Tom Meade : THOMASSIMA I II III
Tom Meade est né à Hollywood/Californie/USA le 19 janvier 1939. Lorsqu’il est sorti de l’enfance il a soudain été enveloppé d’une illumination quasi christique à force de rêver d’automobiles extraordinaires comme d’autres rêvaient d’anges chevauchant des machines extraordinaires. Son but : aller de l’avant tout en revenant en arrière, mais plein pot, droit devant, imaginer, créer et construire des voitures de course pour tous les jours qui passent. Il traverse les USA avec l’idée en tête de s’en aller sur un cargo à destination de l’Italie ou se nichent les grands noms qui trottent dans l’imaginaire des carrosseries de rêve… Il se lance, il survit de petits boulots et économise pour payer le voyage.
Plutôt qu’un aller simple bon marché, il propose au capitaine de plusieurs cargos qu’il travaillera durant le voyage pour couvrir le coût de celui-ci, mais le seul capitaine qui accepte son deal va en Norvège. Tom Meade accepte, bourre un sac de jute de ses affaires, fourre les 50 $ qu’il a économisés dans sa poche et “vogue la galère”… Il travaille comme soutier, a le mal de mer pendant 35 jours dans le céréalier norvégien nommé “SS Nardo”, il arrive exténué à Stavanger en Norvège et se dirige directement vers le sud avec “son pouce de voyage”. Une année d’aventures plus tard, il arrive enfin presqu’au but… Il est passé par la Pologne, la France, l’Espagne et s’est échoué plusieurs mois à Majorque ou il a animé des orgies…
Une de ses conquêtes le prend comme assistant sexuel et matelot “toutes tâches” de compagnie en voilier pour Gênes et, à destination lui achète une vieille moto pétaradante avec laquelle il se rend à Rome. Hasards romains, bellâtre pour de vieilles peaux italiennes il obtient un job de gardien de nuit pour surveiller les décors d’un film de Dino De Laurentiis intitulé “Best of Enemies”. De gardien des trésors des entrepôts cinématographiques, il est promu acteur pour un rôle de complaisance et il devient “homme de mains” pour ses performances sexuelles, nuits et jours, un authentique mythe urbain du cinéma italien. Il continue de la sorte jusqu’à Modène, l’épicentre selon-lui des voitures fabuleuses.
Incroyable mais vrai, après avoir passé toute une nuit à chercher l’usine Maserati, il y arrive un matin à 7h30, trouvant l’endroit fermé et presque désert. Par hasard, Aurelio Bertocchi, (futur président de l’entreprise et fils du pilote d’essai Guerrino) avait travaillé toute la nuit et lui a offert une brève visite, subjugué par ses deux ans de voyages pour arriver chez Maserati… Tom Meade, notre héros, a remarqué une vieille 350S de course sous une bâche qui ne dissimule pas sa forme élégante. Et il ose demander à Bertocchi si elle est à vendre :
– “Non. Nous ne vendons pas de vieilles voitures de course à notre clientèle. D’ailleurs elle est incomplète, il manque le moteur et la boite”….
Maserati récupérait généralement ses voitures de course de la saison précédente, en ce compris celles de ses clients qui n’en voulaient plus et après en avoir récupéré diverses pièces, les laissait pourrir dans un champ marécageux derrière les ateliers. Tom Meade parvient à obtenir l’épave pour un prix équivalent à 420 $, mais pressentant que Aurelio Bertocchi vient de s’être laissé aller à cette générosité en cause de sa fatigue, il force à “taper dans leurs mains à l’ancienne” comme s’est encore d’application en Italie, en prenant comme témoin un camionneur qui venait d’arriver avec un camion-plateau. Il était 8 h 30. Il venait déposer une Maserati accidentée en perte totale mais avec son moteur et sa transmission.
Tom Meade “deale” pour tout avoir, le hasard fait qu’il est avec les patrons, le camionneur est Giorgio Neri en personne… Une chance sur des milliers d’avoir deux mythes automobiles face à lui un matin, par hasard… Incroyable, le patron de la Carrozzeria Neri & Bonacini, accepte, tandis qu’Aurelio Bertocchi s’amuse… Meade met son sac de couchage à côté de la voiture du moteur et de la boite et s’endort…
– J’ai dormi là parce que j’avais peur de laisser la voiture seule”... écrira-t-il plus tard dans ses mémoires.
Un vieux débarra voisin de l’usine Maserati devient ensuite l’atelier de restauration de Tom Meade mais aussi sa maison.
Les mécaniciens de course Maserati passent leurs heures de repos dans le débarra à aider Tom Meade dans son projet et, ce qui n’est pas négligeable, à améliorer son italien alors qu’ils essayaient de comprendre l’anglais.
– “J’ai eu la relation la plus fantastique de ma vie avec eux, j’étais vraiment comme leur animal de compagnie, l’animal de compagnie de l’usine Maserati”, a-t-il écrit dans ses mémoires : “Ils aimaient ma façon de faire les choses, j’étais très aventureux et surtout inconscient. Être “Adventureurous” faisait partie du maquillage. Je suis en effet né à Hollywood au début de 1939. À l’âge de 8 ans, je déménageais avec ma mère en Australie”…
Il était à l’école primaire quand ils ont redéménagé à Hawaii, où il a commencé à fabriquer des planches de surf. Sa mère a re-redéménagé à nouveau en Californie. Il s’est enrôlé dans la Marine pour voir le reste du monde immédiatement après l’obtention de son diplôme. Aurélio Bertocchi a présenté Tom Meade à Medardo Fantuzzi pour l’aider à restaurer la carrosserie de la voiture, le constructeur italien de voitures de course partageait l’enthousiasme du jeune Américain pour les motos, il a donc été convenu entre eux que Meade aurait l’appui de la carrosserie Fantuzzi en échange de travail de carrosserie de sa part. L’accord incluait également une résidence gratuite dans la conciergerie de la carrosserie, pour autant qu’il fasse concierge.
Meade travaillait donc 24 heures sur 24 et dormait sur un lit de camp en fer de l’armée, à côté du chauffage au mazout pendant l’hiver. Il va vivre ainsi pendant un an, tandis que Fantuzzi l’a gracieusement encadré dans la mise en forme et la conception du métal. Fantuzzi lui a tout appris !
–“C’est Fantuzzi qui m’a vraiment appris à façonner les idées pour en faire des voitures. C’est lui qui a fait une grosse partie du travail de reconstruction et du redésign de la Maserari reçue de Aurelio Bertocchi. C’est lui qui m’a donné mon inspiration dans la manière dont les voitures ont été façonnées et a réalisé ma formation dans la façon dont mes carrosseries ont été fabriquées par la suite”.
Après plus d’un an, Tom Meade est devenu expert en pièces de course chez Maserati, il s’était spécialisé dans la restauration des pièces échangées dont il avait besoin pour son projet. Les saisons de course ont alimenté ses contacts entrepreneuriaux. Il a ainsi rencontré quantité de millionnaires (d’époque) venant acheter des voitures exceptionnelles.
-“Quand j’ai rencontré Lloyd Lucky Casner (célèbre pour son équipe de course Comaradi USA Maserati), Bob Wallace avait détruit l’une de ses Corvette Duntov, alors j’ai acheté la plupart de son équipement pour 400 dollars, y compris des pièces, des outils et une remorque. Il m’a donné tout le shebang et, surtout, un moteur”.
Pas n’importe quel moteur, mais un vrai Duntov-Spécial qui va propulser un des coupés emblématiques créés par Tom Meade qu’il appelait “L’Anti-Cobra”, après qu’un accord verbal avec Carroll Shelby ait été usurpé par Ford… Meade a donc fini de reconstruire la Maserati 350S avec le moteur Chevrolet et il a personnalisé la carrosserie avec un toit rigide amovible. Meade a expédié la voiture à San Francisco en 1962, c’était un chef d’oeuvre qui était issu d’années et d’années d’efforts et souffrances. Meade, fier a prété son bijou a un faux-ul d’ami qui voulait parader pour baiser les filles… Et il l’a pulvérisée dans un canyon de Malibu, détruisant le véhicule. L’épave a été vendue pour une fraction de ce qu’elle aurait pu valoir.
Après un an de travail à San Francisco pour se refaire une santé financière, Tom Meade est retourné en Italie pour tout recommencer…
-“J’avais théoriquement perdu 5 ans de ma vie mais découvert que ce que je voulais vraiment faire dans la vie, c’était de revenir en arrière et construire des carrosseries de rêves pour des voitures, exceptionnelles au départ de voitures de course déclassées. Mais plus jamais je n’ai prêté quoique ce soit à des amis”…
Meade a tout recommencé à zéro, a acheté une autre Maserati 350S abandonnée chez Maserati, mais pour 500 $. Quand elle a été terminée en une année, il l’a amenée aux USA et vendue en Californie à un italophile américain : Dick Merritt.
Au cours du processus, Merritt lui a dit qu’il avait un client pour une Ferrari 250 GT à empattement court et a demandé à Tom Meade s’il pouvait en trouver une pour lui. Ce qui fut fait dans le mois suivant, un autre centre de profit a été ainsi établi. Tom Meade a loué un appartement avec un balcon donnant sur l’aéro/autodrome de Modène : En dessous, il y avait quatre garages/box qu’il louait et a commencé à remplir de vieilles voitures de course, des morceaux et des morceaux, y compris une Ferrari authentique 250 GTO’64 fatiguée pour 720 $ (maintenant elles se vendent entre 30 et 60 millions de dollars), qui est devenue sa voiture perso quotidienne…
Tom Meade a créé un partenariat avec David Piper pour “coursifier” des Ferrari Lusso’s, Meade en a fait des sortes de répliques 250 GTO, 8 Lusso’s et il a fait de même avec 4 Ferrari 330LMB’s pour “Mike Parks SF endurance racing team”. Tout cela lui a permis de devenir officiellement designer et de disposer de beaucoup d’argent. La première voiture qu’il a conçue entièrement seul, est la Thomassima I, qui a été envoyée pour être exposée dans un salon de l’automobile à Florence, mais l’une des célèbres inondations de la ville riveraine l’a détruite avant qu’elle ne soit montrée au public… Meade, pas découragé car l’assurance du salon automobile à couvert le drame, a continué de créer.
En plus de Bertocchi, Neri, Bonacini et Fantuzzi, les contacts de Meade comprenaient Piero Drogo, David Piper, Alejandro de Tomaso, le comte Giovanni Volpi, le journaliste de Road and Track Peter Coltrin et Carroll Shelby himself. Tom Meade a créé la Thomassima II en utilisant des éléments d’un châssis Cooper à moteur arrière dans lequel il a installé un moteur V12 Ferrari 250 GT avec une boîte-pont ZF à 5 vitesses. C’est sans doute le plus beau de tous ses designs. La Thomassima III était sa préférée et la seule qu’il a conservé. Les miniatures HotWheels qui l’ont utilisée ont été un best-seller pendant des années… Les Thomassimi I II et III ont rendu Tom Meade célèbre et fortuné.
L’émission TV 60 Minutes a raconté sa vie. L’équipe de télévision a monté des caméras sur la Thomassima II et l’a filmée dans quelques courses très rapides autour du circuit de Modène. Puis l’émission l’a suivi au Salon de Turin où ses voitures étaient exposées et a ainsi contribué à créer son mythe d’être le plus célèbre sculpteur d’automobiles extraordinaires… Après avoir quitté l’Italie, Meade a passé environ deux décennies à voyager en Asie. En 1993, Meade va retourner à Los Angeles pour pour partager les dernières années de vie avec sa mère. Il a simultanément commencé à planifier la construction d’un Thomassima IV (parfois appelé Thomassima IIII), qui devait avoir une carrosserie en fibre de carbone et un moteur Ferrari 333 SP.
Mais Meade est décédé en août 2013. Il avait un fils adoptif, il entretient son domaine et travaille dans l’industrie des produits de luxe. En plus des voitures Thomassima I II III, Meade a construit plusieurs autres voitures personnalisées avec l’aide de ses collaborateurs italiens. Il s’agit notamment de la série Nembo, des voitures de route basées sur des Ferrari 250 GT, construites en collaboration avec Neri et Bonacini. Meade a également modifié 7 ou 8 Ferrari 250 GT Lusso’s avec une carrosserie avant de style 330 LMB, y compris des prises d’air triples et des phares aérodynamiques. Ces voitures ont été pour la plupart achetées en état d’épaves ou de non-fonctionnement dans la région d’Émilie-Romagne près de Modène, reconstruites et modifiées puis revendues.
La Thomassima I a été fabriqué à la demande d’un baron suisse inconnu qui cherchait une remplaçante pour sa Corvette afin de rester compétitif contre les Shelby Cobra’s. Meade a vait basé cette “anti-Cobra” sur un châssis Ferrari 250 GT équipé d’un puissant moteur V8 Chevrolet Duntov avec une carrosserie fortement modifiée qui comprenait des ailes de mouette qui pouvaient être enlevées et placées dans le coffre de la voiture, une idée que Meade considérait comme sans précédent à l’époque.
La Thomassima II a été commandée à la fin de 1966 par Harry Windsor de Los Gatos, en Californie qui voulait une voiture à moteur central ressemblant à la Ferrari 330 P3 ou P4. Meade a réalisé ce à quoi la P3/P4 aurait dû ressembler, mais cela s’est avéré très difficile car il a du modifier radicalement le châssis d’une Cooper T3 Formula One et l’équiper d’un moteur V12 Ferrari 250 GT Colombo couplé à une boîte ZF. Pour la carrosserie, Meade a été aidé par Piero Drogo de Carrozzeria Sports Cars. Le résultat final fut prêt en 1967,
c’était une voiture un peu plus longue et plus musclée qu’une P4, pesant 910 kg et arborant 240 chevaux (180 kW), avec un toit rigide détachable. Cette Thomassima II a été expédiée en Californie, où Windsor l’a rebaptisée “Ferrari 250 P/4 Roadster” et exposée au concours d’élégance de Pebble Beach en 1968 où elle a remporté un prix de classe. Malgré le fait qu’elle ait été improprement appelée Ferrari, la Thomassima II a fait de Meade une figure bien connue dans son domaine. La voiture a fait une apparition dans le premier film de George Lucas, THX en 1971. Plus tard, la voiture a été accidentée, puis achetée par Larry Hatfield et présentée au Concorso Italiano 1980 à Monterey.
La Thomassima III a été construite en 1968 et son achèvement a nécessité plus d’un an de travaux. La voiture donatrice était une Ferrari 1958 type GT Pininfarina Coupé 250 (numéro de châssis 1065GT) propulsée par un moteur V12. La boîte de vitesses a été remplacée par une ZF à 5 vitesses et les freins ont été améliorés. La carrosserie a été modifiée de façon spectaculaire, encore plus loin que la précédente surnommée Thomassima Zero, résultant en un coupé extrêmement bas, musclé, à moteur avant avec des ailes de mouette, des échappements tordus des deux côtés et des roues à verrouillage central. L’intérieur était somptueux. La Thomassima III était la voiture qui a apporté le plus de gloire à Meade et il l’a souvent utilisée pour se promouvoir.
Il la considérait comme son chef-d’œuvre et a décidé de ne la vendre à personne. Elle a été présentée sur Road and Track, est apparue à la télévision italienne à l’émission très prisée 1 Minute [1970] et dans le talk-show de Walter Cronkite, elle a aussi remporté divers prix dans des salons automobiles en Italie et aux États-Unis, de plus elle est devenue un modèle réduit de Hot Wheels. Avant le départ de Meade d’Italie, la Thomassima III a été placée en stockage à long terme dans une installation près du lac de Côme, en Italie puis a été exposée au Museo Ferrari de Maranello en 2014, dans le cadre de l’exposition “California Dreaming”. La Thomassima III appartient au fils adoptif de Tom Meade et est toujours conservée en Italie.