Mustang $helby 1965/1966…
Le 17 avril 1964 marque un tournant dans l’histoire de l’industrie automobile ; ce jour-là, Ford, second constructeur mondial, présente sa Mustang à la foire mondiale de New York. Ford a en quelque sorte réinventé l’automobile pour les jeunes Américains issus du baby boom, blasés des grosses voitures lourdes et massives.
Lee Iacocca, alors directeur général de Ford, avait depuis longtemps la vision d’une petite voiture sportive qui envahirait les rues (comme la Coccinelle de Volkswagen en Europe). Au lieu de créer une énième version d’une voiture déjà existante, pour économiser les coûts de développement, Ford met sur roues un coupé deux places directement basé sur la Ford Falcon familiale, Cette automobile basique nommée Mustang (la version officielle du nom de Mustang viendrait de John Najjar, concepteur de la Mustang prototype I, qui aurait proposé ce nom tiré de l’avion P-51 Mustang dont il était fan), disponible en coupé hardtop ou en cabriolet (la carrosserie fastback apparaît en 1965), est alors dotée en série d’un moteur 6 cylindres en ligne de 2,8 L ou, en option, soit d’un V8 de 260 ci (4,2 L) ou d’un 289 ci (4,7 L).
Il y a du chrome en abondance et de nombreuses options sont disponibles pour agrémenter la voiture, ce qui rend la Mustang attrayante pour les jeunes. 22 000 unités sont écoulées le premier jour de sa sortie ! Ford entourloupé le monde et l’histoire, en ce sens que le modèle 65 démarre officiellement le 17 avril 1964… et que toutes les Mustang depuis ce jour jusque fin 1965, sont estampillées modèle 65…, ce sont les collectionneurs qui nommèrent la Mustang 64 1/2 réalisant les caractéristiques différentes des voitures d’avril au 13 juillet 64. La mustang écrase les scores de la Plymouth Barracuda que la firme du groupe Chrysler se targuait d’avoir sorti deux semaines plus tôt, un vrai mythe est né !
En 1965 Ford éprouve le besoin de dynamiser l’image sportive de sa Mustang et afin d’y parvenir, s’octroie les sévices de Carroll Shelby, repéré par la direction de Ford quelques années auparavant grâce à la métamorphose de la pataude AC Bristol en bestiale AC Cobra par l’emploi du V8 Ford…, qui pouvait mieux faire l’affaire ?
Carroll Shelby a fort à faire afin de modifier la Mustang de série en sportive redoutable, aussi bien en ligne droite qu’en courbe, car selon la réglementation de la SSCA, on ne peut modifier que soit le moteur, soit le chassis.
Etant donné que Ford propose un V8 289 ci sur ses Mustang, un peu de préparation suffit à le libérer complètement, tandis que Shelby s’intéresse au plus désastreux de l’ensemble (la base Ford Falcon familiale), afin d’y consacrer les plus grosses modifications : le chassis !
La Mustang de série héritant d’un train arrière assez ingrat composé d’un simple pont rigide et de suspensions à lames de ressorts, le train avant n’étant pas mieux loti avec son gros débattement et sa suspension trés souple, il lui faut donc retoucher l’ensemble afin de gagner en précision.
Le train avant pour commencer : il est rabaissé en modifiant le point d’ancrage du triangle supérieur, de nouveaux ressorts, plus fermes remplacent ceux de série tandis que les amortisseurs sont échangés pour des Koni réglables !
Afin de rigidifier l’ensemble, une barre stabilisatrice plus grosse est adoptée tandis que sous le capot est mise en place la fameuse entretoise en “V” d’exportation, constituée d’une seule pièce contrairement à l’entretoise livrée d’origine avec les Mustang destinées au marché américain qui elle est constituée de deux pièces.
L’entretoise d’exportation est bien plus rigide et se marie donc à merveille avec le tempérament de la Shelby. Shelby ajoute en plus une barre dite “barre monte-carlo”, cette fois-ci droite, parcourant toute la largeur du capot, fixée de chaque côté au niveau de la chandelle d’amortisseur. Le train arrière n’est pas épargné dans la course, tout comme pour l’avant des Koni réglables ainsi qu’un jeu de câbles et de barres de traction afin de limiter les mouvements du pont.
Moins … c’est mieux !
C’est le serment de Carroll Shelby, et il n’a pas tort ! Comment gagner en agilité et en performance par la manière la plus simple ? Enlever à la demoiselle des kilos superflus ! Shelby commence par l’habitacle : aucune touche de luxe particulière, le même tableau de bord que la Mustang de série avec son gros compteur kilométrique plat, pas de climatisation, pas de de luxe superflu et pas d’autoradio ! On est pas là dans une voiture de luxe, mais dans une voiture de sport, qu’on se le dise ! D’ailleurs il ne faut pas perdre de temps à chercher une éventuelle banquette arrière, Carroll Shelby l’à supprimée et à sa place une roue de secours.
Au niveau de l’extérieur le capot acier est remplacé par un capot en fibre de verre, équipé d’une prise d’air débouchant juste au niveau du filtre à air et permettant d’encore mieux gaver le carburateur, ce capot est équipé de deux attaches de sécurité.
Le capot en fibre de verre ainsi que l’ensemble des restrictions d’équipement permettent de gagner facilement une centaine de kilos !
Le chassis n’est pas le seul à recevoir des modifications, il en va de même pour la mécanique. Tout d’abord le 289, selon le réglement de la SSCA, on en peut toucher soit au chassis soit au moteur, mais pas aux deux. Ce n’est pas un problème pour un cow-boy sans foi ni loi comme Carroll Shelby…, le 289 ci est équipé d’origine de pièces High-perf et sort 271 chevaux, il suffit alors de le libérer un peu plus pour grapiller plus ! Pas vu pas pris…
Shelby commence par la ligne d’échappement : collecteurs Tri-Y 4 en 1 menant directement à de gros silencieux “Glasspack Mufflers” débouchant directement devant les roues arrières ! Comment faire plus court et plus libéré ?
Au niveau de l’admission le carburateur d’origine est remplacé par un Holley monté sur un collecteur d’admission spécial en aluminium. Pour compléter le tout et ainsi éviter de voir le 289 partir en fumée à la première accélération, un carter d’huile de grande capacité compartimenté remplace celui d’origine !
Ces quelques modifications somme toute rudimentaires permettent de faire sortir 306 chevaux !
Afin d’exploiter cette cavalerie vociférante, les GT 350 recoivent de série une boîte de vitesse manuelle à 4 rapports rapprochés : la Borg Warner T10…, le pont est un Detroit locker de 9 pouces au rapport de 3.89:1…, le freinage est confié à des freins à disques à l’avant tandis que les tambours d’origine à l’arrière sont changés-troqués contre des tambours de Ford Fairlane !
Il n’est pas donné à tout le monde de rouler en Shelby Mustang. Pour ceux qui ne sont pas effrayés par les performances de la machine, il reste deux barrières à franchir : le prix (4.547 $) mais aussi le nombre d’exemplaires produits : 560 !
Pour ce prix vous avez le droit de rouler dans une automobile performante, prête à enfumer n’importe quelle auto à la course des feux de trafic, mais aussi très rude avec ses occupants ! Il ne faut pas oublier que la GT 350 est tout sauf un jouet de bon père de famille…, l’absence de tout confort et de banquette arrière vous le fait vite rappeller : la GT 350 est réservée uniquement aux amateurs de vraies sportives ! Et les amateurs sont servis !
Au niveau du look extérieur, on peut facilement reconnaître le serpent venimeux à sa calandre simplifiée : plus de corrall ni de cheval de calandre et encore moins de barres chromées horizontales…, il ne reste plus que la grille de calandre en nid d’abeille avec tout à droite, du côté conducteur un insigne pour toute dénomination !
Plus d’insignes d’ailes, plus de logo 289 à l’extrémité de ces dernières, plus de lettrage Ford à l’extrémité du capot et plus de fause prises d’air d’ailes arrières : moins, c’est mieux ! En revanche pour le prix de 4.547 $, on a le droit au détail qui permet d’identifier une Shelby au premier coup d’oeil : les bandes de décoration de bas de caisse !
Pas de luxe du côté des jantes, de simples jantes en tôles peintes couleur argent équipent la GT 350, chaussées de performants Goodyear Blue Dot en 7.75×15. La batterie est déplacée dans le coffre pour les 324 premiers exemplaires, quelques-uns reçoivent de magnifiques caches culbuteurs Cobra en aluminium, mais la majorité sont de simples caches en tôle peinte !
La seule couleur de carrosserie disponible pour 1965 est le wimbledon white !
Du côté de l’habitacle, l’intérieur noir est standard, mais quelques touches Shelby viennent égayer l’équipement simpliste de la GT 350 : tout d’abord le volant, remplacé par un volant Shelby en bois et acier avec monogramme GT 350 en son centre…, puis le combiné d’instruments supplémentaire, vissé en plein milieu de la planche de bord.
Les options sont peu nombreuses, il y a tout d’abord les fameuse bandes “le Mans”, de couleur bleue, ces bandes parcourent la voiture de long en long et forment le signe distinctif des Shelby ! L’autre option sont les jantes Cragar conçues spécialement pour Carroll Shelby…
Suite à la demande de Ford d’élaborer un modèle moins marginal que la GT350 de 1965, Carroll Shelby doit revoir sa copie pour proposer une toute nouvelle mouture de la plus piquante des Mustang, mais cette fois-ci, en plus civilisée et accueillante !
Un souhait : élargir la clientèle
Ford souhaite que la GT 350 soit diffusée à plus d’exemplaires afin que la voiture sorte de son tempérament de voiture presque exclusive… et pour prouver que le savoir faire de Ford est bien là. De leur côté les clients réclament plus de différenciation car il est vrai que la GT 350 de 1965 se démarque peu des Mustang de série.
Carroll Shelby prend note de tout ces arguments et met sur roues une nouvelle version de sa GT 350 qui répond aux attentes de tout le monde : une GT 350 moins coûteuse à produire, avec des signes extérieurs qui ne trompent personne sur la marchandise !
Il n’y a pas de miracles, si l’on souhaite alléger les coûts de production, il faut aussi alléger la GT 350 !
Mais pour cette fois, pas d’allègement sur le plan du poids, mais plutôt sur le prix des modifications ! Exit le rabaissement du train avant, le pont de 9 pouces à différentiel à glissement limité (il sera tout de même proposé en option), les barres de traction arrière (remplacées par des barres de traction moins chères) et les amortisseurs Koni (proposés en option) !
Afin de mieux civiliser la GT 350 et que plus de deux personnes puissent profiter des performances venimeuses de la voiture, la banquette arrière fait son grand retour !
Le moteur lui en revanche ne subit aucune restriction, il demeure donc le même qu’en 1965 avec son collecteur d’admission alu, son gros carbu de 715 et son carter d’huile à grande capacité. Le seul détail qui change sont les échappements basiques, remplacés par une tubulure débouchant à ‘arrière de l’auto.
L’option la plus intéressante pour ce moteur disponible pour 1966 est l’adjonction (moyennant quelques billets) d’un compresseur Paxton, une véritable boîte à vitamine car il fait s’envoler la puissance aux alentour des 400 chevaux, faisant de la Shelby déjà venimeuse un jouet pour adultes à ne pas mettre entre toutes les mains !
5 couleurs sont maintenant disponibles au total. Les bandes de bas de caisse sont redessinées, légèrement plus fine qu’en 1965. Ce qui se voit le plus est la prise d’air d’aile arrière servant à refroidir les tambours arrière de 10 pouces, elle est fonctionnelle à l’instar des appendices chromés de la Mustang de série qui sont eux, uniquement là à titre esthétique.
Autre équipement qui différencie nettement les GT 350 des Mustang de série : la prise d’air de custode remplacée par une vitre, équipement qui en dehors de différencier de manière exclusive la GT 350 permet aussi de supprimer l’angle mort 3/4 arrière !
La calandre, elle, suit l’évolution de la Mustang de série, toujours débarrassée du cheval et de son corral, elle est pour 1966 composée de lamelles verticales avec comme pour 1965 l’apposition d’un monogramme.
Les jantes de 15 pouces sont supprimées, à leur place des jantes Magnum 500 de 14 pouces, mais avec la possibilité d’opter pour les jantes Shelby exclusives de 15 pouces fabriquées par Cragar ! Toujours au chapitre des options, la possibilité pour 1966 d’opter pour une boîte automatique de type C4 à 3 rapports, la Borg Warner T10 équipant les GT350 de 1965 était toujours proposée.
Ainsi civilisée, la Shelby Mustang se vend mieux en 1966. 1966 marque aussi l’arrivée de deux “séries spéciales” au sein de la flotte des Shelby, il s’agit de la GT 350 H et de a GT 350 convertible !
Cette année là Hertz souhaite proposer à ses clients de louer une voiture sportive ! C’est ainsi que Carroll Shelby, fait affaire avec Hertz en leur vendant 1000 GT 350 !
Ces voitures sont pour l’occasion spécialement dotées : autoradio de série, jantes magnum 500 avec center caps spécial aux couleurs de Hertz, bandes latérales et bandes “le mans” peintes en doré, inscription GT 350H (H pour “Hertz”) au niveau des bandes latérales de bas de caisse.
Arrivé en fin de millésime, Carroll Shelby se décide à produire 6 convertibles GT 350, le but n’étant pas de les commercialiser mais d’en faire profiter son entourage et accessoirement lui même ! Les voitures sont spécialement dotées, avec la climatisation de série et une boîte de vitesse automatique ! Le reste de l’équipement est conforme à la GT 350 de série avec un détail toutefois, si les prises d’air d’aile arrière sont toujours présentes, elles sont pour le coup factices : l’espace de rangement de la capote empêchant d’installer les conduits d’air !
Manque de temps oblige, seuls 4 exemplaires voient le jour, mais de ces 4 exemplaires, Carroll Shelby n’en sent pas le goût : parti pendant une longue période en europe, à son retour, les 4 cabriolets ont disparu, vendus d’occasion comme l’impose la règle instaurée par Carroll Shelby lui même : “toute voiture de service doit être vendue au bout de 6 mois maximum afin de ne pas trop dévaluer le prix de la voiture” !
Quantité de fausses Shelby sont construites aux USA depuis que les valeurs financières dépassent les 100.000 $ par exemplaire en état moyen. La soif de l’or a poussé quantité de gens à réaliser des copies plus ou moins conformes au départ de Mustang basiques et il existe quelques officines qui vendent des kits de carrosseries “Shelby” aux particuliers désireux de paraître, certains s’évertuant à truquer les cartes grises pour réaliser de plantureux profits, malgré que le Shelby Registry regroupe toute l’histoire de chaque vrai numéro de vrais châssis Shelby…
Pour parfaire l’arnaque, une histoire totalement bidon attribue à Carroll Shelby la paternité de la naissance de 12 Shelby convertibles aux standards de 1966…, affirmant sans rire que Shelby aurait racheté 12 Shelby GT350, puis après démontage complet et remise en peinture, que ces convertibles ont été remontés avec des pièces de reproduction Shelby comme à l’origine…
Cette histoire couvre une arnaque planétaire visant 12 idiots parvenus-friqués en quète de notoriété et de sur-profits potentiels…, c’est en réalité un carrossier-escroc qui a réalisé cela lui-même durant plusieurs années, au bout desquelles il a commencé à avoir des difficultés d’approvisionnement de pièces et des problèmes financiers ! Au final, 12 fausses Shelby GT350 convertibles ont été fabriquées, compteurs remis à zéro, et fausse certification de Carroll Shelby à l’appui pour soi-disant en montrer le caractère original !
1967 va marquer un changement radical de la Mustang Shelby…, cette dernière va non seulement offrir un design exclusif mais aussi sacrifier l’aspect sportif pour un confort moins rationné. C’est aussi l’année de l’arrivée des big blocks… Je vous conterai la suite sur le panneau suivant…
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