1958 Kaiser Henry J + 1959 Excalibur Hawk Coupé + 1985 Excalibur RS
Brooks Stevens, natif de Milwaukee, Wisconsin, USA, un enfant du pays, comme on dit, était un designer qui eut un certain succès, surtout auprès de ses clients industriels qui utilisaient ses services pour concevoir des sécheuses, des bagages, des tondeuses à gazon, des trains, des bateaux et des voitures… Son nom est surtout resté associé à Studebaker, à Willys et surtout à Excalibur… Brooks Stevens était un personnage charismatique, très doué pour faire des déclarations inventives à ses clients à l’appui de ses dessins souvent flamboyants… Ses succès, furent toutefois, toujours obtenus avec excès…
Brook Stevens à débuté avec Henry J.Kaiser qui auparavant avait réussi l’exploit de faire fabriquer des navires de transport “à la chaîne” durant la guerre (les fameux “Liberty ships” ), révolutionnant les méthodes de construction navale et contribuant ainsi à assurer la victoire aux Etats-Unis. Henry Kaiser est résumé comme éternellement sûr de lui, impavide, d’une courtoisie extrême, ne se laissant jamais démonter “l’homme au sourire” comme le surnommera la presse, n’hésitera jamais à relever un défi, fût-il totalement insensé en apparence, il ira ainsi jusqu’à proposer après guerre de fabriquer des avions et des automobiles en kit, anticipant largement sur la construction modulaire. “Cet homme a des doigts d’or” dira de lui Winston Churchill,ajoutant : “Sans les incessants convois de Liberty ships fendant jour après jour les flots entre l’Amérique et la Grande-Bretagne, la guerre aurait bien pu être perdue”… L’hommage vaut son pesant d’or… La vie et la carrière du père des “Liberty ships” concentrent tous les ingrédients du mythe du “self made man”.
Parents immigrés arrivant aux Etats-Unis sans le sou, enfance pauvre mais heureuse, entrée précoce dans la vie active, envie furieuse de réussir, intuitions géniales, construction méthodique d’un empire, le tout sur fond d’histoire d’amour. Une saga à l’américaine pur jus, De l’audace, Henry Kaiser semble en avoir eu dès son plus jeune âge, ce qui le poussera à prendre très tôt son destin en main… Né en 1882 dans l’Etat de New-York, il sera ainsi successivement vendeur de rues à New-York à 13 ans, employé d’épicerie à 16 ans, représentant de commerce à 17 ans, puis employé dans un magasin d’articles de photographie à 19 ans et ensuite employé dans une quincaillerie de Spokane, ce qui va permettre à Henry Kaiser de se frotter au secteur qui va bientôt faire sa fortune : la construction. Située au cœur d’une région minière très active, Spokane connaît en effet, en ce début de XXème siècle, un développement très rapide. Chaque jour voit son lot de nouveaux édifices sortir de terre. Flairant le marché, la quincaillerie où travaille Kaiser s’est lancée dans l’achat et la revente en gros de matériau de construction, tissant des liens étroits avec tous les artisans du bâtiment. C’est Henry Kaiser qui a été chargé de suivre cette activité. Les prix du béton et du bois, les contraintes des chantiers et la gestion de la main d’œuvre n’ont bientôt plus de secrets pour lui. En 1914, s’estimant capable de voler de ses propres ailes, il répond à son premier appel d’offre : des travaux de rue à réaliser pour la ville de Vancouver, au Canada. Dans les années qui suivent, la Compagnie Henry J. Kaiser constituée en décembre 1914 va être de tous les grands programmes routiers et autoroutiers des Etats-Unis. Sur fond d’essor très rapide de l’automobile et de développement de gigantesques banlieues à la périphérie des grandes villes (deux évolutions que l’Europe ne connaîtra qu’un demi-siècle plus tard), le pays se couvre de voies de circulation rapides.
Sur ce marché, Henry Kaiser s’impose très vite comme l’un des principaux acteurs. La conséquence, d’abord, d’un sens aigu de l’innovation qui le pousse à adopter avant tous ses concurrents les matériels les plus moderne. Il est ainsi le premier à remplacer, sur les chantiers, les brouettes équipées de pneus en caoutchouc par des brouettes dotées de jante métalliques, le premier encore à s’équiper de tracteurs en lieu et place des traditionnelles voitures à cheval, le premier toujours à utiliser les techniques nouvelles de terrassement mises au point par l’ingénieur Robert Le Tourneau, l’un des pionniers des travaux publics. A la clé : des délais de construction réduits de moitié et des coûts beaucoup plus compétitifs. Avec Kaiser, le secteur des travaux publics entre de plain-pied dans l’ère de la consommation de masse… A partir des travaux routiers, Kaiser va se diversifier dans la pose de pipe-line et dans la construction de grands barrages. Sa consécration, il la connaît en 1929 lorsque sa compagnie est choisie par les autorités fédérales pour construire un gigantesque barrage sur le Mississippi, l’Hoover Dam. Le contrat atteint la somme phénoménale de 165 millions de dollars ! Pour l’occasion, Henry Kaiser a monté un consortium de six entreprises dont il est devenu le principal animateur. Les “Six Compagnies”, comme on baptise bientôt l’entreprise, participera à la construction de tous les grands barrages lancés par le président Roosevelt dans le cadre de sa politique de grands travaux. Pour la réalisation de ces chantiers, Henry Kaiser multiplie les innovations, utilisant le premier des éléments préfabriqués et prêts à assembler en béton et poussant très loin la spécialisation de ses ouvriers . A la fin des années 1930, le consortium est devenu l’un des principaux groupes de travaux publics des Etats-Unis.
C’est aussi celui qui a la réputation la plus sulfureuse. Dans les années 1930, on ne compte plus les commissions d’enquêtes mandatées par le Congrès pour violations de la législation fédérale sur le travail. A lui seul, le chantier de l’Hoover Dam sera entaché de 10.000 procédures ! A chaque fois, Henry Kaiser parviendra à échapper aux poursuites, menant à Washington un lobbying actif, n’hésitant pas à recourir aux “causeries radiophoniques” pour prendre le public à témoin, faisant de chacun de ses chantiers autant d’exploits humains . A Oakland, en Californie, où il a ses bureaux et où il réside avec sa famille, il prend soin chaque Noël d’inviter chez lui tout son personnel, mais aussi ses voisins et tous ceux qui le souhaitent, pour une gigantesque garden party, peaufinant ainsi son image – réelle au demeurant – d’homme simple et accessible. L’industriel restera toute sa vie fidèle à la Californie, se faisant construire en 1935 une belle propriété non loin d’Oakland où il se livre à l’une de ses grandes passions : le ski nautique. Le préfabriqué, l’assemblage rapide, la spécialisation : ces recettes qui ont fait le succès des Six Compagnies, Henry Kaiser va les mettre au service de son activité la plus célèbre : la construction des Liberty et des Victory ships. A l’automne 1940, l’industriel propose aux autorités fédérales de construire pour le compte des Anglais, désormais seuls en guerre contre l’Allemagne, les bateaux de transport qu’ils réclament à cors et à cris. Malgré le manque total d’expérience de Kaiser dans le domaine de la construction navale, Roosevelt accepte, en grande partie semble-t-il afin de préserver les capacités de production des autres chantiers navals en prévision de l’entrée en guerre des Etats-Unis. Dès la fin de l’année 1940, les deux chantiers navals que Kaiser a créés à Richmond et Portland sont opérationnels.
Ils produiront 2.700 navires entre 1941 et 1945, à raison d’un tous les cinq jours. Un véritable exploit ! Pour tenir ce pari, Kaiser a totalement révolutionné l’industrie de la construction navale. Un peu comme Airbus de nos jours, les différents éléments entrant dans la composition d’un navire – 30.000 environ – sont fabriqués dans plus de 2.000 usines et ateliers répartis dans une trentaine d’Etats et acheminés jusqu’à Portland et Richmond pour y être assemblés. Avec vingt ans d’avance dans la construction navale et aéronautique – et pas loin de quarante ans dans l’automobile – Kaiser invente un principe promis à un bel avenir : la construction modulaire. Liberty et Victory ships rapporteront à l’industriel près de 140 millions de dollars pour un investissement initial inférieur à 5 millions, suscitant un début de polémique après la guerre. “Jamais dans toute l’histoire des Etats-Unis, que ce soit en temps de paix ou en temps de guerre, un aussi petit nombre d’hommes auront gagné autant d’argent sans prendre le moindre risque, le tout aux dépends du contribuable” écrira un rapporteur du Congrès en 1946, oubliant un peu vite le rôle de l’industriel dans la victoire finale et dans la modernisation des techniques de production. Dans les années 1950, devenu immensément riche, Henry Kaiser se tourne vers d’autres horizons, se lançant notamment dans l’acier et l’aluminium. Kaiser Aluminium restera longtemps le numéro deux du secteur derrière Alcoa. Mais c’est avec l’Henry-J (voyez le catalogue en 6 blocs ci-après), une voiture compacte, l’une des premières qui devait être produite dans les semaines suivant la fin de la seconde guerre mondiale (mais qui ne sera produite que 5 ans plus tard au terme d’une saga épique et rocambolesque), que Brooks Stevens va faire ses armes en métamorphosant cette voiture en une élégante et surprenante voiture de sport qui, de plus, s’avèrera rapidement être une excellente voiture de course seulement produite à 3 exemplaires !
Certain de son génie, d’ailleurs reconnu par tous, dans la dernière année du conflit mondial en 1945, Henry Kaiser était convaincu qu’à la fin de cette guerre, les gens n’auraient plus les moyens d’acquérir les voitures pachydermiques des années trente et seraient heureux de pouvoir obtenir, à meilleur compte, une voiture simple et d’un format “plus humain”, qui de plus, nécessiterait moins de tôleries et de pièces diverses, se contentant de surcroit d’un moteur 4 ou 6 cylindres moins énergivore, un retour aux solutions du début de siècle avec les Ford “T”, une sorte de Smart City 55 ans avant qu’elle soit commercialisée… Une idée géniale, sans aucun doute, mais ce ne sont pas toujours les idées géniales qui rapportent le plus et passent à la postérité ! Henry J. Kaiser était lui, par contre fasciné par la traction-avant Citroën, il avait ouvert un “laboratoire expérimental” automobile à Emeryville, Californie, ou il mettait au point les théories de l’ingénieur français Jean A.Grégoire : une voiture 4 places à 4 roues indépendantes, mue par un 2 cylindres Flat-Twin 600cc refroidit par air, une révolution ! Il restait toutefois trop classique dans son style (jugez par vous même en regardant attentivement les photos) et le jour de la présentation de la maquette en dimension réelle (1/1) de la Kaiser Henry-J au Waldorf-Astoria de New York en janvier 1946, le directeur des ventes de l’usine Kaiser, un certain. W.A. MacDonald, regarda la chose et frémit : “Comment vais-je faire pour que nos concessionnaires achètent cette chose horrible ? Je me demande si mon salaire en vaut la peine ? Je me demande si nos concessionnaires parviendront à vendre une telle horreur !”..
La carrosserie de son prototype était tellement hideuse que le regretté Tom McCahill, le rédacteur en chef de “Mechanix Illustrated”, (la plus importante publication automobile de cette époque), n’a pu s’empêcher d’écrire : “Elle ressemble à une mini Cadillac qui a commencé à fumer trop jeune. Vous aimeriez conduire une voiture qui ressemble à un éléphant miniature avec un coffre sur le dos ?”… Bien avant que la première Henry-J ait été construite, Ralph Isbrandt, ingénieur en chef de l’usine Kaiser et responsable des châssis avait choqué une salle bondée des pontes de la marque, en ce compris Henry J.Kaiser, oui, oui…, en votant ouvertement contre la mise en production : “Je sais que vous avez le droit de me chasser d’ici”, dit-il face à la bouche grande ouverte d’Henry J.Kaiser… “mais cette idée est tellement ridicule que je ne peux pas y joindre mon nom”… Ralph Isbrandt se retrouva bientôt à travailler pour Ford…, à demi salaire… Henry J.Kaiser s’est alors tourné vers E.H.Daniels inc., un bureau de design basé à Los Angeles ou œuvraient Robert Robillard et Richard A. Teague, ancien ingénieur en chef de la Lockheed Aircraft (qui finira vice-président de la section design d’American Motors), pour réaliser la carrosserie de sa “brillante voiture de rêve pour l’Amérique”…, parce qu’il avait besoin que l’usine qu’il possédait avec Mr Frazer, mette en production sans tarder cette voiture “révolutionnaire”, condition siné qua non pour l’obtention immédiate d’un prêt à taux zéro du gouvernement, très gras financièrement, pour revitaliser la Kaiser-Frazer Corporation, très malade financièrement…,
C’étaient les vases communiquant en quelque sorte ! Mais les fonds ainsi drainés pour lancer cette si laide petite chose ridicule qu’était la Henry-J, manquaient cruellement pour mettre au point un nouveau V8 performant et une voiture de grand format… Cette gaffe et d’autres… car il y en eut beaucoup, ont amené la Kaiser-Frazer Corporation dans des difficultés insurmontables…, la Henry-J a été un désastre… (les extraits des catalogues, vous aideront à comprendre). Après une poussée initiale relative en 1951 (nul n’est parfait), les ventes ont rapidement diminué (un sursaut humanitaire)…, dans sa dernière année : 1954, il n’y eut que 1.123 voitures vendues, le total de quelques années dépassant malgré-tout les 100.000 ventes…, mais une chose curieuse s’est produite sur le chemin du cimetière : les Hot-Rodders étaient enthousiastes de la mécanique de la Henry-J…, ils avaient découverts que le six cylindres de l’Henry-J était très rapide (aux normes standards, s’entend)…, n’oubliez pas qu’on est en Amérique, pays des basse-cours et cul-terreux habitués à rouler dans des voitures monstrueuses (pachydermiques) de 3 tonnes ou dans des Pick-up anémiques et agricoles…, ce qui signifie que les misérables 80 chevaux-vapeur obtenus comme par magie d’un bloc en fonte de 161ci à longue course (sic !), rendaient cette petite horreur, semblable à une torpille capable d’un zéro à 100 km/h en 13 secondes…, ce qui était époustouflant en 1951. Quelques Henry-J “de course” ont été dûment construites afin d’en faire connaître les performances au public médusé…, mais ces engins ainsi bricolés ne prouvaient rien du tout…
Leur carrosserie et châssis désuets annihilait les performances du moteur, démontrant que si peu de connaissances sur les voitures pouvait être dangereux. Tout semblait perdu, la fin était proche pour l’usine, qui plus est dans le déshonneur et les quolibets… Henry J.Kaiser se souvint d’un certain Brooks Stevens, l’un des premiers praticiens de l’art du design automobile, qui avait tellement d’idées révolutionnaires (il faut savoir raison garder), que le grand Harley Earl les réinventera vingt ans plus tard…. Brooks Stevens a proposé en vain un lifting recto-verso des barattes roulantes qu’Henry J.Kaiser avait imaginé et commencé à produire…, en vain…, parce que la direction (c’est à dire Henry J.Kaiser et son associé Mr Frazer), les aimaient dans la façon dont elles étaient. Mais, comme la petite horreur ne se vendait plus, entrainant la firme vers un désastre (c’est peu dire) et les ingénieurs sont venus secouer leur patron pour que l’usine modifie le design de l’Henry-J et débute la construction d’une Kaiser V8…,Brooks Stevens a finalement reçu un feu vert (pâle) pour construire une Henry-J “Sport”…, à condition de défendre ce projet devant le conseil d’administration de Kaiser-Frazer, au moyen d’un courrier percutant…
Brooks Stevens se mit à cette tâche dès le lendemain : “En tant que membre de la SCCA, J’ai toujours souhaité contribuer à la construction d’une voiture de sport à la portée d’un large public car se situant dans la moyenne des prix d’achat des véhicules semblables. En tant que concepteur industriel, il est intéressant de voir ce qui peut être fait avec certains composants 100% américains. Mon plan est de construire trois prototypes de véhicules utilisant le dernier moteur 6 cylindres 161ci des Henry-J, qui sera amélioré en s’inspirant des nouveaux moteurs Alfa-Romeo DACT. Le châssis sera repris mais modifié quant à l’empattement et aux fixations du moteur. Les suspensions seront caractéristiques pour ces roadsters, les moteurs seront améliorés. Les carrosseries devront être construites en aluminium avec une structure tubulaire légère”… Mais Henry J.Kaiser ne voulait pas que les noms de Kaiser et de Frazer soient apposés sur cette voiture. Brooks Stevens et son associé Charles Cowdin.Jr., ont conçu un élégant roadster deux places qui avait quelques ressemblances avec les Allard-J et Lotus Seven, utilisant un minimum de courbures afin de maintenir les coûts d’outillage les bas possible. Brooks Stevens l’a appelée “Excalibur-J” et a continué l’aventure en indépendant. L’Excalibur-J devait être une voiture de sport au sens classique, équipée de civilités telles que pare-chocs, phares et protections contre les intempéries, pouvant facilement être convertie en voiture de course pour les week-end. Son prix de vente au détail…, Stevens l’espérait (l’espoir fait vivre), devait être d’environ 2000-2500 $… et l’idée semblait très bonne.
Première sortie pour l’Excalibur N°1 à Elkhart Lake, Wisconsin, au début de 1953, où les associés de Brooks Stevens, Ralph Knudson, Bob Wilder, Bill Tilden et Dick l’irlandais ont pris la voiture pour les essais. Ce premier prototype, avec le moteur F-Willys, a été inscrit à Janesville, Wisconsin, pour une course sur route ouverte en juillet. L’Excalibur-J a fini deuxième dans la catégorie D avec Ralph Knudson à son volant…, puis, elle a remporté le Hillclimb de Janesville avec le meilleur temps de la classe D et le second rang global de la journée, juste après une Allard équipée d’un Cadillac V-8 de 331ci ! Ensuite, Brook Stevens a jeté son dévolu sur les Douze Heures de Sebring. Deux Excalibur, l’une équipée d’un moteur L, pilotée par Ralph Knudson et Jim Feld…, et l’autre équipée d’un moteur F, pilotée par Dick l’irlandais et Hal Ullrich, ont été inscrites. Dick l’irlandais, a terminé deuxième, derrière une Aston Martin dans la catégorie D ! Le reste de 1953, cependant, a été plus enrichissant. A Dubuque, Iowa, dans le Hillclimb de Mai, Ralph Knudson a terminé premier en classe D et troisième au classement général. Hal Ullrich et Ralph Knudson ont fini respectivement deuxième et troisième dans la même classe D à Champ Chanute, dans l’Illinois, lors des courses de juin…, tandis qu’une Excalibur-J a terminé deuxième en classe D à Offutt , sur l’Air Force Base du Nebraska.
Dans ces deux courses il a fallu un V12 2,7 litres Ferrari pour battre les Excalibur-J. De nombreux autres courses ont été remportées en 1953, contre les puissances Jaguar XK120S…, C-type… et V-8 Allard… ainsi que les V12 Ferrari ! Et, lorsque Ullrich a terminé premier de la classe D à Watkins Glen, ce fut la plus extraordinaire victoire de l’année ! Fin 1953, Brooks a reçu le prix de “l’International New York Motor Sports Show”, pour avoir créé un remarquable roadster américain de sport et de compétition dans la classe des voitures à bas prix, mais un obstacle est apparu sous la forme d’Henry J.Kaiser lui-même… qui n’aimait pas les voitures de ce type ! Alors que Brooks Stevens s’inquiétait que Kaiser-Frazer ne mettait pas en route une unité de production pour fabriquer l’Excalibur-J…, Henry J.Kaiser a pontifié : “Nous ne sommes pas une entreprise de construction de voitures de sport”.., ce qui a été rapidement repris par d’innombrables membres du conseil d’administration de la Kaiser-Frazer Corporation…, un couperet étant tombé identiquement de même pour la belle et spectaculaire Kaiser-Darrin, un roadster avant-gardiste à portes coulissantes (Ci-dessous)…
Brooks Stevens, cependant, était trop enthousiaste pour abandonner… et s’en alla de l’avant avec les trois voitures de course, décidé de continuer cette aventure en utilisant ses propres fonds, espérant que Henry J.Kaiser reviendrait finalement l’approuver. Quelques mois plus tard, en début 1954, la Kaiser-Fazer faisait faillite… Tout au long de 1954, l’Excalibur-J a continué d’impressionner les amateurs de courses automobiles, surtout qu’elles gagnaient haut la main contre des machines beaucoup plus puissantes comme les Ferrari…, Bob Gary a terminé quatrième au général (toutes catégories) en 1954 lors du Grand Prix du Wisconsin ! Ullrich aurait probablement terminé plus haut dans le classement, s’il n’avait pas été victime d’un accident durant le deuxième tour. Ensuite, jusqu’en 1958, les Excalibur-J ont généralement battu et défait à plate-couture, toutes les voitures en lice, sauf une paire de C-type Jaguar et une Frazer Nash…, mais les Excalibur-J ont vaincu toutes les Jaguar XK120s, les Amolt-Bristol… et les Ferrari…, excusez du peu… J’espère que les Ferraristes qui liront ceci, ou qui en seront informés (on peut toujours rêver, non ?), regarderont à l’avenir les Excalibur d’un autre œil… Les Excalibur-J ont continué de remporter des courses, impressionnant tout le monde et débutant ainsi la construction du mythe Excalibur…, Al Ullrich et Carl Haas ont même remporté la classe B de la “Road America 500” en 1958. À ce stade de succès, Brooks Stevens, comblé, couronné de lauriers, s’est retiré des courses (tout comme d’autres se rangent des voitures)…, notez qu’il était bien obligé de se retirer…, puisque l’usine Kaiser-Frazer avait fermé ses portes en 1954, tout en réalisant un geste ultime : lui offrir une quantité impressionnante de pièces d’Henry-J, des boîtes de vitesses surmultipliées, des moteurs complets et divers équipements.
Les trois Excalibur-J de course ont finalement été placées au Musée que Brooks Stevens avait ouvert à Mequon, dans le Wisconsin. A Mequon, Wisconsin, le second fils William-Steve Stevens, était expert à l’administration quotidienne, tandis que l’aîné, David, était axé sur la conception et l’ingénierie (le plus jeune fils, Keith, était encore à l’école à cette époque). Brooks Stevens a continué en 1959 de concevoir des voitures extraordinaires, telle la fameuse Excalibur Hawk, un coupé très en avance sur son époque… et cela avec l’appoint de ses deux fils, David et William-Steve. Conçu pour être une machine de course exclusivement, le coupé Excalibur Hawk a été construit selon les idées de David Stevens…, la voiture, basée sur des composants de la Studebaker Hawk, utilisait son V8 289 ci suralimenté par un compresseur Paxton…, ainsi que sur la Shelby Cobra Daytona Coupé… Le style de la carrosserie a été voulu, volontairement, très agressif, affichant même des traits de conception très marquants.., qui seront copiés par Harley Earl sur la Corvette Sting Ray 1963 !!! L’Excalibur Hawk Coupé a été engagée en course, mais n’a jamais atteint le succès de sa devancière, l’Excalibur-J. Mais comme Kaiser-Frazer n’existait plus… et que Brooks Stevens était confronté chez Studebaker à des défis commerciaux importants, il a ainsi décidé d’utiliser toute la mécanique des Studebaker, ainsi que leur châssis… Une Excalibur Hawk Roadster a été conçue, mais jamais construite. Ce sont des modèles réduits des deux styles de carrosserie et surtout l’illustration d’une Excalibur Hawk Roadster montrée en dessin sur la couverture de février 1961 du magazine Motor Sports, qui a semé durablement la confusion dans les esprits…, car jusqu’au début des années 1990, l’Excalibur Hawk Roadster restait dans les mémoires.
En 1961, Egbert McCulloch, nommé président de Studebaker, téléphone à Brooks Stevens pour que 1° il redessine la Studebaker GT Hawk, 2° fasse un “facelift” de la Studebaker Lark… et 3° pense à créer une nouvelle Studebaker sportive, un projet nommé “Avanti” sur lequel travaille déjà Raymond Loewy. Brook se contentera quelques temps plus tard de proposer une décoration plus “Hard” de l’Avanti surnommée “LT1″… Mais c’est là une autre histoire, curieusement très semblable à l’affaire Henry-J, de laquelle naitront les Excalibur séries 1 à 5, telles que vous les connaissez comme inspirées des Mercedes d’avant guerre… Pour vous aider à mieux comprendre l’aspect mythique des Excalibur, il faut vous rendre compte que toutes les victoires engrangées par les Excalibur-J, l’ont été presque 10 ans AVANT l’arrivée des AC-Shelby Cobra Roadster (1964)…, le coupé Excalibur Hawk étant lui en avance de 6 ans sur la Cobra Daytona Coupé… et battre les mêmes Ferrari V12 dans les années cinquante, ces mêmes Ferrari qui sont acquises par des vauriens bornés pour des millions d’euros…, c’est un sacré pied de nez envers certains maîtres-à-penser qui refusent une Excalibur à compresseur Paxton avec peedigree d’époque et acceptent (la honte) une Auburn réplica en plastique, louée comme une des merveilles du monde ! Ce que les Excalibur-J ont principalement mis en évidence, c’est la force innée et la durabilité de ce que beaucoup ont tourné en dérision comme étant un fer édenté…, battre une multitude de concurrents européens aux noms prestigieux, qui ne sont pas seulement plus exotiques, mais beaucoup plus cher, c’est un piedestal pour le moteur 6 cylindres !
Brook Stevens a ainsi été prouvé qu’il était aussi compétent que les Européens dans la création de véritables voitures de sport, capables de concourir le week-end et d’être conduites relax, en ville, la semaine… et cela à partir de composants de masse de tous les jours de production… Il a été propriétaire de quelques voitures extraordinaires, y compris des Bugatti, une Type 38 et une 51 Grand Prix, ainsi que d’une authentique Ford GT40 qui a été utilisée en course. Bob Shaw, 75 ans, est resté un grand passionné de l’automobile…, en 1963, il avait négocié, au nom des frères Schlumpf, l’achat de plusieurs Bugatti auprès de John Shakespeare, propriétaire à cette époque d’une des plus grandes collections d’automobiles (Aujourd’hui, la collection fait partie du Musée National de l’Automobile à Mulhouse, France). Bob Shaw a également été propriétaire de diverses marques anglaises comme Morgan, MG, Jaguar, Rolls Royce et Bentley…, ajoutez à cela des Ferrari et quelques Françaises comme des Renault Alpine… et vous cernerez ce que cet homme sait sur les voitures. Jusqu’à ce que, dans les années 1980, Bob Shaw réussit à convaincre Brooks Stevens de lui permettre de rouler dans une des trois Excalibur-J dans une course vintage. Comme vous venez de le lire ci-avant, les Excalibur-J ont donc couru jusqu’en 1958…, puis ont disparu de la vue du public… et cela a engendré plus que de l’intérêt… : l’envie d’en posséder une, en conséquence directe de son temps passé dans le siège de l’Excalibur-J ! Bob Shaw, complètement accroc du sport automobile vintage, a décidé que l’ultime hommage à son ami Brooks Stevens serait de construire le Roadster Excalibur Hawk qui n’avait jamais existé… et d’être en mesure de courir avec cet engin mythique dans divers évènements historiques automobiles (comme on le dit vulgairement : c’était du flan caramel)…
Donc, après 5 ans dont on ne sait strictement rien…, en 1985, il a contacté son ami et manufacturier expert : Chuck Rahn, à Scottsdale, en Arizona, ancien pilote sur l’Excalibur-J (belle brochette de spécialistes), pour construire le châssis et la voiture à l’aide des plans originaux de Brooks Stevens et de ses dessins…, mais aussi avec le prêt de l’Excalibur Hawk Coupé afin d’en réaliser des moulages… Comme le projet avançait vite (je suspecte que sous tout le charabia qui m’a été débité en tranches épaisses… et dont je me fais un plaisir de retranscrire ci-après à votre spéciale attention…, que la base de cet engin est une Dodge Viper accidentée, donneuse de ses éléments vitaux… et que la carrosserie est celle d’une Barrister égarée, construite par Georges Barris, amplement modifiée pour donner l’apparence d’un vague look de l’Excalibur Hawk Coupé)…, Brook Stevens qui en était aux dernières années de sa vie (tout le monde est mortel, ne vous en faites pas, votre tour viendra aussi), a toutefois demandé à Bob Shaw d’inclure quelques nouveaux traits de sa conception en fonction de ses années d’expérience (d’où mes suspicions d’un bidouillage intégral)…. Herb Grasse, designer pour Ford, Chrysler, Nissan, et autres, qui habite non loin de Chuck Rahn a été consulté pour la conception d’une expression “design” plus contemporaine pour le Roadster Excalibur Hawk (ce qui ne veut rien dire de concret) :
“Bob m’a contacté pour construire la carrosserie, j’ai ensuite visité Chuck Rahn à Scottsdale pour visualiser le châssis que Chuck avait construit. Par la suite, j’ai invité Mike Kleeves de l’AMS à Kimball, Michigan, pour me donner son apport en ce qui concerne l’utilisation d’aluminium pour construire la carrosserie. Il n’a pas fallu longtemps avant que le projet s’installe dans ma boutique : Time Machines Unlimited àCharlevoix, dans le Michigan, afin d’exécuter une carrosserie qui s’adapte au châssis. Mike formant les panneaux de carrosserie en aluminium. Après quoi nous avons tout assemblé, testé la voiture, et réalisé la peinture. Si la voiture devait reproduire l’originale, qui n’a jamais existé…, le résultat n’est pas la finalité…, car on a évolué vers une conception nouvelle…, ce qui a généré des problèmes, tous résolus avec un consensus général, stipulant que Time Machines créerait la voiture comme si Brooks Stevens était ici aujourd’hui et disait : “Let’s go !”… Ma formation dans la conception automobile a guidé les modifications de conception, afin qu’ils répondent aux exigences du tramway basé sur un châssis de voiture de course, tout en élaborant un modèle qui reste fidèle aux dessins de Brook Stevens… Et avec Bob Shaw cela a été trop critique. Ce n’était pas une mince tâche”… (vous ne me croirez pas, mais j’ai pleuré en retranscrivant cela) ! Cette Excalibur Hawk Roadster RS se veut donc être l’expression personnelle d’un homme qui connaît et aime les voitures (rechute.., j’ouvre ici une petite pause pour sécher mes larmes…, puis je reviens)…. Bob Shaw a mesuré sa vie, non seulement par les amis qu’il a rencontrés dans le hobby des collectionneurs d’automobiles, mais aussi par les gens qu’il a connu dans le secteur automobile. Brooks Stevens a été une source d’inspiration pour Bob Shaw qui aurait aimé vivre sa vie avec style…, Bob Shaw ne cesse de dire que c’est la dernière re-création, parce qu’il a maintenant 75 ans…, pourtant, ne soyez pas surpris si dans les jours à venir il dit : “Que pensez-vous de reconstruire une Gaylord…?” Pour ma part, je m’en tape les cuisses…, étant particulièrement fatigué de retranscrire tout ce toutim, je me simplifie la vie en publiant ci-après, les 4 pages de présentation (en anglais) de l’Excalibur RS, qui je vous le souligne…, non seulement n’a jamais existé…, mais n’est nullement une copie de cette voiture…, qui plus est, elle a été affublée d’une “certaine” quantité de pièces dénaturant l’œuvre de Brooks Stevens… qui ne dira strictement plus rien, étant décédé…
“The Milestone Car Société Grand National” à l’Indianapolis Speedway, a reconnu l’Excalibur-J, de même que les premiers modèles des Excalibur SS Roadster 65 à 69, comme ayant été des “Milestone” (des voitures les plus marquantes de toute l’histoire de l’automobile). Une Excalibur-J, une Excalibur Hawk et une Excalibur SS Roadster paxton ont dès-lors été invitée à l’Indianapolis Speedway, depuis le musée Brook Stevens du Wisconsin jusqu’au circuit d’Indy, pour effectuer quelques tours de démonstration sur l’historique “brick-cour”, tandis que les membres de la prestigieuse société et un parterre de personnalités politiques, cinématographiques et des affaires, sirotant des cocktails observaient le comportement des 3 Excalibur depuis leurs salons VIP sur la tour sud. Le conducteur de la plus fameuse des Excalibur-J, également un important collectionneur de voitures rares, était Bill Tilden d’Atlanta, Géorgie…, son expérience remonte, hors de la piste, à Vineland, New Jersey, avec le légendaire Donna Mae Mimms et son “think pink” Bugeye Sprite. Bill Tilden, après ses tours de piste, devant le parterre de personnalités et de journalistes, se souvenant des années ’54 au volant de cette même voiture, a dit : “Tout est resté très solide et très performant, en dépit de l’âge de la voiture, et du mien…, il est difficile de croire que c’est un quart de siècle… Indianapolis est très différent de beaucoup de circuits ovales, en ce sens qu’il est régulier dans les virages sur l’ensemble des quatre tours. Le secteur bancaire est loin d’être aussi élevé que l’ovale typique d’indianapolis, vous y avez donc besoin d’une bonne voiture. L’Excalibur-J était facile à piloter, très stable et puissante, c’était un régal de la jeter dans les virages sans ralentir, il n’y avait aucune limite. La seconde chose importante était sa capacité de résistance en course, le moteur ne chauffait jamais, il était indestructible… il était donné pour 5500 tours, je le poussais à 6500 et il en demandait encore, l’Excalibur-J pouvait battre beaucoup de voitures plus rapides, je n’ai plus jamais ressenti cela tout au cours de ma carrière de pilote”…