Kustom Kulture Rockabilly : Mercury’49 & Makani Terror
C’est tout un pan de l’histoire du Rockabilly et de la Kustom Kulture populaire américaine, qui est étalé dans cet article richement illustré. C’est comme une gerbe d’indigestion qui slache avec moultes éclaboussures devant vos yeux ébahis : du bruit, de la fureur, de la fumée et de la testostérone aussi… Béééérk ! On s’intéresse également à Makani Terror et ses tatoo’s en particulier, c’est bien plus qu’une mode, c’est un art de vivre ! Pour revivre pareille affaire, prenez une vieille guimbarde, genre vieille américaine Mercury coupé d’avant des années ’50 ’60, boostez-la : Pneus XXL, moteur gonflé, châssis et “suspensifs” surbaissés, look tapageur, vous y êtes ! Vous avez votre Kustom Rockabilly ! Il ne vous reste plus que la tenue, mi-voyou, mi-garagiste old school, mi-guitareux-gratteur de zizique rockabilly des origines, bien rageur et tatoué partouze !
L’image a inspiré bon nombre de musiciens : la Caddy de ZZ Top, la scène psychobilly, des artistes comme Junior Brown, Reverend Horton Heat, les Stray Cats, les Chrome Daddies, les stripping Von Dutch, et aussi toutes ces marques de voitures américaines qui se retrouvent dans des chansons : V-8 Ford Boogie, Hot Rod Lincoln, La vie en Chromes&Flammes. Un véritable délire ! Les Beach Boys ont eux-aussi laissé leur empreinte dans l’univers Hot-Rod avec un titre de 1963 “Little Deuce Coupe”, un hommage au célèbre Ford Coupe 1932, la référence ultime du phénomène Hot-Rod. En 1996, les garçons de la plage sortent leur vingt-huitième album “Stars And Stripes”, rien de neuf, si ce n’est le concept : des hits absolus des Beach Boys repris avec des pointures de la scène country. Au cœur de cette tornade californienne qui agite Nashville, on retrouve “LE” ”Little Deuce Coupe” des Beach Boys mais susurré par le chanteur James House… Bof !
Et puis il y a “American Graffiti”, également ! Un authentique navet tout ce qu’il y a de plus chiant à supporter ! Qu’est ce qu’on était tocard dans les fifties et seventies… Pratiquement déjà en tant que nouvelle voiture, la Mercury de 1949 jouissait d’une grande popularité sur la scène Kustom. Toujours sur l’écran de cinéma, ce lourd traîneau est apparu très tôt dans le rôle de base mobile pour les rockabilly’s et Greaser’s… C’est là-dessus qu’après mélange des ingrédients de la soupe populaire, que l’idée qui a donné naissance au Kustom-Mercury’59 de cet article, parfois appelé “The Rockabilly Freakout” est sortie de la tête d’un lecteur du Chromes&Flammes Allemand : Knud Tiroch qui à d’ailleurs à le look “au poil” pour jouer le rôle d’un Kustomizeur dans un film-navet des fifties ! Je vous présente le script du film d’horreur trash qu’il m’a présenté afin que lui et sa Mercury passent en vedettes dans C&F… L’apothéose…
Il voulait refaire une version porno Allemande/Autrichienne du film “American Graffiti” replacé dans la période nazie, et renommé “Austria HitlerGraffer”... Je lui ai répondu que l’ex-joueur de piano avec son pénis érigé : Volodimir Zeelinsky, le faisait déjà en version Ukrainienne sous-titrée en Eurovision nommée “The Russian Fucker” et qu’il avait raflé tous les prix y compris une floppée de dons par milliards… Que par contre une version Franchouillarde du film “Rebel without a cause”, dans lequel James Dean est sur la route avec une Mercury Coupé 1949 légèrement révisée pouvait être adaptée avec une version Hard d’American Graffiti” où une Mercury’49 “Top-Choppée” du gang des “Pharaoh’s” sert de moyen de transport à des d’jeunes-mâles avec une coiffure pommade, assis en bande désorganisée, la queue en l’air prête à être sucée par des nananas pré-pubères en jupettes, chaussettes et baskets blancs durant “LA” balade traditionnelle obligée du “Saterday night” !
La Mercury pour la version Franchouille n’était pas en adéquation, j’ai proposé qu’il obtienne un partenariat avec Citroën et leur AMI électrique le héros étant un sosie de Manuel Micron se faisant sucer le dard en AMI par une vieille Transsexuelle… Le titre ? “Fuck’France”, simple et direct comme un slogan de campagne ! Je lui ai reprécisé pour qu’il comprenne bien, que l’adaptation d’un film américain d’avant que le Rock’n’roll ne devienne courant, film hollywoodien qui avait été réalisé à destination des jeunes gars “Blancs” qui aimaient se balader en bagnole Kustom (préférence Hot-Rod’s pour le look et sur-préférence pour les lourdes ricaines pour le coté sexuel plus pratique) en écoutant de la musique rockabilly de nègres, tout en se faisant sucer la queue par des jeunettes blanches, en particulier dans les quartiers blancs… était complexe à adapter dans un pays peuplé majoritairement d’immigrés africains et Ukrainiens circulant en vélo et en Renault-Peugeot-Citroën…
C’était bien sûr suspect pour les minorités blanches citoyennes décentes. La musique, qui était “nègre”, donc sauvage et tribale selon les normes de l’époque, renforçait le préjugé dominant selon lequel les garçons, également appelés “Greaser’s” en raison de leurs coiffures graissées, n’étaient pas tous de bons gars. La moitié étaient des futurs-ratés, garagistes précaires, voleurs et bagarreurs ! Des jeunes sauvages, bien sûr, qui avaient la méfiance des espions dans la peau et se prélassaient dans leur image de hors-la-loi. Dans ce contexte, les histoires décorées d’éléments d’horreur et de zombies sont également à comprendre, comme étant la seule Kulture cinématographique intellectuellement accessible dans les “Theater-movie’s” avec laquelle les kustomizers allaient draguer et s’amusaient à s’effrayer! L’idée d’un Remake Franchouille réalisé par Artus Bertrand et Jean Castex a ainsi été abandonnée !
J’en reviens donc à l’histoire de la Mercury vedette de cet article qui est devenue épique en 1957, lorsqu’un Greaser a acheté une 49’Mercury avec son premier argent auto-gagné dans sa phase de tempête et d’envie, également appelé “Shuffle” en Autriche… Le chariot était semblable à un tas d’ordures assez délabré, mais le Greaser était déterminé un jour à en construire un kustom vraiment gros. Mais cela prendrait un certain temps, car c’était un jeune rockeur sans charbon, qui n’avait en tête que de la musique rockabilly, les filles suceuses chaudasses, de la pommade grasse pour les cheveux et des idées “Kool” dans sa tête. Après une nuit de danses dans une spéléologie grassement couillue, il s’est battu avec d’autres rockabillies, renversant un gars avant qu’il ne puisse l’achever lui-même.
Totalement ivre et grièvement blessé, il s’est enfuit avec sa Mercury branlante vers la frontière allemande. Au milieu d’une intersection abandonnée au milieu de nulle part, quelque chose d’étrange s’est produit : juste devant la voiture, l’ombre balayée par la flamme d’une silhouette fantomatique est apparue sur une moto. Notre Greaser a paniqué et s’est écrasé sur le panneau d’affichage d’un spectacle de Rock’n’roll, où un “Mister Rockabilly Freakout” lui est apparu… C’est ainsi qu’il a conservé de son adolescence une fraîcheur d’esprit vraiment hors concours ! Ainsi, lorsqu’il va à un rendez-vous d’amour, son palpitant bat sur un rythme particulier. Il est zému, parole ! Comme un collégien… Ahhhhhhhhhh ! Tout cela me rappelle mes jeunes années !
Vous ne trouvez pas, vous autres, que c’est émouvant de rencontrer une femme ? J’entends : pour la première fois ? On se fait des idées, on bâtit, on l’idéalise, on mouille moralement. Bien sûr, je vous sors des tartines auxquelles vous ne pigez rien. Des emmanchés comme vous autres, pour qu’ils comprennent les grands sentiments, faudrait les rééduquer dans une école pour mous-de-la-tronche ! Le léchage, c’est pas la grande affaire rêvée… Je sais bien qu’il y a toujours dans l’existence des paumés qui s’en prennent aux dieux qui peuplent le ciel, because leur vie ressemble à une tartine de chiotte et qu’ils en ont classe de s’en repaître ! Des aigris, y en a partouze, ils ont des circonstances atténuantes, nous sommes d’accord…
Enfin, ça fait plaisir de s’extérioriser, même devant des pots de géraniums ovipares ! Au fond toute la vie est ainsi : on montre ses richesses voilées à des gens indifférents. Tenez, mon avantage principal, mon machin… Vous voyez ce que je veux dire ? Eh bien ! c’est à des murs que je l’ai fait voir le plus souvent ! Malheureux ? Non. Quand on pense à toutes les dames qui lâchent dix points pour s’installer devant leur TV où on leur passe, à plat, la bouille de Bradd-Pitt ou Johnny Depp ! Oui, c’est triste ! Ah ! un premier rendez-vous ! C’est ce qu’on fabrique de mieux en matière de sensations doucereuses. La rencontre ! Chacun prend les mesures de l’autre : “Tiens j’avais pas remarqué qu’elle avait une tache de vin dans le cou”…
Et puis on se quitte, on se retrouve, la routine commence. Saloperie ! Le voilà bien le vrai chancre de l’humanité ! La grande bouffeuse d’illusions ! Le cancer de la poésie… Le morpion de la liberté… La routine ! Avec ses habitudes grises, son accablante permanence ! Son prévu, son inéluctable… La routine, immuable, perfide, moisie, corrosive ! La routine et ses traites acceptées, ses “Ouiiiiiiiiii” sacramentels, ses bains de pieds du dimanche, ses un-an-et-un-jour, ses neuf mois, ses cinquante-deux semaines, sa chiotte de calendrier, son horloge parlante Qui s’en souvient de l’horloge parlante ? Moi oui, vu mon âge, c’est normal ! Au quatrième top il sera l’heure de vous faire partir, l’heure de jouer à papa-maman, l’heure d’y aller du cigare, l’heure de mener les mouflets “at the public school”… Arghhhhhh ! Putain ! Je vais vous faire vivre quelques vieux souvenirs de ma jeunesse perdue d’il y a presque 55 ans d’ici !
J’étais à Paris, c’était la Révolution de mai’68 ! Ouiiiiiiiii ! J’ai été révolutionnaire ! Sous les pavés la plage ! CRS SS !!… J’y étais avec des pensées pessimistes lorsque j’ai débouché au Pam-Pam de l’Opéra. La boîte était comble. Beaucoup d’étrangers. Le quartier Opéra avec les Champs-Zé, c’était la merde (déjà)… pour ça : tous les Ricains, tous les Englishes, les Scandinaves, les Teutons hantaient ces lieux. Ils étaient désemparés par le Gross Paris en Révolution et ils mijotaient dans les lumières. Des fois qu’un apache leur planterait un portemanteau dans un coin d’ombre ? Y a des trucs plus cotons qui ne sont jamais arrivés ! Je me souviens avoir avisé une moche beauté suavement estudiantine en devenir, assise tristement, anxieuse. Elle guettait farouchement… Probable ! Mais lorsque mes kilos se sont encadrés dans le tambour, elle a un eu sursaut d’allégresse et son vitrail s’est illuminé.
Elle s’était foutue sur son 31, la donzelle. Et vraiment elle valait qu’on cloque la montre du grand-vieux au clou pour la sortir. Elle portait un tailleur jaune avec un col de panthère-imitation, qui lui allait à ravir. Elle était rousse, plutôt acajou, et ça lui allait admirablement avec ses flamboyants verts. Pour les formes, ayez confiance, un aveugle y aurait retrouvé son chemin sur sa géographie… Quant à son tiroir-caisse, il était tellement bath qu’on ne pouvait plus regarder ailleurs lorsqu’on l’avait repéré. Je me suis dit qu’elles étaient toujours anxieuses la première fois ; seulement après, dès qu’elles ont mesuré le bonhomme, on peut venir au rendez-vous avec de quoi tricoter ou faire des mots croisés…
Je lui ai débité les salades d’usage à cette époque révolue : à savoir qu’elle était ravissante, qu’elle se loquait avec un goût inouï, que son parfum était d’une rare délicatesse et qu’à côté d’elle, B.B. c’était zéro. Elle a gobé tout ça comme une demi-douzaine de fines belons et s’est trémoussée vachement. Je me suis serré tout contre elle sur la banquette, nos deux chaleurs faisaient bon ménage. Une cuisse de fille contre la sienne c’est cool ! Parole d’honneur ! Et l’honneur, je sais ce que c’est : j’en avais quand j’étais jeunot ! Mais, en fait, j’étais tombé sur une rebelle de l’amour libre ! Une soirée gâchée, côté calcif ! Je me suis penché sur elle pour lui rouler un patinuche qu’était pour ma frèle expérience le record de plongée en apnée ! Quand je l’ai lâchée, fallait lui faire des inhalations…
Sans perdre une broquille, je lui est massé l’avant-scène. Et ça a durcit rapide sous son corsage… Dehors, sur le bitume, une tapineuse fredonnait en attendant d’éponger un hère errant ! Elle songeait à l’époque où un gars lui avait fait le même cinéma. Elle avait sa vertu et elle y tenait comme à son livret de caisse d’épargne… et maintenant… Pfffff ! Maintenant elle grimpait interminablement des escadrins avec des mâles en rut sur ses talons. Pour elle, la vie c’était un escalier sans fin, des souffles d’hommes avides derrière elle… Des discussions, des bidets à musique… On est monté dans ma Dauphine pour une balade de quartier !
Elle a résisté, j’étais sur le point d’abandonner parce que j’aime pas qu’on me prenne pour une crêpe. Mais comme j’étais en pleine forme, et que c’était gênant pour marcher, j’ai fait une dernière tentative qui a aboutit. Elle a cédé, J’étais dans l’état d’esprit de l’homme-canon après son exercice périlleux. J’avais envie de saluer les badauds… Le plus duraille était fait. Après çà allait tout seul, j’ai toutefois fait abstraction des défauts. Et j’ai commencé mon turbin de bipède en proie au démon de la viande… D’abord c’est l’escargot baladeur, nature ! Un petit truc à moi ! Puis j’ai enchaîné sur une de mes toutes dernières créations ! Là c’était le gros délire !
A force de passer sur le trottoir au moment pile où une tuile tombe du toit ; à force de s’asseoir sur des fourmilières, d’être le sixième devant l’autobus alors qu’il n’y a plus que cinq places ; à force de recevoir des commandements de son adjudant, de son patron, de sa femme et de son percepteur, le Français moyen en vient à s’en prendre à ceux de Dieu… Tous ceux qui attrapent la vérole, qui reçoivent des lettres signées : “Un ami qui vous veut du bien”, qui glissent sur les peaux de banane, qui ratent le train pour une minute ou le gros lot de la Loterie nationale pour un numéro ; tous ont des mouvements d’humeur avec le Tout-Puissant (qui n’existe pas). Ils se sentent visés, les pauvres chéris, alors ils s’en prennent à Celui d’en haut, parce que ceux d’en bas leur fileraient une toise s’ils faisaient mine de se rebiffer. C’est la vie…
Boummmm ! A ce moment-ici, précis, de mes divagations/souvenirs, une souris complètement à poil vient de faire son apparition dans mon jardin. Elle est moche comme une belle-mère. Ses seins pendent tristement comme deux sacs vides, ses hanches sont saillantes et sa gueule n’a rien d’essentiel. Ses tifs sont sales, son nez volumineux et son regard exprime toute la lassitude de l’univers. Elle s’étend sur un des “Lafuma” exactement comme sur la table d’auscultation d’un gynécologue, les flûtes grandes ouvertes et les mains sous sa tête en guise d’oreiller… Elle sent la machine à écrire et la dactylo mal entretenue. Une pépée comme ça vous met tout de suite dans l’ambiance et vous prédispose bien en défaveur de l’amour ! On a envie de s’acheter douze slips à changement de vitesse en contemplant une semblable mocheté. L’univers est tout plein de “gnaces” qui, dès qu’ils poussent leur premier cri, sont déjà cataloguées et bonnes pour une certaine branche humaine. C’était une joggeuse qui traversait mes terres pour ne pas s’épuiser en circonvolutions hardies…
Surtout croyez pas que je fasse de la philo pour après boire… Les considérations fumeuses, les aperçus vertigineux, les déclarations à changement de vitesse, c’est pas mon genre. Mais faut bien admettre que la plupart des gens ont la frime de leur turbin. Par exemple, tous les croque-morts sont de joyeux lurons, un peu pâlots et sentant le décès ; tous les bistroquets sont des gars placides et ventrus ; toutes les repasseuses des souris tristes et molles, et toutes les bonniches d’hôtel de passes de pauvres greluches ravagées qui ont la couleur des bidets qu’elles passent leur garce de vie à ramoner en rêvassant aux palétuviers roses du bouquin pastel qu’elles planquent dans la fouille de leur tablioche. Celle du Mont-Chauve illustre admirablement cette profession subalterne.
Imaginez une pauvre fleur de misère à l’air navré, aux cheveux blond filasse ; au nez en trompette bouchée ; aux joues constellées de taches de rousseur et aux yeux tellement ternes qu’on les croit couverts de poussière. Elle existe timidement quelque-part dans un réduit sans fenêtres, lové au fond d’un couloir du deuxième. Une petite table à repassage, une ampoule électrique, une sonnette composent les accessoires indispensables à son activité. Lorsqu’un couple s’annonce, le patron actionne la sonnerie. Elle pique une servetouze mitée sur une pile posée par terre et elle va accueillir ces messieurs dames. Le patron gueule, depuis le rez-de-chaussée : “Le 24 ou le 16” et elle escorte ces slips en fleur jusqu’à la chambre où doit être consommé le sacrifice ! C’est du travail pas pénible mais assez décevant. Elle pose la serviette sur le lavabo, enfouille un pourliche et s’en va, discrète, furtive, pas frissonnante pour vingt ronds !
Elle repasse interminablement ses serviettes et les limaces du patron. Et elle écoute gueuler les populations qui viennent se la faire briller dans le petit hôtel. Les cris de l’amour ne l’émeuvent pas. L’amour, elle sait ce que c’est… Elle a suffisamment nettoyé de bidets et refait de plumards pour avoir une opinion sur la question. D’autant plus que le patron vient la retrouver “quèquefois” en cours de repassage, histoire de lui donner un cours d’anatomie. Ordinairement, les clients font comme les escargots, les baloches, ou les agents cyclistes : ils vont par deux. C’est recta. Toute seule à une table, fumant une américaine avec des mines voluptueuses. Elle regarde autour d’elle pour vérifier s’il y a à portée de son charme un clille possible. Mais pour l’instant, c’est assez désert. Excepté deux facteurs qui bouffent du saucisson dans un coin et un vieux gland qui sirote un Vittel, c’est l’heure creuse.
La Gilberte ferait plus de chiffre d’affaires si elle arpentait un coinceteau plus populeux. Mais comme elle bouillave en extra, à la discrète, presque en honnête femme, elle ne prend pas de risques et se terre dans ce troquet où des habitués peuvent venir la retrouver. Elle file un coup de saveur par-dessus mon épaule, pour si des fois une souris me filerait le train, ne voit personne et accepte cette évidence comme elle a tout accepté jusqu’ici : avec la plus intense résignation. Dans une chambre voisine, y a une vachasse qui gueule “Encore !” que c’en est une bénédiction. Elle fait fumer les ressorts du page ; on se croirait dans une scierie du Jura… “Plus fort !” elle brame, la vicelarde ! “Plus fort !” Et elle affirme que c’est bon.
Je regarde la soubrette. Pas émue, résignée. C’est la vie, quoi. Elle sait qu’on gueule en faisant l’amour quand on cigle pour une chambre. Faut justifier la dépense, pas vrai ? Au moins au partenaire. Et le partenaire s’escrime de son mieux. Il met tout le paquet, le brave bipède. C’est la corrida-maison ; l’hallali sur l’air de Cavalleria Rusticana interprété au sommier. Un concerto pour braguette et nombril ! Du grand art de bonhomme ! De l’épopée de brave zig. L’amour fait un ramdam terrible ! On n’entend que sa grande voix un peu folle, que ses cris perçants… Pour surmonter ce sentiment inhabituel, elle toussote. Si vous croyez que les batifoleurs d’à côté freinent leurs ébats pour autant ! Ah ! foutre (si j’ose dire) non !
Maintenant, la pépée devient exigeante. Elle réclame l’inédit ! Du terrible, du jamais envisagé ! La chandelle romaine, rien de moins ! Et de la longueur ! Et de la vigueur ! Le gars doit regretter de ne pas l’avoir à coulisse comme une longue-vue ! Pour compenser, il lui fait la torpille humaine, à sa douce compagne. Il pousse des “hans” de bûcheron au labeur, mais le chêne à coucher doit être millénaire avec autant de tour de taille ! Faut un bout de temps pour en venir à bout, pour l’anéantir… D’autant plus qu’il est exigeant, ce chêne-là… J’en ai classe à la fin. Rien n’est plus communicatif que ces sortes de beuglantes ! Ça vous fiche une godomanie sans qu’on ait le temps de boutonner son imperméable.
Là, ça devenait franchement porno et ça m’intéressait. Je biglai le tableau. Ça me fait penser à ces films qu’on projetait dans les claques avant-guerre, aux habitués des taules d’abattage. C’en avait le côté minable. C’était du vice à grand spectacle pour bon bourgeois blasé. Les mecs n’avaient pas l’air émoustillés mais recueillis, ce qui était un comble. Ils récitaient des oraisons à la noix. Du vrai délire ! Comme une tribu primitive perdue aux confins de l’Afrique. Pour consommer une tordue pareille, faut avoir sérieusement faim ou bien s’être farci une vraie dose de cantharide.