Hot Deuce HighBoy
Il est de ces Hot Rod’s qui ne laissent pas indifférents et continuent d’accompagner nos pensées et nos questionnements surgis au hasard d’expériences émotionnellement fortes, tant elles ouvrent un horizon de réflexions au cœur de ressentis plutôt appelé à demeurer dans le silence de la douleur intime et l’étouffante pesanteur d’un certain désarroi. J’investis cette fois encore l’espace symbolique d’un texte pour y inscrire une critique qui s’appuie sur des œuvres littéraires exemplaires de la littérature de langue française, y consacrées.
Parmi ces œuvres, l’on peut citer entre autres “Les Oraisons funèbres” de Bossuet, “Pour un tombeau”de Stéphane Mallarmé, “L’éloge funèbre d’Émile Zola” d’Anatole France, “Le discours prononcé aux funérailles de Balzac” par Victor Hugo, “La consolation de M. Du Périer sur la mort de sa fille” de François de Malherbe, “Le discours du transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon”d’André Malraux, “Le Livre de ma mère” d’Albert Cohen, “Une traversée de l’œuvre d’Henry Bauchau de La Déchirure au Déluge” de François Emmanuel, “Jan Karski”, sans oublier divers passages de chansons de Barbara et Stromae…
Parmi les formes littéraires adéquates pour célébrer le pré-éloge funèbre de ce Hot Rod, on retrouve en premier lieu celle de l’éloge funèbre, qui s’enracine dans la tradition du témoignage prononcé au moment des funérailles et qui a trouvé en français sa forme codifée au XVII e siècle à partir des célèbres oraisons funèbres de Bossuet. La force agissante de cette prise de parole inscrite dans la ritualité du deuil s’appuie sur le principe du don et du contre-don défini par Marcel Mauss. Il y a là une réciprocité qui engage l’hommage rendu En valorisant ce dernier, le locuteur se place dans une filiation symbolique.
Et ce à l’égard du défunt engin dont l’héroïsation profite en fin de compte au locuteur, qui se retrouve à occuper la place, modeste mais nécessaire, de témoin de la grandeur de ce qui mérite l’Oraison. Quant à l’autre genre funèbre par excellence que représente le “Tombeau littéraire”, apparu au XVI e siècle, il reflète le moment où ce qui est visé devient un monument individuel, cristallisant l’émergence de l’identité individuelle. Ce genre se centre sur la partie finale du processus de deuil visant à relancer les endeuillés dans la vie en soulignant l’importance qualitative de l’objet de l’Oraison envers la communauté.
Une évolution notable intervient à la fn du XIX e siècle avec Mallarmé, le conduisant vers la valorisation d’une singularité créatrice résistante à toute récupération par la collectivité, dans une écriture ventriloque cherchant à donner voix au souffle du néant. Mais en tant qu’événement, tout cela tend surtout à laisser s’exprimer qui décide de s’auto-flageller, dans les formes ramassées du langage que sont la citation, l’épitaphe ou même la chanson. Leur brièveté et leur concision conduisent à la perception d’une certaine intemporalité pour les premières et d’une densité contenue toute entière dans le texte.
Il est vibrant d’émotions de qui s’est laissé aller à en écrire tout en le regrettant amèrement. En fait, les nouvelles technologies ne sont pas en reste sur la question, elles qui proposent des formes plus éphémères au travail de mémoire, mettant à profit la fugacité de l’écran d’ordinateur, la sensorialité pour exprimer la fragilité des choses. L’exploitation du support numérique dans les formes contemporaines de ritualisation, inverse le processus d’intégration des valeurs en partant des besoins individuels pour faire émerger ensuite, selon la logique du réseautage, les besoins collectifs.
Il arrive parfois que l’implication des internautes soit fortement sollicitée, au point où tout à l’écran devient hautement signifiant, pouvant ainsi dévoiler des dates d’événements qui sortent rapidement de la banalité de leur statut d’information pour entrer dans la vie sensorielle des vivants, amenés à prendre conscience, dans cette litanie, de leurs responsabilités. L’agir de la littérature personnelle, son style clair et incisif, son ton juste et à propos, font de cet article un viatique pour les mémoires endeuillées. En de brèves phrases qui suivent la chronologie de l’histoire de ce Hot Rod
Le choc de sa disparition et le début du deuil, la confrontation à l’oubli, les commémorations à prévoir et la résilience, obligent d’aborder également l’Histoire occultée que l’on donne, mais aussi celle qui est la mienne pour conclure sur les formes d’expression contemporaines de l’hommage rendu. La prouesse est d’être parvenu à traiter humainement d’un thème résistant à la pensée analytique et à ses armées d’arguments rationnels, en mettant mes compétences de spécialiste du Hot Rodding au service d’une parole sensible, apte à s’adresser humblement à l’irréductible douleur liée à l’expérience de la disparition.
Il ne s’agit en effet pas de faire étalage d’un savoir, mais de rendre compte de la force agissante de la littérature lorsque celle-ci se trouve convoquée dans l’élaboration d’un processus. Face au désarroi je me dois d’attester de la puissance symbolique à même de ramener progressivement du sens au cœur de la sidération. C’est grâce aux mots qu’on cesse d’être seul face au désastre. En plus d’assigner une place aux endeuillés, l’écriture s’appuie sur la performativité du langage telle qu’elle se manifeste dans l’adresse faite, établissant un dialogue virtuel intégrant le silence comme réponse donnée au vide existentiel.
L’enjeu de mes productions textuelles est de créer un réinvestissement qui ravive le sentiment d’appartenance à la communauté des Hot Rodders. La littérature se saisit de l’impuissance ressentie par une sorte de surcompensation de l’imaginaire à même de donner le sentiment illusoire d’une connaissance. Preuve en est que, malgré l’existence de certains genres spécifiquement consacrés à ce thème, l’événement dépasse les frontières du genre afin d’occuper l’ensemble de l’espace littéraire. L’écrivain apparaissant ainsi comme le secret allié avec qui entamer le chemin qui reste à parcourir…,
Comment juguler cette angoisse au quotidien ? Comment s’approprier l’espace, la folie/non-folie et le temps ? Le difficile apprentissage de la mesure prend sa source dans l’art qui est le point d’ancrage dans la réalité. Les œuvres, entre autres de Duras, Hesse, Nabokov, Leduc, Aquin et Lipitor me permettent de deviner le sens et d’élaborer des stratégies de sursis et de survie. Il y a là une victoire certaine de l’art sur la psychiatrie. L‘angoisse relève du théâtre, donc du jeu. Quel est le véritable sens de ce récit défait, refait, décalé dans le temps? Serait-ce simplement une célébration ludique de l’interprétation?
Outre que tout commence par une vision mêlée d’un peu de nudité et de sexualité, les mouvements d’absorption et d’écoulement constituent des éléments récurrents à (ré)interpréter et situent tout le récit. Au fond, la trame narrative tient à peu dans un enchaînement littéraire extatique où les mots prennent la direction du récit et soumettent en quelque sorte à se prêter en une espèce de course à relais entre les fragments. Tout se déroule dans cet art des glissements de sens juxtaposés. Cette quête des images, avalées et transposées dans l’écriture cherche à saisir le temps infinitésimal du faux pas…
Sous le couvert du jeu et de l’humour, je m‘engage dans une révision culturelle inusitée et fantasque, m‘amusant à déranger imperceptiblement, dans le tourbillon effréné de la dérive de la recherche du sens, mais le véritable sens, essentiellement fuyant, échappe puisqu’il n’y a que visions et méditations à poursuivre inlassablement. Cette quête hors de l’angoisse, vers le sens, se vit dans le mouvement des parcours dans la pluralité des lieux, des langues et des cultures. Réaliser un résumé est de la sorte impossible. Ce Hot Roadster Ford de 1932 était énorme il y a 27 ans. Maintenant, il est de retour mais inchangé !
Ce roadster révolutionnaire de Sacramento a été construit par Dennis King de chez Kings Fabrication situé à Turlock, en Californie. King a construit la voiture “à la main”, en ajoutant des centaines de pièces uniques et de détails personnalisés. Comme les 23 autres Hot Rods Deuce de la collection de Gary, ce Highboy blanc est en acier d’Henry Ford… Bien sûr, Henry ne reconnaîtrait pas toutes les modifications apportées à la carrosserie, telles que les panneaux de carrosserie, le capot et la calandre fabriqués “à la main” (avec des clignotants “Frenching”) et les écopes latérales du capot (nécessaires pour le Hemi).
Il y a aussi les phares rectangulaires rabattables cachés, les rétroviseurs moulés, le cadre de pare-brise moulé, les portes inversées avec charnières cachées et les feux arrière “fendus”. Les proportions ont également été modifiées. Ces portes ont été étirées de 2 1/2po, le capot a été raccourci de 2po et le capot a été allongé. L’empattement a été allongé de 4po par rapport aux 106po d’origine. À Oakland il y a quelques années, le ’32 de Gary était en compétition pour le prix du meilleur roadster des États-Unis. Aussi radical soit-il, il a été devancé par le Roadster modèle T à nez de chenille d’Ermie Immerso.
Déçu, Gary a décidé de changer de voiture et de la ramener à la GNRS pour une autre tentative deux ans plus tard. En 1991, le roadster était de retour à Oakland, cette fois vêtu d’une peinture turquoise pâle. Immerso était également de retour et, pour la deuxième fois, le modèle T est rentré chez lui avec le trophée AMBR. Gary’s Deuce a été dégouté et quoiqu’ayant remporté de nombreuses autres expositions tout au long de l’année, après l’avoir conduit pendant un certain temps, Gary a rangé ce Hot Roadster et a commencé à collectionner d’autres Hot Rod’s’32.
Gary a dit qu’il n’avait jamais aimé la peinture turquoise que le roadster portait lors de sa deuxième apparition en GNRS. C’était un jour heureux lorsque la voiture est sortie de la cabine de peinture de Tim’s Hot Rods, préfinie dans une peinture blanche accrocheuse, juste au moment où elle a été construite pour la première fois. La peinture est contrastée par beaucoup de chrome, réalisée chez Sherm’s Custom Plating, la société de Gary. En 2016, le Grand National Roadster Show n’était plus à Oakland depuis près de 20 ans et le roadster de Gary n’avait pas participé à l’événement depuis 25 ans.
Mais lorsque Gary Matranga a conduit son Hot Rod high-tech restauré dans le Fairplex du comté de Los Angeles pour son troisième GNRS, c’était comme un retour aux sources. Aujourd’hui, la voiture est exposée dans la collection de Gary. Le moteur Hemi de 1957 a été transplanté à l’origine d’un dragster Top Fuel. Il est alimenté par un compresseur Bowers et un collecteur Weiand, avec injection Hilborn. Un allumage par magnéto Vertex donne vie au Hemi, et des collecteurs en acier inoxydable personnalisés envoient l’échappement vers des tuyaux et des silencieux personnalisés. Voilà, voilou, c’est terminé… Amen !