Trike V12, Dragsters au Castelet et Chromes&Flammes Show à Paris.
En 1982, il faisait très chaud !!!
Chromes&Flammes magazine a été créé en 1979 au départ du magazine Pretty-Car, qui lui-même était extrapolé des leafleets Viking que j’avais imaginé en 1978 dans le cadre du lancement de cette nouvelle cigarette du groupe British American Tobacoo…, dont j’étais en charge de la publicité au nom de Norman, Kraig & Kummel.
La campagne publicitaire Viking était articulée sur un concept simple, une fille blonde (tabac blond) et une fille noire (tabac noir) habillées de peaux de bêtes dans l’imagerie Viking qui “collait” au style des Hells Angels et des Hot-Rods aux USA.
A l’époque, je m’étais fabriqué un Rod sur la base d’une Oldsmobile 1948 raccourcie et “top-choppée“, engin qui fut repeint dans les couleurs Viking (dragon, filles sexy’s), de même qu’une Ford Taunus 1947 et une Simca Versailles des années ’60.
Quelques chopper’s devaient suivre, toute cette flotte d’engins servant dans des shows ou dans des manifestations diverses regroupant des milliers de personnes.
Des filles blondes et des filles noires pilotaient ces véhicules et distribuaient gratuitement des paquets-échantillon de 2 cigarettes (un mélange de tabac blond et noir), ainsi qu’un leafleet expliquant le monde Viking, dans l’atmosphère des Hot-Rods et des Choppers… : le renouveau du monde du Cow-Boy Marlboro…
La boîte de pub qui m’employait m’a finalement évincé parce qu’elle ne touchait pas de sur-commission payées par les médias dans le cadre de campagnes classiques (journaux, magazines, affichage 20m² et abribus)…
Avec ma prime de licenciement, j’ai créé le magazine Pretty-Car, mais après trois numéros assez fins (dans le seul sens du terme), j’ai été approché par deux loustics qui voulaient créer une course de dragster en france…
J’avais quelques voitures customizées, un peu d’argent, quelques amis anglais propiétaires de Dragsters…, ainsi qu’un ami belge (William Van Hove) pour la maintenance mécanique…, j’ai mis tout le monde ensemble et créé la première course de Dragster en France, sur le circuit des 24 heures du Mans…
La suite fait partie de ma légende et du mythe Chromes&Flammes qui est né en même temps que cette course qui a attiré plus de 100.000 spectateurs payants.
En deux ans, Chromes&Flammes tirait à 500.000 exemplaires mensuels en 5 langues et éditions, dans le monde entier…
Le Trike V12 a été construit dans cette période d’euphorie…, par Dragsters Of Road de Paris (chassis) et ACP à la Défense (mécanique) et a assuré la promotion du magazine édition Française, circulant quasi quotidiennement sur route et réalisant des démonstration lors de courses de Dragsters en France et dans les Chromes&Flammes Shows.
L’aventure va durer 10 ans à fond la caisse, dans une folie débridée… et sous la vindicte du fisc qui va me réclamer (en pure perte malgré les procédures que j’ai finalement gagné) plus de 120 millions rien que pour l’année 1985 !
Puis suivirent encore 10 ans, mais de plus en plus calmes, une lente érosion du genre en cause du Tuning.
A force de recevoir des émails d’anciens lecteurs de C&F me retrouvant grace à Google, disposant d’un site-web assez performant, j’ai finalement accédé aux diverses demandes de recréer un Chromes&Flammes sur le web…
Bienvenue dans www.ChromesFlammes.com
Et n’oubliez pas www.GatsbyOnline.com
Ci-après un article de Jack Lancaster publié en 1982 dans Chromes&Flammes.
Dans un autre panneau, je vous entretiendrai de la course de Dragster du Mans, la première du genre en France !
Amicalement à toutes et tous…
Patrice De Bruyne
1982… Paris, lundi, 11h15, Porte Maillot… J’ai rendez-vous avec l’éditeur du magazine Chromes & Flammes, le sulfureux Patrice De Bruyne. 11h30, un ronflement puissant se fait entendre dans le lointain, là, soudain, au milieu du trafic apparait le fameux Trike V-12.
Il déboule à 200hm/h dans le grand rond-point de la porte Maillot, slalomant entre les voitures.
Je me dis qu’il se rapproche drôlement vite, qu’il va louper son virage, continuer plein pot vers l’Arc de Triomphe et s’y encastrer.
Une légère fumée semble venir des freins arrières, des jantes et pneus de Formule 1.
Ca crame, il pourra sûrement pas s’arrèter à temps.
Prudent, pour ne pas dire autre chose, je dégage le trottoir et escalade un petit muret, me disant que s’il rate son arrivée, au moins mes jambes (et le reste) resteront intactes.
Le Trike est sur la bande de droite, il semble hésiter entre continuer tout droit vers l’Arc de Triomphe ou s’arrèter magistralement pile-poil juste devant moi…
Et soudain, la longue fourche à parallélogrammes de ce Trike de l’enfer semble légèrement tourner, insuflant une nouvelle direction à l’ensemble de l’engin apocalyptique.
Le ronflement de ses échappements s’amplifie, un bras se tend, une main s’agite pour me saluer, comme pour dire joyeusement “Coucou, c’est moi…” et le Trike s’arrète derrière ma Citroën et pile-poil devant moi. Patrice De Bruyne en descend, souriant. –Voyez, je ne vous ai pas oublié, venez faire un petit tour avec mon Trike !
Et je m’approche de l’engin démoniaque. Mes lunettes de soleil n’ont pas le temps de noircir assez vite, je dois fermer les paupières tellement ça brille, tellement tout les chromes me renvoient la lumière en pleine figure.
Le moteur Big-Blok Jaguar V-12 de 5300cc crache ses 400cv par 12 tuyaux d’échappements libres.
Pas une trace d’huile, une propreté clinique.
Patrice De Bruyne m’explique que ce moteur, sa boîte automatique et le pont arrière directement accouplé à celle-ci sans arbre de transmission, proviennent d’une Jaguar Type-E V-12 accidentée et en perte totale.
Le châssis a été conçu et fabriqué par les ateliers “Dragsters Of Road” de Paris, spécialisés en Choppers Harley, tandis que la mise au point mécanique à été réalisée par les ateliers “ACP” situés près de la Défense à Paris. –L’accélérateur est sur le guidon, par contre la commande des freins est au pied gauche.
Les poignées sont d’origine Harley-Davidson, les commandes de clignotants et l’avertisseur s’y trouvent.
Voilà, c’est simple…, la clé de contact se trouve au milieu des instruments, manomètres et compteurs sur le gros boitier alu en face du siège.
Allez-y cool pour l’essai, avec une fourche avant à parallélogrammes de plus de deux mètres, pas de freins et un pneu riquiqui à l’avant, plus deux pneus de F-1 derrière, vous allez avoir vite chaud…
Le salaud, l’immonde salaud, comme briefing c’est costaud, autant me dire “Banzaï” et m’envoyer au casse-pipe. –Avec les quatre carbus double corps et les modifications apportées au moteur, ce bestiau atteint 400cv, pas trop mal, mais n’appuyez jamais sur le bouton rouge de la poignée de gauche, elle commande l’injection d’oxyde nitrique, et alors la puissance est quasi doublée, soit environ 750cv, je m’en sers dans les courses de dragsters ou pour épater les mecs en Ferrari et Porsche aux feux rouges…
C’est dément.
Le salaud, 750cv sans freins à l’avant, sur un pneu de 10 cm de large et une jante à rayons…
La direction doit être infernale avec une fourche à parallélogrammes comme sur les motos d’avant-guerre, la première, celle de 14… Je m’installe et j’ai directement une impression bizarre en regardant devant moi.
Pas de capot moteur, les carbus sont dans la ligne de conduite, la fourche est actionnée par des barres de renvois fixées à un guidon dont l’axe est boulonné sur le dessus de la boîte automatique.
Le siège baquet se trouve juste au dessus du pont et, de chaque coté, deux roues de Formule 1 que Patrice De Bruyne a racheté chez Ligier avant la disparition de la marque. C’est dingue, c’est dément…. Je tourne la clé et VRAOUMMMMMMMMMMM… Paf… Vroumm… VRAAAARRR… ! Sans tourner la poignée de gaz, le ralenti se stabilise à 850 tours, je shifte en “D” en appuyant sur la pédale de gauche et le Trike fait un “Clonck” en bondissant en avant de 50cms… Saloperie !
Cligno à gauche, j’appuie doucement et…. miracle… ça roule… Je suis dans le trafic, direction l’Etoile. Les conducteurs me regardent comme si j’étais un extra-terrestre sur une soucoupe volante.
C’est qu’en fait, ce bazar vole plutot qu’il ne roule. D’un grand coup de pied j’écrase l’accélérateur et…OUHHHHHHHHHHHLLLLAAAAA…, la boîte passe violemment les rapports et les roues arrières se mettent à cirer dans un gros nuage de fumée, ça n’accroche pas les pavés, ça cire, ça patine, l’arrière se met peu à peu de travers, pas moyen de contrebraquer la fourche avant, qui, de toute manière, ne fait que pencher la petite roulette avant vers la droite ou la gauche…
Saloperie ! Et WHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA…, les pneus accrochent brusquement, l’engin se soulève à l’avant. Oui, la roue est au moins à un mètre du sol, il n’y a pas moyen de diriger le Trike, je ne vois plus rien que le moteur qui se dresse devant moi, tandis que derrière c’est un nuage de fumée opaque ! Je vole ! Après un bond d’au moins cinquante mètres, la roue avant revient en contact avec le sol et le Trike fonce tout droit à plus de 120km/h dans un vacarme assourdissant. Saloperie, 130, 140, 150, 160, 170, 180…. je lache les gaz, le Trike louvoie de gauche à droite et je suis déjà dans le rond-point de l’Arc de Triomphe… Je vais mourir, m’encastrer dans une fourgonette, emplafonner un bus, passer au dessus d’une 4L. Non…, j’ai réussi à passer par miracle et je déboule dans les Champs-Elysées…
Saloperie, le Trike semble plus léger, j’ai certainement laissé dix kilos de gommes sur les pavés. Les gens me regardent les yeux exorbités. Je décide de remettre les gaz, mais plus progressivement, la boîte passe en “2” et soudain…: WHAAAAAAAAAAAAAAAAAAA…, c’est pas possible cet engin, je tiens le guidon fermement, et pour la première fois je savoure l’accélération foudroyante.
Le grondement assourdissant des échappements résonne comme si la Patrouille de France descendait les Champs-Elysées en rase-mottes.
Un potin d’enfer, je me croirais presque à cheval sur une grosse caisse de fanfare municipale. J’appuie encore sur la pédale des gaz, et WHAAAAAAAA…, ma tête est projetée en arrière, les pneus accrochent et le Trike est catapulté en avant, le bruit des échappements me transperce les tympans, c’est du délire…, c’est l’extase ! Et… Hop, je soulage la pédale des gaz quand le compteur indique 220Km/h… En un éclair je me retrouve à l’Obélisque, zigzaguant entre les taxis qui claxonnent, je grille les feux, de toute manière les freins…. pfffffffffffffffff…, grand coup de godasse sur le frein et ZAAAAAAAAAAAAA… en travers, 80km/h, me revoila remontant les Champs-Elysées. Les gens ont les sourcils en accents circonflexes, certains ont le pouce levé, d’autres me montrent un autre doigt… J’écrase la pédale des gaz, le Trike bondit. BLAMMMMMMMM…, comme un coup de canon, merde, j’ai poussé sur le bouton rouge du Nitrous-Oxyde. En moins de 3 secondes le compteur indique 200km/h, je suis béat. Je lache l’accélérateur et carresse le frein. Les gens me regardent stupéfaits. Des flics sifflent, je vois des gyrophares bleus.
J’approche à toute allure du rond-point de l’Arc de Triomphe qui est traversé par un flot ininterrompu de voitures pare-chocs contre pare-chocs et je réalise avec effroi que je ne pourrais pas m’arréter à temps. Les deux mains crispées sur le guidon, le pied gauche appuyant à fond sur le frein, je me met à pomper espérant un miracle. Ca commence à fumer. Une odeur âcre tourbillone autour de ma tête.
500 mètres.
400 mètres.
300 mètres.
200 mètres.
100 mètres. Saloperie ! Maman, si tu voyais ton fils ! Han !
Les roues arrières se bloquent, ça gueule comme cent porcs qu’on égorge. Je murmure : “Notre père, vieux salaud, pourquoi Moi ?“… Et miracle, il reste 5 mètres d’espace entre un bus et une Peugeot dans lesquels je m’engoufre dans un vacarme infernal et un nuage de fumée. Il est bienvenu ce nuage de fumée, car il me cache aux yeux des pandorres lançés à ma poursuite. Je traverse le rond-point sans même le voir et Hop, je déboule en vue de la porte Maillot…. Saloperie… Soudain, je le vois.
Il me fait signe près du feu rouge à hauteur de la Brasserie.
Je freine en catastrophe, met le sélecteur sur “Parking“, saute en bas du Trike et hurle : “Les flics, les flics“… Patrice De Bruyne comprend la situation, s’assied aux commandes et appuie à fond sur la pédale d’accélérateur en me faisant un signe du doigt… Dans un BARAOUMMMMMMMMMM… d’enfer, le Trike s’arrache du passage pour piéton et fonce en direction de la Défense…, tandis qu’un nuage de fumée enveloppe le carrefour… Je ne l’ai jamais revu ! Jack Lancaster & Co
Le Trike V-12 a participé par la suite à des courses de Dragsters.
Ci dessous au circuit de Zandvoort en 1985 (autre phare avant, échappements positionnés plus haut, garde-boues et porte-bagage ainsi qu’un roll-bar et un autre radiateur, le tout beaucoup mieus “fini”)…
Un an plus tard, le Trike faisait un “soleil” lors d’un démarage en force à Paris…
Plié, il a été vendu au garage Daytona près de Cannes qui a disparu peu de temps plus tard, avec le Trike V12 que plus personne n’a jamais revu…
La légende affirme que le Trike V12, l’Oldsmobile 48 et la Traction avant Hi-Boy, trois engine mythiques de Chromes&Flammes, se trouvent dans le garage d’une villa de la Côte d’Azur, à Vence, entre les mains d’un milliardaire exentrique.
Le Trike V-12 avait également participé à des courses de Dragsters en 1984 sur le circuit du Castelet, tel que vous l’avez vu (ou allez le voir) sur la vidéo Viméo placée sur ce panneau…