STUTZ, l’icône super-classieuse des néo-classiques (Excalibur, Zimmer, Clénet, Panther, etc.etc.etc.)…
Le nom Stutz, aujourd’hui ne génère que vagues souvenirs d’une marque américaine super-classieuse s’étant auto-positionnée en tête des automobiles néo-classiques telles Excalibur, Zimmer, Clénet, Panther etc.etc.etc… Toutes sont finalement parties en procession au cimetière des rêves-cauchemardés d’automobiles-fantasmes, dans le néant des illusions perdues !
Mise à mal par des problèmes techniques, par la Grande crise (la grande dépression) d’entre les deux guerres mondiales et par une direction soucieuse d’ignorer l’héritage de course de la marque, Stutz, avant la seconde guerre mondiale, s’est lancé parallèlement à ses voitures de luxe, dans la construction de camionnettes de livraison équipées d’un moteur huit cylindres en ligne à double arbre à cames en tête plutôt sophistiqué.
Malheureusement pour Stutz, dans les années’30, c’était la Grande-dépression, la grande crise économique surgie en 1927 était la cause du ravage de l’économie, il y avait donc très peu de demandes pour un nouveau type de camionnettes de livraison disposant d’un 8 cylindres en ligne sophistiqué et vraiment pas de demande du tout pour des voitures de luxe à six chiffres ! La société a fait faillite en 1937 et a été entièrement liquidée en 1939.
Moins de 10 ans après la seconde guerre mondiale, le nom légendaire Stutz n’a pas été oublié par certaines personnes à Indianapolis qui portaient (encore) des costumes à revers larges, des chapeaux Borsalino et des étuis pour violoncelles… Au tiers-début des années cinquante, suivant le renouveau apporté en carrosserie par la Corvette’53, diverses petites entreprises aux mains de bricoleurs inventifs ont récupéré l’usage du polyester en carrosserie et commencé à produire des kit-Cars, soit d’avant-garde, soit copiant bizarrement un mix de différentes lignes de carrosseries hétéroclites, certaines hideuses, d’autres très belles, voire parfois inventives, mais toutes basées sur des châssis existant et récupérés en casses-auto avec leurs trains roulants, moteurs et boîtes. Beaucoup (trop) avaient des conceptions naïves amateuristes et des carrosseries rétro-exagérées. Appelées “Néo-Classiques” pour celles proposées “finies” et banalement “Kit-Cars” pour celles proposées “à construire individuellement dans un box-garage”, certaines reprenaient les éléments de style des années vingt et trente, alors que d’autres voguaient vent-debout dan le futurisme spatial !
Les gens de 15/20 ans qui avaient vécu les années ’20 et ’30 en ne pouvant que rêver des magnifiques automobiles d’alors et qui dès mi des années’50, étaient confrontés à la résurrection de ces voitures vendues “comme neuves” soit “Usine” soit “en-Kit” étaient en âge et en moyens (financiers) d’acheter et de conduire une voiture du style de leur jeunesse. Beaucoup aspiraient au style du passé qui relevait du domaine du Néo-Classique, alors que d’autres voulaient des alternatives futuristes (ou en total rétro-pédalage) aux Chevy’s Corvette. Simultanément les “Bad-Boys” issus des courses de rue et sur lacs asséchés avaient inventés les Hot-Rods, qui avec l’arrivée des clones de carrosseries en polyester pouvaient construire leur Hot-Rod-Kit-Car… Dans l’euphorie générale, des carrossiers inventifs, tels les frères Barris, ont proposé aux déjantés mais fortunés Hollywoodiens, de personnaliser leurs nouvelles voitures… C’était un tournant historique de l’histoire automobile américaine !
Mais c’est l’Italie qui a réellement créé la première automobile néo-classique ! A l’initiative du magazine italien Quattroruote qui avait la prémonition que “Le style Vintage avait de l’avenir” (sic !), Alfa Romeo a accepté au début des années 1960 l’idée de Zagato de produire une évocation de la fameuse 6C-1750 “Gran Sport” sur base de la Giulia. Il suffisait d’utiliser les trains roulants et le moteur 1600 double arbre habillés d’une carrosserie Vintage. Cette voiture néo-classique originale sera produite à 92 exemplaires assemblés “à la main” chez Zagato dès 1963. La carrosserie était en aluminium sur une structure tubulaire et favorisait une vivacité étonnante.
Le prototype ayant été présentée au Salon automobile de Turin’62, un visiteur illustre (le designer de Studebaker Brooks Stevens tombe en arrêt sur la voiture et a une illumination. A cette époque, Brook Stevens œuvrait en tant que designer pour le légendaire constructeur automobile Studebaker qui était pourtant au bord de la faillite. Pour tenter de redresser les ventes et l’image de la marque, Sherwood Egbert, le patron de Studebaker, avait demandé à Brook Stevens et à Raymond Loewy (tous deux designers) de créer une voiture extraordinaire qui serait exposées dans divers shows automobiles et deviendrait la voiture “phare” de Studebaker.
Un an plus tard, avec l’Alfa-Roméo 6C-1750 “Gran Sport” réplique de Zagato en tête, en 1964, Books Stevens propose à Studebaker de réaliser une Mercebaker reprenant le look de la légendaire Mercedes SSK des années”20 plutôt que l’Avanti proposée par Raymond Loewy. Brook Stevens n’a pas attendu de feu-vert et a construit un prototype roulant… Mercedes râle de cette copie “infamante”, et Studebaker refuse ce projet préférant l’Avanti… Brooks Stevens remet en fonction sa marque d’automobiles de courses Excalibur et rebadge sa Mercebaker du nom Excalibur et l’expose au salon automobile de Détroit en tant qu’Excalibur S1, réplique moderne néo-classique de la Mercedes SSK !
Ce modèle a été construit au départ du châssis modifié (raccourci) d’une Studebaker Lark Daytona convertible et motorisée par son V-8. La direction du show le relègue juste à coté des toilettes… Malgré cela, deux des personnalités “Hollywoodiennes” de l’époque : Steve Mc Queen et John Wayne commandent ca$h chacun une “Mercebaker-Excalibur“… tandis que la presse automobile présente cette voiture comme “La voiture phare de l’année du salon automobile” !!!
Cette incroyable automobile était pourtant un pur “Bitza“, construit de bric et de broc, s’inspirant d’un modèle d’avant guerre, en plein milieu des années soixante, années tournées vers l’avenir et non vers la modernisation du passé… Brook Stevens va alors créer une usine nommée Excalibur Motor et va y place ses deux fils pour qu’ils lancent une commercialisation semi artisanale… La faillite de Studebaker permet à la famille Stevens d’acquérir à vil prix des centaines de châssis Studebaker Lark. C’est alors que le concessionnaire Chevrolet de New-York, Jerry Allen propose un contrat d’achat ferme de plusieurs dizaines d’Excalibur pour autant qu’elles soient propulsées par des moteurs V-8 Chevrolet 327ci provenant des Corvette Sting Ray… Les frères Stevens modifient les châssis et lancent la production à Mequon, Wisconsin, près de Chicago…
Le résultat est un typique roadster d’inspiration Mercedes SSK 1928, propulsé par le small block Chevy-Corvette C-2 V-8 327ci (5L3) annoncé à 290 chevaux. Le moteur est reculé de 70 cm et monté directement sans silent-bloc sur le châssis pour éviter que les échappements latéraux (deux fois 3 en 4) n’abiment les capots en cause des vibrations ! Quelques rarissimes Excalibur de cette époque recevront un compresseur Paxton faisant délivrer à cet attelage d’environ 500 chevaux… Mais compte-tenu de l’ingénierie aléatoire des frères Stevens, de leurs moyens financiers (limités) et des composants de l’époque, l’engin est comme une chose sortie de l’enfer… Seulement 3.000 Excalibur’s vont être réalisées entre 1964 et 1985 toutes séries (1 à 5) et modèles confondus..
En 1980, les “Pirates” tels que Clénet, Sceptre-Griffin, Gatsby, Zimmer qui proposent des “Néo-classiques” avec vitres électriques, sièges électriques, capotage simple, fabrication en polyester, récoltent de plus en plus de succès. Les Frères Stevens doivent changer de cap. La nouvelle génération d’Excalibur, la Séries IV, est dotée de vitres électriques, d’un soft-top semi-automatique. Le style “fin des années ’20” est abandonné pour faire place au style “années ’30” des fantastiques et mythiques Mercedes 540K. Le châssis est allongé de 30 cm. Malgré une production quotidienne de 7 voitures, les affaires se portent mal.
Pour malgré-tout fêter les 20 ans d’Excalibur tout en écoulant les anciennes Séries IV invendues, la société crée 50 Limited Editions Séries IV, deux couleurs de peinture, gris et blanc, séparées par une barrette chromée. La société fait malgré-tout faillite et est reprise par un certain Werner qui investit plusieurs millions de dollars pour réaliser une Séries IV mieux finie et plus rentable qui va se nommer Séries V… La nouvelle firme qui n’est plus dirigée par les Frères Stevens se retrouve face à un dilemme : soit produire plus, soit augmenter le prix et la qualité. C’est la voie choisie. Les prix dépassent de loin ceux des Rolls-Royce et Bentley, ce qui ravit Stutz, Clénet, Zimmer et autres qui croient que la Paradis est sur terre !
En contrepartie, les véhicules sont encore mieux équipés : vitres électriques, auto-radio stéréo, cruise-control, verrouillage central, sièges électriques, air conditionné, capote semi-électrique et un hard-top amovible. Werner, voulant positionner la Séries V à un niveau plus haut encore, provoque un effondrement des ventes, le nombre de voitures vendues est en chute libre. L’effort de vente se porte sur la Séries V annoncée à plus de 100.000 US$ La reine des Néo-Classiques-Répliques devenue la plus chère du monde, n’est plus que figurative! En 1985, seulement 78 voitures quittent les ateliers de Milwaukee et en 1986, ce chiffre diminue encore de moitié. Werner lance alors la Séries V “Sedan 4 portes” et la Séries V “Limo 6 portes” toutes deux basées sur le châssis des Dodge Dakota (pont arrière rigide) et équipées du moteur 5L7 GM Marine avec boite automatique. Le succès espéré ne vient pas, les voitures sont proposées à plus de 125.000 US$ C’est la voiture neuve la plus chère du monde !!!
Malgré qu’un voisin, marchand de voitures spéciales, Harry Kauffman, s’évertue (en contrepartie de commissions importantes) d’assurer les ventes en proposant les Excalibur’s neuves en dessous du seuil psychologique des 100.000 US$, la firme Excalibur fait faillite pour la seconde fois et est reprise par un milliardaire allemand. Celui-ci met en chantier une nouvelle version de l’ancienne Séries III dénommée “Séries 100 Limited“, équipée du moteur V-8 Corvette C-4 injection, moteur qui équipe également les toutes dernières Séries V, toutes versions confondues. La firme se lance simultanément dans la fabrication d’une réplique de Cobra 427. Le succès ne viendra pas, la Cobra est disgracieuse, ses pare-chocs détruisent la ligne, les Series V quant-à-elles ne sont plus en phase avec le renouveau automobile. La firme Excalibur fait faillite pour la troisième et dernière fois… Les Clénet, Sceptre-Griffin, Gatsby, Zimmer, Panther vont suivre le même chemin. L’époque des Néo-Classiques se termine !
Les éléments clés d’une voiture néoclassique étaient la grande calandre verticale, les phares de chaque coté et les ailes non-intégrées dans le corps de carrosserie. Le plus souvent, ces caractéristiques de style ont été appliquées à des choses à deux portes et ont créé un coupé ou un cabriolet d’aspect classique avec des touches de luxe personnelles des années soixante/soixante-dix à l’intérieur. Zagato/AlfaRoméo, suivi d’Excalibur ont été été les premières entreprises à proposer des Néo-Classiques neuves dans les années soixante, et d’autres comme Panther, Zimmer et Stutz n’étaient pas trop loin derrière.
L’un des derniers exemples était la Zimmer Quicksilver basée sur la Pontiac Fiero. Les néoclassiques sont mortes au cours des années quatre-vingt et enterrées début des années ’90, lorsque ceux (et celles) qui pouvaient encore se souvenir des années vingt et trente sont morts et que l’ère des Néo-Classiques de luxe a commencé son déclin.
Stutz nage dans la même catégorie mais avec une carrosserie “autre”. La marque est restée en sommeil jusqu’au milieu des années soixante, date à laquelle elle a été acquise et revigorée par le riche et passionné banquier James O’Donnell qui, en 1968, suite à la sorie des Excalibur’s a réincorporé l’ancienne “Stutz Motor Car Company of America” dans une nouvelle entité nommée “Stutz Motor Car of America, Inc”. James O’Donnell voulait aller plus dans le “Luxe classique New-Âge” que dans le “Néo-Classique” Old-Fashion”, conforté par les travaux de l’ancien associé de Chrysler ; Virgil Exner, réalisés en 1963.
À cette époque, Exner était fraîchement disponible pour concevoir comme il le voulait. Il avait été licencié de Chrysler après des désaccords avec la direction sur l’abandon de ses thèmes de style toujours plus farfelus, en particulier en ce qui concerne la Chrysler Imperial ! Exner a incorporé une société de design en son propre nom en 1963 et, à la fin de cette année, a présenté une série de ce qu’il a appelé des “voitures de réveil” pour faire revivre les marques mortes. Les croquis de ces voitures ont été présentées dans le magazine Esquire et étaient en quelque sorte des versions Néo-Classiques des looks de Duesenberg, Packard, Mercer et Stutz.
Parmi celles-ci, seule la Duesenberg est allée quelque part vers n’importe où : dans un effort pour faire renaître la marque vers 1965. Un prototype réel a été construit par Ghia en Italie en 1966, mais n’a jamais été mis en production. Cette grande berline avait été construite sur un châssis Chrysler Imperial, probablement parce qu’elle était la voiture de production la plus lourde disponible comme base.
C’était jusqu’à ce que O’Donnell démarre sa nouvelle entreprise automobile… Ghia a été engagé pour construire un prototype nommé Stutz Blackhawk, qui en théorie était similaire à celui conçu par Exner en 1963. Cependant, cette Stutz Blackhawk’63 n’a pas été adaptée à la refonte de 1968 à la demande d’O’Donnell. La conception de 1963 reflétait un pare-chocs qui s’avançait loin du capot, de minces montants A et un pneu de secours présenté sur le coffre arrière.
Ce qu’Exner a retravaillé pour le prototype de 1968 et les débuts ultérieurs de la Blackhawk en 1970 s’apparentait davantage à la version d’une Pontiac Grand Prix trop stylée. Un grand nez de cercueil chromé ouvrait la voie, fendu au milieu et soutenu en maille. Un logo Stutz rouge prenait la place de tout autre ornement de capot. Clé de l’aspect frontal d’une Néo-Classique, de grands phares circulaires se détachaient de manière indépendante, entourés de boîtiers chromés. Des feux plus petits flanquaient les phares de chaque coté. Tout l’éclairage avant était monté sur une extension du pare-chocs qui avait sa propre lèvre chromée qui rencontrait l’entourage de la calandre au milieu. L’aspect général de l’avant en ce qui concerne l’éclairage n’était pas si différent de la configuration de l’Imperial de 1961. Exner était assez coincé sur cette idée. L’Exner-Stutz a fait ses débuts en janvier 1970 à l’hôtel Waldorf Astoria à New York. Contrairement au concept qui avait été construit par Ghia, la production Blackhawk a été construite par la Carrozzeria Padane. Les panneaux étaient fabriqués “à la main” et toute la carrosserie était construite en acier épais et lourd… Les artisans de Padane ont appliqué entre 18 et 22 couches de peinture sur la Blackhawk pour obtenir une finition supérieure. Peindre chaque Blackhawk prenait environ six semaines !
Même si la Stutz avait une carrosserie personnalisée, la ressemblance avec une Pontiac Grand Prix n’était pas une coïncidence elle était basée sur la plate-forme de la carrosserie G Pontiac Grand Prix de 1969 à 1972. L’apparence de la Blackhawk était un peu extrême, mais s’inscrivait parfaitement dans la tendance du design Néo-Classique. La Blackhawk a heureusement abandonné la majeure partie du design intérieur de la Pontiac Grand Prix. La Stutz Blackhawk était différente de presque toutes les façons possibles, en particulier dans la première année avec son pare-brise en 2 parties. Le tableau de bord a opté pour un design horizontal plat. La construction du tableau de bord était toutefois compliquée du fait du pare-brise en 2 parties, ce qui signifiait que les évents de dégivrage et le dessus de tableau de bord étaient inclinés.
Contrairement au plastique dur du Grand Prix, le tableau de bord de la Blackhawk était rembourré et recouvert de cuir cousu. Les jauges étaient spécifiques à Blackhawk, car les artisans de Padane abandonnaient le tarif standard de GM. Des informations supplémentaires ont été fournies au conducteur via un ensemble complet de jauges, avec cinq cadrans supplémentaires qui complétaient l’indicateur de vitesse et le tach. Le texte sur les jauges a été présenté en anglais et en italien, pour ceux qui aiment la benzina.
Il y avait une petite armoire à alcool à l’arrière de la Blackhawk 4 portes, mais la garniture arrière variait selon les préférences du client. De grandes valises de taille “bagage enregistré” étaient disponibles, également recouvertes de cuir et finies dans la même couleur que l’intérieur de la Blackhawk. Ces bagages pouvaient également être dupliqués pour la zone du coffre, ce qui signifiait un ensemble complet de quatre grandes valises. Les bagages du coffre étaient spécialement fabriqués et avaient une forme à cinq côtés très gênante : ils devaient s’adapter à la forme de la roue de secours, qui s’immisçait dans le coffre et était fixée dans sa position. Un propriétaire de Blackhawk était la seule personne à l’aéroport avec des bagages en forme de pentagone ! Le reste du coffre était rembourré et fini dans le même cuir fin (ou fourrure) que l’intérieur.
Le couvercle du coffre se soulevait sur des jambes de force à gaz pour éviter l’aspect horrible des charnières “dogleg”. Parmi les autres caractéristiques intéressantes de la Blackhawk, citons les commandes d’éclairage automatiques via Twilight Sentinel de Cadillac, la climatisation automatique de Cadillac et le régulateur de vitesse Cadillac. La chaîne stéréo était de Lear Jet et comprenait un lecteur de huit pistes pour écouter les succès des Bee Gees. La sécurité était assurée par un verrouillage central en conjonction avec une alarme de voiture Cadillac. La suspension Cadillac était pneumatique et réglable selon les préférences du conducteur. En plus de tout le bois décoratif, les cuirs, le bar à alcool et plus de luxe que nécessaire, la Blackhawk avait besoin d’une grande centrale thermique et il y en avait une ! Venant de la Pontiac Grand Prix son grand V8 de 7,5 litres (455ci) délivrant 425cv avait été conçu par Pontiac à l’époque où GM faisait encore ce genre de chose !
Entre le travail de peinture de six semaines, les panneaux de carrosserie sur mesure et l’intérieur minutieusement fini à la main, chaque Blackhawk demandait plus de 1.500 heures de soins de fabrication. Comme les voitures Stutz d’autrefois, la nouvelle Blackhawk était destinée à pomper l’argent de la société du Big-Boss qui voulait une Stutz Blackhawk pour frimer et aux finances qui l’accompagnaient. En 1971, la Stutz Blackhawk était commercialisée au prix de 22.500 $ (165.000 US $ actuels hors taxes et frais). Le personnage qui l’achetait devait être choquant car tournant/planant sur une orbite différente de celle des autres véhicules de luxe. Par exemple, une Mercedes-Benz 280SL coûtait 7.469 US$ en 1971, tandis qu’une modeste Jaguar XKE n’était vendue que 5.734 US$. La Blackhawk était plus dans la ligne d’une Rolls-Royce, mais était plus chère qu’elle aussi. La Rolls-Royce Silver Shadow de 1971 ne demandait que 20.200 $ et représentait une bonne valeur à ette époque par rapport à la Stutz Blackhawk. Il convient de noter qu’en 1971, une maison américaine moyenne (un tri-niveau) coûtait 25.200 $ (185.000 US$ actuels). Étant donné qu’il s’agissait du premier modèle ressuscité d’une marque de luxe morte depuis longtemps, la clientèle était un peu différente de ce qu’elle était dans les années vingt. En dollars de 1971, il y avait peu de voitures qui rivalisaient réellement avec l’exclusivité “achetable” d’une Stutz Blackhawk. Et cette exclusivité a attiré des gens très riches…
Les salles d’exposition Stutz d’autrefois (années’20 et’30) attiraient aussi les riches. Les supports marketing Art déco d’alors montraient des scènes luxueuses et faisaient des promesses de sécurité, utilisant des souvenirs du pedigree des Stutz de course. Les Stutz des années vingt attiraient la richesse générationnelle des Américains qui dépensaient six chiffres (ajustés) pour une voiture de luxe avant la Grande Dépression. Mais dans les années soixante-dix, la clientèle relancée de Stutz était un peu différente. La marque a immédiatement trouvé une base parmi les riches et les célèbres, principalement la variété d’artistes les plus dingues de l’univers. La toute première Stutz Blackhawk a été vendue à nul autre d’autre qu’Elvis Presley qui a déboursé 26.500 $ (195.000 US $ actuellement) pour avoir sa Stutz Blackhawk qui n’était qu’une Pontiac Grand Prix fortement modifiée (Kustomizée).
Elvis n’était pas le seul artiste musical au-delà de la fleur de l’âge de sa carrière, intéressé par la Stutz Blackhawk, car Frank Sinatra a également levé la main pour la posséder ! Elvis a fini par l’emporter d’être le premier client parce qu’il était un peu moins pointilleux que Sinatra. L’accord d’achat du prototype avait une condition attachée : le distributeur Stutz Jules Meyers était autorisé à exposer la Stutz Blackhawk au Salon de l’auto de Los Angeles en 1970, et l’acheteur (Elvis) devait poser pour des photos de relations publiques devant et dedans la Stutz Blackhawk lorsqu’il en prendrait livraison. Sinatra a dit : “Je ne suis pas un singe, je ne peux pas accepter ça”. En gros il a refusé ! Peu de temps après la livraison, Elvis a envoyé sa Stutz Blackhawk au modificateur de bon goût : George Barris pour quelques modifications et enlaidissements complémentaires (sic !). Il a également dépensé un paquet de dollars en janvier 1971 alors qu’il n’avait presque jamais entendu causer de technologie, pour un téléphone de voiture qu’il a fait installer dans la Stutz Blackhawk. L’énorme appareil lui a couté 1.467 US$ soit 11.000 US$ actuels).
Après toutes ses dépenses, les publicités d’entreprises et les modifications impressionnantes, Elvis a pu apprécié sa Stutz Blackhawk pendant environ six mois au total. En juillet 1971, un employé d’Elvis a écrasé la Blackhawk contre un arbre. L’assurance devant indemniser, le distributeur a offert à “The King” la somme de 1.000 US$ (de l’époque) pour le coupé accidenté, se justifiant que le téléphone dans la console centrale valait plus que cette offre ! C’était gonflé mais 100% dans la mentalité américaine ! Elvis a décidé de garder l’épave et de la ranger en attente de la restaurer quelques années plus tard avec un assemblage de pièces provenant de diverses sources. Ce bricolage est exposé à Graceland. La Stutz Blackhawk personnalisée y est toujours exposée aujourd’hui. Elvis a malgré-tout acheté trois autres Stutz Blackhawk pour lui plus une quatrième en cadeau cadeau pour son médecin personnel : Elias Ganhem !
Super fan’Stutz, Elvis a apparemment dépensé plus pour les Blackhawk’s que (presque) n’importe qui d’autre ! Le traitement initial avec Stutz a dû laisser Sinatra froid, car il est resté à l’écart de la marque ! Au moins, il a reçu une édition spéciale complète de l’Impérial portant son nom une décennie plus tard, bien que cela ne se soit pas bien terminé non plus… Mais d’autres célébrités ont acheté des Stutz Blackhawk. Les premiers adoptants furent Lucille Ball et Dick Martin en 1971, rejoints par Sammy Davis Jr. (qui en acheté deux en 1972). Dean Martin en a acheté trois il en a écrasé une, elle était immatriculée “DRUNKY”… Parmi les autres acheteurs du début des années soixante-dix, citons Evel Knievel, Wilson Pickett, Luigi Colani, le joueur de baseball Lou Brock Johnny Cash et Johnnie Taylor, l’acteur Curd Jurgens et Erik Estrada. Au début des années quatre-vingt, Stutz a gagné une série de nouveaux propriétaires célébres comme Jerry Lewis, Billy Joel, Elton John, Paul McCartney, Al Pacino, Barry White, Liberace, Wayne Newton, George Foreman, Tom Jones, Willy Nelson et le Shah d’Iran (Il en possédait 12) !…
Il est presque difficile d’imaginer un seul véhicule dans nos temps modernes attirant un si grand groupe de propriétaires célèbres. Mais le coupé Stutz Blackhawk se démarquait et était apparemment parfait pour l’époque et l’image que ces stars voulaient projeter. La Stutz Blackhawk était également bien représentée au cinéma et à la télévision, elle est apparue dans pas moins de cinq films majeurs, ainsi que quelques apparitions dans des émissions de télévision comme Columbo. Comme les gens de Stutz ont vu leur modèle gagner en popularité et se tenir auprès de l’élite hollywoodienne, le prix a augmenté en conséquence. Les hausses n’étaient pas non plus de petites hausses induites par l’inflation. En 1974, le prix de base était de 35.000 $ (215.000US $ actuels). Il y a eu un bond l’année suivante en 1975, la Stutz Blackhawk étant annoncée 41.500 $ (230.000 US$ actuels)… Les prix ont continué à grimper tout au long du reste de la décennie, Stutz ratissant la pâte en raison de son exclusivité ! En 1981, la Stutz Blackhawk avait doublé par rapport à sa demande des années soixante-dix et était au prix de 84.500 $ (280.000 US $ actuels). Ce prix pâlit par rapport au cabriolet Stutz, qui a été annoncé sans ironie comme la voiture la plus chère du monde à 160.000 US$ de l’époque soit presque 600.000 US$ actuels ! Mais nous en reparlerons un autre jour.
Cela a donné à la Stutz Blackhawk un statut et une crédibilité de luxe, même si tout était criard et Extra Super Seventies. Ainsi, Stutz a augmenté le prix de la Blackhawk tout au long de sa première décennie et a doublé ses profits au tournant des années quatre-vingt. Mais Stutz savait qu’il devrait mettre à jour son coupé pour inciter les acheteurs à revenir pour encore plus, et la majorité des mises à jour ont pris la forme d’une différenciation mesquine des garnitures et d’une réduction des coûts. Le pare-brise en deux parties de 1971 a été simplifié un peu comme n’importe quelle autre voiture de tourisme. Avec une forme beaucoup plus simple le tableau de bord était plus facile à construire et à ajuster, tout comme le capot (le pare-brise venait tout droit de la Pontiac Grand Prix). Les portes ont été simplifiées, la roue de secours exposée dans une imbrication du coffre a également été modifiée. Dans la première année du modèle, la roue de réserve était à l’extrême arrière du coffre. Son quart inférieur agissait efficacement comme un pare-chocs. L’année suivante, la roue avait migré plus haut dans le coffre, alors qu’un nouvel ensemble de pare-chocs apparaissait (le clip arrière de la Pontiac Grand Prix). Malgré ces modifications douteuses et économiques de 1972, la puissance-moteur est restée la même. Bien que le moteur principal utilisé ou annoncé était le meilleur V8 de 455ci de la Pontiac Grand Prix, les acheteurs choisissaient parfois d’autres centrales nucléaires (sic !). Également disponible auprès de la famille General Motors, le gros bloc 454ci (7L4 ) de la Chevrolet Monte Carlo a été complété par deux moteurs Cadillac, le 472ci (7L7) et le 500ci (8L2). Quelques moteurs Ford ont également été utilisés en 1971 et 1972 : le 429ci (7L0 L) Cobra Jet de la Mustang, ainsi que le 460ci (7L5) de la Thunderbird.
Entre 1975 et 1976, des messages contradictoires ont été échangés entre les personnes qui dirigeaient Stutz, les personnes qui y travaillaient et les personnes qui étaient clients (célèbres où non) concernant une Stutz Blackhawk cabriolet qui devait être la voiture la plus chère du monde de l’époque et qui s’appellerait : Stutz Italia. Dan Steckler a été chargé de mener ce projet jusqu’à son terme. Il y a travaillé et ce projet à terme n’était qu’une Stutz Blackhawk Coupé avec un toit souple. C’était Boffissime ! Comme il s’agissait d’une voiture très spéciale et exclusive le seul nom d’Italia qui aurait du faire l’affaire en rappel que toutes les voitures Stutz étaient construites en Italie, sonnait faux ! La voiture a été finie avec un intérieur blanc-frigo qui affichait beaucoup de “ruching”, et un extérieur avec un thème bicolore blanc perlé et jaune crème banane. Bèèèèèèèrrrkkkk !
C’était moche, mais très kitch ! La direction a alors présenté la voiture à Elvis Presley qui était le seul capable d’aimer cette horreur. Lorsqu’on lui a présenté l’Italia jaune crème banane de plus de 160.000 US$ (600.000 US$ actuels) en 1975, “The King” à poussé une gueulante Rock’n’Roll signifiant qu’il n’était pas satisfait et qu’il n’en voulait pas d’autant plus que le choix des couleurs le rendait malade… C’est Evel Knievel, également client Stutz, qui l’a acheté. Il n’en a pas été content, les gens se moquaient des couleurs de sa Stutz Italia. Il l’a revendue à Wayne Newton qui l’a fait repeindre, gardé une décennie et est décédé. La succession Newton a alors vendu l’horreur hors de prix au Petersen Automotive Museum qui l’a immédiatement refaite à neuf, peinture noire et intérieur beige… La Stutz était ainsi éblouissante (voyez la vidéo ci-dessous). En fin de compte, l’idée de réaliser une série de Stutz Italia a été abandonnée.
La refonte de la Stutz Blackhawk était nécessaire, la direction se rendant compte que la voiture ne pouvait pas continuer sur sa plate-forme Pontiac des années soixante pour toujours ! Stutz a alors embauché Paolo Martin (le célèbre designer Pininfarina qui avait créé la Rolls-Royce Camargue, le coupé Fiat 130, diverses motos et quelques montres), pour dessiner une nouvelle Stutz Blackhawk de nouvelle génération. C’était en 1977 et au fil des mois la “nouvelle” Stutz Blackhawk design Paolo Martin restait toujours la même, vaguement modifiée avec des choses insignifiantes comme un levier de vitesses mis à jour, la climatisation à deux zones de Cadillac modernisée par rapport aux exemples précédents et, à l’extérieur, un petit badge VI positionné dans la calandre, bien que de n’importe quelle distance, il ressemblait à un carré. De plus les Stutz Blackhawk étaient assemblées avec n’importe quelle garniture disponible en Italie, il y avait peu d’attention à savoir si quoique ce soit correspondait à la “nouvelle génération” des Stutz Blackhawk si ce n’est un changement de la gamme de moteurs !
Alors que les règlements sur les émissions de la fin des années soixante-dix étranglaient la puissance et tuaient lentement les gros bloc V8, le moteur Blackhawk d’entrée de gamme en 77 était le V8 Windsor de 302ci (4L9) de Ford, qui était utilisé dans la Ford Torino. Le Pontiac T/A 6L6 de la Pontiac Trans Am était une option. Deux autres moteurs ont rejoint la gamme en 1977, le V8 Cadillac 425ci (7L0 ) et l’énorme V8 460ci (7L5) Ford utilisé dans les fourgonnettes de la série E. À cette époque, la Stutz Blackhawk n’était que tout un mélange : plate-forme de la fin des années soixante, matériaux intérieurs des années soixante et soixante-dix et moteurs de l’ère Malaise (sic !)… Mais cela touchait bientôt à sa fin. Le coupé de luxe personnel (et les voitures nord-américaines en général) connaissaient une forte diminution et Stutz ne pouvait plus produire la Blackhawk sur la carrosserie G de la Pontiac 1969.
L’idée d’un cabriolet continuait à percoler après l’annulation de l’échec de l’Italia. Une fois que le roadster a été vendu à Evel Knievel, les travaux se sont poursuivis en arrière-plan. La nouvelle réglementation en matière de sécurité stipulait que les cabriolets devaient avoir un arceau de sécurité, et le fondateur de l’entreprise, James O’Donnell, insistait pour que les concepteurs de Stutz y parviennent. En 1979, est donc sortie la Bearcat. C’était une résurrection de la plaque signalétique de la voiture de sport de la première vie (avant guerre) de l’entreprise ! Personne n’avait acheté de Bearcat après 1933 et ce jusqu’à la première faillite de l’entreprise. En substance, la nouvelle Bearcat était une Italia Targa… . Comme le montre la seule photo venant des relations publiques de Stutz, pour la Bearcat de 1979 le toit Targa se repliait derrière les sièges sous un tonneau-cover encliquetable… Il n’y a pas d’autres informations disponibles ! À partir de 1980, la Blackhawk était basée sur la Pontiac Bonneville. Ni Paolo Martin, ni les gens de Stutz ne pouvaient faire grand-chose avec ce point de départ.
La Stutz Blackhawk avait conservé autant de sa gloire d’antan qu’elle le pouvait, mais les changements qui lui étaient imposés par une plate-forme moderne étaient évidement incompatibles. Virgil Exner était décédé bien avant (en 1973), il n’y avait donc là aussi, pas non plus de guide de la part de l’idéateur. Stutz visait à recréer l’apparence des la première Stutz Blackhawk à pare-brise en 2 parties… Mais avec des proportions plus petites et les looks commandées à Paolo Martin en 1976 pour s’adapter à une autre plate-forme qui n’existait pas lorsque Martin a terminé les dessins, de ces faits les efforts que Stutz étaient vains ! Le nez chromé des Stutz Blackhawks se détachait toujours fièrement et ouvrait la voie, mais il n’était pas aussi évocateur qu’avant. Les ailes s’étendaient également pour former des auvents au-dessus des feux de conduite autoportants, mais elles n’étaient pas aussi pointues ou étendues qu’elles l’avaient été. La fierté et la joie d’Exner s’étaient évanouis, les Stutz étaient devenues grotesques. Le seul moteur disponible était un Buick 350ci 5L7 litres la transmission était bien sûr automatique (personne ne voulait une Stutz Blackhawk manuelle), la très réputée THM350 à trois vitesses.
La Stutz Blackhawk a continué dans son format de dernière génération perdue (sic !) avec des garnitures de bricolage ici et là soumis principalement à des changements dans l’ordre de diminution des coûts de construction. Pendant ce temps, la Bonneville de sixième génération n’existait plus ! La Stutz Blackhawk est devenue un sac de merdes de plus en plus mélangées. 1985 s’est avéré être la fin des Stutz Blackhawk, les artisans italiens travaillaient si lentement que les voitures de 1985 n’ont été terminées qu’en 1987. Au total, Stutz n’a vendu qu’entre 150 et 250 Blackhawk de deuxième génération alors que l’ère des voitures néoclassiques s’estompait depuis quelques années.