Ce ne fut pas tout de l’y avoir amenée, ma chère automobile, à la vente aux enchères Artcurial de Rétromobile 2008, il m’a fallu quelques jours (et nuits) plus tard y retourner pour participer à la nullissime théâtralité de la vacation quelques jours plus tard tout en en prévoyant de la ramener “At Home” si elle ne s’y vendait pas… C’était du temps où je m’occupais encore d’achats/ventes d’automobiles “de collection” simultanément à mon web-Site GatsbyOnline. J’en ai fait assez d’articles pour que vous deviniez, sans que je doive préciser grand-chose… J’étais là, “chez-mon-chez-moi”, à penser… en charmante compagnie… je pensais du passé, au passé… je pensais du présent, au présent… je pensais aussi de l’avenir presque immédiat qui m’obligeait à quitter ma quiétude ouatée pour affronter (à nouveau) l’enfer Parisien des ventes aux enchères… A cette époque (1988) Poulain-Le Fur cherche une assise financière, Artcurial n’existe pas encore, Bonhams occupe la place, Coys surfe sur les vagues et Sotheby RM ne s’aventure pas encore en France…
Je me suis servi un Mojito pour mieux penser à rien… mais aussi pour penser à d’autres choses… et en conséquence j’ai eu un flash éthylique ! C’est vrai que j’ai toujours été un déjanté cynique et si ça m’a souvent desservi dans mes rapports (sexuels), cela à aussi desservi certaines plantes vénéneuses décoratives dans leurs rapports avec moi… fort de ce constat (c’est son aspect finance qui sème les discordes), j’ai décidé de ne pas changer et de m’en resservir un autre… de Mojito ! Décision elle-même très déjantée et relativement cynique, ce qui m’a fait dire intérieurement que j’arrivais à très bien faire coïncider ma nature et mes actes. Quoiqu’il en soit, ma vie change sans cesse… mais je suis conscient que de déjanté, je suis devenu adepte du Gonzo…
On me l’aurait prédit, je ne l’aurais évidemment pas cru : je peux pourtant croire n’importe quoi de n’importe qui, à condition qu’il soit plus charismatique que moi, en conséquence je ne crois plus en rien ni personne. Il est donc également à noter que ‘fou’ se greffe naturellement aux précédents qualificatifs de ‘déjanté’ et de ‘cynique’... de remarquables qualités… et je m’en branle royalement. Faut dire que j’avais pulvérisé tous les records en gagnant le jackpot qu’étaient les magazines Chromes&Flammes, je m’étais servi de l’argent uniquement dans des conneries… là-dessus, je ne peux pas prétendre le contraire : une dizaine de costards à deux milles cinq cent euros pièce quand on roule en Harley, en Trike V-12, en Hot-Rod et en Corvette, ça ne sert à rien !
A cet instant précis de la rédaction de ce que vous lisez (c’est ça la magie du direct)… j’ai décidé que mon occupation première, ma charge envers l’humanité, resterait la même… faire n’importe quoi, pourvu qu’il se passe quelque chose quelque part… m’y rendre, écrire ensuite mes impressions, les publier dans mon site-web et revenir ensuite à ma vie de branleur (c’est un double-sens subtil)… jusqu’à ma prochaine aventure, c’était lumineux… !
Les reportages ont toujours opéré chez moi un déclic irrémédiable : la folie totale m’atteint de plein fouet et je “pneu” vous dire (c’est normal pour un déjanté)… que c’est une drôle d’impression (comme d’être “à plat”)… je ne sais pas… j’essaye de vous trouver une comparaison qui vous siérait… et je ne trouve pas, à ma connaissance… personne ne vend d’artefacts de ce type…
Un voyage à Paris ne s’improvise pas, principalement un vendredi à dix-huit heures trente lorsque je suis déjà à moitié bourré, tout fier d’avoir enfin un cap à appliquer à mon existence… mais afin de mener à bien une telle entreprise, il me fallait un bloc-notes qui allait souffrir mes observations du cru une fois sur place et mon Canon numérique Power Shot pour immortaliser ce qui le méritait.
Une rapide consultation du net m’apprit que le temps serait “radieux”, plein soleil… j’allais toutefois devoir à nouveau subir la faune locale… ce qui me plongea dans une profonde tristesse désespérante puisque j’allais encore avoir toutes les difficultés imaginables à combler les vides, sans oublier les embouteillages….
J’ai dit adieu à chaque objet du salon, ce qui sembla les toucher sans les émouvoir plus que de raison. Mon chat (à cette époque j’avais un petit félin) fut expressif, comme d’habitude il alla jusqu’à m’éblouir avec ses yeux d’un halo bleuté qui m’accompagnèrent vers la porte d’entrée, m’auréolant ainsi à la manière d’un dieu.
Ma sortie fut humble et discrète. Ma Jeep Grand Cherokee se propulsa à vitesse correcte, à une allure acceptable en fait… mais sur l’autoroute me vint la triste idée de faire le plein d’essence à une station Shell… où je ne m’étais jamais arrété !
En y arrivant, j’ai eu comme un pressentiment en voyant les poubelles renversées et la saleté générale… J’ai voulu faire le plein… mais il était indiqué sur une feuille délavée et quasi illisible derrière la vitre d’une des pompes qu’il fallait payer d’avance… ou payer au distributeur, ce que j’ai voulu faire… mais il était en panne.
Un message d’erreur était allumé en permanence… ce qui me résolut à aller voir la préposée derrière son guichet… Là, un Kosovar maugréait qu’on lui avait fait payer le plein d’un autre, brandissant son ticket et montrant que sa voiture était devant une autre pompe que celle indiquée sur le ticket… Peine perdue ! S’exprimant dans un Kosovar irréprochable, je ne saisis toutefois que peu de choses de son monologue pourtant très développé mais néanmoins entrecoupé de parenthèses violentes quoique bien à propos !
J’ai signalé moi aussi que les distributeurs étaient en panne, la préposée, tout en mastiquant un chewing-gum, m’a répondu qu’ils marchaient… je suis retourné essayer… ils ne marchaient pas… ils ne sprintaient pas non plus… ils étaient à l’arrêt !
Je suis revenu râler à coté du Kosovar qui devenait méchant… on lui a répondu simultanément à moi-même qu’on n’avait qu’à payer d’avance… Mais comment payer d’avance un plein d’essence dont on ne connait pas la quantité, donc le montant ?
J’ai donc résolu de laisser tomber Shell que je n’aime plus (ancien slogan publicitaire de la marque, mais à l’inverse) et je suis allé 20kms plus loin à la station Total ou l’accueil a été bien plus chaleureux !
A quinze heures tapantes, j’étais à Rétromobile… et pas possible d’entrer… car ayant une remorque porte-voiture, l’attelage ne pouvait pas aller dans les parkings “normaux”… Bienheureux téléphones portables… j’ai pu demander à je ne sais plus qui, d’intercéder auprès de St-Pierre pour qu’on me laisse passer… J’ai donc pété intérieurement un plomb tout en lisant un magazine d’autos anciennes particulièrement crétin en attente que “les choses” évoluent… quand les gardiens du temple sont passés devant moi en disant n’importe quoi dans leurs talkie-walkies juste pour faire comme les malinois (des chiens-bergers belges à poils courts fauves)… J’étais mal à l’aise, l’un deux allait peut-être s’exprimer dans un dialecte barbare en se frottant le torse, je n’en savais rien. Je gardais mon cure-dents à portée de main, au cas ou… Mais, j’ai pu enfin franchir les portes de l’enfer.
Après avoir une ultime fois papoté avec un tas de cons… à très exactement 16h38 je me suis engouffré dans l’arène aux fauves… en effet, devoir supporter d’aller là dedans, ça vous change un être humain en bête fauve ! Piting ! Ce voyage m’avait exténué.. cependant j’avais décidé de rester en pleine forme.
Ils se rencontrent, comme par hasard, les visiteurs et visiteuses… quoique pas vraiment, au gré de divers shows, de ventes aux enchères et de meetings en balades pour n’importe-ou… au hasard des mouvements de foule, mimant la surprise sur leurs visages irradiés de stupéfaction, affichant à leurs lèvres un faux sourire de complaisance, manipulant leurs émotions à la manière des politiques… leur démarche, souvent, s’identifie, sciemment ou non, à celle d’un gang de faux jeunes, vrais futurs vieillards, ce qui constitue un paradoxe.
D’où leur vient cette attitude ? Certains prétendent qu’il s’agit de robots, de clones d’eux-mêmes, protéiformes et parfois lobotomisés d’idées fixes, qu’on leur a introduit par des histoires d’appartenances qui requièrent, dans les cas extrêmes, l’obligation de se vêtir de même façon : lodden vert, blazer beige en pied de poule et cocotte minute avec bijoux cartier et sac Vuitton… si ils et elles sont de la confrérie des “anglaises“, celles d’avant que Jaguar et Aston-Martin deviennent propriété de Tata, l’Hindou…. et Bentley à Volkswagen (la voiture du peuple… appréciez le gag) et Rolls-Royce à Focke-Wulf…, une dévotion sur le retour des genres, en arrière…
Un loden vert ne peut aimer une américaine, impossible… et un fan’ d’américaines ne s’habillera jamais en loden vert, non… santiags et franges pour les gammes moyennes… baroudeur blasé pour les catégories supérieures… Entre-deux, il n’y a place que pour la teutonisation, pas au point de s’afficher affublé Tyroliens et Tyroliennes, mais c’est du sérieux, souvent avec camouflage, couleur passe-muraille, gris acier, le regard aussi…
Un esprit plus logique, moins enflammé, ne saurait donner foi à de telles rumeurs, (je vous y invite donc)… mais il apparaît plus qu’indéniable que leurs mœurs, aussi étranges qu’inopportunes, ne s’inscrivent dans nul autre système de pensée ou d’action connu. Dans ces lieux de concentrations, sans que le double sens soit voulu… à peine… ils n’ont d’autres raisons d’être que celle de se rencontrer, comme par hasard, selon les lois mathématiquement démontrables de la foule. La normalité se caractérisant par son adhérence au plus grand nombre, on peut légitimement s’interroger sur leur appartenance à la dite catégorie.
Tenez, par exemple, par le plus grand des hasards (si, si, croyez-moi)… sans les connaitre, je les ai tous croisés durant ce dernier week-end, plus précisément à Rétromobile (Paris-Porte de Versailles, 8-17 février 2008, 12,50 euros l’entrée, plus le parking et les extras)… installés tous ensemble sur des sièges pour célébrer et participer à quelque chose qui en réalité n’existe pas… les yeux fixes pointant droit devant eux, leurs lèvres closes comme leurs portefeuilles… venant prier et s’incliner (avec dévotion) devant le dieu consumériste qui a pris la forme de la plus belle, fantastique et magnifique (extraordinaire aussi… je passe la pommade et la crème pour me faire bien voir) escroquerie basique, qui n’est pas répertoriée comme telle dans les Lois… l’exposition Rétromobile ET la vente aux enchères de voitures extraordinaires et de collection qui y est couplée.
Bonhams, avait fait les choses en grand, en énorme, touchant au sublime, en recréant une vente “à l’américaine” avec les voitures présentées une à une sur une estrade, face au public (médusé)… A observer le public tétanisé, la foule immobile, les gens droits sur leur siège, je n’ai pu m’empêcher d’imaginer qu’on allait atteindre une sorte d’orgasme collectif…
Ce fut le cas… Mes pupilles ont contemplé un spectacle unique en autant de tableaux qu’il n’y avait d’objets d’automobilia et d’automobiles à la vente, une œuvre orchestrée par le bateleur en chef Matthieu Lamoure (qui finalisait ici un triomphal retour sur la scène Parisienne des automobiles de collection ayant été engagé chez Bonhams) et par Marielle Digard une Commissaire-Priseur talentueuse dont la verve présentatrice en animation de la vacation, flottait quasi sexuellement mais chastement devant les mâles en foule, qui dès-lors vivaient cette histoire comme dans un théâtre, dont la pièce, admirablement interprétée, ne leur semblait demeurer visible qu’à eux seuls… toutes choses subtilement mises en valeur par la sobriété toute britannique de Philippe kantor, naturellement avare d’envolées descriptives…
Lot # 134 1989 Sauber-mercedes Benz C9 Groupe C Jean Louis Schlesser et Jochen Mass
Avant… il y a plusieurs années… il y avait une logique, tordue mais cohérente, une sorte d’enchaînement des prix en fonction de critères précis… on savait toujours quoi penser et ce qu’il y avait à faire. Maintenant, ici… plus rien n’a de sens… et, personnellement, je ne sais plus quoi penser de ces enchevêtrements de valeurs disparates. Tous ces gens, là, dans cette vacation, ont leur attention fiévreuse palpable qui leur brûle la peau, à moins que ce ne soit le sable du sablier du temps qui passe…, qui envahit l’air. J’avais un but en venant ici, maintenant je n’en ai plus eu assez rapidement…, rien, je me suis contenté d’attendre chaque numéro suivant, le regard éteint et la conscience vidée. J’ai ce jour-là perdu la Foi en l’automobile…. Il y a pourtant une règle et une seule pour survivre : avoir confiance en soi… et je n’avais plus confiance en rien, sauf en moi-même; me disant : “Un artiste ne doit jamais douter, sinon il est foutu”…
J’ai eu le loisir d’étudier l’absurdité des valeurs…, simple phénomène transitoire et pour tout dire pratiquement imperceptible au moment même, mais qui, je ne le savais évidemment pas encore pourquoi, me paraissait couler de source : c’est-à-dire les disparités de certaines de ces dites valeurs entre les pays… Pourquoi tant pour l’une et pas autant pour une autre alors qu’ailleurs c’était l’inverse ? La réponse me fut donnée par un bouillant personnage en pull gris-bleu, qui, lorsque je lui ai demandé d’immortaliser notre rencontre par une photo numérique, m’a dit : “Ne dévoilez pas mon nom… et je ne peux figurer que devant une Ferrari“…, devant une des quelles il s’est placé derechef… J’avais alors tout compris…, je suppose que vous aussi : Jean Todt…. est un grand filousophe et aussi un fumiste de première bourre !
Lot # 143 1964 Ferrari 250GT Lusso Berlinetta
Lors de la vente, existe comme un combat entre “ceusses” qui veulent acquérir une automobile… pourtant, ils ne se font pas face… les combattants ont le front plissé en un pastiche de front plissé… regard moite et violent, se fondant l’un dans l’autre… et pas un tressautement de lèvre, pas un clignement de paupières, pas un seul frémissement… juste un geste imperceptible que doit débusquer la Maîtresse de cérémonie pour faire monter les valeurs, c’est comme pour le sexe, le geste qui fait érectionner les mâles… les bourses se vident ensuite rapidement, c’est basique !
Lot # 155 1928 Mercedes Benz 26/120/180 S-Type 6.8 Litres à compresseur
Passé quelques instants, secondes plutôt que minutes, lorsque le marteau tombe et qu’on entend “adjugé à deux millions cent mille euros“…, les visages se détournent au même moment, dans une direction identique, vers l’endroit d’ou provenait cette enchère… et au plus elle frise l’incongru en nos périodes de clash’s monétaires… au plus l’engin ainsi acquis est inutilisable… au plus le frisson d’une angoisse existentielle mâtinée d’envie, d’idolâtrie et de jalousies en répulsions d’amour-haine… parcours la salle qui exorcise en applaudissements… Les gens, ensuite, récupèrent leur absorbante rectiligne et flaccide attitude et refusionnent avec la masse. L’un d’entre eux a fait mine de me reconnaître au fond de mes pensées (celles que je viens d’écrire…), sa bouche s’est pliée en un semblant de sourire qui se voulait complice et il a hoché la tête… le catalogue de la vacation à la main et une liste de statistiques d’autres résultats de vente dans l’autre (main…, je précise que chaque individu n’a que deux mains)… les deux s’ordonnant par anticipation dans l’organigramme de son cerveau très vif… j’ai répondu de même mais je n’en pensais pas moins !
Lot # 123 1948 Cisitalia 202 Nuvolari Mille
L’esprit occupé à des séries de chiffres et de données n’aide pas à l’exhaltation… Je n’ai accordé qu’un coup d’œil entendu, à la lisière du sourire de circonstance… en suivant du regard mon ami, Xavier (c’est lui, ci-dessus en photo), s’initiant aux joies des ventes aux enchères… Il apprend vite !
Lot # 130 1965 Ford Mustang Shelby GT350
Le hasard des attributions de sièges m’avait fait m’installer à coté de Claude Dubois, entre lui et son ami Christian, juste devant le tonitruant Marc Nicolosi qui n’a pu s’empêcher, en me reconnaissant d’il y a 30 ans, de me parler de mes anciens magazines Chromes&Flammes…, il faut dire que le premier C&F show s’était tenu à cet exact et même endroit et que ça avait fait grand bruit… Claude Dubois et moi avons parlé du temps ou il entretenait (à grands frais pour moi) ma Mustang Shelby GT-350 dans son garage de la rue Vanderkinderen à Bruxelles et particulièrement d’un certain jour ou j’étais là alors que Carroll Shelby en personne était venu discuter des ventes de ses œuvres, les Shelby GT350 et 500 ainsi que des Cobra 289 et 427 !
Grand moment que d’avoir papoté une demi-heure avec ces deux géants il y a trente années… Claude Dubois était ici pour la vente d’une Mustang Shelby GT-350… et ce fut grande émotion… lorsqu’elle ne fut pas vendue… alors qu’une insipide Mercedes 190SL roadster 1962 sans aucun plaisir de conduire (l’exact opposé de la Shelby) était adjugée 70.150 euros ! D’autres “non-gagnants” de cette loterie, affichaient eux aussi un sourire biaiseux et un mutisme obstiné, rien de plus, sinon un échange de regards vides de sens, en cause de la non-vente de leurs voitures.
Lot # 149 1927 Salmson Grand Prix
Le public, vers les 2/3 de l’épreuve… (75 voitures présentées c’est beaucoup) était fatigué, tout autant que la Commissaire-Priseur (peut-on dire/écrire : Commissaire-Priseuse…, à moins que ce ne soit simplement Huissière…, je ne sais ?), qui parfois semblait lasse… et en conséquence peu ont résisté à plus de 4 heures de vacation ininterrompue… La Commissaire-Priseur (encore elle) a toutefois eu quelques envolées lyriques et une renaissance a été perçue chez-elle lorsque quelques voitures ont trouvé des candidats acquéreurs… Pourquoi se priver d’une jouissance orgasmique ?
Lot # 162 1936 Mercedes Benz 500K Cabriolet A Carrosserie Sindelfingen
Derrière le rideau usé, j’entendais des murmures, une rumeur s’élevait, c’était le clou de la vente aux dire de Matthieu Lamoure… qui arrivait enfin. La foule était en haleine… le cœur battant… la tension était au plus haut… les murmures impressionnés faisaient presque peur… Raz de marée d’applaudissements. Une sarabande d’images a défilé devant les yeux sous forme d’un film à la gloire du peintre Mathieu et de sa prestigieuse Mercedes 500K. Les ventes aux enchères sont une course contre le temps, et rien ne saurait l’arrêter. Ne pas s’évanouir, ne pas flancher. Garder la tête haute, car c’est à ce moment-là qu’apparait l’appréhension, cette humeur traîtresse qui paralyse et ankylose les pensées.
Lot # 104 1962 Chevrolet Corvette Roadster
Avant chaque voiture présentée, l’humeur traîtresse qui paralyse et ankylose les pensées, s’insinue comme un parasite le long des veines, enveloppe les muscles et vide de toute intention et attention… Elle rend chacun ombre de lui-même, automate sans vie, jeté dans l’arène d’un spectacle dont on ne voit plus ni le faste ni les attraits, réduisant à néant toutes les certitudes, brûlant le mode d’emploi et la table des valeurs, mélangeant la fiole des vices et des vertus, unifiant même les couleurs. Pendant les quatre heures de la vacation, une malsaine impatience s’est progressivement substituée à mes craintes antérieures qui se sont justifiées… et lors des quelques regards fugaces avec mon ami d’alors Xavier, très intéressé à en connaître plus sur l’opportunité des ventes aux enchères, je n’ai pu que m’étonner de nos réactions mimétiques….
Lot # 157 1965 Chevrolet Corvette Sting Ray Convertible
Rien à en dire, cette bleue l’a emporté sur ma rouge…, ma “caisse” à échoué à 2.000 euros de mon minima de 50.000 pour une valeur “certifiée” de 80.000… pas de bol, tant pis… Je commente ci-après !
Lot # 172 1966 Chevrolet Corvette Sting Ray Lingenfelter 500ci Convertible
Il baratine “A Donf” le Matthieu d’Amoure… “Chers amis Corvettistes. Rendez-vous est donné à ceux qui en veulent !!! Quel passionné d’américaines (mécaniques) n’a jamais rêvé de posséder une Corvette mythique ultra-puissante s’imaginant de s’installer à son volant ? Le Big-Block V8 427ci de cette Corvette C2 a été développé grâce à la C6-R, la Corvette qui a remporté les dernières 24 Heures du Mans en catégorie GT1 (Soit dit en passant la quatrième victoire d’une Corvette en 5 ans dans l’épreuve mancelle). En effet, l’importance volumétrique ce ce Big-Block porté à 500ci et 700hp, avec la volonté de ne pas modifier le gabarit extérieur de la Corvette C2, a obligé de modifier radicalement l’arrivée d’air frais au carburateur quadruple corps Holley (voir le premier montage sur les photos) avec un filtre à air positionné sur la droite (coté passager)…
… Le transfert de la technologie Lengenfelter (USA), monté par Speed-Shop-Racing a joué à plein. De même, le ventilateur classique a fait place à un système “racing” comportant des ventilateurs électriques de gros débits, positionnés, avec le radiateur “compétition” dans un “box” autorisant un refroidissement optimal. Avec à peine plus de 250 kilos, le V8, n’est plus qu’un cousin de celui de la 427 C2, le L72. Avec ses 500ci et ses 700 chevaux de nombreux organes, tels le freinage et l’échappement ont dû être redimensionnés. La cylindrée est passée de 7 à 8 litres, la puissance de 425 à plus de 700 chevaux…
… Un arbre à cames de plus hautes levées est fourni (en plus mais à part) pour une utilisation réellement “racing”, il n’a pas été placé car de ce fait le moteur tournait au minimum à 2000 t/m. Les montées en régime se font dans un bruit quasi envoûtant… déjà agréable, mais relativement discrète dans les bas régimes, la rage du V8 est totale lorsque les 4 corps s’ouvrent, cette Corvette rapproche toujours un peu plus de l’exclusivité, le véhicule n’en demeure pas moins utilisable quotidiennement.
Une réalité qui demande un grande concentration. Avec plus de 700 chevaux à 6.400 tr/mn, un couple (mkg SAE) de 63,6 à 3800tr/min, cette Corvette abat le 0 à 100 en 4,6s, réalise le 0 à 400m DA en 12,4s et atteint 245km/h. Un bilan ? C’est une vraie voiture de rêve, mais un rêve teinté de réalité si vous pouvez débourser 80.000 euros pour cette pièce unique !…
… En voici la liste des détails. – Rare M35 1966 option, seulement 20 voitures équipées (voir Corvette Black Book) en 390hp et 1 en IP code 427ci 425/450hp. – 427ci IP # L72 425/450hp : préparation Lingenfelter 500ci/700hp – Carburateur 4 corps Holley R3247A – Hard Top # C07 – Suspensions spéciales # F41 – Positraction # G81 – Freins assistés # J50 – Direction assistée # N40 – Jantes aluminium “Knock-Off” (5 jantes d’époque) # P48 – Pneus “Goldwall” 7;75×15 Nylon # T01 – Radio AM-FM # U69 – Peinture Rally Red # 974 – Soft Top noir – Hard Top rouge – Intérieur noir – Longueur : 4.453mm. – Largeur : 1.770mm. – Hauteur : 1.275mm. – Empattement : 2.489mm. – Poids : 1.370kg. – V8 Big-Block 7.000 / 8.200cm3 : 500ci. – Taux de compression : 11:1. Qui la désire ?” …
La foule était béate, un silence sépulcral règnait… Ne manquait que la bénédiction papale de Matthieu Lamoure… une parole de Philippe Kantor… et un des seins de la Commissaire-“priseuse” qui sort subitement de son logement… Bon, la Corvette n’a pas été vendue… et basta… bye-bye Paris… Après vacation ou pas grand monde n’a su et pu dire “au revoir” à quiconque, tellement tout le monde, même ceux qui ne le sont pas, étaient pressés de ne rien commenter, puisque rien n’était “commentable” dans cette sorte de loterie des valeurs et intérêts, j’ai chargé ma Corvette invendue sur la remorque puis je suis rentré “At Home”, sans attendre…, sans même jouer de la voix pour commander un verre quelque-part d’autre… et j’ai décidé de ne commenter cette vacation qu’au strict minimum dans GatsbyOnline, ce qui était déjà trop !..
Mes yeux se sont portés au loin… et, il me fut, somme toute, aisé de les maintenir ainsi, comme coincés dans un tunnel transparent, sans rien au bout de rien du tout. Que voyaient-ils ? Se posaient-ils les mêmes questions ?
Puis, arrivé à destination, lorsque s’est enfin achevée ma si curieuse réunion roulante en retour… (quel autre terme employer ?)…, dans une gestuelle remarquable par son insolente synchronie… et d’un commun accord avec moi-même, quoique guère plus que tacite… je me suis fait un signe de tête empâté dans le rétroviseur…
Quel pied, quel déplaisir, quelle folie… énervé, mais curieusement pas fatigué, j’ai sorti numériquement les quelques photos de mon Canon Power shot G6 et les ai placées sur l’ordi… et, dans la foulée j’ai publié ce petit texte… J’en ai eu terminé à 5 h du mat ! De plus…, j’ai décidé d’un changement dans la continuité, oui… mais une évolution rationnelle… Tout en ayant l’apparence d’avoir perdu comme un match, ou un combat contre le temps qui passe… je ne fais maintenant et pourtant que m’interroger sur la condition humaine… Et les conclusions que j’en tire…, sont désastreuses…, les gens sont des gnous…
Le sommeil étant réparateur, en sortant de mon lit, le dimanche matin, j’ai pris garde d’éviter les pensées négatives que je fréquente habituellement… et, pourfendant, anonyme, l’air de mon chez-moi, je me suis servi un double café pour ne pas attirer leur présence. Ensuite j’ai cliqué sur le “On” de ma tour d’ordinateur…