Facel-Vega Facellia F2B…
LE DERNIER VESTIGE GAULOIS…
Depuis 1955, Jean Daninos avait réussi le pari fou de s’imposer sur le marché du très haut de gamme avec des autos 100% françaises, sauf sous le capot ou il faisait appel à des V8 “made in America“.
En 1959, avec la Facellia, il va avoir recours à un moteur 100% français pour son nouveau modèle…
CONCEPTION SOIGNEE !
Le cahier des charges de la Facel Vega Facellia reprend dans les grandes lignes les schémas de construction des grosses Facel Vega à moteur V8 : châssis tubulaire et coque soudée en acier, suspension avant indépendante, pont arrière rigide.
Mais contrairement à ses sœurs à moteur V8, ses dimensions sont ramenées à des normes plus “européennes” et les Facellia sont habillées d’une carrosserie fine et élégante réalisée par l’équipe de Jean Daninos.
Comme il est alors de tradition à l’époque pour une auto sportive, la Facel Vega Facellia est une propulsion et les voitures sont équipées d’un pont arrière à taille hypoïde de fabrication Salisbury.
Certaines pouvaient recevoir en option un différentiel à glissement limité.
Ce pont est rigide, maintenu par des ressorts semi-elliptiques à neuf lames, alors que l’on trouve à l’avant des ressorts hélicoïdaux.
C’est de Carbon qui fabrique et fourni les amortisseurs.
La direction passe par un boîtier Gemmers à vis et à galet.
Enfin, le fin du fin technique pour l’époque est le montage en série des freins à disques Dunlop sur l’avant.
LANCEMENT EN GRANDES POMPES…
La finition générale de la Facel Vega Facellia est soignée et originale.
Ainsi, ses enjoliveurs rehaussent ses roues en tôle, et les bas de caisse en aluminium striés affinent la silhouette générale de la Facellia.
Le tableau de bord dans le plus pur style aviation, cher à la marque, est intégralement gainé de cuir noir et les sièges sont formés de rouleaux de mousse.
Le 28 septembre 1959, la Facel Vega Facellia est présentée officiellement sur la scène parisienne, au musée Jacquemart-André, boulevard Haussmann.
La presse et de nombreuses personnalités eurent alors l’honneur d’y assister.
La Facel Vega Facellia s’offre un parrain de marque pour son baptême : Stirling Moss !
Il faut tout de même rappeler qu’il était déjà un client de Facel Vega avec les HK500 à moteur V8.
Le public la découvrira au 46ème salon de Paris dont elle est la plus grande nouveauté.
Le magazine “L’Automobile” consacrera même sa page de couverture et un essai de sept pages dans son numéro d’août 1960.
Le titre de l’article est “Enfin une grande sportive française“.
Il faut reconnaître que le prix affiché à l’époque rapporté a sa fiche technique, sa marque et sa plastique, ne peuvent qu’annoncer un succès foudroyant.
Les dirigeants de la marque avaient même tablé sur une production d’environ 2500 exemplaires chaque année (contre une centaine pour les grosses Facel à moteur V8).
Environ 1000 commandes sont déjà enregistrées avant le démarrage de la production en chaîne.
Les premières livraisons de Facel Vega Facellia interviennent à partir de l’été 1960, le prototype ayant été homologué le 15 mars 1960.
Les moteurs sont alors assemblés et testés sur banc à l’usine Facel de Puteaux à partir d’éléments usinés chez Pont-à-Mousson qui fournit également la boîte complète.
Le montage de la voiture se fait à Colombes et la peinture et la sellerie à l’usine de Dreux.
Très rapidement les premiers utilisateurs des jolies Facellia sont enchantés quoique l’empressement dans la conception de la mécanique Pont-à-Mousson n’a pas entièrement fiabilisé le quatre cylindres français.
Les ingénieurs à l’usine doivent revoir leur copie en urgence, mais ce quatre cylindres, est brillant à l’usage et convient à merveille à la petite Facellia.
EVOLUTIONS IMPOSEES…
Dès mars 1961, la Facellia connaît sa première évolution avec la type F2 (qui remplace la type FA).
Entre-temps, la gamme Facellia, initialement commercialisée en cabriolet, se dote également d’un coupé 2 places (un cabriolet avec un hard top soudé à la caisse) et d’un coupé 4 places.
Sur la Facellia F2, le moteur Pont-à-Mousson a été sérieusement renforcé pour rassurer la clientèle.
En outre, la direction est plus directe, la trappe à essence est désormais située derrière la plaque d’immatriculation AR et non plus dans le coffre au centre de la roue de secours, les poignées de portes sont plus conventionnelles, et les sièges cuir sont redessinés.
L’engagement en compétition du modèle est en outre intéressant avec de belles places d’honneurs et même la première place en catégorie 1601 à 2000 cm3 au rallye de Monte Carlo avec au volant les Néerlandais Gastonidès et Van Noordwjik.
Toujours pour aller plus loin…
Facel Vega dévoile sa Facellia F2S dont le moteur progresse sensiblement en puissance et permet à Jean Daninos de réaliser le record en catégorie ” GT plus de 1600 “.
Mais tous ces efforts sont amoindris par les petits problèmes des préséries à leur lancement, petits soucis dont les causes ont pourtant été arrangées.
L’effort du réseau et du constructeur dans la garantie et les échanges standards des premiers moteurs non modifiés coûte très cher, tant en réputation qu’en trésorerie.
La Facellia F2S, si elle figure au catalogue, ne pourra pas être commercialisée faute de trésorerie.
La société Facel Vega est alors dans une situation critique, surtout que la Facellia ne décolle pas dans les ventes, à cause en grande partie de la mauvaise réputation injustifiée des tous premiers modèles.
La mauvaise réputation injustifiée des premiers modèles…
Jean Daninos se retrouve acculé, car ses problèmes de trésorerie l’obligent à solliciter les banques qui lui refusent toute aide significative.
Il doit alors accepter une intervention des pouvoirs publics dans son entreprise.
Sous la pression du ministre des finances de l’époque, Jean Daninos doit lâcher le pouvoir et de nouveaux actionnaires majoritaires sont nommés.
Huit jours après cette mesure prise en août 1961, un nouveau président est nommé (celui de la Mobil-Oil une des sociétés actionnaires avec Hispano-Suiza et Pont-à-Mousson).
Jean Daninos reste tout de même vice-président et conserve le poste de directeur technique et commercial de l’entreprise…, son entreprise.
Il est tout de même curieux de constater que ce sont ces mêmes pouvoirs publics qui interviennent alors qu’ils avaient refusé la fourniture de moteurs étrangers lors de l’étude de la Facellia, ce qui aurait certainement évité la chute de Facel Vega.
La chute de Facel Vega.
La nouvelle direction confie le soin à la société “Le Moteur Moderne” de remotoriser la Facellia.
A cylindrée identique, le moteur développe désormais 120 ch pour la Facellia F2 et 131 ch pour la Facellia F2S.
Au salon de Paris 1961, en octobre, les clients peuvent choisir en option les double optiques sous globe Marchal Megalux, plus aérodynamiques, tandis que toutes les Facellia héritent désormais des planches de bord peintes en faux bois, jusqu’ici l’apanage des grosses Facel à moteur V8.
Ces planches de bord étaient peintes à l’usine de Dreux par des artistes…
Au salon de Paris 1962, Facel Vega présente sa Facellia avec de légères modifications qui entraînent l’appellation F2B.
Les phares Marchal Megalux sont d’ailleurs montés en série.
Au printemps 1963, après un assouplissement de la position du gouvernement français, Facel Vega stoppe la Facellia pour commercialiser la Facel III dotée d’un ensemble moteur-boîte Volvo, mais la situation est désespérée…
AUJOURD’HUI…
Excessivement rares, écrivons même “rarissimes“, les Facel Vega Facellia ne sont pas réellement connues du grand public.
Leur rareté et l’originalité des moteurs Pont-à-Mousson est un gage de grande valeur spéculative pour ces modèles si élégants.
Vous devez compter à partir de 20.000 € pour un coach 4 places en très bon état, ou pour un coupé 2+2 et 30.000 € pour un cabriolet en très bon état.
Il faut absolument acheter une auto complète avec toutes ses pièces et ses accessoires, car la chasse aux pièces peut se révéler longue et décourageante.
Sachez que peu de spécialistes existent et ceux qui veulent bien accepter de travailler sur les Facellia ne sont pas très nombreux pour les rarissimes moteurs Pont-à-Mousson.
Les éléments de carrosserie sont évidemment introuvables et il faudra alors songer à refaire des pièces en cas de choc, ce qui sous-entend de s’assurer correctement.
La corrosion est à surveiller comme sur toutes les autos qui ont plus de 40 ans d’âge.
Les Facellia ayant été réalisées chacune de manière totalement artisanale, il est en outre risqué de penser prendre les pièces de carrosserie de l’une pour les monter sur une autre.
Les boîtes et les freins sont inusables.
La Facellia est une auto pour passionnés.
Si vous cherchez la facilité, l’anonymat et une belle ligne très commune, achetez plutôt une Mercedes SL Pagode de même valeur, mais dans la recherche d’une très haute exclusivité avec une griffe française de même niveau que Cartier, Dior et Vuitton, ne cherchez plus, la Facellia est pour vous !…
CONCLUSION…
Belle, élégante et raffinée, la Facel Vega Facellia disposait à sa naissance de tous les atouts pour réussir une carrière sans faute et permettre au dernier constructeur de prestige français d’étendre son influence.
Hélas, une administration française primitive et bornée ainsi qu’une situation économique monétaire encore délicate, eurent raison de ce projet prometteur.
Dommage, car le recours au moteur Pont-à-Mousson, brillant, amène les Facellia au statut convoité de vraie marque qui construisait ses modèles et ses moteurs 100% français !
Véritable égérie des stars planétaires…, la Facellia est à acheter pour tout fanatique d’automobiles extraordinaires qui sait apprécier les belles carrosseries et est avide d’autos rares et exceptionnelles.
En plus elles sont 100% françaises ! .
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
Facel Vega Facellia F2B
Moteur: 4 cyl. en ligne, double arbre, 8 soupapes, longitudinal AV
Cylindrée : 1 646cc
Alésage x course en mm : 82 x 78
Puissance ch SAE à tr/mn: 115 à 6 400
Puissance/litre (en ch SAE) : 69,86
Couple maxi en mkg à tr/mn: 14,7 à 4 500
Transmission: AR, BV 4 rapports manuelle
Poids (Données constructeur en kg): 990
Rapport poids/puissance en kg/ch DIN: 8,60
PERFORMANCES
Vitesse maxi en km/h: 182
1 000 m DA en secondes: 35
0 à 100 km/h en secondes: 13,2