“Il en faut du courage”…, c’est extrait d’un film que je viens de revoir, hier soir, miracle…, un aveu rapporté de l’intérieur par Jean Louis Trintignant revenant de Monaco sous la pluie en rafales de la nationale sept…, timbre magnétique, la voix… de l’acier doux, comme si l’on fabriquait les contrebasses depuis le roc, la tôle… et que par grâce de destination, ces matériaux d’ordinaires frigides se découvraient de caressantes manières…, “il en faut du courage”… couvrant, pour partie seulement, le ron-ron du huit cylindres Mustang…
“Il en faut du courage”…, lettres nobles des mots autrement mélangés à tout et à n’importe quoi qui prennent nouveau jour si l’on cause de l’être plus que de sa part de faire…, ou alors : faire la paix, faire l’amour et voilà résumé, là, les actes dignes, ceux qui valent vraiment, quoique…
J’ai fait ce périple “trintignantesque” dans l’autre sens…, il quittait le sud, moi le nord…, il allait vers l’amour…, moi je le fuyais l’absurde… avec également le ron-ron d’un 8 cylindres, mais Jeep…, plus cool…
Je me berçais de ça comme de quelqu’autre, avec en tête des refrains…, ceux qui me dictent sont rares et il faut croire qu’ils, jusqu’alors, m’ont suffit en ingrédients de base autorisant à assez de recettes…
Je m’en berçais, j’avais un petit chiot interrogateur assis à mon coté droit…, j’avais eu le courage de fuir l’absurde…, le courage de partir comme disait Jacques Brel…, aller enfin vers ce qui avait été rêvé, imaginé et créé… !
Une scénette coupée au montage… typique des films d’avant…, belle histoire, limpide, maintenant ça débute là…, du coup, on n’y comprend rien, c’est un peu ce qui m’arrive, c’est donc pas un mauvais film, c’est un mauvais découpage…
Savez-vous ce qui nous rapproche ?
Comme moi vous vivez les choses en photos-mots s’inscrivant tout seul…, là…, à tous moments…, votre vie (comme toutes vies), s’écrit en photos-mots…, tout ce que vous vivez, voyez, entendez, sentez se soumet à cette forme particulière de translation : la vie à l’image et aux mots-phrases-textes-chroniques…, du son au mot…, de l’odeur, du déplacement, de la peine, du fait le plus anodin, de l’élan : ce chien qui passe en courant, ce retour dans le soir humide, cette volée d’escalier essoufflée à grand peine, ce bar encore ouvert ou cette fille un peu vulgaire accompagnée d’un type beaucoup plus âgé qu’elle vous envoie un baiser canaille…, des feuilles volant ou des fleurs gisant en déjà presque pollen,… ce coup de frein un peu louche…, cette ville trop active ou mouillée de romantisme…, un chat clochard mendiant une caresse…, le craquement du papier bonbon autour du caramel.., des accidents…, tout ça aux photos-mots.
Vous ne vous êtes peut-être jamais demandé si c’était comme ça pour chacun ?
Peut-être avez-vous toujours conçu des gens vous entourant, ce collègue ou cousin éloigné, cette voisine…, qu’ils phrasent la journée muettement, comme vous, qu’en dedans de la tête ils abritent eux aussi leur traducteur automatique…, un bréviaire s’alimentant, se compliquant, s’enrichissant à mesure que le temps s’égrène.
Peut-être vous êtes vous laissés tromper de ce qu’avec ces âmes là, l’échange ait lieu toujours dans l’emploi d’un vocabulaire de vocables et de verbes.
Et bien non…, il n’y a que vous… et moi.
Il n’y a que vous et moi qui bâtissons un poème constant, une tirade sans pause…, il n’y a que vous… et moi, qui vivons en transparence…, vous qui me lisez, moi et mes mots en phrases formant chroniques… et ici, pour changer, quelques photos d’avant…, c’est ce qui nous rapproche un instant…
Ici, en noir et blanc, c’est parenthèse, vite, très vite, extrême vitesse…, tombe le masque écologique et celui du paisible : il y a peut-être la prégnance d’un certain romanesque : Isadora Duncan, Françoise Sagan, François Cevert et puis Mac Queen…, sans oublier, bien sûr Trintignant, père et fils, épingles ou grandes courbes, asphalte trempée, glace, ce qui glisse et puis tangue…, dancing in the sky assurément conviendrait le mieux : on croit piloter à la faveur d’un œil qui percerait le loin… et de l’oreille qui distinguerait plus détaillée je ne sais quelle phonème venue des gommes pneumatiques, du moteur, du châssis, attribuant une conscience supérieurement affûtée ou méchamment en berne selon qu’on est admiré ou conspué, sûreté de la main ou certaine connaissance théoricienne qui fait comprendre quelques mystères relatifs à l’équilibre et à la loi des corps…, ce n’est ni ici ni là qu’il faut chercher : le tango, la salsa, les bolides, tout ça c’est affaires de fesses et ressenti des hanches, il suffit de se laisser aller, peut-être, en tous cas au sensible.
Et boum…, crac…, l’auto est cassée…, ça date des années d’avant, années vingt, années trente…, c’était plus “graphique” que les accidents de maintenant…, qui plus est : en noir et blanc…