L’Hypercar NILU27 de Sasha et Inna Selipanov…
Nilu27 est la société fondée par Sasha et Inna Selipanov, originaires de Russie mais se revendiquant citoyens du monde, américanoropéens de formation, artisans constructeurs en série hyper limitée d’un véhicule extraordinaire. Et cela commence cet été 2024 avec les débuts publics de leur premier véhicule : l’époustouflante Hypercar NILU27 à moteur V12, dévoilée à Pebble Beach durant la Monterey Car Week d’août 2024. L’hypercar NILU27 est hors des tendances traditionnelles en évitant l’électrification, la numérisation et autres aides technologiques, et propose une expérience de conduite non filtrée et non censurée (sic !)… S’inspirant de sources telles que la F1 des années ’60 et des “vraies” courses du Mans entre Ford, Ferrari et Porsche des mêmes années soixante, elle s’affiche d’un look avant-gardiste ayant suivi un parcours temporel… En sus de réinventer le design, de pratiquer la philosophie du Bauhaus (la forme suit la fonction), d’aimer la vieille école américaine des Muscle-Cars et Hot-Rods, le Drift, les mathématiques et même de jouer de la musique Metal d’avant-garde, l’objectif de Sasha Selipanov était de créer une voiture au design “inévitable”, fraîche et pourtant d’une certaine manière familière… L’extérieur de la NILU27 qui en résulte, avec ses sections transversales serrées et ses courbes sinueuses, est fonctionnel, mince et aérodynamique. Pour un contraste maximal, il juxtapose des surfaces sculpturales épurées avec un compartiment moteur/mécanique, volontairement exposé et finement détaillé.
Se revendiquant de la philosophie du Bauhaus, cette NILU27 évite les éléments de style superflus et célèbre la beauté fonctionnelle essentielle… C’est une formulation pompeuse qui est une réponse sans questionnement à la stupéfaction… Me concernant, y voyant une manière astucieuse de créer l’évènement du moment et une source de revenus, j’ai directement flairé que les auteurs de cette “affaire” avaient comme vocation première d’utiliser l’art qu’ils prétendent y avoir insufflé, pour en faire un objet de commerce, un outil du capitalisme dans sa fonction la plus primaire… On peut partir de deux postulats : soit l’art est un objet non soluble et hermétique, dans ce cas sa vocation est d’être un produit qui satisfait les besoins de l’homo œconomicus. Soit on vise l’artiste, et on demande : “Crée-t-il de l’art pour subvenir à un débordement artistique, fruit de la passion, ou pour subvenir à sa condition économique, souvent précaire ?”… Ces questions en dégagent aussi d’autres, savoir si un artiste est bon parce qu’il crée par nécessité créative ou par nécessité financière ? La transcendance créative des artistes et leur nécessité de subvenir à leurs besoins sont parfois intimement liées, rappelons-nous que Van Gogh, génie du post impressionnisme, mettra une existence entière à vendre un seul tableau. Pourtant animé par le besoin irrationnel de peindre, de créer à partir d’épiphanies clairvoyantes, il chercha toute sa vie à vendre son art au plus offrant. La question est donc difficile à cerner, elle implique une multitude de considérations.
Elles sont toutes plus périlleuses les unes que les autres, je ne me perdrais donc pas plus longtemps en élucubrations… L’art a-t-il une vocation s’il ne s’adapte pas à la société ? Une œuvre qui n’a pour horizon que son artiste n’a-t-elle pas d’autre choix que de s’éteindre, amenant l’art à s’éteindre lui-même ? Les plus grands artistes sont ceux qui vendent le plus (Andy Warhol, Pablo Picasso, Jeff Koons…) et donc on reconnait “le génie” d’un artiste par son influence, lui-même propulsé par sa côte sur le marché. En définitif, le constat est sans égard, l’art s’adapte pour survivre et cela est d’une absolue nécessité. L’art est un perpétuel devenir pétri “d’illusionnements” et il sera toujours présent peu importe sa forme. Il importe donc peu la forme que prendra l’art, son seul devoir est d’exister. On pourrait penser que l’art se vide de sa substance à partir du moment où l’Homme, pervers et envieux, le dérive de sa vocation première : plaire, toucher, révéler le beau pour le rattacher à des aspects économiques et financiers. Cependant on peut déceler une logique implacable à ce constat : l’art est la substance rattachée à un bien, qui, comme tout autre bien, peut être détenu, vendu et faire l’objet d’une monétisation de par sa valeur. Une valeur qui est un moyen qui assouvit une nécessité et révèle un constat : La plupart des artistes sont en situation de précarité, une essence quasi prophétique à laquelle chacun est frappé, en réalité chaque artiste fait son numéro comme dans un cirque, l’art est de récupérer le plus de piécettes possible.
Il existe pourtant des artistes comme on aime à les imaginer dans les œuvres de Jane Austen ou Oscar Wilde, grandioses, touchés par la grâce du génie et du beau, qui n’ont que faire de l’uni conformisme ! Je me revendique en être un, tapoteur de textes, éditeur anti conformiste et politiquement incorrect…J’ai préféré remplacer le pinceau par un hachoir rouillé pour faire du sang de mes lecteurs (et lectrices), victimes consentantes, l’encre de mes élucubrations créatives. Ne suis-je l’exemple atypique du créateur torturé par l’adversité que sont : 1° d’abord divers éditeurs copieurs, jaloux que je suis comme un chantre de l’art abstrait qui écrit et publie face à l’éternité… 2° le fisc, mon ennemi de toujours… 3° Divers faux culs d’amis qui m’ont volé ma merveilleuse et unique LéaFrancis… Cependant, Gauguin, lui, était plongé dans une telle précarité qu’il dit un jour dans une lettre à Pissarro : “La peinture, je n’ai même pas l’argent pour acheter de la peinture, je me borne donc à dessiner”... Cela démontre bien que c’est la condition sociale de l’artiste qui détermine son utilisation de l’œuvre, l’artiste bourgeois crée à son bon vouloir et dans une transfiguration complète de son état, là où l’artiste précaire s’ancre dans un constat tragique s’opposant à cette transfiguration. En bref, l’art de créer des conneries, est-il libre de son positionnement ? Si c’est soluble dans le consumérisme c’est donc par contrainte, mais on peut aisément penser qu’il existe une dimension perverse dans le fait de contraindre par sa précarité un artiste à vendre son œuvre.
Mais n’existe-t-il pas une volonté de la part des artistes de faire connaître leur art et à le céder par le biais d’échanges financiers ? Surement ! Mais l’artiste qui vend son art est-il un artiste vendu ? Les époux Sasha et Inna Selipanov sont-ils vendus ? Examinons leur création… Le châssis de la NILU27 n’existe pas en tant que chassis classique “à l’ancienne”, c’est une vue de l’esprit… Ici, c’est mieux qu’une vision, c’est une monocoque en fibre de carbone rendue rigide par un sous-châssis de tubes en alliage d’aluminium soudés entre-eux “à l’ancienne”. Développé en interne et contrairement aux sous-châssis composites “à la mode”, le designer de la NILU27 a délibérément choisi une approche “tubesque” pour prétendre améliorer l’accès aux composants de la transmission tout en facilitant sans effort l’extraction de la chaleur et la célébration de l’esthétique mécanique. Faudrait-il enlever la carrosserie…. Ahhhhhhh ! Oui… Si non comme accéder à tout ? Personne ne ma répondu, si ce n’est me dire que la NILU27 a été conçue pour offrir des angles de vision parfaits avec une ergonomie et une sécurité idéales… Ok… Mais ma réflexion dérangeante n’a pas reçu de réponses… Le designer m’a par contre “bassiné” les oreilles en soutenant qu’il a été en mesure d’obtenir une ligne de toit incroyablement basse et des dimensions compactes de l’habitacle sans sacrifier le confort…. Ok… Ok… La NILU27 peut accueillir deux adultes dans une disposition traditionnelle côte à côte, avec une entrée et une sortie rendues possibles par des portes papillon…
Waouwwww ! Elles sont de faibles hauteurs de seuil et les sièges fixes et encastrés n’obstruent pas les ouvertures des portes avec leurs renforts latéraux. Mais comment la machine s’adapte-t-elle aux grands et aux petits puisque ni le volant ni les pédales ne peuvent être réglées ? L’interface homme/machine NILU27 est donc magique quoiqu’entièrement composé de commandes manuelles, analogiques, d’entrées et de rétroaction qui ne fonctionnent pas… J’ai tout tenté… Rien… Le seul écran est la caméra de recul/rétroviseur, qui s’adresse à la faiblesse traditionnelle des voitures de sport à moteur central : le manque de visibilité vers l’arrière. Mais ça n’est pas encore branché… Décidément, je déchante me demandant si en finale de mes ressentis on ne va pas me faire chanter l’air des bijoux de famille coupés en rondelles… Vite, je dois trouver un point positif… La taille compacte et la forme parfaitement ronde du volant qui spermettent des sensations de direction détaillées et la précision ultime de saisie. Voilà… C’est tout bon, ça, le volant rond… Le volant revient aux sources, il est dépourvu d’interrupteurs, de boutons et autres gadgets. Rien n’allume ni éteint quoique ce soit, c’est magique… C’est le témoignage de la conviction que la conduite de performance nécessite une concentration totale sans aucune distraction. Fini les modes de conduite, les paramètres et les options : les commandes de la NILU27 sont à la fois primaires et intuitives. Il suffit d’imaginer que ça fonctionne…
La transmission manuelle à 7 vitesses est, me dit-on, la porte ouverte à la conduite analogique tout en ajoutant un élément de sécurité avec un verrouillage de marche arrière dans le cas ou à 650km/h on l’enclancherait pour revenir en arrière… Le volant, le pédalier, l’appui-tête, les rétroviseurs extérieurs et d’autres réglages sont eux-aussi délibérément manuels, accessibles par des leviers et des interrupteurs manuels fixes… Le retour tactile et haptique des commandes usinées à froid a été jugé à la fois plus attrayant et, surtout, plus sûr que la navigation dans les menus de l’écran. Oui, c’est bon à savoir, mais rien ne fonctionne…L’hypercar NILU est une vision, celle de Sasha Selipanov dans sa forme la plus pure, une vision chimérique qu’il perfectionne depuis 2006 dans un espace temps figé… Elle sera plus tard, initialement disponible en série extrêmement limitée avec une production plafonnée à 15 unités, pour un prix à déterminer qui devrait surpasser la plus chère des Bugatti actuelles…Pour peu le chiffre de50 millions va être évoqué, dans les options… “Mon parcours dans l’industrie n’a jamais consisté à suivre des règles et à m’en tenir aux normes”, m’a expliqué Sasha : “Je n’ai jamais eu peur de suivre mon intuition ou de poursuivre mes rêves. Briser les conventions n’est qu’un sous-produit. Il en va de même pour ma NILU27, c’est une hypercar qui abandonne les tendances et les conventions actuelles à la recherche d’une automobile d’expérience. Révéler NILU au monde est pour moi un rêve devenu réalité”… Waouwwwwwww ! Une lampée et ça repart…
“C’est un moment si profond qu’il m’est difficile de l’exprimer avec des mots. Ma vision est le résultat de décennies de recherche, de nuits blanches, d’années de réflexion et d’analyse excessives. J’ai eu la chance d’apprendre et de contribuer à les meilleurs de l’industrie ; maintenant, mon équipe et moi sommes ravis de mettre à profit toute cette vision et ces connaissances à l’action”… Nilu27 s’est associé à Hartley Engines en Nouvelle-Zélande pour produire “l’un des moteurs atmosphériques les plus puissants et les plus frappants au monde”. Personne ne l’a entendu ni vu fonctionner, mais il devraitêtre terrible… De plus, le compartiment moteur de la NILU27 est entièrement créé pour mettre en valeur ce magnifique V12 de 6,5 litres à 80 degrés. C’est magique… Et parce que la NILU27 ne s’appuiera pas sur l’électrification, parce qu’elle vise à être l’hypercar atmosphérique la plus puissante au monde, le V12 lorsqu’il fonctionnera délivrera plus de 1000cv. Et tandis que son grand alésage et sa course courte le feront tourner comme un moteur électrique (sic !), le moteur “à feu égal” (un gag ?) fournira au conducteur la quantité parfaite (sic !) des seules vraies vibrations tactiles. Le V12 Hartley disposera d’une zone de combustion raffinée, d’orifices à haut débit et d’une géométrie de soupape de performance, ce que les équipementiers ne peuvent généralement pas intégrer dans leurs plates-formes compactes… Le moteur disposera également de 12 carbus individuels pour une réponse instantanée de l’accélérateur, ce qui est un autre facteur clé de différenciation…
Dans cette configuration, les positions d’échappement et d’admission conventionnelles sont inversées. La configuration offrira des avantages clés en matière d’emballage (sic !), d’extraction de chaleur et d’esthétique. Et cela aurait permis aux étonnants collecteurs d’échappement 12-en-1 “Snakepit” de servir de point culminant unique du design extérieur… A nouveau, tout est fantasmé, rien n’existe qu’en illusionnement… L’ensemble du système d’échappement a été imprimé en 3D en Inconel, cela a permis de réaliser la conception complexe, une autre caractéristique unique si l’on considère ses dimensions, mais ce n’est pas fonctionnel. Couplé à la boîte manuelle CIMA à sept vitesses et logé dans le sous-châssis en alliage d’aluminium recouvert de céramique, le moteur V12 représentera la beauté fonctionnelle à son meilleur… J’en ai été “tout paf !”... Nelson Hartley, fondateur et PDG de Hartley Engines, a déclaré sur une bande enregistrée qu’on m’a fait écouter quasi de force comme étant une preuve magistrale : “Au cours des dernières années, nous avons travaillé discrètement sur la conception et l’agencement d’un moteur hypothétique en nous inspirant des voitures de Formule 1 de la fin des années ’80 et du début des années ’90. Nous nous sommes efforcés d’obtenir le genre d’ingénierie brute, attachante, émotionnelle et parfois un peu folle de ces époques. Avec la liste de souhaits de Sasha pour sa NILU27, nous avons finalement trouvé le projet parfait pour consacrer notre temps et toucher un paquet d’argent”…
Ne vous y trompez pas ; il ne s’agit pas d’un moteur OEM d’un autre fabricant converti au “Hot V”… Il s’agit d’un monstre imaginaire sur mesure, de gros calibre et à course courte réalisé en 3D non réel mais en donnant l’illusion… Il est donc fictivement doté de cames agressives, d’un débit de port fictivement agressif, de composants légers et de matériaux exotiques imaginaires pour avoir des sueurs froides à chaque fois que le V12 démarrera dans la tête et tournera à vide dans une autre vie… Il est juste pour moi de tapoter (d’écrire) que maintenant que je suis informé de la non réalité de tout ce souk, je suis très enthousiaste et heureux que Sacha soit Russe et pas Ukrainien… Toujours dans la fantasmagorie, son on hypercar NILU27 utilisera une suspension à double triangulation visible de l’arrière… C’est encore des histoires qui contribuent aux caractéristiques de manipulations exceptionnellement précises façon KGB. Un ensemble de pneus Michelin Pilot Sport Cup 2 R a été monté, spécifié à 265/35 R20 à l’avant et 325/30 R21 à l’arrière. Ils chaussent des jantes “Nilu27Centerlock” de 10x20po et 13×21 po, qui ont été conçues en interne avec des détails légers complexes pour réduire le poids non suspendu. Elles ont été produites par AppTech en Italie. L’équipement de freinage en carbone-céramique provient de Brembo. Les étriers BM sont montés à l’avant et à l’arrière dans une finition blanche personnalisée. Ils offriront des performances exceptionnelles et une résistance à la décoloration.
Les premiers prototypes de NILU27 et le premier lot de voitures clients seront assemblés par Aria Group à Irvine, en Californie avec unproduction limitée à 54 unités, dont quatre seront des designs uniques et “autres” qui feront encore évoluer le langage du design : “Nous avons été ravis et touchés par votre réaction de venir bous rencontrer”, m’a déclaré Inna Selipanov, cofondatrice et directrice de l’exploitation de l’entreprise, ajoutant :“Alors que le monde bouge vers l’électrification, et pour de très bonnes raisons, nous croyons fermement à l’intemporalité. Ces voitures ne permettront pas seulement de rester pertinentes, mais elles continueront à trouver une place dans les collections d’amateurs passionnés d’automobiles. Nilu27 est fier d’avoir le soutien de leaders de l’industrie tels que Aerotak, AppTech, Aria Group, Brembo, CIMA, Hartley Engines, Michelin et Schroth”… La voiture a été dévoilée sur rares invitations à la crème de la crème de la nouvelle presse indépendante d’avenir, GatsbyOnline + ChromesFlammes en tête, et à un groupe de VIP et de médias sélectionnés lors d’un événement privé à Los Angeles ce 8 août. Les débuts publics suivront le 15 août à Pebble Beach, Monterey, en Californie, USA, avant d’apparaître en tant que Concept Lawn au concours de Pebble Beach d’Elegance le 18 août… L’hypercar NILU fera également ses débuts dans CSR Racing 2, le jeu de course mobile hyper-réel de NaturalMotion de Zynga. Les joueurs peuvent faire l’expérience de la performance à indice d’octane élevé, un design de jeu apparaitra en novembre 2024.
Alors que le monde s’oriente vers l’électrification, et pour de très bonnes raisons, Sasha Selipanov croit fermement que l’intemporalité de ses voitures permettra non seulement de rester pertinentes, mais aussi de continuer à trouver une place dans les collections des passionnés de voitures. Si les marques recourent à l’art pour mieux affirmer leur valeur symbolique, ne devraient-elles pas élever le consommateur par cet art même ? Autre grande philosophie à débattre… Depuis des décennies, et notamment à partir des années 1960, quand le peintre Andy Warhol utilisait Campbell dans ses œuvres, marques et art se sont alliés à des fins de valorisation pour les unes, de notoriété et de gain financier pour les autres. Bien avant, Henri de Toulouse-Lautrec pour le Moulin Rouge, Alfons Mucha pour la bière de la Meuse ou le papier à cigarette Job, ont inscrit dans la publicité cette possible union, a priori antinomique, qui pose question. Quels sont les réels apports pour les marques et leur communication, pour l’artiste et son œuvre ? Détournée elle est réappropriée par le marketing et pour le consommateur, qui reçoit, en un échange mercantile, un reader digest de culture ? La consommation est en soi basée sur un échange non gratuit, qui engage la création de valeur matérielle et immatérielle. Gain en réputation, en fidélisation, en préférence et attachement des clients, en information sur leurs pratiques, le marketing joue ses cartes de séduction en augmentant la désirabilité des marques.
La tâche est devenue difficile, car d’une consommation de masse destinée à satisfaire le plus grand nombre, nous sommes passés à une adresse plus individualisée et à la nécessité de prendre en compte la part aspirationnelle qui sommeille en chaque individu/consommateur. À cette quête de différenciation et de reconnaissance, les marques ont répondu ou tenté de répondre par des offres plus sophistiquées et plus en adéquation avec les besoins et désirs de chacun. Un véritable travail de résilience pour celles qui ont été chahutées, remises en cause, concurrencées, boudées, interpelées… Imagination, intelligence et quête de sens ont été déployés pour qu’elles deviennent plus “généreuses” et offrent, comme il est dit dans le vocabulaire marketing, plus d’enchantement… Le recours à la production artistique s’est imposé à la fois comme une opportunité, une évidence et une nécessité. Les enjeux et les bénéfices souhaités par les marques peuvent en être rapidement listés ici : pertinence, audace, pour provoquer l’étonnement, la surprise, le désir ; polarisation sur l’humain, ses ancrages, sa mémoire, ses valeurs, voire sa spiritualité ; stimulation par le sensoriel et l’émotion esthétique ; affirmation d’un engagement autre que consumériste, par des partenariats culturels et artistiques plus altruistes ; crédibilisation d’un positionnement… Mais ces enjeux ne concernent-il pas aussi l’univers du luxe, dont les fondements subsistent malgré l’évolution de ses critères ?
Notamment un rapport au temps spécifique, entre intemporalité et ancrage historique et culturel, présent augmenté par des futurs possibles… L’audace de la création, l’unicité, le choc esthétique et émotionnel… Hermès est un exemple de ce rapprochement entre luxe et culture, avec sa fondation des arts plastiques ouverte à la diversité des créations contemporaines. Elle a pour vocation d’accompagner celles et ceux dont les savoir faire créatifs éclairent notre vision du monde, le mettent en débat et fondent les bases d’une culture commune… Savoir-faire et vision, partagés par les créateurs et la marque, qui légitime, dans la cohérence, sa propre créativité. Le renforcement de ce positionnement par une valorisation artistique la fait tendre vers l’universel, et offre aux artistes un lieu d’expression et de promotion. Le recours à l’art est une manière pour les marques de rehausser leur valeur symbolique et de réaffirmer leur suprématie, par l’élaboration de signes eux-mêmes hissés au rang de création artistique ! Elles expriment ainsi leur nécessité de puiser dans leurs sources et lieux de nourrissage de quoi toucher au plus haut point des consommateurs de plus en plus désabusés. Mais la question peut se poser d’une démocratisation de l’art qui massifie son expression par sa récupération consommatoire, et incite l’artiste à une fonction de reproduction parfois non décidée. (Il y a prescription pour Vermeer et sa belle Laitière)… Cette stratégie d’alliance artistique cache aussi un déficit créatif des marques.
Elles font un pas de côté, ou vers le haut, s’échappant par facilité de ce pour quoi elles sont faites, de leur véritable territoire d’expression et de leur propre culture. Elles risquent cependant de promouvoir en retour une consommation intéressée de l’art, en proposant aux individus des produits et des messages qui nourrissent leurs achats de valeur artistique ajoutée, au risque de confondre l’art, voire le remplacer, avec des récupérations artistiques massifiées. Et qu’en est-il des artistes concernés ? Depuis des décennies, ils utilisent l’univers de la consommation pour s’en inspirer ou la dénoncer. Le pop art, les sculptures d’Arman, les compressions de César, voire les personnages obèses de Fernando Botero, utilisent pour les uns la reproduction par l’industrialisation et pour d’autres l’hyper-monstration comme illustration de la quantification excessive de produits de consommation aux effets souvent délétères. Cet usage par les artistes de l’univers consommatoire, qui à la fois s’y appuient et s’en enrichissent, est certes source de notoriété, mais comporte un risque non négligeable de noyer la production artistique dans sa propre massification, de la banaliser, de lui faire perdre son âme, son unicité, de la réduire à sa fonction de faire-valoir et de signifier, en soi, l’inéluctable force d’appropriation du maelstrom consumériste. Des artistes et des designers ont cependant exécuté des pièces dont la singularité et la cohérence avec les marques prescriptrices apportent aux uns et aux autres des bénéfices d’image incontestables.
Les flaconnages de Nina Ricci par Élisabeth Garouste et Mattia Bonetti en sont un des exemples. Mais qu’en est-il de l’art numérique, qui est, selon la formule d’Abdel Bounane, président et cofondateur de Bright, “la forme d’art qui nous permet d’envisager le plus sensiblement les enjeux qui vont façonner le monde de demain : la place des algorithmes, des data, la neutralité du net, la bioéthique, l’intelligence artificielle”… Le rôle citoyen et politique de l’artiste numérique est primordial puisque les enjeux du XXIe siècle seront de plus en plus numériques. Cette appropriation créative du numérique, pour en extraire une production artistique, renverse la donne de l’universalisme et revalorise la notion de démocratisation en en facilitant l’accès par l’implication des publics. L’artiste et l’outil numérique s’allient dans une co-création dont il faudra suivre les développements. Par ces croisements des mondes physiques et virtuels, « nous allons être immergés dans un monde esthético-informationnel, qui sera potentiellement présent en permanence et qui va personnaliser notre vision du monde. Google Deepdream illustre cette tendance, casse les codes de l’esthétisme et crée des images dont le fantastique puise aux sources de notre inconscient. Et le consommateur dans tout ça ? Polymorphe, il puise dans l’opportunisme et l’opportunité, dans la recherche de plaisir déconnectée du consumérisme et dans une consommation qui apporte du “plus”, matériel et immatériel, et du “mieux”.
Il intègre de ce fait la montée esthétisante des packagings et la signature des grands chefs cuisiniers sans forcément vouloir en payer le prix ; la communication de ses produits aux emprunts artistiques (Mondrian pour Studio Line) sans forcément le savoir ; il conjugue les reproductions de Monet sur ses sets de table à l’interminable file d’attente d’une exposition médiatique. Il consomme de ce fait, consciemment ou non, des morceaux plus ou moins bien reproduits et distribués de formes d’art servies par des marques, dont certaines s’autoproclament par ce biais plus puissantes que la puissance artistique et culturelle. Apple et ses bâches géantes sur la façade d’un hôtel particulier parisien ou Coca-Cola sur le palais des Doges à Venise n’ont pas hésité ! Mais qu’est-ce que l’art, dont les multiples formes, dérivations et dérives, abreuvent aujourd’hui notre civilisation consumériste en mal de valeurs et de sens, s’il ne se confronte pas à la façon dont ses destinataires le reçoivent ? Sa présence aux côtés des marques ne devrait-elle pas s’accompagner d’une réflexion sur ses effets, et, de même que le travail du luxe doit être connu et reconnu par ses acheteurs, une imprégnation pédagogico-artistique ne permettrait-elle pas de quitter les habits de consommateur pour endosser ceux de l’amateur, pour faire bel usage, émotionnel, spirituel, de ces fragments aspirationnels. Sans aller jusqu’à une re-sacralisation de l’objet, de la trace artistique, du moins savoir y reconnaître une différence signifiante d’avec le commun…
Faut-il savoir affûter un regard critique, se motiver pour aller plus avant. Car c’est bien cet amateur qui aura pour charge d’accueillir l’offre et de l’honorer par un prix de reconnaissance émotionnel et temporel… Connu pour son expertise en matière de design, Sasha Selipanov, fondateur de Hardline 27 et ancien responsable du design chez Koenigsegg, s’est entretenu sur sa dernière entreprise et les forces qui animent l’avenir du design automobile. En quittant Koenigsegg en mars 2022, Selipanov est entré dans une nouvelle phase, animé par le désir d’explorer de nouvelles frontières dans l’industrie automobile. Cette nouvelle entreprise découle de l’engagement de Selipanov à combler une lacune du marché, ce qui a conduit à la création de son studio innovant : Hardline27. Avant d’être annoncée le 3 août de l’année dernière, l’équipe de Hardline27 a travaillé activement sur divers projets, collaborant non seulement avec des OEM établis, mais aussi avec des start-ups et des entreprises technologiques. Sacha Selipanov apporte plus de deux décennies d’expérience à la table et a récemment été reconnu comme un ancien combattant dans le domaine. Après avoir obtenu son diplôme de l’Art Center College of Design en 2005, il a commencé un voyage d’initiation avec le groupe Volkswagen, en commençant en tant que jeune designer et en travaillant finalement sur des marques emblématiques comme Lamborghini et Bugatti. Son rôle s’est étendu à la supervision du design extérieur de Bugatti.
Cela y compris des projets comme la Vision Gran Turismo et la Bugatti Chiron. Cependant, son parcours n’a pas été simple. Après avoir réalisé très tôt que pour vraiment exceller sur le plan créatif, il a élargi ses compétences au-delà de l’esquisse pour inclure la modélisation 3D, l’ingénierie et les aspects commerciaux. Après avoir quitté le groupe Volkswagen, il a rejoint Genesis où il a dirigé le processus de conception de la voiture d’exposition Essentia. Sa passion pour le design de voitures de sport l’a conduit chez Koenigsegg en 2019, où il a occupé le poste de responsable du design. À Koenigsegg, une amitié étroite avec Christian l’a inspiré à se lancer dans l’entrepreneuriat. C’est ainsi qu’est née la création de Hardline27, un cabinet de conseil en design. D’abord à Berlin, tout s’est ensuite étendu à Los Angeles, où il a conservé deux sociétés sœurs. La première année s’est avérée fructueuse, opérant un peu furtivement, et il a décidé d’établir une présence en Californie en raison de sa clientèle pour les services de conception. Il a gardé le secret pendant une longue période après son départ de l’industrie en 2022. De plus, l’idée de créer sa propre entreprise était quelque chose qu’il avait en tête. Plusieurs facteurs ont influencé le moment de l’annonce de sa nouvelle entreprise. Tout d’abord, il voulait s’assurer que l’entreprise était solide avant de faire des annonces à l’industrie dans son ensemble. Cela lui a permis de prendre de l’élan et de la confiance.
De plus, le déclenchement malheureux de la guerre en Ukraine a affecté son humeur, et il n’était pas très à l’aise en ce qui concerne les nouvelles annonces créatives et le fait de dire aux gars de jeter un coup d’œil à cette nouvelle entreprise passionnante sur laquelle il travaillait. Il a reporté l’annonce jusqu’à un moment approprié, choisissant finalement la Monterey Car Week l’année dernière. La décision de quitter Genesis l’a amené à choisir entre Koenigsegg et la création de sa propre entreprise, l’expérience avec Koenigsegg a renforcé son désir d’indépendance. Inspiré par l’approche libre de pensée de Christian Koenigsegg, il a décidé de poursuivre son rêve de créer sa propre entreprise, poussé par son état d’esprit anticonformiste de longue date. Le nom “Hardline27” vient de sa partenaire commerciale et épouse, Inna Selipanov, qui a toujours fourni d’excellents noms pour divers produits et projets. Elle supervise les aspects de marque et de marketing de l’entreprise. Hardline symbolise une rupture avec la créativité arbitraire et aléatoire. Contrairement à la notion d’écarter les limites et de penser librement, il faut obtenir de bons résultats en établissant des paramètres clairs. Dans son approche des projets, il définit des limites directrices, en tenant compte de facteurs tels que la performance, le confort, le coût et les contraintes esthétiques. Cette approche conduit parfois à des discussions animées avec ses collègues qui peuvent avoir des préférences de design plus axées sur la mode.
Le chiffre “27” a une signification personnelle. Cela date de sa fascination précoce pour les voitures, en particulier une voiture rouge avec le numéro 27 dessus. Les voitures portant ce numéro l’ont toujours fasciné. L’inclusion du chiffre 27 ajoute selon lui de la chaleur, une touche de philosophie et de passion, reflétant ses racines et ce qui m’a initialement captivé dans le monde de l’automobile. Sa passion pour les voitures de sport et les véhicules de haute performance a été une constante tout au long de sa vie. Dès son plus jeune âge, il a été attiré par les choses d’une qualité extrême, ce qui s’étend à ses goûts musicaux et à divers autres intérêts. Ce qui le fascine le plus, ce sont les projets qui ont une longueur d’avance, ceux qui repoussent les limites et redéfinissent les normes, comme l’emblématique Ford GT40, vainqueur du Mans. L’audace, le courage et la passion investis dans de tels projets où des individus visent à défier les lois de la physique, l’ont toujours fasciné. En vieillissant, il en est venu à apprécier la nature authentique des projets de voitures de sport, parmi quelques autres. Contrairement aux projets visant un lifting marketing, les voitures de sport ont des objectifs tangibles et réels. Les mesures de performance, les considérations de poids, l’aérodynamique et les aspects structurels fournissent une base solide pour des arguments et des décisions créatifs. C’est cette dépendance à des faits scientifiques concrets et à des contraintes physiques, plutôt qu’à de simples considérations commerciales…
Celles-ci l’attirent dans la conception de voitures de sport. Ce qui le passionne particulièrement dans le monde des voitures de sport, c’est la capacité d’utiliser ces principes directeurs, ancrés dans la logique et les contraintes du monde réel, dans le processus de création. Bien que tous les projets n’aient pas besoin d’établir des records au tour, les contraintes fondamentales et logiques de la conception des voitures de sport peuvent être étendues à d’autres produits. Qu’il s’agisse d’améliorer l’expérience utilisateur, d’améliorer la sécurité ou d’optimiser l’efficacité dans différents contextes, cette approche ajoute une dimension sobre et légèrement scientifique au design, apportant une perspective réaliste et efficace à diverses entreprises créatives. Au fil de ses projets avec Bugatti, Genesis, Lamborghini et Koenigsegg, son travail est devenu entièrement numérique, adoptant une approche de conception plus rationnelle et sobre. Cela peut sembler non conventionnel, mais cela s’est avéré efficace. Avec l’intégration croissante des outils numériques dans le processus de conception, il y a un changement dans la façon dont on aborde les méthodes traditionnelles. Les constructeurs automobiles traditionnels hésitent souvent à adopter des approches plus efficaces en raison de considérations et de respect pour les employés existants. Cependant, pour les nouvelles entreprises qui partent de zéro, l’utilisation d’outils modernes dans divers départements, y compris l’ingénierie et la conception.
Cela offre un avantage concurrentiel. L’élimination des processus obsolètes, la rationalisation des services et l’adoption d’outils modernes peuvent permettre de réaliser des économies substantielles et d’accélérer le développement de produits de meilleure qualité… L’état actuel de la technologie autonome n’est pas encore à un niveau permettant de prendre en charge un véhicule autonome entièrement dédié à une utilisation immédiate sur la route. Alors qu’il y aura de plus en plus de degrés d’autonomie intégrés dans les voitures conventionnelles, la vision de passagers se faisant face dans une voiture numérique équipée d’un feu de joie n’est pas encore réalisable pour de vrais projets. Dans le passé, des maisons de design comme Bertone et Giugiaro étaient emblématiques, créant des looks légendaires principalement centrés sur leur vision unique du design. À l’époque, les équipementiers approchaient les maisons de design pour demander une Giugiaro, et c’est ce qu’ils recevaient, une voiture avec l’ADN de design distinct de Giugiaro, avec le nom Giugiaro en bonne place. Aujourd’hui, le paysage est complètement différent. Les entreprises reconnaissent la valeur de la différenciation du design pour leur succès commercial. Contrairement au passé, où de nombreux clients souhaitaient la vision d’un designer spécifique, les constructeurs automobiles d’aujourd’hui recherchent un ADN de design unique rien que pour eux-mêmes.
Lancer un produit sur le marché sans une histoire convaincante, sans comprendre son alignement avec le marché, sa position par rapport aux concurrents, peut avoir un impact sur son succès. Le paysage de la marque, le message, le ton de la voix, la narration visuelle, l’identité de l’entreprise, le logo et la stratégie de dévoilement jouent tous un rôle crucial dans la détermination du destin d’un produit, les projets réussis sont souvent le résultat d’une collaboration harmonieuse entre l’image de marque, l’ingénierie, le marketing, le design et les ventes, une approche globale à 360 degrés. Si l’on considère qu’un véhicule moyen pèse environ 2 tonnes, ce n’est pas seulement une question de masse, il représente l’aboutissement des efforts de diverses disciplines, sciences, ingénierie, art et contraintes commerciales. C’est essentiellement le produit phare de notre civilisation, une production raffinée qui a nécessité des ressources et des efforts substantiels de la part de notre planète. Les liens de l’automobile avec la mode, contredisent les principes de durabilité et vont à l’encontre de l’idée de consommation responsable. Les produits, en particulier les plus importants comme les voitures, devraient durer plus longtemps. Le remplacement d’un véhicule devrait être un véritable défi, déclenché par un changement fondamental de style de vie, comme l’arrivée d’un nouveau membre de la famille. Il est presque irrespectueux de voir ces précieux véhicules être mis au rebut et détruits quelques années seulement après leurs débuts.
Compte tenu de l’immense effort investi dans leur création. À bien des égards, les outils d’IA imitent ce que font les concepteurs. Ils recherchent l’inspiration dans de vastes ensembles de données, les analysent et génèrent des résultats inspirés par le vaste apprentissage qu’ils ont fait. Cela ressemble un peu à la routine d’un designer dans une entreprise automobile qui passe du temps à faire défiler diverses sources, à absorber des informations et à les traduire sur papier pendant le processus de création. La réponse se trouve dans l’aspect unique et irremplaçable de la créativité humaine. Ces moments sont rares dans la carrière d’un designer, mais ils sont la force motrice d’idées vraiment révolutionnaires. Bien que l’IA puisse contribuer à optimiser certains aspects tels que le poids et les performances dans le processus de conception, elle ne peut pas remplacer le lien profond avec l’inspiration qu’un humain éprouve. La créativité, par essence, reste une qualité unique et profondément humaine que les machines ne peuvent pas reproduire… Du moins pour l’instant…