D’aussi loin qu’il s’en souvienne, Lucien Deltour, originaire de Cambrai (la ville des bêtises, c’est dire…), pense avoir passé la majeure partie de ses jeunes années ’90 le cul planté sur le canapé parental… j’écrirais même, pour être pleinement honnête : le cul fermement vissé dans l’odieux sofa d’un cuir vert et lisse, finement ciselé et tellement puissant pour l’époque, qu’il serait venu détrôner n’importe quelle merde de repose-fesse en velours, façon “Madame est Servie”, avec boiserie rococo de fils de pute, au niveau de l’armature.
J’espère que vous visualisez bien la scénette (c’est important) car cette peau de vache ayant essuyé les plâtres de son anatomie repoussante, était en fait une merde infâme pour qui ses parents s’étaient saignés à payer à crédit ce canapé chez les crochus escrocs vendeurs d’un infâme magasin de déco de quinzième zone.
Des années gâchées à se gaver également de films coréens de space opéra péroxydés : Robotech (Macross, pour ceux qui savent)… Cosmos 1999 (sorte de Star Trek avec un équipage entier sous crystal-meth et bassinant la gueule des zombies téléspectateurs 45 minutes durant, dans un cockpit façon ex-URSS, avec des concepts philosophico-religieuso-sodomites pour finalement atterrir sur une planète de carton-pâte avant de repartir aussi sec, car l’espace est rempli de gros cons et qu’en fait, il n’y avait pas assez de moyens pour fabriquer des monstres à chaque épisode)… ou encore à s’exciter devant les exploits de Buck Rogers, du Galactica ou du connard frisé dans Tonnerre Mécanique (Lyndsay Wagner, dans Super Jaimie, avec ses tétons d’acier mériteraient à eux seuls un pamphlet)… certes, je m’éloigne du propos auquel je souhaitais arriver… mais laissez-moi donc l’espace d’un instant de jouissance, vous narrer ce pourquoi tout ce bazar des années ’90 ne devaient aboutir que sur l’ingestion de séries à roulettes et cheveux gominés.
Alors autant que vous le sachiez tout de suite : son éducation est presque totalement passée par le tube cathodique de la TV, difficile d’ailleurs de savoir à quel moment il n’a plus décollé ses yeux de l’écran…, peut-être pendant ces glorieuses années où les chaines privées attiraient les gogos avec des films pornos pakistanais et turcs pour les faire bander salement dur dans leurs shorts éponges. Toutefois, si je devais condenser toute la singularité de cette formation à la vie extra-muros, singularité même qui aura permis à ce brave Cambraisien, Lucien Deltour, de devenir aujourd’hui ce glorieux wannabe, quelque chose d’autre qu’un artiste raté… j’écrirais sans trop de honte que c’est bel et bien une antique caravane Airstream Ambassador 1976 apparue dans un des épisodes d’Agence Acapulco, qui a marqué jusqu’au plus profond de son obscur patrimoine génétique…, car, concrètement, en sus de cette bêtise en aluminium, il y avait tout dans cette série, oui TOUT, pour que la jeunesse déglingue… une musique entraînante dès l’opening (basse dégueu + mélodie de synthé révolutionnaire), de jolies pépées qui annonçaient de suite la couleur… et un panel d’acteurs/trices tous et toutes plus stylé(e)s les un(e)s que les autres… l’ex-playmate Alison Armitage, en tête, celle qui grâce à des gougouttes démesurées remplaçants toute nécessité d’onéreux cours de théâtre… et une bouche qu’aucun savon industriel ne pourrait curer de ce tenace goût de foutre accumulé au fil des castings, lui avait fait prendre en pleine face cette tragédie du XXIème siècle, que l’on nomme hétérosexualité !
“La petite Catherine Oxenberg (Ashley Hunter-Coddington), je l’aimais bien. C’était un peu la chef, il me semble. En tout cas, elle me faisait bander dur. Oui, c’était donc la chef. J’ai de graves soucis de priapisme quant il s’agit de femmes de pouvoir. Y’avait aussi d’autres personnages mais on s’en tape un peu. Tout ce que vous devez savoir c’est que concernant les filles de la série, elles ne portaient que peu de tissus et qu’elles ont toutes, sans exception, été stalkées par ma personne lors des frénétiques visionnages d’Hollywood Night sur TF1, et quand aucune série ne mettant en scène la mammairement volumineuse Shannon Tweed n’était disponible pour ceux n’ayant pas le câble. Est-il nécessaire de vous préciser que je n’ai pas revu ce bijou télévisuel depuis sa diffusion entre ’94 et ’97 ? La raison est toute simple : je souhaite conserver un regard certes subjectif, mais bienveillant et ne pas risquer ainsi de venir corrompre à tout jamais ce qu’il subsiste de ce bonheur fugace que l’on ne retrouve que dans la postface de son enfance”... qu’il m’a dit Lucien Deltour…
Il n’y a pas longtemps, en suite de mes discussions avec Lucien Deltour, essayant de comprendre le pourquoi du comment il en est arrivé à flasher sur la caravane Airstream Ambassador 1976, j’ai commis l’erreur de voir un DVD d’un épisode d’Agence Acapulco, ainsi que d’un autre feuilleton : “Jayce et les Conquérants de la lumière”…, eh bien, je peux vous garantir qu’en plus d’un générique épique et des monstroplantes préfigurant un peu de ce que seraient les hentaïs à tentacules, les dialogues et scénarii sont creux, totalement insupportables…
Et non, je ne me souviens même pas de ce dont pouvait bien parler cette niaiserie bariolée… et non, je ne vous fais pas une crise de retraité en manque d’amour comme d’inspiration…, je fais juste le constat que ce qui fait que l’on tient encore le choc lorsqu’on tente de se balader sur ce sentier pavé de piètres intentions que l’on nomme année 2015… c’est la force du fantasme de nos joies passées et qui nous unit dans une folle ronde d’amour et de respect, où nos mandrins respectifs seraient analement harnachés aux fines rondelles de nos voisines dans une sortes de Human Centipede dont on aurait remplacé l’intestin unique par une copieuse banque du sperme !
Oubliez tout ce que je viens d’écrire… de toute façon, vous êtes sans doute déjà passés à autre chose…, du haut de vos certitudes, je vais toutefois et quand même vous narrer ce qui est advenu de ucien Deltour…, alors qu’il se promenait à vélo dans la périphérie de Cambrai par un bel après-midi, Lucien Deltour a remarqué une caravane Airstream garée sur le bord de la route : “Quelques jours plus tard, lors d’une recherche sur Internet, je l’ai vue en vente en ligne. Même si je n’avais pas prévu de commencer un projet de rénovation et encore moins de vivre dans une caravane, il ne m’a fallu que quelques heures pour commencer à m’y voir, car il s’est avéré que par le plus grand des hasards, il s’agissait de la même Airstream Ambassador 1976 que dans mon feuilleton préféré ; Agence Acapulco… La caravane Airstream était en bon état pour un modèle Ambassador de 1976 (9m de long) mais elle était vendue en l’état, avec son désordre, sa moquette à poils longs, et ses rideaux opaques, typiques des Airstream de l’époque. Je l’ai achetée pour une bouchée de pain en quelques heures. Le plus difficile a été de trouver où garer la caravane pendant sa rénovation, puis un endroit où y vivre sur le long terme. J’ai cherché un peu partout et ai finalement trouvé l’endroit rêvé sur le terrain d’un bon ami. Il habite au nord de Cambrai et possède un terrain de 12 mètres de large à l’arrière de sa maison. Il n’a suffi que de quelques bières et l’affaire était faite”…
Le processus de restauration a été long car après réflexion, Lucien Deltour a décidé de changer presque tout : “Le meilleur moment a sans aucun doute été ma première nuit dans la caravane. Je venais non seulement de vivre de longues soirées d’un hiver froid et interminable à y travailler, mais cela faisait plusieurs mois que j’étais sans domicile fixe, à aller et venir d’un endroit à l’autre. Pendant la rénovation, ma vie a subi plusieurs changements importants… et finir la caravane a représenté bien plus que la fin d’un projet. C’était un geste symbolique pour me prouver que j’étais encore capable d’avoir une idée un peu folle et de lui donner vie. Pouvoir m’endormir dans cet espace un peu dingue m’a apaisé et m’a permis de me retrouver et de me rappeler ce que je souhaitais vraiment : une vie simple et heureuse dans le Cambraisis. Je pense que mon style se résume à un mélange de matériaux contemporains, vintage et élémentaires, de l’acier, du bois et de la pierre. Même si je suis quelqu’un d’imprévisible, je n’aime pas du tout le désordre et je préfère les espaces nets et bien agencés, faits pour être multifonctionnels. Lorsque je fais de la déco, je pars du principe que si cela ne sert à rien, ce n’est pas nécessaire. Je déteste les objets déco qui ne servent à rien dans une pièce à vivre. Le concept d’une maison exiguë est très attirant pour moi. Cela oblige à éliminer tous les objets qui ne sont pas nécessaires et à utiliser l’espace comme reflet de ma personnalité”….
Pour suivre ce principe, Lucien Deltour a utilisé des centaines de planches de bois dépareillées et a fabriqué le placard et le meuble qui accueille le frigo : “Le principal défi a consisté à ouvrir l’espace et à se débarrasser de l’impression d’enfermement que l’on ressent dans les vieux modèles Airstream. Il fallait aussi ajouter des espaces de rangement et des aménagements pour la vie quotidienne”…
Après de nombreuses recherches sur les rénovations de modèles Airstream, Lucien Deltour était frustré de se rendre compte qu’ils avaient tous encore une apparence de caravane : “Je voulais ajouter des éléments qui pourraient donner au mobil-home une apparence de studio, plutôt qu’une apparence de caravane. J’ai tout simplement choisi de meubler l’espace avec des pièces amovibles. Par exemple, le canapé-lit, les tapis, les tables et la chaise peuvent être bougés facilement. La plupart des rénovations ont des structures encastrées. J’ai trouvé que la flexibilité de ce salon était vraiment idéale pour réarranger l’espace en fonction de mes besoins. L’ambiance est ainsi celle d’une maison ou d’un appartement classique. Le bureau est mon espace préféré. Je passe la majorité de mon temps à manger, travailler, lire et écrire sur ce petit bar/bureau/plan de travail que j’ai fabriqué. C’est un simple petit renfoncement sous le long plan de travail que j’ai ajouté au dernier moment. Et pourtant, ce coin s’est révélé être l’espace le plus utile et forcément, celui que je préfère. Le défi, quand on décide de commencer une rénovation, a fortiori celle d’un Airstream, est de décider ce qu’il faut refaire complètement et ce qui peut être conservé une fois réhabilité. Presque tout dans ma caravane a été
enlevé et réinstallé complètement”…
Lucien Deltour a demandé conseil pour réussir à mettre la tuyauterie au goût du jour : “Ce n’est pas évident avec les mobil-homes, il y a de nombreuses normes de sécurité à respecter au niveau du gaz. J’ai fait appel à un spécialiste des caravanes. Nous avons pu faire face aux différents problèmes de façon sécurisée et efficace. J’ai ajouté des toilettes à compost qui fonctionnent avec de la mousse et qui complètent l’autonomie de l’Airstream. Je n’ai rien fait qui vienne gâcher le charme de la caravane. J’ai vu des dizaines d’Airstream sur le web, mais je suis toujours fasciné par cette ligne nette et moderne qui date de la fin des années ’50. Elle était vraiment en avance sur son temps”…
Lucien Deltour est maintenant occupé à rénover l’extérieur du mobil-home…, il lui reste à refaire le calfatage des fenêtres et des jonctions, à poncer et repolir le cadre principal et peut-être même à repolir l’ensemble du mobil-home : “Ce sont de petits travaux sympas pour lesquels je peux prendre mon temps, au contraire du rush de cet hiver où il fallait se presser de finir l’intérieur”…, raconte-t-il.