Hot-Rod / Dirt-Tracker……
On m’avait rencardé sur un “scoop” de cinquième main, l’existence d’un Hot-Rod spécial qui allait être présenté en première universelle dans une concentration-concentrationnaire qui se déroulait dans un recoin des USA, en même temps qu’une course de Dragsters “Dirt-Track”, sur terre, un bazar-machin poussiéreux réservé aux inconditionnel(e)s, ce qui allait m’offrir une nouvelle expérience des folies inhumaines… Un Chinois à la con a écrit que l’expérience est une lanterne qu’on porte dans son dos et qui n’éclaire que le passé, pour ma part, d’expériences diverses, je pense que vivre, c’est arpenter un tapis roulant allant en sens inverse de son déplacement. Ce qu’on peut espérer de mieux, c’est de pas trop reculer, se maintenir est une victoire…
Mais avancer est une utopie, surtout si les forces déclinent… Et le moment vient, inévitablement, où on se retrouve à la case départ, la gueule déjà barbouillée de mort. Cela écrit, il n’y a pas de quoi s’affoler ! Je réfléchissais à ça dans le car Greenwood climatisé qui roulait peinardement. L’horizon s’élargissait au fur et à mesure du temps passé à rouler, sinistre et magnifique à la fois, les terres alentours étaient plus glabres que la chaglatte d’une vieillarde et puis on a ralenti et le car s’est payé un majestueux arc de cercle avant de se ranger entre deux monstres de son espèce. Les touristes pullulaient : des Japs blêmes, des Scandinaves trop blonds, des Teutons trop gras dont les femelles portaient des culottes de cheval consécutives aux excès de lard fumé…
C’était un ramassis de glandus, nantis de coups de soleil et de chapeaux de toile ridicules, coltinant un matériel photo qui achevait de les enconner, la horde habituelle ! Installé sur le siège proche de la porte, je fus le premier à poser le pied sur terre, le soleil tapait durement, un vieux larbin de l’organisation de la manifestation a rameuté tout le monde et nous a entraîné en direction d’un cabanon ou l’ancêtre s’est mis à expliquer ce qui allait se dérouler, un rien théâtral il était fier de ses explications (dont je n’ai rien saisi), comme d’un exploit physique que lui seul réussissait… Tout juste s’il n’attendait pas des ovations… Il s’est résigné à enfouiller quelques pourliches parcimonieux puis, d’un geste autoritaire, nous a embarqué un peu plus loin.
Un sourd grondement nous est alors parvenu, de plus en plus fort… et un Hot-Rod a jailli comme vers le ciel avant de retomber à coté du groupe hétérogène que nous formions, l’assistance a crié de surprise, de peur peut-être aussi ! Une ravissante jeune fille accompagnant son père paralysé, a eu un élan de frayeur et s’est blottie contre mon épaule, mais aussitôt, elle s’est écartée, confuse.
— “Excusez-moi !” balbutia-t-elle avec un délicieux accent russe…
— “Tout le plaisir a été pour moi”, j’y ai rétorqué dans un français se la jouant entre l’inflexion dauphinoise et l’intonation parisienne.
En pleine choucroute, le conducteur-pilote du Hot-Rod n’avait pas l’air tellement vieux, mais il avait dû morfler un court-jus dans le cigare qui le faisait patauger du bulbe, ce mec avait dû être quelqu’un de bien, ça se distinguait encore sur ses traits, cheveux bruns, grisonnants aux tempes, yeux de Delft, pommettes longtemps encaustiquées à l’aquavit, dommage qu’il paraissait en pleine crise de décroissance ! On clapait morne dans cette ambiance lamentable de touristes au rabais, toujours soucieux d’obtenir le maximum en échange du minimum… Je guignais sans déplaisir la demoiselle au papa déjanté, si blonde et bronzée, j’imaginais son corps gracieux, peint aux bains de soleil, mais bon, stop…
J’allais pas me mettre à goder avec une tranche d’animal mort, je me morigénais, j’ébullitionnais du bulbe, trépignais de la bistougne, la trempe-trempe, ça devenait systématique, à la longue, j’aurais pu tenter de faire un usage différent de ma vie, me consacrer aux autres, aller au secours des populations sous-alimentées du tiers monde, m’occuper de jeunes (et jolies) délinquantes. L’homme de bonne volonté trouve toujours à s’employer, à force de copuler, on fini par se vider l’âme plus vite que les bourses. Je pourrais en ce sens vous interpréter le rôle intéressant du Hot-Rodder éperdu d’amour découvrant le Saint-Graal qu’était ce Hot-Rod Dirt-Track “verdache” immatriculé “UNDERSLUNG” : j’aurais du, auquel cas, pleurer de bonheur sur mon clavier d’ordinateur…
J’aurais ensuite déchiqueté un mouchoir à belles dents, me tordant les mains, et autres simagrées de même style : au lieu de ça, je suis resté digne dans mes souvenirs “zémus”… J’ai tiré mon calepin à couvrante de moleskine pour prendre des notes. On n’en trouvait pratiquement plus dans le commerce, on n’en trouve d’ailleurs maintenant plus du tout, mais j’en ai tout un stock qui me vient de mon pépé, lequel adorait faire des réserves, il accumulait les trucs les plus insensés, des crayons, des trombones de toutes les tailles, des cornes à chaussures, des crochets “X”, des savonnettes Gibbs, des brosses à dents, que sais-je encore ? Il avait un côté écureuil, mon pépé, des marottes lui venaient brusquement, un besoin de se prémunir contre les vacheries futures de l’existence.
II m’avait dit un jour que le temps des calepins allait disparaître et cette perspective lui paraissait intolérable… Alors il a foncé dans une grande papeterie et a acheté tout son stock de calepins ! Dommage qu’il ait disparu si tôt, on aurait sûrement eu des choses à se dire, des connivences somptueuses à établir entre nous, bref, j’ai noté dans le calepin mes ressentis concernant le Saint-Graal que je venais de découvrir… Moi, j’ai fait romancier spécialisé en autos mobiles et particulièrement les Hot-Rods au lieu de cosmonaute, je ne m’en sentais pas capable et quand j’ai vu le retour sur Terre des vaillants pionniers de l’espace, j’ai de suite compris que ces héros étaient pleins de merde dans leur combinaison…
Car, rester coincé des jours et des jours et nuits et jours plein de merde dans ces énormes toupies bourrées de fils, de condensateurs, de bidules et de trucmuches avec, à peine discernables dans cet enchevêtrement, deux places pour des cosmonautes, fallait-il avoir des couilles géantes pour oser prendre place là-dedans et se laisser valdinguer dans l’intersidéral, ces héros devaient avoir le cul super irrité, tout rouge/violet sans pouvoir se gratouiller avec leurs gros gants ! Ces gonziers qu’on a déjà oublié les blazes, je les salue bas, devoir supporter tant de merde dans l’espace, c’est un exploit sidéral, ils auront fait du genre humain autre chose qu’un paillasson. Sur leurs calepins ils avaient surement noté des rencards pour la semaine de leur retour, la foi en Dieu peut-être?
Moi, ces places réduites qui les obligeaient à se tenir tête-bêche, recroquevillés à l’extrême, je comprenais pas où ils pouvaient loger leurs gigantesques burnes, les focards de l’espace et puis ils en sont revenus, ils ont, depuis, fait des gosses, pris du ventre, regardé des débilités à la TV, ils sont rentrés dans l’atmosphère glandue qui est la notre, là que le con prolifère, que se développe le vice et qu’on meurt pour de bon, pas plus avancés qu’avant le déluge ! Notez que l’intérieur d’un Hot-Rod c’est presque pareil qu’une capsule spatiale, y a pas de place pour les jambes, les couilles sont compressées, l’air est irrespirable, faut espérer ne pas avoir de crampes et prier pour qu’on puisse en sortir vivant…
De plus, lorsqu’on arrive en Hot-Rod dans une fumiste concentration concentrationnaire, on a quasi les mêmes sensations qu’Amstrong posant ses pieds sur la lune (Amstrong le cosmonaute, pas le coureur cycliste), on se demande ce qu’on est venu f… là… car dans les concentrations concentrationnaires, qui sait y faire avec les femmes ? Embroqué à fond de couilles dans les cagoinsses, ça manque de poésie, mais dans les cas d’urgence, le décor n’a plus la moindre importance, j’ai d’ailleurs connu une Hot-Roddeuse nymphomane qui à ma vue s’est direct déslipée, puis s’est accrochée à mon cou, et a placé ses admirables jambes autour de ma taille. Je l’ai promenée d’un mur à l’autre des toilettes jusqu’au moment ou je ne sais plus qui est entré because sa prostate….
Oui, ça le taraudait… et quand il m’a vu en train de bien faire, il a ouvert la bouche pour un cri de surprise qui n’est pas sorti, par contre, il s’est licebroqué une grande giclette dans le falzoche, puis, discret, il est ressorti… La Hot-Roddeuse pendant ce temps d’éternité tentait de ne pas crier, mais lorsque je lui ai eu déposé le bord des fesses sur le lavabo pour pouvoir y aller plein gaz, ç’a été trop intense et elle s’est mise à appeler sa maman sur l’air impérissable de la Marseillaise. Je tente, en écrivant tout ceci de dresser un catalogue raisonné de ces jolies greluches adeptes du Hot-Rodding, mais y en a trop, toutes bien ronflantes du Pétrus et salopiote de bon ton, par contre, en comparaison, les pétasses des réunions de voitures classieuses, c’est autre chose…
C’est pas que les culbuter qui importe, c’est le style, même si elles sont trop bien sapées pour les étreintes forestières, y a toujours la manière, la frénésie aidant, on peut arriver à les embrocher et embourber, mais c’est exceptionnel… A la rigueur extrême, on y arrive pendant que leur mari (qui à la calvitie étincelante), se trouve avec d’autres semblables occupés à se congratuler à tour de rôle, se pâmant de vanité de recevoir quelques derniers lauriers façon sacre de Napo avec remise en fanfare d’une coupe en fer blanc en hommage d’avoir gagné la catégorie de la bagnole la plus chère du concours d’élégance, son auditoire gémissant trop fort d’obséquiosités indicibles pour qu’il puisse percevoir le chant du fade de sa merveilleuse occupée à jouir…
Les pétasses “de la haute”, donc, elles préfèrent s’encanailler dans un hôtel chic et cher, histoire d’ajouter des sensations : voire à l’arrière d’une Rolls ou d’une Bentley, mais elles restent très mode, elles pratiquent la baise haute couture, une habitude priseuse des manies de leur vieux pépère qui ne baise plus qu’avec la langue depuis longtemps…, Excepté dans des occases rarissimes, les soirs de gala, ou les coïts relèvent de la légitime défense après une longue préparation d’artillerie, si bien que le cocufiage n’est en réalité que de l’assistance à personne en danger. Avec les Hot-Roddeuses, par contre, on peut leur flanquer la grande seringuée cosaque dans un buisson ardent, derrière un arbre ou dans un cabanon en ruine…
Le genre de seringuée telle qu’on n’en a plus revu depuis la chute des Romanoff… Les cris deviennent alors stridents, mais, après, une fois le désir assouvi, que ce soit avec elles ou avec des “de la haute”, ne reste plus que le ressenti d’un vide cacateux ! Bref… J’en reviens au sujet de cette chronique : ma découverte du Saint-Graal des Hot-Rods Dirt-Track ! Je respirais donc les vapeurs d’essence avec volupté, lorsqu’une dame m’a interpellé, elle était entrée dans la catégorie des encombrants (des “encombrantes” aussi), de ceux et celles dont la famille attend le décanillage définitif pour palper l’héritage, elle était donc parcheminée époque moyen-âge ancien (très) et une sorte de dais en toile lui assurait un poil d’ombre afin qu’elle n’entre pas en auto-combustion…
— “Vous vous intéressez aux Hot-Rods ?”…, m’a t’elle dit avec un délicieux accent méridional.
— “Un peu !” ai-je roucoulé, charmeur…,“Chère compatriote, puis-je vous demander pourquoi vous êtes là, si loin de votre Provence, dans ce bled étouffant des Etats-Unis d’Amérique, dans cette atmosphère chaude et puante ?”…
— “C’est rapport à mon mari, j’ai une entorse et du mal à me déplacer, alors je suis restée ici pendant qu’il fait le tour des lieux”…
Soupir profond et long de cette dame aux jambes sédentaires… Il ne faut jamais s’attarder en ce bas monde, quand on devient gênant pour l’entourage…
Il faut en effet savoir se retirer dans un mouroir ou enjamber le parapet d’un pont sous lequel coulent les amours anciennes, tout le monde vous en sera gré, en ce sens, j’ai fait un sourire tendre à la Mémé, j’aurais voulu lui offrir un bouquet de violettes, ou un petit cadeau à trois balles, histoire de lui faire savoir qu’elle n’était pas seule en plein cagnard, mais à quoi bon ? A ce stade de mon récit, ô lecteur frappé de constipation chronique et de gonflement gazeux dans le tissu cellulaire, il est louable que je te révèle l’objet de cette chronique, oui, je te tutoie exceptionnellement… Ce n’est pas pour pratiquer un tourisme de masse que je suis venu dans ce bled, mais pour tenter de combattre l’un des fléaux de la planète et que ce “thon” théâtral ne te paraisse point excessif…
Tu vas croire, mon Popu, que je romance, que je fantômasse… et pourtant, ce que je déclare ici est la sous-expression de la vérité, la certitude qu’un esprit démoniaque étend sa toile d’araignée sur le monde… A voir les Hot-Rods tourner en rond, je me suis dit que les objets les plus neufs sont des épaves en puissance, je me philosophais cette pensée en matant les bedonnants et variqueux, imaginant leur oignon douteux, leur sexe suintant, toutes leurs saloperies mal gérées, me sentant cruellement moi-même organique et propagateur de sanies, en fait, j’observais la foule au forfait tirant partie de cet Eden… et songeais qu’après une longue immersion dans la médiocrité, je prendrai un pied éléphantesque dans un restaurant “chic” où j’irai attaquer mon éternité.
Ces Hot-Rods sont trop exigus pour qu’on y puisse tirer un coup convenable sans excès de souplesse et d’ingéniosité, je l’ai écrit ci-avant, mais je me répète à dessein, même une nanana voulant jouer à la femme-serpent, après le coup de rapière, y aurait plus mèche de la rectifier, de lui supprimer ses crampes, qui lui forcent à conserver une position d’acrobate ayant raté son numéro, il faudrait des heures pour arriver à la dénouer, avec les sévices d’un mécanicien pervers, pour démonter les sièges et la masser tout en lui glissant le médius dans la grotte des mille merveilles, il serait ravi de l’aubaine, le reste de la journée, il (le mécanicien) ferait sentir ses doigts à ses potes en affirmant que sans les aubaines que le ciel nous accorde, le monde ne serait pas existable.
Puisqu’il est question de grotte des mille merveilles, sachez que tout souterrain recèle un mystère car il représente une anomalie géologique, notre planète est faite pour rester dure et compacte, qu’elle abrite en ses profondeurs (lieu présumé des enfers) des galeries au cheminements bizarres, assez semblables à celui des vers dans les fruits, nous déconcerte… et aussi nous effraie, nous les hommes, aussi, besognons-nous silencieusement dans l’interminable terrier, tantôt aisément, parfois non, car rechercher le poing sensible pour elle et le point sensible pour nous, reste parfois aléatoire… Faut ensuite se restaurer, la machine réclame, c’est ce qui nous perd, mais aussi nous sauve, nous les bipèdes pensants.
C’est cette nécessité d’ingurgiter périodiquement des calories, après les plus extraordinaires jouissances et orgasmes, dans les pires désespoirs aussi, refusant la vie, mais finissant par accepter un casse-dalle, sandwiche-rillettes ou jambon-beurre, en cas de grands désespoirs : tu te suicides, ou bien tu bouffes. Combien en ai-je connu, des peines de cœur, qui capotaient dans le foie gras et la caille aux raisins, la tortore a réconforté davantage d’amants trahis que la ciguë n’en a tués, meurs ou mange, là est l’unique question ! Bien… J’en viens (ou reviens) au but premier de ce reportage/chronique qui concerne le Saint-Grall des Hot-Rods Dirt-Track…
Le Dirt-Track est une discipline typiquement américaine qui a eu ses moments de gloire avant la dernière guerre et suscite un grand intérêt auprès des nostalgiques du Hot-Rodding des débuts dont les plus âgés (presque centenaires) se souviennent d’avoir respiré la poussière en bordure de piste, en culottes courtes, entre papa et maman, suçant un candy-bar. Bob Schoonhoven est l’un d’eux, beaucoup trop jeune pour pouvoir courir lui-même, il construisait des maquettes de “racers” complètement fous, avec des pneus arrières gigantesques, des peintures vives… et rêvait toutes les nuits qu’il gagnait le “Grand National” devant les meilleurs pilotes du moment, il eut, un beau jour, l’occasion de racheter une de ces vieilles machines de course…
Puis il se mit en tête de la restaurer façon Hot-Rod… Plus tard, Bob devenu un gars rangé, marié et tout et tout, avec un bon job, avait toujours en lui le virus du Dirt-Track, ce Hot-Rod Track’T’23, que je vous présente ici dans toute sa splendeur… Comme l’histoire va généralement avec de telles constructions, cet engin est une Dodge en grande partie de nom seulement. Bien sûr, nous avons une chose telle que l’arrière du camion Dodge de 1925 1tonne qui le retient et le groupe motopropulseur (en quelque sorte, nous en parlerons plus tard), mais c’est à peu près tout. Presque tout le reste a été fabriqué sur mesure ou provient d’endroits qui ont peu ou pas de lien avec Dodge. À première vue, la construction semble avoir été conçue pour être du côté agressif des choses.
Une fois que l’on a dépassé la peinture apprivoisée de céleri et de vanille française sur la carrosserie et les roues, on est confronté à ce qui semble être une machine très puissante: à grandes roues, à capot long et apparemment juste mûre pour une conduite très rapide sur la route ou la piste de course. Arborant des panneaux de carrosserie lisses, des portes suicide et un toit de style toile fantaisie pour couvrir la banquette en cuir brun-rouge bordeaux, le Hot-Rod se déplace sous la puissance d’un moteur 440ci (7,2 litres). Le groupe motopropulseur, contrôlé par une transmission Torqueflite, fait partie de la famille Magnum de V8 à gros bloc fabriqués par Chrysler avec cette cylindrée de 1965 à 1978. On ne m’a pas donné les spécifications du moteur,…
Mais à son époque, il a développé jusqu’à 395 chevaux lorsqu’il était équipé d’un Holley six pack. On m’a dit que ce véhicule particulier a été inclus dans la liste des dix meilleures constructions pour 2006 par Hot-Rod Magazine USA. Il s’agit d’un engin simpliste et désuet, dont je n’ai rien retenu de particulier au niveau du palmarès d’autant plus que j’ai perdu le calepin dans lequel j’avais tout noté, y compris les coordonnées des jolies avec qui j’ai…. euh…. Sauf que simplement, qu’il a participé à quelques compétitions entre 1926 et 1932 alors qu’il était muni d’un 4 cylindres d’époque. Ce Hot-Rod Dirt-Track a été construit par un certain Bo Jones (qui était un préparateur célèbre à l’époque et que l’univers a oublié)…
Ensuite Bob Schoonhoven lui a racheté l’engin à l’état d’épave restaurable en cadeau à sa fille Nancy, sur le point de rejoindre son père sur les circuits de course de Dirt-Track… L’ensemble de la voiture était sain, mais surtout rien n’y manquait… le Trackster ayant été rangé dans un petit hangar au retour de sa dernière course, puis oublié…, Plus personne ne l’avait regardé depuis, il portait encore son numéro de course et était couvert de poussière rouge, celle de sa dernière Track-Race.. Les Trakster’s d’aujourd’hui n’ont plus rien de commun avec celui-ci, vous en avez certainement vu des photos dans des magazines américains, on les appelle parfois “Midget”, tellement ils sont devenus petits (Midget veut dire nain, rien à voir avec les MG de ce nom)…
Ils n’ont plus de carrosserie, ils ne sont qu’une cage de tubes qui entoure complètement le pilote… et ils tournent sur des pistes ovales à des vitesses effrayantes en prenant les deux virages en travers des quatre roues ! J’en reviens à ce Hot-Rod verdâche. Sous le capot-moteur le 4 cylindres d’époque a donc été remplacé par un V8 préparé par le non moins fameux Gene Sousa (qui est et restera inconnu en Europe), un arbre de transmission Mc Kennet de 36′ reliant la transmission Powerglide au pont arrière, qui est une pure merveille à lui tout seul, c’est un authentique Halibrand Quick-Change (surnommé Gennie Old Style par les puristes). Mais ce Hot-Rod était équipé de freins qui eux ne valaient pas le détour : de “bêtes” tambours !
Ils n’étaient même pas munis d’une flasque d’aluminium ni pourvus d’ailettes de refroidissement ! Ils ont ensuite remplacés par des freins à disques ! Le pont Halibrand est monté sur un ressort semi-elliptique transversal au dessus du différentiel, qui provient d’un Ford Modèle-A de grande série. Pour l’avant, une paire de ressorts “quart elliptique” soutiennent un axe de Ford’32 qui a été “droppé” et qui est lui aussi équipé des mêmes freins qu’à l’arrière (des freins à disques). Les pneus sont des Firestone, les phares proviennent d’un Ford-A tout comme la calandre et les feux arrières (qui datent de 1923), ainsi que les quatre jantes, qui ont été élargies, le tableau de bord minuscule a été refait et ne comprend (rien) en tout et pour tout que trois instruments.
Il y a un gros compte-tours, une jauge de pression d’huile ainsi qu’une jauge de température d’eau au milieu de tableau de bord ! Le Hot-Rod Trackster’T’23 avec sa curieuse allure de baignoire à roulettes, m’attendait donc sagement sous le soleil, splendide. J’en suis tombé immédiatement amoureux, tellement la forme générale était belle, curieuse et très bien proportionnée, la bête était en train de rôtir au soleil lorsque je m’en suis approché (à propos de Dirt-Track, mon fidèle dico m’a révélé que Dirt voulait dire poussière et que Track voulait dire piste). Quelle superbe bête, la ligne de caisse m’arrivait à la ceinture, J’ai enjambé la portière en un ciseau olympique plutôt que de l’ouvrir comme une simple portière de voiture, je ne sais pas, mais ça m’a semblé naturel…
C’est le genre de voiture qui n’avait pas besoin de portières ! Installé derrière le volant, j’ai détaillé le tableau en me disant qu’à part le compte-tours, je ne devais pas regarder grand-chose d’autre que la route devant moi ! Les jambes repliées en grenouille, presque accroupi, j’avais le volant en travers du ventre, les pédales étaient positionnées de telle façon qu’il me fallait chausser du 28 pour les actionner… et pire que tout, j’avais le levier de changement de boite, soit en dessous de ma jambe droite, soit contre mes coucougnettes ! “Comment ça se met-y-en marche, ce truc-là ?”… Je n’ai pas trouvé directement la clé de contact, mais un coupe-circuit positionné sur une caissette sur le plancher devant le siège-banquette., un quart de tout à droite vers le bas… et hop !
La pompe à essence électrique s’est mise en marche. J’ai attendu encore quelques secondes pour que se remplissent les cuves du carbu, puis j’ai enfoncé le bouton du démarreur situé juste à côté du coupe-circuit et… Brâaâoum, le bazar a démarré… J’ai vérifié la jauge de pression d’huile pour m’assurer que la culasse était lubrifiée… et effectivement l’aiguille était en plein milieu du cadran, mais elle s’agitait au même rythme que celle du compte-tours. Après une bonne minute de vroum-vroum pour empêcher le moulin d’étouffer, le ralenti était toujours aussi chaotique !
Je me suis rendu compte qu’il était inutile d’attendre que ça se stabilise, autant chauffer en roulant, je contrôlais le ralenti à la pédale avec le pied droit, le gauche étant sur le frein, il n’y avait pas l’air d’avoir de choke automatique et ce moulin ne tournait pas très rond, j’ai enclenché la vitesse et le bidule a démarré doucement. A 1500 tours, ça tournait rond, très rond même, et j’ai laissé la voiture prendre de la vitesse, étant seul à évoluer, je n’avais pas besoin de me soucier du trafic et ma trajectoire ne gênait personne…, Ah…! C’est qu’il tournait bien, par la suite, ce petit moulin, il lui manquait quelques chevaux pour être vraiment amusant, mais il y avait 300 bourrins quand même, qui attendaient en troupeau bien serrés que je leur laisse la bride sur le cou…
J’ai enfoncé la pédale, les pneus arrières se sont mis à cirer et hurler à l’agonie, j’ai entendu un “Bang!”, il y avait plein de fumée partout et le moteur s’est éteint, l’essai était terminé.., j’ai essayé de redémarrer, mais rien à faire, le moteur était noyé, ou explosé, ou pire encore et Nancy est accourue et a hurlé (je traduis) : “C’était bien ? Cool ?”… J’ai répondu que oui, que c’était un essai fabuleux, colossal, envoutant, elle était contente, elle s’est mise à rire en me proposant de l’acheter 26.000 US$ au lieu des 36.000 affichés, j’ai décliné l’offre, ayant déjà mon Hot-Rod Wanderer qui a plus ou moins un look semblable, j’ai dit qu’on se donnerait un coup de fil plus tard, que tout était OK, qu’elle était OK, que j’étais OK… Bref, c’était le bonheur… C’est ça l’Amérique !
@ pluche…