1966 Ford Thunderbird Cabriolet 428 Q-Code
Il y a des histoires automobiles qu’on ne raconte pas, des détails qui “passent à l’as”, soit parce que les journalistes sont incultes (c’est souvent le cas, de plus en plus…) soit parce qu’il n’est pas bienséant de raconter les “histoires de cuisine”, (comme on dit), les véritables évènements qui sont souvent remplacés par des “faits légendaires” totalement (ou partiellement) inventés qui cachent la vérité des choses…
Cette Ford Thunderbird de 1966 a été commandée en aout 1965 neuve via Taiwan Motor Company Ltd. par un major de l’armée américaine qui était stationné en Asie à l’époque. La voiture a été assemblée à l’usine de Wixom, dans le Michigan à partir du 14 septembre 1965, terminée en octobre 1965 comme modèle 1966, livrée en novembre 1965 à Lucas Motor Sales de Burlington, dans le New Jersey, où le major a pris livraison de la voiture à son retour aux États-Unis fin 1965 immatriculée comme modèle 1966.
Pour produire, vendre à tout prix, l’industrie automobile va souvent jusqu’à renoncer purement et simplement à proposer des produits réellement performants, au profit de “produits affectés”, des “automobiles simulacres”, des produits inefficients et contre nature, uniquement dictés par une démarche marketing, sachant que leurs clients à 99% ne font pas la différenciation entre la “valeur d’usage” et la “valeur de signe”...
Dans les mid’sixties aux USA on était loin, de cette prise de conscience par la population, pour “réveiller” l’esprit critique du consommateur moye, il aurait fallu une crise beaucoup plus grave que les précédentes, les marchands de rêves avaient donc encore beaucoup de beaux jours devant eux. La vogue des Muscle-cars aux USA est une illustration parfaite de cette dérive marketing qui finit par aboutir à des produits “inutiles et sans efficacité” dans le cadre d’un endoctrinement publicitaire destiné à flatter une clientèle et de créer un besoin totalement déconnecté de la réalité.
Ces Muscle-cars, n’avaient en réalité aucunes qualités vraiment réelles et abouties ! Routières médiocres, bruyantes et inconfortables, elles n’offraient pas les qualités d’authentiques voitures sportives (loin s’en faut) et, cerise sur le gâteau, elles étaient encombrantes, d’une habitabilité faiblarde, assez malaisées à manœuvrer en ville, et leurs pneumatiques (entre autres) en faisaient de piètres voitures “de course” !
Mauvaises, sur tous les plans, donc, ou vraiment médiocres, dans tous les cas… elles n’avaient d’autre raison d’être que flatter les égos par procuration à grands renforts d’images pieuses (tel Steve McQueen en Mustang) qui “transportaient” des valeurs par le biais de signes asociaux, flattant ceux (et celles) qui voulaient afficher une image sportive, sexy, baroudeur et un peu fun… Les Mustang’s se sont ainsi vendues à des millions d’exemplaires, et elles ne servaient à rien d’autre qu’à matérialiser un “besoin” inexistant car créé de toutes pièces par la publicité et le marketing…
En attendant les usines tournaient et le cash entrait à flots dans les caisses (bien utiles, celles-ci) des industriels. C’était le temps de la dispersion des qualités dans une myriades de modèles dont aucun, parmi ceux qui restaient plus où moins accessibles, ne les réunissait pas toutes. C’était le principe commercial de la déception post-achat (bien plus important que la soi-disant règle voulant que le client soit roi : il ne l’était que dans la mesure où il demeurait client, c’est à dire où il n’était pas totalement satisfait mais pouvait le devenir en acquérant la dernière “ultime” version, en attente d’un Nième nouveau modèle forcément beaucoup plus cher !
Quant au segment du luxe. Il avait encore des créneaux pour écouler des véhicules d’exception telles les Ford GT40 “routières”, mais le fait est qu’on en voyait très peu sur les routes ! Quelques quartiers réservés aux milliardaires en hébergeaient quelques-unes, les parkings des compagnies de cinéma Hollywoodiennes en renfermaient quelques-autres, mais dans l’ensemble, dans la partie la plus cultivée de l’hyperbourgeoisie, on était déjà passé à d’autres centres d’intérêts.
C’est d’ailleurs sans doute là une des raisons de la désuétude de la grosse voiture de luxe sportive façon Facel-Véga KK500 et quelques “hors-jeu” comme la Stutz : elle ne correspondaient à aucun type de déplacement qui soit en rapport avec leur taille et leur motorisation. Personne de suffisamment fortuné pour s’offrir ce genre d’engin ne traversait véritablement ni les USA via la “Route 66” (The Mother Road) ni en France sur la Nationale7, à bord de telles voitures.
Les vitesses devenaient limitées, la route devait être partagée avec la plèbe alors que l’avion mettait n’importe quelle ville européenne à moins de deux heures, dans une ambiance bien éloignée des aires d’autoroutes. Dès lors, le champ d’action de ces voitures s’est réduit au trajet entre les palaces cannois et le tapis rouge des marches du palais des festivals. Autant dire qu’un moteur électrique y suffit, c’est d’ailleurs la tendance actuelle.
Qu’il y avait quelques milliardaires russes et chinois pour fantasmer encore sur ces engins, ce n’était que le témoignage de de leur retard culturel sur tous les autres aux yeux des occidentaux, ils faisaient en réalité juste pitié, et on ne devient pas à ce point riche pour inspirer la pitié ! De plus, les Russes se voient actuellement saisir “préventivement” leurs biens sans aucun jugement ni justification autre qu’un caprice hégémonique des USA (qui oublient leurs incessantes guerres et massacres)…
Et les chinois restent chez eux, passant donc à autre chose (le vol spatial, les concerts haut de gamme, les œuvres d’art, le mécénat… et la création des Bricks destinés à supplanter le dollars américain par un contre-pouvoir Chine, Inde, Russie, Amérique du Sud, Iran). Reste que pour les plus nombreux des consommateurs, l’idée qu’on se fait du “grand monde” a suffisamment de décalage horaire sur la réalité pour qu’on puisse encore fantasmer sur ces marques, en se donnant l’impression “d’en être”, alors que ce monde là est depuis un moment passé à autre chose. On peut supposer que ces marques pourront surfer encore quelques temps sur cette vague, avant que tous ensemble, on passe à autre chose.
J’en reviens à la Thunderbird 66… Vendue à un nouveau propriétaire, celui-ci s’est mis en tête de la restaurer ! Les travaux de ce deuxième propriétaire en 2008 ont consisté à décaper l’extérieur et à refaire la voiture dans sa couleur Arcadian Blue telle que peinte en usine, tandis que l’intérieur blanc et bleu a été refait. La puissance provenait toujours du V8 428ci Q-code jumelé à une transmission automatique C6 à trois vitesses, et l’équipement supplémentaire comprenant la capote blanche chaîne stéréo AM / FM et la climatisation R134a… Les roues en acier à finition noire portent des enjoliveurs de marque Thunderbird avec des emblèmes centraux rouges et ont été montées avec des pneus à parois blanches en 2012. Une pièce de rechange est montée dans le coffre et une barre oscillante de 11/8 a été installée. Les flexibles de frein ont également été remplacés.
La voiture a reçu un intérieur en vinyle perlé bleu et blanc avec climatisation Selectaire et un siège conducteur réglable-motorisé de l’usine. L’habitacle a été refait avec de la mousse de siège de remplacement, une sellerie avant et arrière préalablement isolée avec du matériau FatMat, de la moquette, les panneaux des 2 portes et des panneaux de garniture arrière. Le plancher de la voiture a été dépouillé à ce moment-là et recouvert d’une doublure .
Une chaîne stéréo AM /FM avec connectivité iPod a été montée identique à l’usine et le système de climatisation a été converti pour utiliser le réfrigérant R134a. Un volant à deux branches se trouve devant l’instrumentation qui comprend un compteur de vitesse horizontal de 120 mph et quatre jauges/compteurs auxiliaires dans des boîtiers sphériques. Le compteur kilométrique à cinq chiffres indique un peu moins de 77.000 milles, dont environ 300 ont été ajoutés par le propriétaire actuel depuis 2014.
Le V8 428ci Q-code avait été évalué à 345 chevaux à 4 600 tr/min et 462 lb-pi de couple à 2 800 tr/min lorsqu’il était neuf. Le carburateur à quatre barils porte une étiquette estampillée Ford, et d’autres caractéristiques comprennent un système d’allumage MSD, une pompe à eau Edelbrock, un couvercle de purificateur d’air, des couvercles de soupape chromés, des embases shorty revêtues de céramique et des silencieux MagnaFlow.
Les travaux de 2013 et 2014 incluaient la reconstruction du carburateur et le remplacement de la batterie, du réservoir de carburant, de l’unité d’envoi de carburant, du filtre à carburant et des arbres de l’essieu arrière. La puissance est transmise vers l’arrière par une transmission automatique C6 à trois vitesses. L’autocollant de fenêtre indique un prix de détail total d’époque (1966) de 5.771,54 $.
Les télégrammes de Ford joints au dossier de la Thunderbird indiquent que le propriétaire d’origine a reçu un rabais de 18% ainsi qu’un remboursement pour les vitres latérales électriques, qui ont été commandées mais non installées. Les documents de Taiwan Motor Company Ltd (le seul concessionnaire Ford autorisé à Taïwan à l’époque) sont fournis avec une feuille de construction, les documents de vente, une correspondance supplémentaire, la documentation du fabricant, des notes de remise à neuf, des reçus datant de 1966 et une sélection de bordereaux d’immatriculation inclus. La voiture a également reçu une première place lors d’un concours VTCI en Caroline du Sud en 2012… La Thunderbird a été vendue 100.000 US$
En vérité, je n’ai jamais rien compris aux automobiles, je les aime quasi-toutes mais en retour elles me sont ferrailleuses, batailleuses, féroces et pétaradantes, elles ont presque toujours agressé mon existence ! Obnubilé, pourtant, par la fluidité sensuelle et les atours féminins des bolides, j’ai décidé un jour d’entrer dans la bataille, je me suis intégré à la mécanique véloce et guerrière, j’ai appris à dompter sa puissance, je suis entré dans le trafic !
Dévorant jusqu’à l’azur de l’horizon vibratile toutes les lignes droites cernées de bandes blanches, j’ai essayé de dépasser le monde entier, laissant derrière moi des panaches de fumées toxiques, souvenirs ricinés de mes exploits de vitesse. Cheval cabré sur capot écarlate, Jaguar prêt à mordre sur la calandre ou logos divers et abscons, cramponné au volant derrière la calandre du Dieu Neptune aux fanons assassins qui déchirent la route à la vitesse des tombeaux qui s’ouvrent, j’ai défié le rythme cardiaque des chronographes jusqu’à la tachycardie fatale, la sortie de jeu, dans le sang et la peur, pour un sommeil qui n’en finissait plus…
Je me suis réveillé, pourtant, dans un autre temps, de ma vie antérieure, car je ne sais plus ni entendre le vacarme, ni revoir les déchirures d’acier… Bleu profond, telle est ma couleur, pour toujours ! J’ai fixé mon regard sur une autre horloge, celle qui, sur le tableau de bord plaqué de boiseries précieuses, scande un autre tempo, en couvrant de son “tic tac” discret le ralenti d’un moteur qui respire comme on rêve…
Devant moi, la déesse ailée ouvre la route et me protège, le long des autoroutes sombres ou quand le ciel est en colère, lors de mes lancinantes errances routières, autant de voyages vers des lieux que je croyais perdus pour moi… D’avant la chute, je n’ai que des images floues où se mélangent presque toujours des histoires contradictoires, mais je poursuis tout de même mon chemin vers la vérité, en priant qu’elle existe…
Je pars souvent ainsi, à ma propre recherche, et comme disait le poète dans une exégèse de Shakespeare : “Je suis parfois surpris par de fugaces souvenirs qui sont peut être authentiques”… Je reste seul au volant, la route défile sans bruit sur l’écran du pare brise, en tête de proue, les ailes de la spirit of extasy transforment le paysage en abstraction, définitivement !
Les jours , les semaines, les mois qui passent, n’ont plus pour moi la même importance, je n’en ressens plus l’écoulement. L’hémorragie temporelle, pour moi a cessée, frappé par cette cécité angoissante, je vis dans un présent perpétuel, mes souvenirs sont souvent des prédictions. Mon esprit flotte loin du vôtre, je m’éveille loin du vacarme et je cherche plus loin encore, dans chaque soir l’instant de calme qu’il faut à mon regard pour cesser d’observer le monde… Mes nuits sont plus longues que mes jours, éclairées de bleu microsoft !
Sur la toile, j’ai croisé mille âmes, sans rencontrer personne et quand l’épouvante cybernétique des paradis du net m’étreint, je m’assied derrière le volant, et je laisse glisser la Silver Shadow le long des routes bordées de platanes, pour tuer la nuit et attendre un ciel plus clair… Mais, vraiment, je n’ai jamais rien compris aux automobiles ! En revanche je devine qu’elles disparaitront un jour, il aura bien fallu en finir avec ce chaos… Ce sera peut être triste, de voir toutes ces carapaces rouillées et immobiles, ces machines devenues absurdes rouiller sur le bord de la route…
Cette vision d’après demain est encore fragile dans mes “souvenirs du futur”, mais je sais que ces évènement auront lieu sous le l’éclat d’une lumière nouvelle… Ce jour viendra : Un Temps Gigantesque où l’on aura dépassé la vitesse et où l’on oubliera le bruit de la bataille. Parcourant tranquillement le grand labyrinthe d’asphalte déserté par les cloportes d’acier, la reine sera la dernière à rouler, une ultime fois, surplombant de son regard doux et protecteur l’ensemble de la tribu anéantie !
Au sommet de sa calandre les ailes de fée prendront l’ampleur et l’envergure immortelle de la victoire de Samothrace ! Les temps futurs écraseront le passé, sans aucune pitié, les souvenirs du quotidien d’aujourd’hui ne survivront pas aux accidents des guerres et des découvertes à venir. Dans ce nouveau monde, il ne restera plus rien de l’automobile, juste l’image fugitive
2 commentaires
Mon Cher Gatsby,
Une fois de plus, voici un très bel article. Les images permettent au lecteur de s’évader, et les textes ne sont pas en retrait, loin de là, prouvant une fois de plus vos capacités d’analyse et un certain talent poétique !
Pour certaines générations d’européens biberonnées à la télévision depuis leur plus jeune âge et aux images des films de l’oncle Sam, ces automobiles incarnent un rêve inaccessible, car on ne pouvait pas les voir dans la rues, mais elles étaient des éléments de décor du rêve mis en scène à la télévision ! Et vous l’avez souligné, la robe semble plus compter que certaines parties des dessous.
Je crois me souvenir que vous avec possédé un bel exemplaire de Thunderbird rouge restaurée, d’où mes deux questions : est-ce que lorsqu’on finit par posséder ce type d’automobile, elles gardent un pouvoir onirique plus important qu’une production européenne, et est-ce que lorsqu’on en est propriétaire, c’est à dire qu’on paie l’essence, les pneus, l’entretien, qu’on veut ramener l’auto intacte chez soi le soir et qu’on a fini par se lasser de tester les capacités de l’auto, les qualités routières sont aussi catastrophiques qu’on a pu l’écrire ?
Réponse à question 1 : Ces voitures finissent par lasser et deviennent des objets comme un magnifique JukeBox qui s’allume et clignote mais sans plus pouvoir “faire de la musique”… Entre en balance le cout (gigantesque) des maintenances et réparations et l’attrait visuel si on a les moyens de disposer d’un hangar pour les y mettre en exposition perso… Avec le temps, ça fatigue et on se retrouve piégé car pour les vendre il faut les réparer ce qui coute des fortunes. Existent des marchands qui prennent en l’état si vous êtes psychologiquement près à perdre 50% de vos rêves en contrepartie d’un choc psychologique salutaire vous démontrant qu’on s’est fait “autobaiser” bien profond !
Réponse à question 2 : Idem
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