Historic Route 66… En dieu nous croyons !
La 66 est la route des réfugiés, les “ceusses” qui fuient le sable et les terres réduites, le tonnerre des tracteurs, les propriétés rognées, la lente invasion du désert vers le nord, les tornades qui hurlent à travers le Texas, les inondations qui ne fertilisent pas la terre et détruisent le peu de richesses qu’on y pourrait trouver.
C’est tout cela qui faisait fuir les gens… et, par le canal des routes adjacentes, les chemins tracés par les charrettes et les chemins vicinaux creusés d’ornières, les déversaient sur la 66.
La 66 est la route-mère, la route de la fuite.
Au XIXè siècle, la seule route commerciale reliant l’Est à l’Ouest était la voie maritime contournant le Cap Horn…, l’essor des migrations vers l’Ouest, catalysées par la présence de richesses dans le sous-sol du Far West, rendit nécessaire l’ouverture d’une voie plus directe et surtout plus rapide, c’est ainsi qu’en 1867 fut inaugurée la première ligne de chemin de fer transcontinentale.
Pourtant, au début du XXè siècle, alors que 300.000 kilomètres de voies ferrées étaient déjà en exploitation, les autorités et les industriels comprennent la nécessité de développer un réseau routier.
C’est ainsi qu’en 1923, un homme d’affaire originaire de l’Oklahoma, Cyrus Avery, imagine un réseau routier organisé, remplaçant le désordre des pistes existantes…
En 1925, il présente à l’American Association of State Highway Officials son projet de réseau routier inter-états, les futures “Interstates”, dont une route transversale reliant les Grands Lacs au Pacifique, au travers de huit états.
La Route 66 est née…, son créateur la baptisera la Grande Route Diagonale.
La Route est toutefois officiellement baptisée “US Route 66” et les travaux débutent en 1926, mais ce n’est qu’en 1938 qu’elle sera entièrement empierrée.
On la surnomme alors “Main Street of America”, ou encore “Mother Road”, selon l’expression de l’écrivain Steinbeck.
La Grande Dépression, qui suit la crise de 1929, a pour conséquences le chômage et la misère.
A cette crise économique s’ajoutent le Dust Bowl, événement climatique se traduisant par une grande sécheresse et des tempêtes de poussières, de 1934 à 1936, réduisant à néant les récoltes des familles exploitant les terres de l’Oklahoma et de l’Arkansas (les “Okies” et les “Arkies”, ces termes étant péjoratifs).
Ces familles ne pouvant rembourser les banques, propriétaires des terres exploitées qui, de plus, introduisent l’utilisation du tracteur, n’ont d’autre choix que l’exode…
Les “vertes vallées de Californie”, véritable Terre Promise, et l’existence de la Route 66, leur ouvrent une voie toute tracée vers l’Ouest.
Avec la Seconde Guerre Mondiale, la Route 66 devient un itinéraire privilégié pour l’acheminement de matériel et de troupes militaires, mais elle gardera des séquelles du transport incessant de matériels lourds.
Dans les années 1950, la démocratisation de l’automobile et des vacances draine des millions d’Américains sur la Route, friands des paysages qu’elle offre et des tout nouveaux Parcs Nationaux qu’elle dessert, mais l’état de la Route, ainsi que son dimensionnement, ne sont plus adaptés au trafic qu’elle doit supporter.
De retour de la Seconde Guerre Mondiale, le Général Eisenhower arrive au pouvoir en 1953…
Sur le modèle avancé des autoroutes allemandes inventées par le régime nazi, il propose en 1956 “l’Interstate Highway System”, un vaste réseau autoroutier financé par le gouvernement fédéral, destiné à relier rapidement et directement tous les états.
Simultanément, peu à peu la Route 66 est oubliée : les panneaux sont progressivement retirés, la Route n’est plus entretenue ; par endroits, elle disparaît littéralement.
Le 18 février 1987, Angel Delgadillo, qui refuse de regarder mourir la Route, crée la “Arizona Route 66 Association”, dans le but de sauvegarder ce monument qu’est devenue la Route au fil des décennies.
Quelques mois plus tard, l’état d’Arizona accorde au tronçon Selgiman-Kingman la désignation officielle de “Historic Route 66”.
Le 13 octobre 1984, la ville de Williams, en Arizona, est la dernière de la Route 66 à être contournée…, il est maintenant possible de rejoindre Los Angeles depuis Chicago sans quitter les Interstates, en à peine plus de trente heures…
Peu à peu, l’intégralité de l’itinéraire d’Arizona obtient la même dénomination, puis c’est au tour des sept autres états traversés, qui créent eux aussi des associations similaires.
Aujourd’hui le gouvernement a officiellement reconnu la légitimité de la sauvegarde de la Route 66, tant elle a joué un rôle fondamental dans l’histoire des Etats-Unis…, elle sert en fait et surtout à faire les poches des touristes, les seuls à venir s’y afficher en vestes à franges et bottes de pseudos-cow-boy, dans des voitures dont plus personne ne veut, qui ont été récupérées “à-la-casse”, pour être louées le double d’une Corvette neuve.
La Route 66 est ainsi devenue une véritable institution mercantile, tout le monde s’y est mis, des vieux blancs mourants sans retraite jusqu’aux indiens alcooliques aux têtes burinées de scalpeurs illuminés…
Que des breloques à vendre, des faux souvenirs de pacotille, des cartes postales et des néons…, on ne peut qu’y “bouffer” des hamburgers gras, dégoulinants, arrosés d’une Bud’ ou d’un Coke, et rouler, rouler, rouler, vers d’autres points touristiques, quasi identiques…
A chaque étape, tout les 100 kms, c’est pareil, invariablement, et les touristes font tous exactement la même chose, photographier bobonne et les gosses, mémé et pépé édentés, souriant béatement en souvenir de John Wayne massacrant les mauvais indiens…, le top étant de croire que l’histoire américaine c’est tout ça et Hollywood au bout du chemin…
Il y a aussi des pin-up’s qui se font shooter de même façon qu’elles se font prendre, entre 1 et 10 US$ selon la taille des seins et la minceur de la taille…, plus si affinités…, ces plantes décoratives, sont de plus “sponsorisées” par des marques de Jean’s, de bières, de Coke et de bagnoles…, un tarif de survie !
Il y a aussi les plantes vénéneuses, les authentiques putes 100% western, toute la panoplie, bottes, chemises à carreaux, gilet avec une étoile, j’ean’s moulant et déchiré… et le chapeau de Cow-Girl en prime, 100% en cuir bouilli…, elles racolent mine de rien pour un flash-back Pathé-Ciné technicolor au fond d’un lit crasseux de motel en ruine…, le tarif est misérable (50 US$), la prestation aussi !
En finale pour la famille, la danse western en spectacle, par paquets de 20 personnes et dollars, l’ultime occasion de finir les fonds de poches, que du bonheur…, c’est tout ça l’Amérique, que du business !
On savait l’Amérique au bord de la crise de nerfs…, ce grand pays infantile où le moindre téton turgescent dévoilé à la télévision provoque l’hystérie des mères de famille.
A observer leurs mœurs rétrogrades, on est partagé entre le sourire et l’accablement…, puis, âme charitable, on les plaint de vivre dans cette schizophrénie perpétuelle, cette affreuse confusion mentale faite de puritanisme et d’exhibitionnisme.
Pays à la fois de la fesse triste et de l’industrie pornographique florissante, l’Amérique ne sait plus à quel sein se vouer…, la sortie planétaire de “Cinquante nuances de Grey”, le roman de EL James qui date de nombreuses années qu’on vend toujours dans les échoppes bordant la Route 66, en est une pathétique illustration.
Que retrouve-t-on dans cette œuvre censée raviver la sexualité des femmes américaines mariées ?
Un anti-manuel du petit bricoleur érotique, cravache, gode, menottes et fessée à l’usage des épouses en manque d’orgasmes.
L’Amérique ne nous déçoit jamais dans sa représentation grotesque et attardée des rapports intimes, du plaisir, de la place des femmes et de son inévitable apologie de la société marchande…, c’est aussi réactionnaire que risible… et je ne parle même pas ici du style, négation totale de l’acte littéraire, simplification à outrance du discours et de la pensée, on assiste à la naissance du “junk-book”, un peu comme les “junk-bond” et les “juke-box”.
Alors, par souci d’information et d’émancipation, j’aimerais enlever la camisole de force qui drape l’honneur d’une Amérique aussi peu experte sur les choses de l’amour et de la vie…, car en ce qui concerne la vie, les américains sont spécialistes…
Le massacre génocidaire et “holocaustien” des amérindiens (les indiens peaux-rouges caricaturés par Hollywood)…, le massacre des noirs importés d’Afrique…, le massacre des finances mondiales…, le massacre des illusions…, le massacre des ouvriers et autres catégories sociales…, le massacre des autres, ceux qui ne sont pas eux… (mais qui sont-ils vraiment ?)…, le massacre des Japonais d ‘Hiroshima et Nagasaki, après les civils de Dresde…, les massacres de la Corée, du Viet-nam, de la Serbie, du Kosovo, de l’Afghanistan, de l’Irak et j’en passe tellement la liste est longue…
Il serait bon que les américains (re)découvrent les vertus de l’irrévérence, de la transgression, du raffinement et tout simplement de la liberté.
En tourisme, s’ils pouvaient s’inspirer de notre Nationale 7, de nos paysages, de notre gastronomie… et pour les éclairer sur les tourments et les délices de la chair, je leur conseille vivement la lecture d’un court roman libertin paru en 1745 et republié l’automne passé : “Thémidore ou Mon histoire & celle de ma maîtresse”, l’œuvre déjantée d’un certain Godard d’Aucourt né à Langres en 1716 qui fut fermier général, puis receveur général des finances à Alençon…, Guy de Maupassant qualifia ce roman de chef d’œuvre, il écrira même que Thémidore est un vrai miroir enfin de la débauche spirituelle, élégante, bien née et bien portée de cette fin de siècle amoureuse.
Les amerloques peuvent remballer leur quincaillerie et fatras idéologique, Godard d’Aucourt place le plaisir au pinacle, chez lui, les femmes ne sont pas des instruments dociles comme aux USA, mais de véritables dévotes de l’amour physique.
Les honnêtes hommes qui ont le cœur noble reconnaissent en elles des âmes pures, les seules capables de déclencher les abandons sincères et les jouissances extrêmes.
Godard d’Aucourt évite les descriptions anatomiques, absurdes et indélicates, de l’acte en lui-même, l’homme a des lettres et un style grand siècle, tournures suaves où la profondeur des sentiments et des opinions crépitent sur plus de cent cinquante pages.
Le charme de d’Aucourt réside dans son art de la périphrase, il effleure, il contourne, il suggère sans jamais se perdre dans la banalité friponne…, c’est un exploit littéraire que de retenir son souffle sans faire suffoquer le lecteur, au contraire, on suit avec passion les aventures de Thémidore, un jeune conseiller au Parlement qui s’éprend de Rozette, une adorable libertine.
Godard d’Aucourt n’a pas son pareil pour railler les puissants et surtout insuffler la passion amoureuse : De la morale au plaisir, il n’est souvent qu’un pas… ou Pourquoi la nature a-t-elle borné nos forces, et étendu si loin nos désirs ?
Quant au portrait de sa tendre amie : Prude par accès, tendre par caractère, dans un moment son caprice vous désespère ; dans un autre sa passion vous enivre des idées les plus délicieuses », comment ne pas tomber sous le charme ?
Vous comprendrez que l’on préfère la compagnie de Rozette sous Louis XV que d’une héroïne américaine formatée sous Buch, puis Obama et maintenant sous Trump…, héroïne héroïnomane Hollywoodienne, bien entendu, le genre assez laide qu’on prétend extraordinaire, avec des genoux difformes articulant soi-disant les plus belles jambes de la planète…
Schyzophrène pathétique, moralisatrice perverse, semi lesbienne adopteuse qui n’hésite pas à se faire couper les seins et trancher les ovaires dans un but préventif…, qui vous dites ? Angélina Jolie…, ahhhh oui !
C’est comme la guerre préventive inventée et justifiée par Gorges W.Buch…, on tranche dans le vif, dans le tas, on explose tout le monde puis on compte les morts et on s’écrie qu’il y en aurait eu bien plus si l’Amérique n’avait pas fait son travail divin !
C’est même inscrit sur les dollars : En dieu nous croyons…, voilà…, la suite au prochain numéro…