdote un peu croustillante ne serait pas digne de sa réputation. Ca se passe chez Mercedes mais l’importateur n’y est pour rien, la faute en incombe aux » pontes de Stuttgart qui sont à côté de leurs pompes ». La nouvelle Mercedes classe E a été présentée à Detroit, son entrée officielle en Europe se fera par le biais du salon de Genève en mars prochain. Mais depuis bon ombre d’années déjà et comme Bruxelles « chevauche » Detroit, certaines nouveautés se retrouvaient sur le stand Mercedes de Bruxelles, un peu « cachées dans une black box » mais visibles par les futurs clients. De bonne guerre …Mais cette fois, les dirigeants de la firme à l’étoile ont poussé le « bouchon un peu trop loin ». Lors de la journée de presse à Bruxelles, le 12 janvier dernier et alors que la classe E avait déjà été dévoilée à Detroit et figurait en bonne place sur la « toile », pas question pour la presse locale de découvrir cette nouveauté « Streng verboten ».
En revanche, le lendemain, les futurs clients pouvaient s’en approcher mais en montrant patte blanche, sans GSM ni Smartphone, interdit de prendre des photos, une voiture classée » secret défense ». A mourir de rire si derrière tout cela, il n’y avait pas des hommes et des femmes incapables de prendre certaines responsabilités. Comme tout le monde, j’ai donc pu avoir une « entrevue » avec « miss classe E « et recevoir tous les détails techniques mais interdiction de la photographier, tout cela étant contrôlé par de très nombreux agents de sécurité. A la place de Mercedes, j’aurais encore fait mieux. J’aurais par exemple bandé les yeux des visiteurs, plongé la voiture dans la pénombre et invité les curieux à uniquement découvrir cette berline via les mains en la palpant …Rendez-vous compte l’érotisme que cela aurait pu dégager auprès des futurs acheteurs, je n’ose imaginer l’état second dans lequel cette berline aurait plongé tout ce petit monde…
Isuzu, constructeur de pick up, a lui aussi fait « très fort ». En décembre, un communiqué de presse de l’importateur nous informe que cette firme nipponne fête ses 100 ans, ajoutant en plus, qu’Isuzu serait dès lors le plus ancien constructeur japonais de véhicules. Comme j’ai une bonne mémoire mais surtout une documentation très poussée, j’ai douté, très vite vérifié et constaté qu’il n’en était rien.
En 1907, Daihatsu avait déjà bien avant Isuzu, débuté des activités automobiles. Reléguant dès lors Isuzu au second plan, son acte de naissance datant de 1916. Du coup, en tant que chroniqueur automobile responsable, j’ai pris contact avec le directeur de la communication, lui signalant cette erreur. Avec comme réponse « qu’Isuzu était bien le plus ancien constructeur nippon en Europe, Daihatsu ayant cessé ses activités sur le Vieux Continent ». Ben voyons, du grand n’importe quoi !
Voilà comment on « trafique » une vérité historique au profit d’une autre marque. Grave ! Oubliant bien évidemment de préciser que Daihatsu faisant partie du groupe Toyota, restait en Asie un acteur automobile très important. Et si demain, Daihatsu revient en Europe (en automobile, rien n’est jamais acquis), mettant en exergue son ancienneté comme constructeur nippon, Isuzu devra sérieusement revoir sa communication. C’est d’autant plus grave que cette « fausse info » a bien évidemment été reprise dans le catalogue officiel du salon alors que les plus « grands journalistes de l’automobile » n’ont même pas pris la peine de vérifier. Se transformant dès lors en « journaleux de service » recopiant n’importe quoi dans leurs différentes publications. Vous avez dit « presse spécialisée », moi, j’ai un doute …
Terminons cependant cette revue belgo belge par une excellente nouvelle pour l’emploi. C’est tout frais, Audi vient d’annoncer qu’à partir de 2018, le constructeur bavarois produira sur son site bruxellois à Forest (qui fabriquait la petite A1) un tout nouveau véhicule électrique, devant être vendu dans le monde entier, Q6 dans le jargon des spécialistes. Les 2600 collaborateurs de cette unité d’assemblage ont de quoi se réjouir…
Marcel PIROTTE
https://www.gatsbyonline.com/main.aspx?page=text&id=1564&cat=auto