Bentley Continental Speed GT Cabriolet : 325 km/h !
Le crash redouté a bel et bien eu lieu en 2012…
Renault : – 25 %… Peugeot et Citroën : – 18 %… Opel : – 16 %… Volkswagen : – 15,8 %…
Les ventes d’automobiles se sont écrasées en 2012, enregistrant une diminution globale de près de 15 %.
Une collision généralisée pour le secteur automobile ?
Pas réellement…
Les marques les plus prestigieuses (et coûteuses) sont loin d’être à la fête : Ferrari voit ses ventes fléchir de 30 %.., tout comme Maserati : – 44 %…, Aston Martin : – 60 %… et Lamborghini : – 33 %…
Mais…, une seule marque affiche des résultats contraires : Bentley !
Ce constructeur a annoncé une augmentation de 25% de ses ventes mondiales : + 29% aux USA…, + 26% en Chine…, + 20% en Europe continentale, + 10% au Royaume-Uni…, + 43% au Moyen-Orient…, + 35% dans la région Asie-Pacifique… et + 69% au Japon.
Cela représente un peu plus de 6.000 voitures vendues…
On croyait que la crise allait engloutir l’ensemble du marché automobile et que des marques comme Bentley et Rolls-Royce allaient disparaître de la circulation (en France en tout cas)…, or, il n’en est rien, Bentley présente même une évolution de la Continental, façon Convertible…, alors que Mercedes n’est toujours pas parvenu à faire son deuil de la Maybach dont la production a définitivement cessé en 2012…, à oublier jusqu’au souvenir, même si cela mine, ronge et assaille le mental de certains…, qui en sont devenus irrémédiablement tristes, solitaires, dépressifs.
Qui sait si la nouvelle Bentley Continental Convertible va peu à peu leur redonner un certain goût de vivre ?
La mort, l’amour, le désir, l’acceptation de soi, évoquer des sujets existentiels universels, raconter avant tout l’histoire d’une seule automobile parmi la multitude, qui revit soudain, lentement.
Les clients de Bentley sont ainsi fondus comme en un homme qui entreprend sa reconstruction au contact d’une sensualité retrouvée…, à l’instar de Gustav von Aschenbach dans Mort à Venise quand il découvre et convoite le jeune Tadzio (mais si cette rencontre mène von Aschenbach à sa perte, au contraire elle régénère Yossi)… et c’est justement l’œuvre de Thomas Mann que j’écoute dans la Bentley Continental Convertible (la Symphonie n°5 de Mahler, immortalisée par Visconti dans son film) qui est semblable à un être à l’agonie qui tente de se ressaisir dans un sursaut tardif.
Tout et n’importe quoi s’imbriquent ainsi : le quotidien et ses rengaines, la crise financière et économique, mon voyage catharsique à bord de cette automobile… jusqu’à un futur fantasmé non vraiment apaisé où les Bentley’boys & girls envisagent un possible avenir.
Je vous l’écris d’emblée, la Bentley Continental Convertible se regarde simplement et sans ennui, mais n’apporte rien en soi, ni émotions ni surprises, la vie à bord déroulant un scénario linéaire à peine troublé par un moment magnifique (un plan cul qui tourne à la masturbation durant ma balade en voiture avec ma propre solitude…).
La Bentley est attachante comme tout, mais ne reste pas, n’arrache rien.
Je n’en ai gardé en tête, vers la fin, qui est venue soudain me cueillir alors que je n’attendais plus grand-chose, qu’une chambre d’hôtel où, face à la beauté d’une Mexicaine, j’ai du me mettre à nu, chancelant d’un coup d’exposer mes pensées dans la lumière…, essoufflé par l’effort, frappé par la dureté du geste.
Un petit moment touchant, discret et sans manière, mais qui manquait d’envergure, d’un grand geste libre du poignet…
Bentley a gagné au Mans cinq années quasi consécutives et passé les cinquante suivantes à s’en glorifier passivement sous le joug anesthésiant de Rolls-Royce.
Jusqu’au jour où l’on nous annonça enfin la “la renaissance de la voiture de sport silencieuse“… et qu’une Bentley revendiqua à nouveau “des accélérations susceptibles de combler les tempéraments les plus sportifs“…
En cette année 1980, il ne s’agissait encore que de la Bentley Mulsanne, un clone effacé des Rolls-Royce Silver Spirit et Silver Spur, mais le processus vers une plus grande autonomie du label Bentley était entamé.
Il ne s’arrêtera plus.
A dire vrai, peu de modèles furent aussi fraîchement accueillis que ces trois carrosses extrapolées de la même citrouille.
Les plumes anglo-saxonnes en particulier, outrepassent les révérences d’usage à l’égard de la mythologie automobile britannique.
“J’ai peine à expliquer comment Rolls-Royce-Bentley a pu passer 8 ans et dépenser des millions de livres Sterling pour sortir une nouvelle voiture de même taille, énorme, de même poids, lourde… et utilisant le même moteur assoiffé que l’ancienne”…, écrivait un journaliste de Car&Driver en janvier 1981…, ajoutant : “Une consommation d’essence de 30 litres aux 100km, aujourd’hui lamentable, devrait devenir franchement anti-sociale ou même illégale dans les années à venir. Sans son radiateur et sa dame volante de mascotte, la nouvelle Rolls-Royce serait simplement grosse, lourde et affreuse”...
Outre l’effarant bilan énergétique d’une bonne grosse gamelle de six litres trois quarts conçue en des temps plus prospères à destination du premier gaspilleur mondial de pétrole, on peut comprendre l’amertume des spécialistes quant à l’absence totale d’innovation de ce qui n’était qu’un simple re-carrossage de la précédente Silver Shadow.
Ce modèle emblématique lancé quinze ans plus tôt mais dont le pedigree technologique, quasi-révolutionnaire pour une Rolls-Royce en 1965, a fini par pâtir du manque de moyen du petit manufacturier de Crewe face à l’Empire de Stuttgart.
Quant à l’esthétique certes moins empâtée que celle de la Shadow, la raideur monacale de ses lignes trop rébarbatives pour ne pas dire déjà vues sous des labels moins glorieux, n’incitait guère au lyrisme.
Alors qu’une baraka de leader palestinien avait préservé la maison britannique des crises pétrolières durant les années 1970, la division par deux de la production annuelle constatée en l’espace de deux exercices va convaincre les plus flegmatiques qu’il ne suffit plus d’attendre patiemment la venue du candidat acquéreur.
Derrière les briques rouge de Pyms Lane, on s’est alots mis à implorer le dieu Mercure.
Et c’est alors, ô miracle, qu’un cerveau avisé a eu l’idée de lancer une Bentley Turbo, mot magique s’il en est en ces temps avides de tels superlatifs.
Certes, l’intention dépassait largement la réalité des modestes moyens techniques disponibles.
Même turbo-compressé, le paisible V8 n’en restait que faiblement sollicité, la puissance maximum estimée de quelques trois-cent percherons s’obtenant à des régimes de compresseur à mazout, là où les turbo de compétition bénéficiaient encore d’une confortable plage de régime avant de daigner s’éveiller.
Ravie de se taper autre chose que des minimum automobile aseptisés à force de boîte longue et autres brides anémiantes, la presse anglophone va succomber à l’euphorie de célébrer le “retour de la Browler Bentley”.
S’il est tout de même bien difficile de trouver une quelconque continuité entre deux engins séparés par un demi siècle de léthargie, ce moteur au tempérament pachydermique, capable de fournir un couple camionesque si bas dans les tours, n’en rappelait pas moins ce qu’Ettore Bugatti qualifiait avec ironie de : “camion le plus rapide du monde” soixante-ans plus tôt.
Avant que les journalistes avides de rapprochement historiques ne soient tentés de mettre à l’épreuve la Mulsanne dans la courbe éponyme, au risque de mettre à jour de peu gracieux déhanchements, le bureau d’étude Rolls-Royce fit en sorte que l’enthousiasme soulevé par la voiture survive au premier virage serré.
En 1985, le renfort salutaire des barres anti-roulis, de pneumatiques élargis et d’une poignée de quadrupèdes supplémentaires portant l’écurie à 389 spécimens, annonce l’évolution Turbo R.
R comme Roadholding…
“Not Roller” …,précise Motor Trend, rappelant non sans malice que l’analogie entre le nom Rolls et le verbe to roll ne tient pas seulement de la proximité sémantique.
Une nouvelle fois, l’effet surprise fait mouche : “Elle a une vivacité, une agilité sans rapport avec sa taille et ses origines“… s’enthousiasme le magazine américain Automobile. “Imaginez, si vous le pouvez, une Rolls avec des performances de Porsche, c’est la Bentley”…, résume le célèbre Motor Trend.
Bon an, mal an, la baraka persiste.
Avec ses moyens dérisoires, Bentley bat tous ses records de vente en 1990.
Trois mille carrosses produits cette année-là !
Certes, les méfaits d’une nouvelle crise venue du Golfe et la volonté du groupe Vickers de se défaire de son joyau bicéphale relancent les pires spéculations.
Cependant, les folies du sultan de Brunei, qui achète ses Bentley spéciales par demi-douzaines, permettent de maintenir le navire à flot..; et même de donner encore quelques beaux coups de griffe.
Signe des temps, la Rolls-Royce type était une Bentley turbocompressée.
En 1997, six mois avant l’arrivée de l’Arnage à coeur bavarois, les noms commerciaux muent en Brooklands R ou Turbo RT et le V8 flirte désormais avec les quatre-cent percherons-vapeur.
Je l’affirme sans férir : en inventant la première Bentley Turbo, le constructeur le plus suffisant de la planète a fait plus que découvrir le marketing, il a aussi et surtout assuré sa survie et maintenu son aura à peu près intacte durant les plus difficiles décennies de sa longue histoire.
C’est ainsi qu’en 1996, le plus célèbre fabriquant de tank recycla son unique base roulante déjà trentenaire en sportive d’opérette.
Vu les moyens dérisoires dont disposait l’auguste manufacture en ces années à ne plus mettre un carrosse dehors, ce morceau de bravoure émeut jusqu’à la lecture de sa fiche technique.
Pensez-donc, 875 Newtons-mètre à 2200 tours/minute, voilà un chiffre faramineux dont l’ouie abracadabrante bombarde l’esprit initié d’images dantesques.
Imaginez, si vous le pouvez, Elizabeth II en blouson de cuir clouté ou le vénérable yacht royal concourant au championnat du monde de hors-bord.
C’est dans l’absurdité de ses paradoxes que réside tout l’attrait de la Bentley Continental T.
Deux tonnes et demie de métal lourd mais six secondes pour passer de 0 à 100, de l’électronique dernier cri sous l’anachronisme de l’aluminium bouchonné, le raffinement inouï du fait main et la rusticité bourrue d’un V8 prêt à remorquer un pétrolier, ou comment être décadent sans se départir de sa dignité si britannique !
T comme Tyrannosaurus Rex plutôt que Testa Rossa, Tremendous Torque plutôt que Tourist Trophy.
Avec son empattement aussi long qu’une Mini Cooper entière et sa bonne grosse gamelle à la courbe de couple de Diesel industriel, cette Gargantua Turbo inquiétera davantage les turbo-bahuts et autres panzer des sables que les bella machinas de la plus pure race.
Ce cétacé sorti de je ne sais quel Jurassic Parking défiait à ce point l’entendement que toute tentative de jugement objectif se brisera sur les fanons de son monumental fronton.
Elle n’occupait pas l’espace, elle l’emplissait, l’envahissait sinon l’écrasait en s’imposant aux regards plus qu’elle ne se proposait à eux.
Ni raisonnablement belle ni honnêtement laide, elle était, tout simplement.
Définitivement étrangère à tous critères d’évaluation contemporains, elle ira jusqu’à se jouer des repères temporels.
Elle était née en 1996 mais aurait pu tout aussi bien voir le jour en 1986 ou en 1976 tant elle s’inscrivait dans la parenté technique de la vénérable Rolls-Royce Silver Shadow de 1965.
Alors que s’éteignaient les derniers dinosaures, ce coup de force magnifique et dérisoire comme un baroud d’honneur fera réaliser l’incommensurable absurdité d’un paquebot de sport…, jusqu’à ce que Bentley lance sa nouvelle Continental Converible… alors que les ventes de toutes les autres Bentley sont en constante augmentation pour 2012…
Provocation ultime, donc, pour ce cabriolet quatre places le plus rapide du monde : plus de 300 km/h en plein hiver.
L’humour britannique a toujours ce petit parfum provocateur qui fait présenter par Bentley sa Continental Convertible en plein hiver, qui plus est dans le froid polaire du Salon de Detroit, en cette mi-janvier 2013, en y ajoutant une once tout aussi décoiffant : Sa vitesse maximale de 325 km/h établit un nouveau record pour rouler cheveux au vent.
Le 0 à 100 km/h est atteint en tout juste 4,4 secondes et il ne faut que 9,7 secondes pour atteindre les 160 km/h…, à peine quelques dixièmes de seconde supplémentaires par rapport au coupé.
Étonnant W12 !
Cette nouvelle carrosserie reprend tout de la version coupé, dont l’unique et toujours étonnant W12 biturbo 6.0 l de 625 chevaux et 800 Nm de couple.
La boîte auto ZF 8 rapports améliore sa sobriété de 15 % (14,9 l/100 km, soit 347 g de CO2), compensant ainsi l’aérodynamique assez médiocre des cabriolets en général par rapport aux coupés dont ils sont déclinés.
Autre modification nécessaire : le châssis est abaissé de 10 mm et la direction se veut plus réactive.
La transmission intégrale permanente n’est pas modifiée et favorise toujours un typage propulsion avec 60 % du couple vers l’arrière.
Et la masse totale de cette Continental GT Speed Convertible atteint toujours des sommets : 2 495 kg à vide, soit 175 kg de plus que le coupé.
Malgré un châssis affûté, ce n’est toutefois toujours pas une vraie voiture de sport, plutôt un coupé grand tourisme parfaitement accompli.
C’est déjà très bien !
Premier modèle entièrement conçu sous la coupe du groupe Volkswagen, le coupé Continental GT associe toujours avec un bonheur relatif, tradition et modernité, ou autrement dit : un admirable sens du luxe à l’anglaise avec le meilleur de la technologie allemande.
En dix ans, il est ainsi logiquement devenu le modèle phare de la marque anglaise et bénéficie, à ce titre, de toutes ses attentions.
Après l’introduction d’une version “light”, animée par un “petit” V8 de 500 chevaux, le renfort d’une déclinaison Speed franchement musclée devait dans le cerveau de ses concepteurs, accroître encore une demande qui avait pourtant déjà augmenté de 25 % en 2011.
Malgré ses 575 chevaux, la version standard de la Continental GT doit certainement sembler mollassonne à certains puisque la moitié des acheteurs du modèle sont prêts à craquer pour la Speed.
Il est vrai qu’à ce niveau de prix (plus de 200.000 euros) ce n’est pas un maigre supplément de 10 % qui va les rebuter…, d’autant qu’ils en ont finalement pour leur argent.
Sobre et élégante, elle s’habille également de bois précieux ou d’un aluminium brossé du plus bel effet, brillant ou sombre, au choix.
La perfection de la finition, le souci du détail participent au plaisir que l’on a à s’installer à bord, en commençant par saisir un pommeau de levier de vitesses en aluminium moleté qui a tout d’un joyau.
Pour la partie “branchée”, on commande tout à partir d’un écran tactile de huit pouces : navigation, système audio, téléphone, réglages de la voiture, etc.
Le meilleur de deux mondes.
La Bentley Continental Speed Convertible m’attendait attend sur le parvis de l’aéroport et j’ai vite compris qu’elle méritait son nom.
Le discours de bienvenue fut bref et sans détour : “Chez Bentley, on n’a pas pour habitude de limiter la vitesse de nos voitures. La Speed peut ainsi dépasser les 330 km/h. Vous allez pouvoir le vérifier tout de suite”…
En accrochant en un clin d’oeil 270 km/h à plusieurs reprises, j’ai rapidement pris la mesure du potentiel de l’engin.
Ça poussait fort, très fort même, et ça allait vite, très vite…, mais sereinement et en toute décontraction, car la tenue de cap restait impeccable, le freinage sécurisant et le silence à bord reposant.
Pour avaler les kilomètres confortablement et à bon rythme, on ne fait guère mieux.
Une fois sur route sinueuse, je me suis régalé de la sonorité grave du W12…des passages de vitesses à la volée autorisés par le mode manuel et des palettes au volant.
Toutefois, l’aptitude sportive de ce bolide avait ses limites.
Si elle virait à plat et était capable, grâce à ses quatre roues motrices, de négocier les grandes courbes à une allure impressionnante, j’ai été en effet beaucoup moins à l’aise lorsque les virages se resserraient.
Avec un poids de plus de 2,3 tonnes, dont 60 % supportés par le train avant, la tendance au sous-virage est logiquement marquée et nécessite une certaine anticipation.
D’autant qu’en utilisation intensive les freins perdent rapidement de leur efficacité, légitimant les éléments carbone-céramique proposés en option.
Si l’on y ajoute une gestion moteur-boîte qui manque parfois d’un peu de fluidité dans ces conditions et un train avant qui, lors des fortes accélérations, a un peu de mal à composer avec les chevaux qui lui sont dévolus, j’ai vite réalisé que ce n’était pas au rythme d’une voiture de rallye mais bien à celui, coulé, d’une automobile de prestige que cette Continental GT Speed s’appréciait le mieux.
Outre sa capote souple rétractable à quatre couches, cette GT Speed Convertible se distingue du coupé par une grille de calandre et des prises d’air dans le pare-chocs, chromées…, ainsi que des jantes alliage de 21 pouces.
Bentley précise, non sans humour dans son communiqué de presse : “Bien que la nomenclature de la Speed ait été ranimée en août 2007 avec la Continental GT Speed de première génération, le nom date de l’époque de W. O. Bentley, avec la 3 Litres Speed de 1925 et le modèle Speed Six victorieuse au Mans qui a suivi. En toute logique, la toute première Bentley Speed était également une décapotable, offrant aux pionniers du sport automobile la chance de profiter de la conduite cheveux au vent et d’une authentique capacité à atteindre les 160 km/h. La GT Speed Convertible affiche 325 km/h, quant à elle, est plus de deux fois plus rapide que son ancêtre, et incroyablement plus civilisée pour le conducteur et les passagers”…
Reste à trouver les euros, l’espace et le temps pour en profiter !