Astra Gnome’56, la voiture du temps et de l’espace…
Le rétrofuturisme est né en suite de l’utilisation de deux bombes atomiques contre les habitants civils d’Hiroshima et Nagasaki au Japon, en 1945… Cette barbarie aussi épouvantable que les atrocités nazies, a créé un sentiment de toute puissance et d’invincibilité de l’Amérique “Maître du monde et de l’univers” ! Caractérisé par un mélange de l’imagerie d’avant la “dernière” guerre 1939/1945, avec des visions technologiques futuristes du nouvel empire Américain dominant l’Atome, le monde et l’univers, le rétrofuturisme va rapidement explorer les thèmes de la tension entre passé et futur ainsi que les effets aliénants de l’autonomisation et de la technologie atomique qu’on a imaginé se généraliser dans tous les domaines. Une nouvelle imagerie s’est développée, se manifestant immédiatement dans le monde de l’automobile, de la mode, de l’architecture, de la littérature et du cinéma.
Deux tendances ont ainsi émergé, se chevauchant et pouvant se résumer par : “Voici l’avenir tel qu’on le voit dans le passé-actuel” (sic!) et : “Voici le passé actuel tel qu’on le verra du futur” (re-sic!)…
-La première tendance était “le futur” imaginé par l’esprit des écrivains, des artistes et des cinéastes qui, dès fin 1945, ont tenté de prédire l’avenir, que ce soit dans les projections graves du développement de la technologie existante (par exemple, dans des magazines comme “Science and Invention”) ou dans des romans et des histoires de science-fiction. Ces visions futuristes étaient comparées à un nouveau présent “atomique” disposant de fusées envoyées dans toute la galaxie avec une certaine nostalgie d’un passé simple mais atomisé, une image contrefactuelle de ce que le futur allait être.
-La deuxième tendance était à l’inverse de la première, elle mélangeait les styles artistiques et vestimentaires ainsi que les mœurs du “passé-actuel” qui accédait aux technologies futuristes, ce qui créait un ensemble d’éléments à la fois passés, présents et futurs.
Dans la pratique, les deux tendances ne pouvaient pas être nettement distinguées quoiqu’elles contribuassent mutuellement à des visions similaires. Le premier type de Rétrofuturisme fut de la sorte inévitablement influencée par la prise de conscience scientifique, technologique et sociale de la nouvelle ère atomique qui n’était pas que bénéfique eu égard des visions horreurs des populations atomisées devenues des légions de morts-vivants ! Diverses créations Rétrofuturistes ont changé de cap pour ne pas apparaitre comme des copies des unes et autres abominations atomiques ! Le rétrofuturisme s’inspirant de l’époque à laquelle il avait été pensé, une évolution a amené le futur tel qu’imaginé après 1945 (et l’arrivée de l’ère atomique), vers un futur “familial” ou l’atome se devait d’être domestiqué jusque dans les cuisines !
Cette vision grotesque va perdurer jusque dans les années 1960 ou soudainement la “guerre froide” va démontrer que la Russie Soviétique disposait elle aussi d’armes atomiques et de fusées capables d’anéantir New-York, Chicago, Miami et LosAngeles. De surcroit dans les futurs “Américains” imaginés entre 1945 et 1960 aucune trace positiviste d’un système permettant l’inter-connexion entre tous les êtres humains ! La tendance était le non-dialoque et la démonstration de force ultime visant à la dstruction totale de tout ce qui n’était pas l’Amérique… Il faudra de longues années de folies à quelques secondes de la fin du monde pour que l’avènement d’Internet tende à l’inter-communication, au dialogue et cela comme un élément central de toute société future. Dans un sens, le rétro-futurisme doit beaucoup de sa saveur apocalyptique aux débuts de la science-fiction (par exemple les œuvres de Jules Verne et H. G. Wells) car dans une quête d’authenticité stylistique le monde est revenu à se laisser inspirer par les artistes et écrivains de la période pendant laquelle ce monde futuriste était imaginé.
Ces deux tendances rétrofuturistes ne renvoyaient jamais à un moment précis. Lorsqu’un délai était fourni pour une histoire, il pouvait être un présent contrefactuel avec une technologie unique, une version fantastique du futur, ou un passé alternatif dans lequel les inventions imaginées par le passé étaient devenues bien réelles (comme les dirigeables “Zeppelin” en tant que moyens de transports répandus). Des exemples incluent le film “Capitaine Sky” et “Le monde de demain”, situés dans un 1939 imaginaire, ou “The Rocketeer”, imaginé bien après 1945 mais se déroulant en 1938 ! Le rétrofuturisme, en raison de la variation des époques et des visions futuristes associées à celles-ci, ne proposait pas un but ou une expérience thématique unique, le fil conducteur étant l’insatisfaction ou le malaise du temps “présent”, à laquelle le rétrofuturisme nostalgique offrait un contraste.
Un des thèmes souvent employé était l’insatisfaction vis-à-vis du futurisme moderne. Une extrapolation du présent dans le futur produisant un résultat négatif où les défauts de notre société avaient pris le dessus et fait tout empirer. Le “Steampunk” est né dans cette mouvance comme étant un terme désignant la projection de la technologie futuriste dans une ère victorienne alternative et l’application de styles néo-victoriens à la technologie moderne. Le film “Space Station 76” montrait ainsi la civilisation humaine qui s’était répandue dans les étoiles, mais où les costumes, les objets du quotidien, l’électronique domestique et les mœurs renvoyaient directement au ‘passé-futuriste-Steampunk”… Le “Cyberpunk” s’est créé avec l’ajout des technologies liées à Internet et au numérique s’infiltrant absolument partout, cela se caractérisant par la surpopulation, la dégradation de l’environnement et le transfert de pouvoir vers des entités privées ou des gouvernements totalitaires. C’est notre monde actuel (2021) !
Face à un tel avenir, le rétrofuturisme imagine un monde plus confortant ou du moins plus susceptible d’être compris ! Un thème similaire est l’insatisfaction du monde actuel lui-même. Un monde de transports aériens à très grande vitesse, d’ordinateurs et de stations spatiales est (selon toutes normes antérieures) “futuriste”. Pourtant, la recherche d’un futur alternatif plus prometteur suggère un sentiment de déception quant au futur que l’on a espéré voir et qui ne s’est jamais concrétisé. Le rétrofuturisme suggère une voie alternative et en plus d’être pure nostalgie, il peut agir comme un rappel d’anciens idéaux, aujourd’hui oubliés. Le rétrofuturisme implique également une réévaluation de la technologie. Contrairement au rejet total de la technologie post-médiévale dans le genre fantastique, ou l’étreinte de toutes les technologies possibles dans la science-fiction. Le rétrofuturisme se rapporte plus à une échelle humaine, une technologie plus compréhensible. Le rétrofuturisme n’est toutefois pas universellement optimiste et quand ses points de référence touchent des périodes sombres, comme la Seconde Guerre mondiale, les 2 bombes atomiques lancées sur des populations civiles de femmes et enfants… ou la paranoïa de la Guerre froide ! Le pessimisme, dans de tels cas, fait que la réalité alternative inspire la peur, et non l’espoir, même si elle peut encore être couplée avec la nostalgie d’un monde plus moral.
Une grande attention est portée sur les machines fantastiques, les bâtiments, les villes, et les systèmes de transport. La conception esthétique futuriste du début du XXe siècle tend vers des couleurs unies, des formes simplifiées, à une échelle immense. On pourrait dire que la vision futuriste du XXe siècle a trouvé son expression ultime dans le développement du design de “Googie” ou “Populuxe”. Tel qu’il est appliqué à la fiction, cette marque de style visuel rétrofuturiste est également définie comme le “Raygun Gothic”, un terme fourre-tout qui désigne un style visuel qui intègre les différents aspects du “Googie”, style “paquebot” et des styles architecturaux “Art déco” lorsqu’ils sont appliqués à un environnement rétrofuturiste de la science-fiction. Bien que le “Raygun Gothic” est le plus semblable et parfois même défini comme un synonyme, au style “Googie” ou “Populuxe”, le nom est principalement appliqué à des images de science-fiction. Ce style est également toujours un choix populaire pour la science-fiction rétro dans les films et les jeux vidéo.
Les premières influences du style “Raygun Gothic” sont les décors de Kenneth Strickfaden et Fritz Lang. Les vêtements futuristes sont une vision particulière imaginé des vêtements qui pourraient être portées dans un avenir lointain. On les trouve généralement dans la science-fiction littéraire et les films de science-fiction des années 1940, mais aussi dans le journalisme et les autres cultures populaires. Les vêtements ont été le plus souvent envisagés soit comme une seule pièce de vêtements, ou comme des vêtements moulants, ou bien les deux, finissant généralement par ressembler à une combinaison ou un justaucorps, souvent portées avec des bottes en plastique. Dans de nombreux cas, il y a une hypothèse selon laquelle les vêtements de l’avenir seront uniformisés. Le cliché des vêtements futuriste fait désormais partie de l’idée même de rétrofuturisme. La mode futuriste joue sur ces stéréotypes désormais galvaudés, et les recycle comme des éléments de mode vestimentaire dans le monde réel.
“Nous avons effectivement vu ce look se répandre dès 1995, pourtant ça n’a pas été une mode vestimentaire largement populaire ou même acceptable, même en 2008”, a déclaré Brooke Kelley, rédacteur en chef de mode et écrivain dans Glamour. “Au cours des 20 dernières années, la mode a examiné les temps du passé, décennie par décennie, et ce que nous voyons maintenant, c’est une combinaison de différentes époques dans un look complet. La Mode du Futur est un style au-delà de tout ce que nous n’avons pas encore osé porter, et ça va être un paradis pour le trend setter”. Le “rétro-futurisme” est apparu dans quelques exemples de l’architecture postmoderne, par exemple, la partie supérieure d’un immeuble n’étant pas destinée à être intégrée au bâtiment, mais plutôt à apparaître comme un objet séparé telle une énorme soucoupe volante ou un vaisseau spatial seulement “attaché” à un building conventionnel. Cela semble destiné à ne pas évoquer un avenir possible, mais plutôt un imaginaire passé de cet avenir, ou un clin d’œil à l’architecture futuriste “Googie”.
Richard Arbib (1917-1995) est diplômé (1939) de l’Institut Pratt de New York. Il s’est immédiatement orienté vers l’avenir dès le début de sa carrière et grace à ses idées futuristes, il a été engagé pour concevoir des présentoirs pour l’exposition “World of Tomorrow” de General Motors à l’Exposition universelle de 1939 à New York. Il a exécuté ce “job” en travaillant pour le directeur du design (lui-aussi visionnaire) : Harley Earls. Il a en cette suite attiré l’attention de “Henney Motor Co” de Freeport, Illinois et va y être nommé directeur responsable (sic !) de la conception visuelle des “automobiles commerciales” de Packard construites par “Henney Motor Co” de 1951 à 1954 (ambulances, corbillards, limousines). L’un des traits distinctifs de ces modèles étaient des vitres latérales arrière “wrap-around”.
Richard Arbib a ensuite conçu la “Packard show-car-Panaméricana” dans “l’International Motor Sports Show” de New York City au Grand Central Palace en mars 1952. C’était une 1951 Packard 250 convertible innovante construite par “Henney Motor Co” qui espérait ainsi devenir “LA” société de création de GM. La “Panamericana” y a remporté un trophée récompensant la première place pour la conception la plus remarquable du salon. Plus tard, Richard Arbib a créé sa propre entreprise de design à Manhattan, où il a produit une série de livres et tableaux largement distribués d’illustrations de voitures de rêve pour les publicités “Veedol Brand” de la “Tidewater Oil Cy”. Selon le New York Times, les conceptions de Richard Arbib reflétaient un sentiment de changement dramatique de la civilisation qui était de plus en plus important dans l’esprit des consommateurs et qui a émergé dans le “boom” d’après la Seconde Guerre mondiale. Richard Arbib a pris mesure de sa notoriété et a réalisé “l’automobile la plus audacieuse de 1956” qu’il a conçu et financé ! L’Astra-Gnome était en effet radicale et reflétait parfaitement la nouvelle ère spatiale, c’était le premier “Concept-car-compact-Space-Âge” du monde.
Conçu par la société portant son nom “Richard Arbib Inc Co”, le prototype a été réalisé en un temps record de 4 mois par la société “Custom Body Work” de New York, sur base du châssis d’une Nash Metropolitan 1955. Le véhicule représentait “la vision” de Richard Arbib de ce que serait une automobile en l’an 2000… C’était génial, mais totalement “à coté de la plaque”. L’Astra-Gnome n’était qu’une dream car officiellement imaginée par “Richard Arbib Company” et fabriquée par “Andrew Mazzara de Custom Body Work” (New York) sur un chassis de Nash Metropolitan. Au niveau de sa conception, ce dream car permettait facilement l’interchangeabilité des panneaux d’aluminium colorés qui la composait de manière à lui modifier à son gré quantités de couleurs. Avec son look futuriste et ses équipements insolites, comme les fuseaux horaires célestes (gag !), la voiture était très “spatiale” avec son dôme utilisé comme une “chambre sonore aux caractéristiques intemporelles”.
Elle était plus large que la Nash originelle, ce qui lui donnait un espace intérieur plus abondant et permettait une quantité phénoménale de stockage dans la zone des bagages (pas moins de 6 valises). En aluminium avec des formes fantastiques et une allure étrange, contrairement à la plupart des voitures les roues (jantes et pneus) de l’Astra–Gnome avaient été “dé-soulignés”, c’est-à-dire complètement cachés et rendus invisibles. L’interchangeabilité des panneaux d’aluminium colorés permettait en outre de modifier les couleurs selon ses humeurs. L’Astra-Gnome a attiré l’attention de la presse du monde entier à l’International Automobile Show 1956 de New York, et a été présentée sur la couverture de Newsweek magazine daté du 3 septembre 1956, précisant que Richard Arbid avait conçu des montres “disymétriques” électriques pour la société Hamilton dans les années 1950, des modèles remarquables nommés Ventura, Everest et Pacer. Était également mentionné que Richard Arbid avait également conçu l’extraordinaire “Célestial Time Zone Clock MX1” donnant l’heure “spatio-temporelle”, ainsi que des montres pour Tourneau, Benrus, Sheffield et Gucci… Ainsi que des bateaux pour la “Century Boat Company” dans les années 1950, notamment le Coronado…
La brochure d’Arbib expliquait que le tableau de bord était dominé par une horloge céleste permettant une navigation réelle de type vol spatial, c’était la fameuse “Célestial Time Zone Clock MX1” donnant l’heure “spatio-temporelle”. D’une certaine manière, Richard Arbid tâtonnait vers un système de navigation GPS ! Le public disait que la verrière-bulle et les marchepieds rétractables de la voiture permettaient une “entrée sans rendez-vous”, c’est-à-dire facile. Cette même bulle permettrait également “Une vision hémisphérique complète et une vue du trottoir pendant le stationnement. Et pas de soucis de surchauffe, car la climatisation est disponible pour garder les choses au frais”… Après son passage sous les projecteurs, l’Astra Gnome est tombé en disgrâce, a été oubliée et a disparu sans laisser de trace, jusqu’à ce qu’elle soit traquée, découverte, achetée et entièrement restaurée par des spécialistes-restaurateurs de Nash Metropolitan, qui l’ont ensuite exposée “en toute propriété” au musée “Metropolitan Pit Stop” de Valley Village, situé à North-Hollywood en Californie, où l’Astra-Gnome peut être vue en exposition permanente. La voiture-bulle de l’avenir et du cosmos des années 1950 (sic !), est aujourd’hui le témoignage que les visions des années 1950 du futur des années 2000, sont souvent fausses !