2020 Emory Motorsports, revival 1960 Porsche 356 RSR “Cracker-Jack” !
Cette fausse Porsche 356 RSR est désignée être une “Cracker Jack” aux USA ou elle est bricolée…, “Cracker Jack” est une marque américaine (Frito-Lay) de snacks composés de pop-corn et d’arachides enrobés de caramel et de mélasse, vendus en sachets transparents et bien connus pour le “cadeau” d’une valeur insignifiante qui se trouve à l’intérieur.
Le nom et le slogan de “Cracker Jack” : “Plus vous mangez, plus vous en voulez”, ont été enregistrés en 1896…, les historiens de l’alimentation considèrent ce produit comme la première malbouffe… et avec le temps, aux USA, toutes les automobiles commercialisées qui s’avèrent être des choses bricolées et d’une valeur d’investissement douteuse, sont caricaturées sarcastiquement comme “des gadgets qui se trouvent dans les paquets de Cracker Jack”…
Cette Emory Motorsports revival 1960 Porsche 356 RSR est une pure “Cracker-Jack-Gadget”…, l’aboutissement d’un projet de sept ans (3 ans de réflexions diverses + 4 ans de réalisation) que Rod Emory défini comme : “Un hommage à la Porsche 935 des années 1970, via une réplication (sic !) approximative d’une 356B 1960 façon Outlaw (re-sic !), sous l’inspiration d’une Porsche 964 de 1990, façon 911 C2, motorisée par un quatre cylindres VW 2L4 turbocompressé développant 393 chevaux (re-re-sic !)”
C’est alambiqué, totalement crétin et stupide, exactement tels les gadgets de “Cracker Jack”… et cette archi fausse 356 RSR a donc mis quatre ans pour être construite après 3 ans de pensées déviantes…, Rod Emory expliquant avoir ainsi réussi à diviser équitablement la différence d’empattement entre les deux voitures donneuses tout en conservant les éléments de suspension de la 911 C2, mais en retravaillant le cadre arrière pour l’adapter plus ou moins correctement à un quatre cylindres VW : “Identique au look d’une Porsche 356B”…
Selon les explications de Rod Emory, recueillies sur mon agenda…, le capot et le nez (enveloppé) ainsi que la longue queue sont en aluminium, les fausses calandres sont en maille d’acier inoxydable (sic !) et sont sensées accueillir de l’air pour qu’il s’écoule dans les conduits de refroidissement du moteur (re-re-sic !), tandis que les louvers situés au-dessus des roues avant sont sensés évacuer de l’autre air (re-re-re-sic !), c’est à dire de l’air (terrestre) venant des puits de roue (re-re-re-re-sic !).., les évents dans les ailes arrière en acier alimentant simultanément les intercoolers (re-re-re-re-re-sic !)…
Voulant en savoir plus sur le coté génialement surréaliste de cette fumisterie apocalyptique, Ron Emory m’a avoué qu’après avoir dessiné son idée sur un napperon papier d’un restaurant mexicain tenu par des Vietnamiens, il a posté ce croquis sur Instagram… et a eu la surprise que le PDG des volants Momo : Henrique Cisneros, entre en contact avec lui pour savoir ce qu’il faudrait qu’il mette sur et sous la table… pour construire la voiture (Cette explication qui équivaut à boire d’un trait le contenu d’une barrique de Téquila, éclaire de manière éblouissante le pourquoi des nombreuses inscriptions Momo tout au long de la bagnole qui en devient un hamburger publicitaire).
Momo a fabriqué et livré les jantes à fixation centrale de 17 pouces à cinq rayons spécialement pour cette voiture, s’inspirant de celles utilisées en course sur une Porsche 935… et c’est également Momo qui a fourni le volant copié de celui de la 911 RSR Prototipo (à “libération” rapide), ainsi que les coussinets Momo-billet sur les pédales Tilton, un pommeau de changement de vitesses Momo-shift inspiré de la Porsche 917 pour la boîte de vitesses manuelle à cinq vitesses, des sièges calqués sur la 911 RSR (sans appuie-tête), et un harnais de compétition Momo à six points.
Le moteur VW 2L4 a été boosté via deux turbos Garrett avec intercoolers personnalisés…, tandis qu’un échappement quatre en trois en deux en un… se termine par une double pipe droite courbée…, un bouton positionné suite à de savants calculs sur le tableau de bord peut augmenter le Boost des turbos jusqu’à 1,2 bar…
Et en cette suite ahurissante, divers éléments particulièrement soignés incluent des éléments décoratifs en fibre de verre de teinte ambre, la même matière qu’utilisée pour les casquettes de tableau de bord inspirées par les Porsche 917 et 935…, tandis que les revêtements de sol sont réalisées en “Hardura” de qualité marine dans le caoutchouc qu’on pourrait trouver dans les Porsche GT…
Le créateur éponyme m’a toutefois avoué en conclusion que tout le monde n’était pas fan des finitions : “On me dit souvent que c’est trop exagéré, même aux yeux de certains des puristes parmi les plus indulgents, mais la voiture attire beaucoup d’attention et sert maintenant de référence”…
Ses explications m’ont poussé à faire une crise de nerfs, ma vie basculait, faut me comprendre…, je n’en pouvais plus de son expression pâmée, tout révélait la grande couillonnade bien sublime, l’emplâtrée géante : délices et grandes orgues…, j’ai commencé par crier de détresse, puis par maugréer, me reprochant de me laisser presque entuber, mais qu’y pouvais-je ?
Je lui ai répondu que ça risquait de mal tourner si sur le champ, je ne pouvais faire une balade au volant de sa fausse Porschette diabolique…, il a accepté sous condition que je ne publie rien de négatif, ce que j’ai accepté (un mensonge hyper volontaire digne des meilleurs tacticiens militaires)…, on est montés dans “la chose”, j’ai “starté”, le moulin a de suite émit le vacarme caractéristique des 4 cylindres VW refroidis par air, j’ai tapé l’accélérateur “à donf” et c’est parti tout mou…, sauf que j’ai opéré une embardée, because un chat noir qui traversait la rue, que j’ai écrabouillé.
Rod Emory m’a alors intimé l’ordre de faire demi-tour pour corriger le sort, sa maman d’origine mexicaine lui ayant inoculé le virus de la superstition…, j’ai décrit un arc de cercle pour contourner le cadavre du chat, puis suis allé chercher la route côtoyant les montagnes alentours…
— C’est loin, la prochaine agglomération ? m’enquiers-je…
— Je ne sais pas.
— Il y a de l’essence ?
— La jauge est détraquée, on verra.
Au lieu de m’alarmer, son insouciance m’a ragaillardi…, la chance sourit toujours aux optimistes.
Je me suis mis à rouler d’une allure endiablée, enregistrant les écarts de direction, mordant volontairement les talus, écrasant quelques autres bêtes rôdeuses : coyotes et chats sauvages.
— Quand je suis pété, je fais ce que je veux.
Faut dire que c’est angoissant de devoir m’arracher à une vie douillette et honorable pour foncer vers l’inconnu dans une VW foireuse maquillée en Porsche comme une VW volée…, une malfaitrice du plaisir automobile, pute à jamais classée monument hystérique, mais un mec qui mène mon existence ne peut folâtrer dans les péripéties ineptes d’une littérature de style “Sergio Bellâtre” !
Manière de tuer dans l’œuf tout malentendu, je lui ai murmuré :
— Vous avez la perspective d’un endroit où aller ?
— Non. Allez droit devant vous !
— Pas de famille au cas ou on meurt, car elle tient la route comme une machine à laver le linge sur roulettes…?
— Mon père ; mais il est pasteur évvangéliste.
— Des frères, des sœurs ?
— Je suis fils unique.
Le voyage continuait…, on croisait de très rares voitures sur cette route de l’enfer : des glandus qui fonçaient… et moi je filais, avec de temps à autre, un coup de saveur par le petit vitrage de la cabine
— Que comptez-vous faire, plus tard ?
— Devenir riche.
— Louable ambition. Et comment vous y prendrez-vous ?
— Comme il faudra, selon les opportunités.
Ensuite, on l’a bouclé parce qu’il faisait une sacrée soif…, un peu léger de s’engager ainsi dans une traversée du désert, l’air brûlant, plein de poussière en suspension, nous consumait… et soudain le moteur s’est mis à débloquer.
— L’essence, hein ?
— Ça y ressemble…
Comme on amorçait une descente en lacet en roue libre, ce qui était de la dernière imprudence, mais les freins ne répondaient plus…, le véhicule prenait de plus en plus de vitesse…, cramponné au volant, je faisais ce que je pouvais, d’autant que la pédale de frein ne freinait plus rien…, la roue avant droite tutoyait les remblais et le véhicule, décontenancé, a soudain décrit un tête-à-queue qui nous a placé perpendiculairement à la pente…, ça tanguait, la fausse Porschette embardait et je n’y pouvais plus rien…, la direction m’a alors échappé, j’ai essayé de l’empoigner, tandis que Roy Emery braillait d’horreur…
C’était hallucinant mais calme dans la perception que j’en avais : l’horreur au ralenti, teintée d’incrédulité, avec, au fond de mon être, une espèce de confiance forcenée en mon étoile.
On dévalait en bondissant… et, brusquement, face à nous : un amoncellement de roches…, de part et d’autre, c’était le vide vertigineux…, finito !
Fermer les yeux ?
A quoi bon perdre une séquence pareille, qu’on a tant de mal à réaliser au cinéma ?
On allait trop vite, Roy avait immensément peur…, en un milliardième de seconde, la terrific question me vint à l’esprit : “Que fais-tu, Ducon ? Tu essaies de sauver tes os en abandonnant Roy Emery ou bien tu acceptes de mourir avec lui, par pure élégance morale, parce qu’un capitaine d’industrie comme moi n’abandonne pas la dunette quand son barlu coule comme un fer à repasser ?”…
Je n’ai pas eu le temps de me fournir la réponse, un choc atroce m’a déchiré tout le côté droit, ma tête s’est enveloppée d’une épaisse vapeur pourpre…, il me semblait que j’étais broyé…, je ne bougeais pas…, je n’entendais rien…
Cependant, cette foutue merde avait bel et bien percuté les rochers, et une confuse idée m’a pénétré le cigare : “Elle ne prendra pas feu puisqu’il n’y a plus d’essence”…
J’ai essayé de me mettre sur le dos…, impossible…, je m’imaginais archiplégique, pot de fleur à vie…, cela arrive bien à d’autres, pourquoi pas à moi ?
Si la chose m’échoyait et que je n’en mourais pas, je réorganiserais mon existence autrement, voilà tout…
L’homme est conditionné de telle façon qu’il peut TOUT accepter, TOUT subir…, il lui est même possible de vivre dans sa tête… et seulement dans sa tête…, alors je soupire in petto : “O.K., Seigneur : je suis prêt !”…
Beau, non ?
La soumission au destin, l’acceptation sans pleurnicherie.
Le soleil dardait encore comme un dingue, une puissante odeur d’huile me parvint, l’olfactif primant toujours chez moi parce que le monde pue !
Alors, j’ai fait mon bilan…
Jambe gauche ? Je parvenais à la plier, donc tout n’était pas zingué.
Bras gauche ? Je l’amenais jusqu’à ma tête.
Pied droit ? Dieu qu’il me faisait mal !
Roy Emery ? Je l’ai gardé pour la fin…, le pauvre “avait morflé l’carter dans l’burlingue, et l’pare-brise avait décapité sa tête”.
J’ai fermé les yeux… et un grand froid m’a enseveli au fond de la misère humaine.