Hot Rod Steampunk “Automatron”…
Après les années du Flower Power, au tournant des années ’70, vinrent les années de violentes désillusions. Une nouvelle génération aux looks débraillés, allait incarner cet air du temps avec provocations et excès permanents. Le Customizing bénèt de quelques Papy’s opportunistes s’est alors affiché volontairement comme une réincarnation qui n’était qu’une adaptation du consumériste mais s’est avéré quasi invendable en dehors de la cinématographie Hollywoodiènne. Ce qui s’est imposé, dans une époque historique extrêmement troublée issue de mensonges et rebâties de mensonges encore plus énormes, est l’idée de combler le vide d’un monde en lente putréfaction, en créant une opposition systématique à tous les rouages d’un système ayant développé son emprise à tous les rouages de la création.
En cette suite a donc été créé le “contre pouvoir” absolument à part de tout, destiné à combattre un système n’offrant que des considérations sociologiques ou des fausses manifestations et révolutions inutiles. La puissance négative déployée devait ainsi être le support d’un absolu qu’il fallait promouvoir pour sonder la psyché impénétrable de l’homme dans sa généralité et saisir l’incertitude qui est la vérité dramatique de chaque être. Sur une période de vingt ans s’est ainsi approfondi la question du néant lui-même, mais aussi, ce qui est sans doute plus fondamental, celle d’un pouvoir transcendantal de la création sous toutes ses formes par les relations étroites nouées non seulement avec la philosophie et les savoirs mais aussi avec les arts, peinture, sculptures, écriture et musique, pour affirmer la primauté de la sensation sur la raison. S’est en en cette constitué dans la désespérance, un devenir dans un monde sans avenir…
Dans ces années, c’est la fureur qui s’avère un bouillon intense et tapageur dans lequel vrombissent tous les extrêmes. C’est à cette époque, marquée du sceau de la mutation, que le courant punk commence à se définir. New York 73/77 de Will Hermes (Rivages) est un des récits de cette explosion dont le monde ne s’est jamais complètement remis. Déboulent dans cette foisonnante chronique les noms fameux de tous ceux et celles qui ont foulé les planches du mythique CBGB, club new-yorkais et berceau de la musique punk : Richard Hell, Patti Smith, The Ramones, Blondie, sans oublier ceux et celles qui les ont précédés, les Velvet Underground, les Modern Lovers et autres New York Dolls. Une épopée échevelée qui met en contexte le brasier sur lequel la musique punk a fait ses premiers pas d’une révolution esthétique mettant de l’avant un élément central de la culture punk : les “fanzines”.
C’étaient des publications faites maison avec les moyens du bord tel l’accès à une photocopieuse à peu de frais ce qui était, à cette époque, une révolution. Elles pouvaient être colportées, autant par la forme que le contenu, c’était l’esprit même du punk. Cette esthétique négligée, complètement assumée, voire accentuée, reflétait “l’urgence de dire” qui caractérise le punk. Le DIY (Do it yourself, fais-le toi-même) dans ses plus belles dimensions ! Les pages couvertures de ces différentes publications aujourd’hui disparues défilaient à travers des entrevues agrémentés de collages, de dessins et de textes ne se limitant pas à la seule culture anglo-saxonne, on y trouvait en effet des reproductions de certaines publications françaises, le courant punk y ayant connu de belles années avec des formations comme Métal Urbain et Starshooter. Certains Hot Rodders se sont inspirés de leur histoire dans l’univers de la jeunesse désœuvrée…
C’était au tournant des années ’80 qui gravitaient aux USA autour d’une banque convertie en bar où défilaient les plus grands noms de la mouvance punk tels “The Clash” et “The Ramones”. L’atypisme est devenu une expression de rejet trouvant dans le “punkisme” le terreau propice à l’expression de l’exubérance. Divers Hot Rods encore existants sont des témoignages de ce que fut cette époque trouble. Diverses filiations sulfureuses à l’origine du mouvement punk ont eu une influence considérable dans la critique de la société marchande (le fameux consumérisme) et voulaient symboliser l’esprit du détournement des idées par les gouvernements et la société marchande soucieuse de perdurer… Ce fut une Divine Comédie à rebours nommée “Génération Néant”, tissant déjà mille motifs, créant des formules-chocs voulant amplifier les premiers cris du politico-punk.
Il expliquait que tout est chaos déchaîné et structure fractale. dans le nouveau monde que la société marchande construisait à tour de bras, que Micro et macrocosme s’entrelaçaient, le tout étant dans la partie qu’on occupe et qui préfigure l’ensemble, même si rien n’est tout à fait “intervertible”, car l’envers de l’envers n’est pas l’endroit… C’est ainsi que certains de mes textes se retrouvent imprégnés tels des polars “hard-boiled”... “Le col de mon imperméable crasseux remonté jusqu’en haut de la nuque, les semelles de mes godasses pompant avidement l’eau boueuse d’anciens trottoirs à putes, j’avance dans les rues de la fin. L’orage sillonne à rebours les faisceaux de l’éclair et des lights de la nuit. J’aime ces nuits sinistres où le double du soleil s’est pour longtemps fait étrangler à licous de noyade. Mon enquête tortueuse dans les arrière-salles de la finance internationale et de la politique véreuse devient une balade alchimique “noise’n’roll”… Brrrrrrrr !
Tout cela dans une guerre mondiale sous-jacente ou j’explore la “Génération Néant” composée pourtant de personnages extraordinaires avec fusion des éléments mâle et femelle (le “trasgenrisme”) à la fois promesse d’un avenir radieux et cause d’un présent irradié cause d’une dualité fondamentale et de guerres sexuelles devenant mantra. Plonger via mes récits hallucinés incantatoires, intenses, dans mon incandescence, c’est palper ce qui m’a nourri, faire l’expérience que des fléaux rôdent alentours des nausées violentes de notre jeunesse. Le groin du Monde est en effet descendu à hauteur de bouche humaine, il flaire l’inexpugnable puanteur de son haleine et nous précipite dans diverses terreurs organiques. Mourance et cruauté se partagent nos fièvres. Le désespoir plante les aiguilles avancées des regards dans la chair crépusculaire, c’est un drame qui se joue.
Et vous seriez fous où folles de penser que les fureurs pourraient devenir glacis immuables figés sur eux-mêmes ! Si une Cendrillon moderne avait encore besoin d’une balade de minuit après le bal, serait-elle fière de voyager dans l’Automatron, ce Hot Rod punkiste créé par Paul Bacon, construit à partir de zéro et inspiré des carrosseries de calèches montées sur les premières automobiles de fin du précédent siècle ?… C’est donc un Hot Rod d’avant la Ford T… qui est plus “fondamental” que mon Hot Rod C’Cab…. Le Hot rod Automatron de Paul Bacon, construit à partir de zéro et inspiré des calèches, a été achevé en 2019, après plus de quatre ans et demi de travail et (comme Paul lui-même l’admettra plus tard), après beaucoup d’essais et d’erreurs de sa part. C’est peut-être la construction personnalisée la plus étonnante et certainement la plus détaillée de toute l’histoire du Hot Rodding…que vous ayez jamais vue.
Bacon est connu pour détester les croquis, alors il n’a pas pris la peine d’en dessiner un seul lorsqu’il a commencé à penser à son prochain projet, en 2015. Il avait déjà deux énormes succès à son actif, alors il voulait faire “quelque chose” qui n’avait jamais été fait auparavant. Son idée s’est focalisée sur le carrosse de Cendrillon. Le résultat est un Hot Rod de style steampunk/cyberpunk, avec un moteur présenté de telle façon qu’il apparaisse hyper complexe avec la forme d’un carrosse. Les détails intérieurs et extérieurs devaient être inspirés de la révolution industrielle, Bacon utilisant tout ce qui lui passait dans les mains. Le châssis provient d’une Singer Sport’24, mais il a été modifié au-delà de toute reconnaissance. Les roues avant proviennent d’une Austin 7, et il y a d’énormes pneus Mickey Thompson à l’arrière avec un essieu Alfa Romeo. Le moteur étant un V8 Buick/Rover suralimenté couplé à une transmission Borg Warner T35.
Lorsque Ce Hot Rod a été dévoilé, Paul Bacon a fait état d’une vitesse “possible” de 110 mph (177 km / h). C’est probablement aussi rapide que n’importe qui oserait aller dans quelque chose d’aussi léger et avec une si mauvaise visibilité. En effet, Bacon lui-même admet qu’il ne peut pas voir grand-chose à travers le pare-brise à cause des carburateurs du moteur. Comme pour aggraver les choses, il déteste aussi l’attention que la voiture lui apporte quand il est à l’arrêt, parce que tout le monde veut une photo et des informations. L’intérieur est comme le coffre aux trésors du capitaine Nemo. Un appareillage de commutation de bombardier quadrimoteur Lancaster a été réutilisé, le volant a été construit à la main, les sièges sont la résultante de la destruction de chaises de salle à manger qu’il a repérées au showroom Barker et Stonehouse de Nottingham…
C’est un vieux cadran solaire qui indique dans quel rapport de vitesse (automatique) se trouve la voiture. Et ce n’est qu’à première vue. Bacon aime s’adapter au fur et à mesure qu’un projet progresse et surtout réutiliser des choses que d’autres rejetteraient, par exemple, les feux avant de l’Automatron sont fabriqués à partir de vraies lampes de chariot, tandis que les embouts d’échappement sont fabriqués à partir de gobelets en argent offerts comme cadeau de mariage. Le réservoir d’essence était à l’origine une bouteille de gaz. Les planchers sont en chêne poli, les fenêtres sont faites à partir de zéro donc elles ne sont pas fonctionnelles, mais elles en ont toujours l’air. Bacon a même mélangé et appliqué la peinture lui-même. Tout bien considéré, il n’est pas étonnant qu’il lui ait fallu autant de temps pour terminer ce projet, qu’il décrit comme le plus long, le plus difficile et le plus coûteux sur lequel il ait jamais travaillé.
Pour un homme avec son expérience, cela veut dire quelque chose : “Automatron est la meilleure chose que j’ai jamais construite et je ne construirai probablement plus jamais rien d’aussi détaillé”, m’a dit Paul Bacon : “Cette voiture a été la voiture la plus chère que j’ai jamais construite, et aussi la plus exigeante en main-d’œuvre jusqu’à présent, presque toutes les pièces sont personnalisées”. Pour Bacon, la construction de la voiture est la partie la plus intéressante du projet, donc, peu de temps après le grand dévoilement d’Automatron, il parlait déjà de la vendre pour un montant non divulgué dépassant le million d’euros : “Quand vous avez été si proche d’un projet et que vous l’avez construit, je ne pense pas que vous puissiez jamais l’apprécier pleinement. Mais si quelqu’un peut me l’acheter, je suis sûr et certain qu’il va l’adorer”. Personne ne s’attendait à être bel et bien arrêté net dans son élan par cette chose lors du dernier festival of Speed de Goodwood…
Mais, une fois que les gens du public ont admiré comparativement toutes les merdes, fermé leurs grandes gueules critiques et éclaboussé son visage d’un peu de postillons, Paul Bacon a su que qu’il allait en savoir plus à ce sujet et palper le million de dollars qu’il estimait être le juste prix de sa création artistique… Etant sur place, j’ai donc redécouvert ce que je savais, à savoir que cette chose avait été construite par le légendaire Paul Bacon qui n’est pas étranger à la communauté Hot Rod Britannique alors qu’il est extrêmement connu dans la scène américaine du Hot Rodding pour ses constructions capricieuses. Vous supposeriez qu’avec une construction aussi “immense” que celle-ci, qu’il y aurait des croquis et des plans, de la recherche et du développement et autres. Je veux dire, que c’est pratiquement à partir de la base. Et qu’il fallait en faire état pour sa postérité…
Mais Paul Bacon ne dessine rien en détail, il suit simplement les oscillations de son cerveau au fur et à mesure que la construction se développe et que les choses fonctionnent ou non. L’arrière-plan de la construction terminée il est de première nécessité de faire un retour vers le futur en 2015, lorsque Paul a mis la main sur un pick-up Ford Model A de 1924 qui était reconstruit d’un châssis Singer. À partir de là, il ne restait plus grand-chose à part ce même châssis (ayant eu une charge absolue d’ajouts découpés au laser, etc.), l’essieu avant avec un ressort à lames transversal avec des triangles de la conception de Paul) et un essieu arrière Alfa Romeo qui a été radicalement réaménagé avec des bobines supplémentaires. Propulsé par un V8 Buick/Rover assez bien déguisé qui a été accouplé à une transmission Borg Warner T35 reconstruite, il semble monstrueux !
Les couvercles de culbuteurs de style Ardun ne manqueront pas de vous décourager, mais nous vous assurons qu’il s’agit d’un moteur V8 Rover en dessous. Paul a utilisé des gobelets en argent fixés sur des plaques découpées au laser pour créer des trompettes d’admission d’air. Il y a aussi quelques ventilateurs à induction 12V pour aider à maintenir les températures du radiateur. Diverses marques de moulure ajoutent un aspect vintage d’authenticité aux morceaux de résine qui ont été tournés dans un tour pour reproduire les capots à effet laiton, tandis que les embouts du collecteur d’échappement ont été volés sur la moissonneuse-batteuse d’un fermier voisin avec qui s’éternise une dispute familiale ! Le réservoir de carburant monté à l’arrière a en fait commencé sa vie comme une bouteille de gaz “Vintage Calor” et a été adapté pour convenir.
Les rouages que vous voyez à l’arrière du moteur regroupent les mêmes liaisons d’accélérateur que celles d’une Bugatti de 1926. L’extérieur est formé de deux parties distinctes, en raison du poids. Paul a utilisé des feuilles de polystyrène pour créer une forme rugueuse avant de la positionner avec du plâtre ménager jusqu’à ce qu’elle soit fixée… À ce moment-là, il a ajouté du papier d’aluminium et beaucoup de fibre de verre. Les deux côtés de la carrosserie ont été boulonnés directement au châssis de-même que la carrosserie “calèche” en fibre de verre et recouverte de vinyle. Recouvrant ce que l’on pouvait voir de la jonction des deux parties, Paul a reproduit un badge Singer pour le cacher… Les charnières des portes à ouverture suicide ont été découpées au laser à partir de feuilles d’acier. Tout a été une question de détails, du début à la fin.
Les fenêtres, par exemple, ont été créées à partir de feuilles d’acrylique polies et collées. Cela signifie que ces fenêtres ne sont en aucun cas fonctionnelles, mais Paul a quand même ajouté des faux enrouleurs magnifiquement détaillés. Le Hot Rod repose sur un ensemble de roues de charriots pour canon, elles sont en acier, avec des centres découpés au laser et des pneus Austin 31 3 / 5.19/7, cachant un jeu de freins à disque Alfa Romeo. Des centres similaires se trouvent dans les roues de moto élargies et recouvertes de 31/18.5/15 Mickey Thompson Sportsman… Les feux avant sont également intéressants, Paul les a fabriqués lui-même. Littéralement, tout a dû être réfléchi et réfléchi un peu plus. Une teinte Aircraft Grey appropriée termine parfaitement l’extérieur, que Paul a préparé et peint lui-même.
À l’intérieur, parlons d’abord de ces sièges uniques. Paul avait initialement prévu de faire les sièges lui-même, mais après une visite à la salle d’exposition Barker and Stonehouse de Nottingham, il a repéré quelques chaises de salle à manger. Tout était mesuré et ordonné, c’était aussi simple que cela. Les cadres de siège en acier ont ensuite été découpés au laser, avec du chêne poli utilisé pour les bases et les dossiers. Le sol est également composé de chêne poli. Ils sont en forme de lattes afin qu’on puisse réellement voir le sol en dessous ! Également à l’intérieur se trouve une roue du treuil à bombe d’un avion biplan français de 1915 au centre du cockpit qui actionne le frein à main du véhicule. La timonerie de vitesse est dissimulée par un faux boîtier de direction, que Paul a également fabriqué lui-même, ainsi que les lettres Hispano-Suiza ajoutées.
Ce boitier est composé d’une poignée de machine à coudre Singer et d’une vieille perceuse, ainsi qu’un cadran solaire adapté de diverses choses pour indiquer dans quel rapport il se trouve! Il y a d’autres bizarreries à chaque coin, avec de nouvelles utilisations pour les anciens matériaux. La pédale de frein, par exemple, comporte la plaquette d’une vieille pompe à pied Dunlop, tandis que le volant a été entièrement construit à partir de zéro par Paul. Le simple fait de regarder cette construction est hallucinant, les yeux se précipitent constamment vers de nouvelles choses que vous remarquez, et de nouvelles questions surgissent dans votre esprit à chaque regard. Paul souligne qu’il y a eu pas mal d’essais et d’erreurs, c’est pourquoi il a fallu quelques années pour tout concrétiser. C’était un aimant évident et certainement un futur aimant pour les futurs spectacles auxquels l’engin sera peut-être encore exposé..