Fisker Viper VLF Force 1…
Né le 10 août 1963 au Danemark, Henrik Fisker a suivi les cours de l’Art Center College of Design, à l’époque où cette école californienne avait une succursale en Suisse, à Vevey. Silhouette conquérante et visage poupon, ce grand blond aux chaussures noires… pas du tout aussi comique que la vedette du film symbolisant l’humour franchouille s’est appliqué, avec un manque d’humour typiquement Viking , à devenir un créatif diplomé… ce qui lui valut d’être engagé en 1989 chez BMW Technik installé à Munich qui avait pour vocation d’explorer, avec le sérieux Bavarois légendaire, des territoires vierges…
Après avoir exploré les dits territoires vierges, sans découvertes notables, en 1992, Henrik Fisker fut détaché chez Designworks, un autre espace de réflexion pour BMW, celui-ci se trouvant à Newbury Park, en Californie. Là, Henrik fit la connaissance de Bernhard Koehler, son futur associé, tout en créant le dessin qui devait le révéler à la planète du design. Il imagina en effet une interprétation moderne de la BMW 507 qui fut dévoilée à Tokyo en novembre 1997, sous la forme du concept car Z07, qui déboucha, deux ans plus tard, sur la très exclusive, très classique, très sérieuse et très couteuse Z8… un objet roulant cultissime dénué de tout humour.
En janvier 2000, Henrik Fisker prit les rênes de Designworks à la suite de Charles W. Pelly… mais peu de temps après, en septembre 2001, Ford lui fit deux propositions si financièrement alléchantes qu’il accepta de revenir en Europe : il était en effet invité à prendre la direction du département design d’Aston Martin, succédant à Ian Callum, pour gérer “Ingeni”, le studio londonien dont Ford voulait faire un laboratoire expérimental. Cet atelier ne présentant strictement rien d’innovant ni fantaisiste, fit long feu et ferma ses portes dès 2003 ! Mais Henrik Fisker poursuivit son œuvre à la direction du design avancé de Ford en Californie, tout en conservant ses prérogatives chez Aston Martin. Avant de passer le relais à Marek Reichman en juin 2005, Henrik Fisker aura eu le temps de dessiner la V8 Vantage la Vanquish et la DB9…
Henrik Fisker avait simultanément d’ores et déjà préparé sa sortie dans l’espoir de voler de ses propres ailes… en janvier 2005, sans attendre que Marek Reichmann prenne sa place, il avait déjà fondé Fisker Coachbuild LLC avec Bernhard Koehler… et sous cette enseigne, ils se destinaient à commercialiser en très petites séries, voire en version unique, des voitures très exclusives élaborées sur la base de sportives éprouvées. Présentée au Salon de Francfort 2005, la première réalisation de leur association fut la Latigo CS basée sur la BMW Série 6… tandis que la Tramonto, exposée au Mondial de Paris 2006 par le carrossier Stola qui la fabriquait, était dérivée de la Mercedes-Benz SL55 AMG.
Dans le même temps, Fisker Coachbuilt va créer la pulpeuse Artega GT qui apparaîtra au Salon de Genève 2007 et simultanément Fisker Coachbuild LLC devient pour de nébuleuses raisons Fisker Automotive Inc. en septembre 2007… et quelques mois plus tard, au Salon de Detroit 2008, apparaît la Karma… décrétée d’office par une certaine presse inféodée (sic) “un pur chef-d’œuvre” qui n’eut que les déboires décrit dans cet article : https://www.gatsbyonline.com/automobile/fisker-un-tres-mauvais-karma-359094/ … Le Karma désigne l’ensemble des actions directes ou indirectes consécutives à l’existence d’un individu. Le Karma est ce qu’on a fait, ce qu’on fait et ce qu’on fera.
De nombreuses astuces sont ajoutées pour rendre l’auto “Cool” aux yeux des californiens plus soucieux de leur image que de l’air qu’ils respirent : les placages en bois sont issus d’arbres mort, péchés au fond d’un lac ou récupérés d’un incendie, les mousses de sièges sont en soja, les cuirs sont synthétiques et les moquettes issues de matériaux recyclés. Les deux pots d’échappement sont des haut-parleurs qui diffusent un faux son de V6, V8 ou V12 au choix. Ce son numérique est à l’automobile ce que la Tank Cartier chinoise est à l’horlogerie : une faute de goût impardonnable.
Pour finir de se différencier du badaud en Prius, s’ajoutent encore quelques options chic et classe : Peinture en écailles de verre, toit solaire, récupération d’énergie de freinage et jantes de 22 pouces, donnant à ce vaisseau de 2,5 tonnes une allure ramassée nécessaire à assurer la crédibilité d’un tel projet. Je dois l’avouer, j’ai beaucoup ri au début, pensant à l’apparition d’une nouvelle DI-MORA. Mais le projet à vu le jour !
Sous l’enseigne FISKER COACHBUILD LLC, il reprendra une fois de plus de l’autonomie, en créant un coupé nommé LATIGO, qui est en fait une BMW série 6 à la ligne modifiée, certainement une de sa pire création annoncée à un prix stratosphérique… Le succès ne sera pas au rendez-vous… à 120 000 $, on pouvait pénétrer dans la caste des écolos qui préfèrent s’afficher au volant d’une Fisker, comme Léonardo DI CAPRIO et Justin BIEBER, plutôt que dans une Auto-Lib.
D’ouvertures de capital en appels d’offre, Henri FISKER va persévérer dans son projet, lavant d’une main l’affront des batteries qui surchauffent, puis celui des batteries qui se vident (comme sur une Tesla, lorsque les batteries arrivent à leur décharge complète, elles rendent l’âme, l’auto est ainsi bonne à jeter. Ce qui peut arriver à la première utilisation). Il nie les rumeurs de fermeture de ses usines ou de licenciement de la moitié de ses salariés et planifie déjà l’évolution de sa gamme, avec la Fisker Surf, puis la Fisker Nina, un modèle d’entrée de gamme qui, selon diverses rumeurs “du jour”, partagerait sa chaîne motrice hybride avec BMW…
En janvier 2016 la Fisker VLF Force 1 basée sur la dernière génération de Dodge Viper fait son apparition et évolue en 2018 en monstre dans un costume à fines rayures. Et cette dernière étape d’expansion est tout simplement magnifique pour qui aime se promener avec des pantoufles extrêmement voyantes… la biplace cuite au carbone possède selon la littérature de circonstance diffusée en fardes de presse : “Elle est équipée du moteur à aspiration naturelle le plus puissant du monde que vous pouvez acheter dans une voiture de série”… la Dodge Viper en tant que base ne peut être devinée du premier coup d’oeil.
Quand Tesla a lancé son Model S révolutionnaire qui fait d’Elon Musk un milliardaire, c’est le designer Henrik Fisker qui se positionnait en tant que leader dans l’industrie naissante du véhicule électrique… il avait alors de nombreux atouts dans sa manche : de bons contacts, des fonds de “capital risque” disponibles, un prêt fédéral avec peu d’intérêts de $528 millions et un concept innovant d’hybride rechargeable sur batterie… Mais tout ne s’est pas passé comme prévu, une ribambelle d’obstacles s’est interposée : des défauts de batterie, des problèmes techniques, et une tornade qui détruit une livraison de voitures Fisker Karma automatiques d’une valeur de 10. 000 $ chacune. Autant d’obstacles qui ont mené l’entreprise à la faillite en 2013.
Aujourd’hui, Fisker est déterminé à faire un retour sur le marché en 2020. Nous sommes fin 2020 et rien… si ce n’est que depuis le début de l’année sa nouvelle société Fisker Inc. située à Los Angeles est sur le point de lancer en production un crossover élégant, rechargeable par batterie et à des prix étonnamment abordables. La production devrait commencer en fin d’année 2020 et il serait disponible à la vente avec un mode de paiement en différé. Tout comme Tesla, l’entreprise distribuerait ses véhicules à domicile à ses clients, pour réduire les coûts d’un concessionnaire “classique”…
Le modèle Electric Ocean, dévoilé à la CES de Las Vegas en début d’année, est affiché 37.499 $ et contiendrait des éléments écologiques tels que le toit en panneaux solaires (idem que la Karma) et des matériaux recyclés. La réservation déjà ouverte coûte $250 et le modèle de base sera disponible avec un bail flexible et à durée indéterminée pour seulement 379 $ par mois, maintenance et services compris. Les modèles haut de gamme, quant-à-eux se vendront plus de 60.000 $ avec un intérieur high-tech avec grande console à écran tactile contenant un système de projection d’affichage et une option karaoké pour les conducteurs qui aiment chanter…
“Nous avons déjà programmé la production, qui commencera l’année prochaine. Nous avons une chaîne logistique sécurisée et une marge de manœuvre de plus de 1 million de véhicules entre 2022 et 2027”... m’a déclaré Fisker… pareil discours qu’envoyé à Forbes. Il ne dévoile pas où seront construits les véhicules et combien va coûter la production, mais il promet de divulguer plus d’informations concernant la liste des “partenaires de l’automotive” (sic !)… Certains d’entre eux pourraient être des fournisseurs et concepteurs automobiles qui manquent de véhicules électriques dans leur gamme…
Le retour de Fisker arrive alors que Tesla est en pleine transition de volume de production. Les actions de Tesla ont augmenté depuis octobre, propulsées par la demande de voitures et crossovers électriques ainsi que par les attentes concernant la nouvelle usine à Shanghai qui a commencé à livrer des Modèles 3 S en Chine et dont on espère qu’elle continuera sa croissance. Le cours du marché a atteint les 85,8 milliards de $, Tesla est devenue l’entreprise automobile la plus rentable de l’histoire selon les données du Dow Jones. Tesla peut bien vendre 500.000 véhicules en 2020, d’une valeur moyenne de 40.000 $ environ pour les modèles les moins chers, le marché de la voiture électrique ne sera un marché de masse sans augmenter la production.
C’est sur cela que mise également Fisker : “Pour atteindre notre gamme de prix et être rentable, il faut vendre des millions de véhicules. Alors ce qu’on a fait, c’est qu’on s’est allié à des groupes en devenir pour partager des composants et nous en avons déjà trouvé pour tout le groupe motopropulseur”… m’a-t-il déclaré sans plus d’explications autre que : “Nous nous sommes concentrés sur la construction de notre modèle d’entreprise afin de nous assurer que nous pouvons proposer un modèle loué à 379 $, ce qui est très bas, le bail moyen aux États-Unis est de 433 $ et le prix de base est de 37.499 $. On a donc une marge bénéficiaire ! Pour réussir, les start-up automobiles, électriques ou autres ont besoin de beaucoup d’argent. Dans ses débuts, pour survivre, Tesla avait obtenu des investissements de la part de Toyota, Daimler et Panasonic, ainsi qu’un généreux prêt fédéral et une introduction en bourse pour démarrer son usine de Fremont, en Californie”…
À l’âge de 56 ans, Fisker reste un designer et un porte-parole de talent pour son entreprise, mais il est encore trop tôt pour savoir s’il peut tenir ses promesses. Les fonds et les partenariats sont deux points fondamentaux pour une entreprise, mais il reste très discret là-dessus. Néanmoins, sa dernière expérience en start-up lui a beaucoup appris et il pense sincèrement que ses connaissances combinées à l’augmentation de la base d’approvisionnement de batteries, moteurs, et autres composants nécessaires pour produire des véhicules électriques, feront son succès !
“Par expérience, la leçon à retenir, c’est qu’il est extrêmement difficile de tout faire soi-même. L’industrie automobile a beaucoup évolué pendant plus d’un siècle, il ne faut pas sous-estimer ce qui est nécessaire pour non seulement créer une voiture, mais la produire, la livrer, et ensuite maintenir le flux de revenus en croissance permanente pour produire les modèles suivants. Tout cela est compris dans notre business plan”… m’a encore dit Henrik Fisker sous le ton de la confidence, ajoutant : “Il n’y a qu’une façon pour que ça marche : il faut avoir de très gros partenaires. Et c’est exactement ce que nous avons, et pas que pour investir. Indiquez tout ça dans votre site-web GatsbyOnline”…
La Fisker VLF Force 1 est basée sur la Dodge Viper qui n’est plus construite depuis le 17 aout 2017. La conversion s’effectue sur base de Viper d’occasion. Un gros paquet de fumisteries, mensonges et délires aide à laisser croire que le moteur est boosté à 750 chevaux et que le couple passe de 814 NM à un puissant 928 Nm. Alors que la voiture est alourdie par le kit de carrosserie, Fisker annonce une diminution du poids à vide à seulement 1,5 tonne et que de fabuleuses valeurs d’accélération ont été re-pré-programmées… amenant la bête à réaliser des performances de soucoupe volante : un sprint de 0 à 100 en un peu moins de trois secondes et le quart de mille en un peu moins de onze secondes à une vitesse de 220 km/h, l’engin atteignant finalement 350 km/h si on ose pousser complètement avec les jantes de 21 pouces chaussées de 305/25 à l’avant et de 355/25 à l’arrière.
Et VLF a même installé un routeur WiFi dans le spectaculaire becquet de toit, qui est censé garantir l’accès en ligne au WWW. Ok… Mais chaque petite voiture peut le faire aujourd’hui ! Soit dit en passant, la Force 1 devait être limitée à un nombre maxi de 50 unités et, à notre connaissance, il n’y a pas eu plus de 10 véhicules ré-assemblés !
2 commentaires
Qu’est-ce qui fait qu’après 10, 15 ans de non-réussites, on utilise encore le nom Fisker pour se lancer dans de tels projets ?
Escroc hors normes ou génie incompris ?
Je n’en sais fichtre rien, je suis le premier surpris, raison pour laquelle j’ai réactualisé l’article avec un bref sur-commentaire de fin… Toutefois…
“Il y a dans le monde deux sortes de grandeurs ; car il y a des grandeurs d’établissement et des grandeurs naturelles. Les grandeurs d’établissement dépendent de la volonté des hommes, qui ont cru avec raison devoir honorer certains états et y attacher certains respects. Les dignités et la noblesse sont de ce genre. En un pays on honore les nobles, en l’autre les roturiers ; en celui-ci les aînés, en cet autre les cadets. Pourquoi cela ? Parce qu’il a plu aux hommes. La chose était indifférente avant l’établissement : après l’établissement elle devient juste, parce qu’il est injuste de la troubler. Les grandeurs naturelles sont celles qui sont indépendantes de la fantaisie des hommes, parce qu’elles consistent dans les qualités réelles et effectives de l’âme et du corps, qui rendent l’une ou l’autre plus estimable, comme les sciences, la lumière de l’esprit, la vertu, la santé, la force. Nous devons quelque chose à l’une et à l’autre de ces grandeurs ; mais, comme elles sont d’une nature différente, nous leur devons aussi différents respects. Aux grandeurs d’établissement, nous leur devons les respects d’établissement, c’est-à-dire certaines cérémonies extérieures qui doivent être néanmoins accompagnées, selon la raison, d’une reconnaissance intérieure de la justice de cet ordre, mais qui ne nous font pas concevoir quelque qualité réelle en ceux que nous honorons de cette sorte. Il faut parler aux rois à genoux ; il faut se tenir debout dans la chambre des princes. C’est une sottise et une bassesse d’esprit que de leur refuser ces devoirs. Mais pour les respects naturels qui consistent dans l’estime, nous ne les devons qu’aux grandeurs naturelles ; et nous devons au contraire le mépris et l’aversion aux qualités contraires à ces grandeurs naturelles.” Pascal, Discours sur la condition des grands, “Les grandeurs d’établissement et les grandeurs naturelles”, 1660.
Donc, sans nul doute que la Fisker doit avoir de la grandeur et du Karma pour certains et certaines…
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