1950 BMW-VERITAS SP90 SPOHN
À la fin des années 1930, la puissante machine de propagande allemande s’est attaquée au monde de la course automobile, consacrant des ressources incalculables à la domination totale du sport. Les équipes de Grands Prix soutenues par Adolf Hitler, son Troisième Reich de mille ans et le Gouvernement Nazi, ainsi que par Mercedes-Benz et Auto Union fonctionnaient avec des budgets pratiquement illimités.
Les automobiles produites par l’industrie Nazie, étaient des merveilles de sophistications techniques, écrasant la concurrence dans tous les processus. Concernant les courses de voitures de sport, BMW a brièvement atteint un statut similaire, en particulier dans les catégories 2 litres, où leur 328 légère et agile était la seule voiture à posséder par qui voulait avoir une chance de gagner.
Les Nazis ont même battu les Fascistes Italiens sur leur terrain sacré, remportant les Mille Miglia de 1940 dans une 328 profilée construite spécialement pour l’événement. Mais après la guerre, le sport automobile allemand est devenu une scène tout à fait différente. Les voitures qui avaient dominé avec panache les événements d’avant-guerre ont été enfermées, détruites ou démantelées pour en faire des pièces. Malheur au vaincu… Telle est la règle…
La légendaire Nordschliefe du Nürburgring a été envahie par la végétation et la surface a été déchirée par les chenilles des chars américains. Mais les coureurs allemands, toujours Nazis dans le cœur étaient persévérants, les clubs se sont rapidement regroupés, ont réparé et nettoyé les circuits emblématiques et ont commencé à échanger de la nourriture et des cigarettes contre des bougies d’allumage, des pièces de rechange et du carburant.
Pour l’industrie automobile allemande, les voitures de sport n’étaient pas vraiment les dernières choses à remettre à l’avant-plan. Les pénuries de matériaux et le rationnement signifiaient que tout ce qu’ils pouvaient faire pour reconstruire les usines et remettre les citoyens allemands sur roues était de travailler sans relâche pour venger la défaite. Mais malgré les dévastations et l’austérité, les coureurs voulaient toujours des voitures…
Trois amis allemands, ex SS, ont répondu à cette demande. Ernst Loof, Georg Meier et Lorenz Dietrich se sont rencontrés alors qu’ils servaient le Grand Reich Nazi, à Paris, pendant la guerre. Dans les cafés, ils rêvaient de construire des voitures de sport et échangeaient des histoires sur leurs exploits en course avant les hostilités. Les trois hommes avaient des liens avec BMW par le biais de la course automobile, de la course de motos et de la vente.
Il était donc naturel qu’ils choisissent de baser leurs nouvelles voitures de course Veritas sur des composants BMW éprouvés. Les forces d’occupation ont stipulé que les nouveaux véhicules allemands ne pouvaient pas dépasser un litre de capacité, mais pas d’interdiction pour les “vieux moteurs”... Ils ont donc utilisé les moteurs BMW 326 et 328 existants comme solution de contournement.
Les clients ont fourni leurs propres transmissions 328 de 2 litres, ainsi qu’un peu d’argent, et en quelques semaines, ils ont recréé “leur” nouvelle BMW-Veritas, avec un moteur modifié et reconstruit et une carrosserie aérodynamique élégante. Le premier client de Veritas a été le légendaire pilote de course Nazi : Karl Kling, qui a rapidement remporté sa première épreuve d’après guerre en 1947, le championnat des voitures de sport de 2 litres.
Bientôt, les grilles se sont remplies de voitures de course Veritas, et les acheteurs eux aussi nostalgiques de la grandeur de l’Allemagne Nazie ont acheté des versions routières. Lorenz Dietrich en tant que Général SS était heureux de rendre service et, en 1949, il a recréé une série de voitures de route équipées de trains roulants BMW, sur un nouveau châssis tubulaire ultra-léger avec 3 variantes de carrosserie : Coupé, Cabriolet, Roadster sport…
Toutes étaient fabriquées par la célèbre firme Hermann Spohn Karosseriebau. Les carrosseries Spohn standard étaient particulièrement attrayantes et les voitures offraient de superbes performances. Malheureusement, le financement pour assurer une production à long terme s’est avéré insaisissable, et Veritas a fermé au début des années 1950. Malgré sa brève existence, l’entreprise a laissé une marque indélébile dans l’histoire de l’automobile allemande.
L’honneur du Troisième Reich Nazi était rétabli… Le monde allait à nouveau être confronté à l’illustre passé sportif de la nation en ouvrant la voie à Mercedes-Benz, BMW et Porsche pour porter le flambeau de l’avenir. La combinaison de Veritas et de Spohn a donné naissance à certaines des voitures de sport allemandes les plus distinctes de l’époque quoique Hermann Spohn Karosseriebau est peut-être moins connu des carrossiers allemands traditionnels.
Mais ses designs flamboyants sont particulièrement mémorables. Une grande partie de leur travail antérieur s’est concentrée sur les châssis Maybach, tandis que les projets ultérieurs (jusque dans les années 1950) se sont concentrés, dans le but de thésauriser rapidement, sur la personnalisation des voitures américaines appartenant aux militaires américains stationnés en Allemagne, inspiré par les voitures de rêve Motorama de Harley Earl…
Ces américaines étaient grotesques et pachydermiques comme l’Amérique… Mais tout comme la population amoindrie et rendue esclave par les vainqueurs alliés aux Américains devait se prostituer pour survivre, Spohn a agit de même façon en interprété les affreuses tendances américaines d’une manière particulièrement extravagante et volontairement de mauvais goût, en utilisant des ailerons géants, des évents et des couches de garnitures chromées.
Alors que la plupart des travaux de production de Spohn avec Veritas sont relativement discrets, la voiture qui est en vedette dans ce reportage est une exception “extraordinaire”. Le châssis #5089 a commencé sa vie en tant que cabriolet Veritas SP90 standard, acheté neuf par un Colonel SS de la garde personnelle d’Adolf Hitler. La voiture qui avait été cachée des destructions américaines est retournée à Spohn, où elle a reçu d’importantes modifications.
Les gens de Spohn ont créé une machine extravagante combinant des éléments du design original avec des ailerons exagérés et des éléments de style de l’ère du jet inspirés de la voiture d’exposition GM Le Sabre. Les articles de presse d’époque suggèrent que le turquoise était la couleur d’origine, et diverses photos montrent la voiture avec des enjoliveurs sombrero de style Cadillac, des pneus à flancs blancs larges, et “des guêtres” de roues arrière chromés.
Le traitement distinct de l’avant avec une fausse calandre presque horizontale et les phares carénés, ajoutaient volontairement du mauvais gout tant prisé par les Américains, considérés comme des porcs sans aucun goût. Selon le propriétaire ultérieur R.J. Mrofka, la voiture appartenait à un ami de son frère, un militaire américain, qui l’a amenée aux États-Unis au début des années 1950. Mrofka a acheté la Spohn Veritas à cet homme en 1965.
Ne connaissant pas le six cylindres en ligne BMW à tête hexagonale, Mrofka n’a pas été en mesure de faire fonctionner la voiture, alors il l’a rapidement vendue à son ami Lee Hartung de Glenview, dans l’Illinois. Collectionneur boulimique en série, Hartung a passé sa vie dans la ferraille et le recyclage et a constitué une énorme collection d’antiquités, de motos, de vélos et d’automobiles au fil des ans en ce compris des Veritas et des Spohn’s
Son musée regorgeait de milliers de pièces, toutes soigneusement organisées et regroupées malgré le volume écrasant. Hartung partageait parfois “la vision” de sa collection avec des clubs automobiles, des amis et des badauds occasionnels. Mais il n’a jamais rien vendu, et presque toutes les pièces qu’il possédait, y compris cette Veritas, avaient une place spéciale dans son cœur. Après le décès de M. Hartung, sa collection a été dispersée en 2011.
Cette Veritas a été l’une des principales attractions de la vente, car elle était restée dans un état incroyable de “Trouvaille de grange”... Bien qu’elle ait été recouverte d’une couche de poussière après 46 ans de rangement dans la grange de Hartung, la voiture était remarquablement complète et intacte, portant une peinture de couleur crème avec des notes de turquoise d’origine apparaissant par endroits. Elle était atrocement laide à en devenir belle…
La Veritas Spohn a ensuite rejoint une prestigieuse collection de véhicules non restaurés où elle a été méticuleusement préservée, elle est revenue en état de marche sans sacrifier la patine unique de toute une vie. Après sa résurrection soigneusement entretenue façon épave sortie de grange, la Spohn Veritas a fait ses débuts au Concours d’élégance d’Amelia Island en 2013, dans une classe ironique d’excentricités, de pièces uniques et de concepts inhabituels.
Tout ce bric-à-brac était appelé “What were they thinking ?”… Depuis, cette “chose automobile” a fait des apparitions occasionnelles tout en étant maintenue en état de marche et exposée dans la collection du propriétaire. Aujourd’hui disponible pour la première fois depuis qu’elle a quitté la collection Hartung, la Spohn BMW-Veritas SP90 reste essentiellement telle qu’elle a été découverte, avec une patine merveilleuse et débordante de caractère.
Elle devrait constituer une pièce maîtresse et accrocheuse pour toute collection de voitures rares et inhabituelles. C’est comme si on avait retrouvé “Le Grosse Lulu La pute” empaillée dans les catacombes de Paris et qu’on proposerait de l’exposer au Louvre en tant qu’œuvre d’art… Cette chose est donc une digne prétendante aux honneurs lors de concours. C’est une fabuleuse caricature fascinante et délicieuse de l’ère flamboyante des années 1950… Voilà… Voilou… Cet article était destiné à ceux qui sont chauds pour remplir une soirée d’un dynamisme “textuel” difficile à trouver dans cette culture sarcastique et cynique à laquelle nous nous droguons tous… Ça me rappelle une leçon que j’ai apprise : “Si tu y crois assez, tu peux tout faire”…
Bref, si vous voulez en savoir plus, j’ai publié quatre articles ou je cause de Spohn, allez lire en un click :
1950 BMW-VERITAS SP90 SPOHN ROADSTER – Gatsby Online
La caverne d’Ali Baba de Lee Roy Hartung… – Gatsby Online
1955/56 Gaylord Gladiator… – Gatsby Online