Kruising’s d’amoures…
Je l’ai rencontré au hasard, comme les plus belles rencontres. Quand je ne m’y attendais pas, quand j’avais la certitude que l’on ne m’y reprendrait plus. L’esprit libre, encore cabossé des zamoures précédentes, j’ai déboulé au détour d’un stand dans un putain de show de Hot-Rods, l’esprit libre, le cœur mou. Alors ce fut le coup de foudre, la folie directe : la relation qui démarre sur les chapeaux de roues, au risque de me brûler le cœur. On a passé le temps à kruizer ensemble un weekend entier, des histoires de palpitations des sens, des histoires de puissance. Le début d’une histoire d’amour, ce n’est que mélodie et passé l’électricité des premières fois, on se roule dans le bonheur jusqu’à l’agonie, jusqu’à ce que l’esprit s’enflamme. Jusqu’au sang. On kruize. On kruize. J’écluse quelques boissons, elle me ruine en consommation des sens et d’essence. On kruize, et je pense à la vie, à l’avenir, au non avenir, à la fin…
Des longues phrases, des tirades banales que je pense profondes, pour des moments tellement beaux. C’est burning et burnout, c’est des moments de vies, des mensonges et quelques vérités. Je m’invente un personnage ou je gomme certains défauts, parce que chaque pensée m’offre la possibilité de me redéfinir. Alors je passe des semaines, voire des mois, le sourire aux lèvres, à me balader. Tous les jours, certaines nuits. Ce n’est pourtant pas l’affaire finale de ma vie, mais il y a quelque chose de chaud, de rassurant, un coté aventure aussi. Je lui pardonne tout, ses petits défauts, ses petites manies, et, lors de rares moments fugaces, cela confine au sublime. Alors on kruize, on kruize, on kruize. Puis je commence à connaître les habitudes. L’excitation de la nouveauté n’est plus là, mais pourtant, chaque moment, chaque nouvelle balade, chaque nouveau kruizing est tellement plaisant.
J’étais un peu perdu aux premiers moments, à ne pas s’avoir que faire de ce nouveau Hot-Rod, gestion d’émotions nouvelles. Je connais parfaitement le tout désormais. Je le chante sous la douche, je le connais par cœur, je sais sur quels boutons appuyer pour tout faire sauter. De lassitude ? Que nenni. Quel bonheur, cette relation qui partait sur du plaisir spontané, sans lendemain, évoluer en longue quête amoureuse avant de rentrer explosé, défoncé, chez moi. Des mois plus tard, il m’accompagne toujours, dans mes moments de joies, dans mes déprimes. J’ai même vécu un plan cul de sortie de boîte de nuit sur ses sièges en cuir, que demande le peuple ? Tu as envie de pleurer de me lire, mon Popu ? Mais parce que tu es bourré, et heureux par procuration de lecture… Et le temps passe. Un deuxième Hot-Rod arrive. Une sacrée étape, dans une relation, parfois casse gueule, souvent accueillie avec sourires.
Seuls les cons ne voulant pas s’engager dans une telle collection auront peur de ce genre de défis au grès des mélodies, n’est justement pas qu’un objet de kruizing. La deuxième étape, c’est souvent de prouver que l’on peut être plus sérieux. Alors je police. Je police. Ses aspérités des débuts, ses petits défauts, je les accepte moins. Ses maladresses de tenue de route tellement mignonnes des premiers mois deviennent agaçantes. Alors je gomme. Je fais des efforts. Je me gratte les couilles lorsqu’il ronronne. Je pête un plomb parce que son faisceau électrique devient bordélique. C’était mignon, c’est devenu chiant. Soudainement. Alors je fais des efforts, je rabote. Tohu Bohu ! C’est beau. Très beau. C’est la relation stable, sans les kruizing’s et les burnouts sauvages du début, mais c’est toujours aussi agréable, aucun autre ne m’a jamais mieux taillé un 400 mètres que ce Rod que je connais sur le bout des doigts depuis un an.
C’est beau putain, c’est beau. Je fête son anniversaire, c’est beau, je suis heureux putain. Bye Bye Macadam, ça me rappelle le début, quand tout était fou, beau, candide. Parade, ça me rappelle quand je rentrais bourré en hurlant dans la rue, avec une nymphette dans les bras. Je roulais sur le monde putain. Maintenant je roules en Rod, mais c’est bien. Et puisque qu’on se connait bien, pourquoi ne pas pimenter un peu le bordel et tester de nouvelles choses ? Ca fait des Let’s Go, mais c’est pas grave parce que j’ai confiance et que je vois bien que la relation tient toujours debout, qu’on est fait pour être ensemble, putain je suis heureux. Alors oui, c’est plus mou. C’est moins l’aventure, les surprises, ce n’est pas tous les jours, mais seulement quelques fois dans le mois. La lassitude ? Pas encore. Pointe-elle le bout de sa calandre dans ma tête ? C’est possible. Les burnout’s ? Va falloir oublier. Le boulot tu comprends mon Popu ?
Et la Bentley est jalouse et râle que je ne la sors plus, alors que je me pointais avec des beautés rares et vénéneuses au resto il y a un an, et que j’en étais fier. C’est beau, c’est beau. C’est mieux construit une Bentley, plus solide, les fondations sont fortes. Mais la passion n’est peut-être plus là. On a troqué la passion pour la sécurité. C’est pas plus mal. Ohhhh ! Tu as envie de pleurer mon Popu ? Mais c’est parce que tu sens le truc glisser, parfois s’éteindre, alors que tu étais pourtant heureux pour moi. Ca fait quelque temps que je ne l’ai pas regardé mes yeux dans ses phares. Avec le boulot, GatsbyOnline, les obligations, les fausses excuses, tout ça. Ohhhhh ! On se croise tous les jours au garage, hein, mais depuis combien de temps n’y a t’il pas eu le feu ? Le vrai, celui qui brule, qui fait transpirer, qui nique les sens et le cervelet. C’est froid bordel. Il est toujours aussi propre, toujours aussi beau. Oh, il est toujours parfait. Il est beau !
Il est parfait, putain ! Tu nous envie mon Popu ? On avait l’air tellement heureux, des souvenirs pleins la tête, de la mélancolie à tour de bras. Il fait froid, tu penses à Biolay et sa vieille chanson déprimante, mon Popu ? On continue tous les jours. Mais ça Kruize plus. Ca forniquait de façon robotique. Une obligation presque mécanique pour entretenir. Pire, je commence à comprendre qu’il discute avec la Bentley quand je suis pas au garage… Il ne le cache même pas, ça m’agace, et le pire, c’est que la Bentley se marre. C’est déjà mort ? A l’intérieur ? Ça prendra peut-être encore six mois. Six mois à trainer. A s’engueuler parce qu’il démarre plus, des hurlements inutiles parce qu’entre deux séances d’ennuis il faut bien un peu de tension, un peu d’électricité pour charger la batterie. Les charges fréquentes ont remplacé les Kruising’s sauvages, il faut bien se décharger d’une façon ou d’une autre.
Et pourtant je continue, je tente de regarder vers l’avant, de prévoir des voyages. Parce que c’est rassurant. Ca fait des années que s’en est là ! Je fais quoi si je me retrouve tout seul comme un con ? Ça fait peur, l’idée de me retrouver seul sans Rod. Alors c’est fini, c’est mort, et pourtant, au détour d’un regard, d’une soirée, d’un geste, je me souviens que j’étais amoureux. C’est un peu amer, un peu triste, mais il y a une légère chaleur dans ma poitrine. Je me rappelles de tous ces putains de moments, mélancolie belle et lunaire. C’est Mortel, c’est beau, c’est le plus beau truc depuis des années dans ma putain de relation homme/machine. C’est nouveau et c’est avant. C’est rassurant et ça pue les burnout des Kruising’s des premiers jours. Je pense même à tout recommencer avec ce Rod, comme aux premiers jours. Ça te file les larmes aux yeux, tu es heureux, mon Popu ?
Tu te dis que tout peut repartir, que je vais rééditer Chromes&Flammes en papier ? Que l’étincelle est là, l’amour aussi, bien enfoui. Alors tu espères comme un niais, mon Popu, comme un con tu te dis “Putain ce connard de DeBruyne m’a entrainé jusqu’ici à pleurer sur un Rod, salaud !”, Les minutes passent, l’étincelle trépasse, elle ne te regarde plus et voilà que l’on s’engueule pour rien… La lassitude ! Et tu te rends compte que je t’ai fait passer une émotion électronique dans le cœur… Voilà, retour au vide du web vide. Pas de rage, pas de lien. Mêmes les conflits sont vides, sans passion, sans feu. Tu pleures mon Popu parce que c’était une belle histoire d’amour et qu’il ne reste plus rien que des photos. Plus d’amour, plus de haine, plus rien… Haine de quoi et de qui ? C’est la question, on verra plus tard. Mais, le vrai sujet de cet article mon Popu, sache-le avant de changer de sujet, je te le dis tout net, n’a pas été abordé…