Peter Szabo “Julia-Woodster”, un concept Roumain…
L’automobile que je présente à votre ahurissement est ambiguë tant par ses formes que par son fond véritable qui demeure étrange… et sa nature quasi “écolomagique”, témoigne des tensions-aberrations qui peuvent survenir dans le cheminement d’une création – j’insiste sur ce terme – que ma présentation va mettre en scène au moyen d’un savant mélange burlesque de diverses explications énonciatives que je ne nommerai pas, non par pudeur, mais parce qu’elles sont multiples !
Généralement, et particulièrement en matière de design, les renversements intellectuels de pensées multiples auxquels donne lieu le jeu des contrastes, permettent la constitution d’une structure de fond et de forme très élaborée qui combine d’une façon particulière des errements structurels eux-mêmes polysémiques.
C’est cette “combinatoire” qui va être l’objet de cette chronique.
Vous voulez que je reprenne ?
Non ?…
Bien…, je poursuis…
Elle constitue, la combinatoire, un réseau fictif dont l’agencement complexe fait intervenir différents niveaux d’interprétation.
Au niveau de la créativité, par exemple, une étude des marqueurs – vous devez tous savoir ce qu’est un marqueur, je ne m’arrête pas sur des problèmes terminologiques, vous vous reporterez aux ouvrages universitaires qui traitent de ce sujet, dont je détiens les références dans vingt-cinq pages de bibliographie…
Où en étais-je ?
Ah ! oui, les marqueurs…
Eh bien, ces marqueurs, ils nous révèlent de façon surprenante la modalité intersubjective qui caractérise le sujet dont il est ici question…, intersubjectivité que l’énonciation particulière, je dis bien particulière, met nettement en valeur (et non en exergue).
Un exemple : la “prédicativisation” du sujet traité, révèle de toute évidence l’ambivalence du narrateur narrant à l’égard du narrateur narré (je parle de mon moi-même).
C’est clair ?…
Ou pour parler votre langage de beaufs attardés, on aime ou on n’aime pas.., ce qui ne change strictement rien au fait, d’évidence, qu’il s’est trouvé un humain pour créer cette folie relativement grotesque.
Vous me suivez ?
Bon !
Faites un effort, ça va se compliquer.
Tout ce montage, véritable labyrinthe structural – ne notez pas, ne notez pas cela, une simple métaphore didactique – toute cette construction plurielle – ça, vous pouvez noter – cette pluralité a, à voir, c’est ce que l’on finit par découvrir, avec un non-dit subtil et jamais atteint – car vous avez tous remarqué qu’il s’agit là d’une quête, qui bien sûr n’en est pas véritablement une – a donc à voir avec un indicible… que Lacan aurait nommé : l’un en moins…., de ce vide entre le dit et l’objet de cet implicite suggéré avec une rare finesse, naît l’inquiétante étrangeté : l’Unheimlich…
Vous aurez donc remarqué le cheminement que j’ai suivi, et qui nous amène à dire que cette voiture est fantastique…, ce qui n’était clair pour personne, maintenant, je l’espère, l’est pour tous.
Des questions ?…
Vous voulez savoir qui est le créateur ?
Il s’agit de Peter Szabo, un Roumain de Roumanie, fanatique de voitures soviétiques, qui a décidé de combiner la menuiserie avec la technologie moderne pour créer une voiture en bois d’arbre…, capable d’une vitesse de croisière de 85 km/h.
Cette voiture en bois, qu’il a nommée “Julia”, le nom de sa première petite amie avec laquelle il a vécu son premier rapport sexuel, est donc un projet de menuiserie qui a exigé plus de 4.500 heures étalées sur trois ans et à coûté 20.000 euros de bois de frêne.
Ce véhicule combine les lignes rétro mêlées au style de la vieille école des automobiles classiques Russes, avec des innovations modernes telles que les phares et la musique slave contrôlée par une tablette Samsung.
Je continue…
Nous entrons maintenant dans la “mise en abyme” du projet de Peter Szabo…
L’esthétique dominante est celle de l’ambigu…, tout le monde aura remarqué que tout ici est ambigu…
N’est-ce pas ?…
Il est clair que l’obscurité du vide intellectuel participe au phénomène d’angoisse auquel vous êtes en proie à l’idée que la prochaine Mercedes pourrait avoir un look extrapolé de cette voiture…
De quoi est-il question ?
Comment une telle complexité est-elle possible ?
Vous conviendrez donc avec moi que le mystère dont s’entoure le créateur de cet engin laisse ouvert tous les possibles…
Comme le disait si poétiquement, Barthes je crois : “Le vide est une polysémie exacerbée”…
N’est-ce pas ?
Il est clair aussi que ce topos n’éclaire pas l’ethos en principe toujours nettement visible dans l’incipit…, le sujet de toute énonciation se dissimule derrière un référent qui n’existe pas.
Ainsi, par un subtil jeu de cache-cache, l’on ne sait ni où l’on est, ni en quel temps, ni même de quoi l’on parle !…
On erre dans un univers flou qu’un créateur extra-homo-diégétique en focalisation externe à imaginé !
Oui ! cette automobile est un concept “homodiégétique” en focalisation externe…, car il s’agit d’un charpentier amnésique et dédoublé…
Il a d’ailleurs affirmé publiquement, en cercle restreint que : “Il est très rare de trouver un concept en bois dur d’arbres de très bonne qualité. Il est presque impossible de le trouver partout dans le monde”.
Peter Svabo voulait construire quelque chose qui était rare et cela l’a amené à construire ce concept fait de bois dur d’arbres : “Ce fut un moment difficile pour moi, mais aussi un moment heureux. C’était un grand bonheur pour moi de le construire”…, c’est là la démonstration totale de sa volonté d’arriver à un résultat, quel soit-il…
“Julia” est devenue un projet tellement vaste dans ses applications potentielles, qu’après un an, Peter Svabo a été obligé de construire un atelier plus grand car son espace actuel n’était plus adapté !
Maintenant, il n’aime rien de mieux que de conduire sa voiture unique autour de son village Roumain…, afin de ressentir les vagues d’admiration de ses voisins.
“La réaction des gens me rend heureux”, a-t-il déclaré.
Vous le voyez, le fantastique, là ?
Eh bien, cet extra-homo-diégétique (allez voir Genette pour ça), a observé comme vous ce qui se passe dans le monde de l’absurde… et a écouté ce qui se dit de tout et n’importe quoi en essayant de saisir quelque chose.
Peter Svabo a également déclaré : “En Roumanie, beaucoup de gens travaillent avec leurs mains afin que les gens apprécient vraiment une voiture construite à la main”…, ajoutant : “Ici, en Roumanie, beaucoup de gens travaillent de leurs mains et ils savent que construire quelque chose avec les mains est difficile. Ils l’apprécient”…
Extraordinaire moment de vérité vraie et pure qui doit donner matière à réflexions multiples.
La voiture qui a été très appréciée au Salon de l’agriculture de Vladivostok en juillet 2015, puis au Salon de l’automobile de Francfort en septembre 2015, et enfin au Salon de l’érotisme de Varsovie en décembre 2015, peut se déplacer confortablement autour de tout village, à 50 ou 60 Km/h, dans un but récréatif…, grâce à un puissant moteur Ford Taunus 20M récupéré sur une épave de 346.975 kms non garantis réellement…, mais Peter Svabo est sûr et certain que « Julia » atteindra prochainement(pour fin 2017) des vitesses plus rapides grâce à l’adjonction d’un carburateur neuf…
Ce fanatique de la voiture a également déclaré : “Ma femme et nos enfants sont très fiers de cette voiture et de leur père!”…
Et avec “Julia” sous sa ceinture…, Peter Svabo planifie déjà son prochain projet, une autre voiture en bois avec un design plus “futuriste” et un moteur électrique…, qui se nommera “Alexia” du prénom de sa seconde petite amie qui l’initia au plaisir anal…
On pourrait voir là l’aboutissement d’un projet à rebondissements multiples qui semblait une aporie, et dont la forme féminine en clair-obscur, effrayante et désirable, laisse percevoir sous le voile du flou artistique, une connotation érotique.
La permanence de l’irréalité ressentie est engendrée par l’illusion d’une présence transcendante que recouvre l’immanence de l’insaisissable, de l’invisible…, signifiants sur lesquels nous essayons tous en cet instant tragique de mettre au moins un signifié, une sorte de généralité signifiante globale, vaste et suprême consécration du chef-d’œuvre : l’ambiguïté créative !
Merci, merci…, je vous en prie…, merci… et à bientôt…