Gladys…
Gladys s’était faite toute belle aujourd’hui, les parents de Dan les avaient invités à dîner tous les deux, c’était la première fois qu’ils allaient voir leur future belle-fille… et elle voulait leur faire bonne impression.
Elle s’était habillée dans des tons sobres et élégants…, elle finissait d’attacher ses cheveux lorsqu’on sonna à la porte…, elle se regarda une dernière fois dans la glace : une vraie sainte-nitouche !
Elle sortit de la salle de bain, descendit les escaliers, ouvrit la porte et embrassa Dan sur la bouche :
– Salut poupée…
Ils montèrent ensuite dans le Rod que Dan venait de terminer, un Rat-Rod tout pourri comme ses dents :
– Alors qu’est-ce que tu en penses ?…
Il posa une main sur les genoux de Gladys et se mit à lui caresser la jambe.
– Super caisse…
– C’est tout ce que tu trouves à dire sur ce petit bijou ? C’te Rat-Rod, il a une âme…
– Mais oui mon amour, je te crois.
Gladys le regardait en lui souriant stupidement. “Quelle conne ! Les gonzesses, elles y comprennent rien à rien”, pensa t-il.
Trois ans de boulots minables pour pouvoir se construire son bonheur mécanique pour qu’on lui dise “Super caisse”. “Il est magnifique splendide, fabuleux !”…, voilà les mots qu’il fallait employer…, elle l’énervait déjà… et il sortit une cigarette avant de démarrer en trombe.
Il était midi passé et ils ne devaient pas arriver en retard, car les parents de Dan détestaient qu’on arrive en retard.
Gladys lui dit qu’il faisait beau aujourd’hui, ce qu’il avait déjà remarqué, puis elle se mit à lui parler d’un film d’amour qu’elle avait vu… et elle avait pleuré à la fin car c’était émouvant, c’était une fin du genre : “ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants”… et elle se mit à lui causer de mariage, ce qui énerva encore plus Dan.
– Le mariage, c’est dépassé ! Et pourquoi tu me parles de mariage ? Ça fait que cinq mois qu’on sort ensemble.
– Oui, je sais. Mais je… Je trouve ça merveilleux, ça consacre les sentiments qu’éprouvent deux personnes l’une pour l’autre !
Elle regardait Dan amoureusement et voulut l’embrasser mais il la repoussa.
– Hé, tu veux qu’on fasse un accident ou quoi ?…
Il continuait à rouler vers l’est… et il passa devant un énorme panneau publicitaire, c’était une pub pour des sandales avec une nana brésilienne en maillot de bain deux-pièces, vue de dos, elle était toute bronzée et trop bien foutue et Dan se dit : “Putain, mais quel cul”… et il s’imagina en train de la prendre dans toutes les positions du Kama-sutra…, mais Gladys l’interrompit dans ses rêveries…, il avait envie de la jeter de la bagnole.
– Dan, je t’aime.
– Je sais, je sais…
– À toi, dis-le.
– Quoi ?
– S’il te plaît.
– Tu sais bien que j’aime pas de le dire quand on me le demande.
– Allez, dis-le moi !
Elle lui faisait vraiment pitié à l’implorer comme ça…
– Bon d’accord… Je t’aime…
Elle était contente et fit un grand sourire… et elle voulut à nouveau l’embrasser… mais il la repoussa…, elle devenait vraiment chiante !
Ils étaient tout près de chez ses parents à présent…, Dan devait prendre la prochaine rue à gauche et remonter le boulevard mais il prit à droite et il s’arrêta quelques rues plus loin.
– Voilà on y est, c’est juste en face ! Tu peux déjà descendre, je vais vite aller me garer là-bas plus loin. Comme ça tu devras pas trop marcher…
Gladys sortit du Rod en se contorsionnant….
– À tout de suite mon amour !
Et Dan murmura : “C’est ça, adieu, pauvre conne !”…
Il était déjà seize heures passées…, de loin, cela donnait un banal petit Rat-Rod qui se déplaçait dans le décor…, d’un peu plus près, c’était un Rat-Rod tout pourri… et de très près, on pouvait apercevoir un Rat-Rodder crétin qui, d’une main, tenait le volant, et de l’autre, se bourrait la gueule au whisky.
Il ne savait pas trop ce qu’il allait bien pouvoir inventer à ses parents…, ils avaient certainement préparé un délicieux repas pour accueillir comme il se doit leur future belle-fille…, il réfléchit en buvant de temps en temps une petite gorgée de whisky, puis il se dit : “Mais pourquoi je me prends la tête ? J’ai qu’à dire que Gladys s’est fait écraser par un camion, un point c’est tout”…
Il se demanda si elle l’attendait encore, et il eut un peu pitié…, mais elle l’avait vraiment énervé avec ses histoires de mariage…, finalement, il se dit qu’il avait bien fait de la larguer comme ça et il espérait ne plus jamais la revoir.
Après avoir roulé pendant une demi-heure, il s’arrêta à un feu rouge et s’étira un moment…, il se demandait ce qu’il allait bien pouvoir faire ce soir…, il passa une main dans ses cheveux et se dit qu’il allait sortir en boite pour se trouver une nana qu’il pourrait ramener à la maison cette nuit : “Ouais, c’est ça que je vais faire !”…
Il pensa à tous ces beaux petits culs qui se trémoussaient toute la nuit dans les discothèques de la ville…, il regardait le feu de signalisation qui était rouge, en donnant des petits coups d’accélération…
Dan était prêt à faire un démarrage en trombe pour impressionner la galerie.
Rouge.
Deux types cagoulés surgirent de nulle part, l’un d’eux lui cala un coup de poing sur le pif et l’autre le braqua avec son arme à feu !
– Sors, enculé ! Sors tout de suite de ce putain de Rat-Rod !
Celui qui avait donné le coup attrapa Dan par la chemise pour le faire sortir.
Rouge.
Dan essaya de lui balancer un coup de poing dans les couilles…, l’autre type, celui qui était armé, lui tira une balle en pleine tête.
Bang !
Rouge.
Ils tirèrent le corps sans vie de la bagnole et le laissèrent par terre.
Le feu devint vert.
Les deux types plongèrent dans le rat-Rod et démarrèrent.
Le cadavre de Dan gisait sur le macadam…, une flaque de sang se répandit autour de lui… et des gens sortirent de leurs voitures et des piétons s’approchèrent et certains criaient : “Appelez une ambulance !”..., mais il était trop tard…
Et le feu redevint rouge.