Hot Rod Ford’T-Bucket 1924
J’étais assis très bas dans la barque, la lumière scintillait sur les vaguelettes. Le vrombissement et le bourdonnement du petit moteur out-board remplissait l’espace de mes pensées. A la vue du Hot Rod’ T-Bucket se reflétant sur les eaux du lac, j’ai tremblé d’émotion d’avoir pu l’acquérir pour à peine 18.900 $ et la barque s’est doucement balancée en heurtant la berge. Je connaissais cette sensation. Je l’avais déjà ressentie. Pieds à terre…
Je me suis assis dans le T’Bucket, presque recroquevillé, regardant par-dessus le volant. Le ciel était bleu. Contact… Explosion de fureur… Flammes expulsées des échappements. Le V8 atmosphérique hurlait son bonheur. Les vibrations du moteur bourdonnaient dans le siège et, à travers mes mains et dans les talons de mes Baskets. Ma pression sanguine augmentait, mon cœur semblait s’accorder aux vibrations.
Je pensais que j’avais laissé ces expériences déchirantes derrière moi dans une autre époque des débuts de Chromes&Flammes, années ’80, Dragsters au Mans, Expo-show monstre à Paris, puis partout en province. Retrouver le bonheur de conduite un Hot Rod’T était bonheur… Je retrouvais mon tour de France par la route avec le C’Cab’T qui trône dans mon bureau comme une relique d’un musée personnel que personne ne peut voir qu’en photos..
Boite en Drive et GO… J’ai senti la poussée du V8, la légèreté du Hot Rod s’élançant sur la piste entre les arbres le long du lac… Une ligne droite puis un virage rapide me met quasi au défi si près des arbres que je pourrais toucher en tendant la main gauche. Comme c’est bizarre de conduire sur une piste en sous-bois dans un Hot-Rod aussi exposé à tout ce qui l’entoure…
J’ai tourné à droite, à gauche, fait tout droit, je me suis rapidement retrouvé de l’autre coté du lac. Toujours sur une piste étroite avec des arbres serrés sur les accotements. Personne nulle part… Que du bonheur…. J’ai pris le virage à venir et j’ai senti le volant se tortiller, la piste était si inégale. Tant d’informations me revenaient à travers la voiture. Après 20 minutes, je connaissais chaque particularité du chemin au fur et à mesure que je me jouais des ornières.
La suspension semblait parfois en porte-à-faux dans la carrosserie étroite. Chaque pneu me parlait. Je les ai tous entendus causer entre-eux de la route du lac, discuter de son grain, de l’adhérence chancelante à sa surface. Comme j’étais heureux de ressentir ce premier moment de sous-virage. La voiture m’a conseillé de soulever la pédale des gaz pendant un moment, de laisser le nez se calmer avant que je puisse à nouveau foncer…
Comme j’étais béatement heureux et que la vie aime se jouer des sentiments, ma vision a changé brusquement… La route s’est brouillée, des grands buissons dépassaient des bords. Dans le flou, j’ai vu toute ma vie défiler. Tout brillait comme le soleil dans mes yeux. C’est ce qui m’a fait soulever le pied droit de l’accélérateur pendant ce bref instant. Le lac semblait si proche que je pouvais en gouter les odeurs.
Et puis j’ai appuyé à nouveau sur l’accélérateur. Et puis la voiture s’est défoulée, la suspension arrière s’est enfoncée… Les roues avant délestées cherchaient appui… Une fusée. Tous les clichés que je positionne dans mes textes étaient réunis, plus gros, plus lourds et plus fermes. Quatre corps de manette des gaz ont aboyé et le Hot Rod s’est cabré encore plus… La vibration de la voiture s’est amplifiée en passant dans une nouvelle plage de régime….
Wouahhhhh ! C’était si intense que ma vision s’est brouillée. Ce n’était cependant qu’un point de résonance particulier. Appuyez dessus et il s’égalise, tout comme la voiture bégaie si vous donnez trop d’accélération à trop basse vitesse. Je ne sais plus combien de virages j’ai vécu comme ça. Trop nombreux pour être comptés. Le Hot Rod T’Bucket volait et s’il y en avait eu, toutes les voitures locales se seraient arrêtées sur notre chemin.
Je n’ai pas pu lever les mains du volant pour remercier. Qui aurais-je du ? Toute ma vie s’est consacrée à des moments semblables. Mon corps était absorbé dans le Hot Rod, à travers les montées en régime. À lui seul, ce V8 développe 315 chevaux… Il s’agit d’une approche globale. Serait-ce la raison pour laquelle je me passionne pour des voitures comme celle-ci ? De mettre leur passé et leur avenir à l’avant-plan de mon esprit…
C’est pour les mettre de côté, en vivant dans l’instant présent, tour à tour ? J’aime assez obscurcir mes propres visions de ce qui est à venir, en roulant sur les berges de cette route d’un tour de lac, je me suis connecté à quelque chose d’intangible, comme un point de lumière au-dessus de ce lagon. Quand j’ai finalement re-trouvé l’emplacement initial de départ en gravier, je ne voulais pas sortir. Même avec la voiture éteinte, je vibrais comme un diapason.
Une note parfaite est sortie de moi, et je suis sorti d’une voiture parfaite. Cela n’a pas de sens, à bien des égards, quoique pour vivre les mêmes sensations, une voiture Ferrari à la retraite roulera dans des temps similaires, avec des réglages similaires, mais en contrepartie d’une démultiplication financière par 20… Pour 20 fois moins qu’une poubelle rouge à problèmes constants, pour 1/20ième d’une misérable fraction, le Hot Rod apporte bien plus de bonheur…
Et ce n’est pas très pénible de posséder un tel engin. Sur la route, conduire un Hot Rod’T Bucket est une expérience que vous ne pouvez pas partager. L’espace est assez serré au point que vous pouvez à peine garder un portefeuille dans votre poche, et le coffre arrière niché sous un petit panneau amovible, ne peut pas contenir beaucoup plus qu’un baise-en-ville et un chargeur de téléphone.
Comme c’est idiot de mettre son téléphone dans cette petite boîte, et de penser à devoir faire un appel, ici, dans la nature, près d’un lac enchanteur, si exposé. Mais c’est la vie qui semble si riche et pleine au volant de ce Hot Rod. Je m’éloigne et une brise monte de la vallée. L’odeur de l’eucalyptus est écrasante. Sous le soleil chaud, j’en suis entièrement entouré. Voilà, je vous ai partagé quelques moments de bonheur…
Ce bolide Ford T-Bucket est doté d’une carrosserie en fibre de verre montée sur un châssis personnalisé et est propulsé par un V8 GM Small-bloc équipé de deux carburateurs à quatre corps chacun montés sur un collecteur d’admission surélevé. La puissance (315cv) est envoyée aux roues arrière via une transmission automatique. La carrosserie est finie en couleur “sarcelle” avec des rayures multicolores et l’intérieur est garni d’une sellerie en vinyle beige.
Les autres caractéristiques comprennent des freins à disque avant, des combinés filetés arrière réglables, une pile à combustible montée dans le coffre, des jantes à rayons avant de 16po, des jantes arrière de 15×12,5po de “Billet Specialties” et une capote beige amovible. Le pare-brise est rabattable, munis de rétroviseurs extérieurs. Une capote beige amovible est incluse et peut être vue installée dans la galerie de photos.
Les jantes sont montées avec, à l’AV des pneus Metzeler Lasertec 110/90 et à l’AR de pneus Mickey Thompson Sportsman Pro 28×12,5. Un essieu abaissé et un ressort à lames transversal sont montés à l’avant, et l’essieu arrière a été équipé de combinés filetés Viking réglables. Un volant gainé de cuir sarcelle avec quatre branches polies se trouve devant un tableau de bord de la couleur de la carrosserie abritant des instruments AutoMeter.
Le V8 GM 307ci et est surmonté d’un collecteur d’admission Edelbrock surélevé, de deux carburateurs Edelbrock et d’une prise d’air “attrape-insectes” avec des accents de la couleur de la carrosserie. L’équipement supplémentaire comprend un radiateur en aluminium avec un ventilateur électrique ainsi que des collecteurs Sanderson quatre-en-un. La voiture était immatriculée dans le Nevada en tant que Ford T-Bucket de 1924 en utilisant le numéro VIN 9054926.
2 commentaires
Maître,
Une fois n’est pas coutume, je m’abstiens de convoquer les philosophes et de soulever des questions. Je tiens simplement à exprimer ma sympathie et à vous féliciter chaleureusement pour votre talent indéniable. Votre plume, telle une palette de couleurs textuelles, offre un réconfort bienvenu au milieu d’une actualité ironiquement triste. Merci de votre formidable art et votre expérience avec tant d’élégance.
C’est réel grand plaisir de vous lire à nouveau, dans le sens ou je suis heureux que vous reveniez lire mes articles en m’offrant un commentaire général.
Si je publie énormément ces derniers temps, une grande part vient du temps que j’économise mon temps de plus en plus précieux, en appliquant mon total désintérêt pour les séries TV, les mauvais films débilitants, les désinformations TV débitées en clans sectaires et rangs d’onions… ainsi quez les stupidités “remâchées” des supports de la presse papier…
Tant de technologie pour en arriver si bas… Idem avec les réseaux asociaux concernant leur utilisation “primate”…
Toutefois, Fesse de bouc ne sévit plus autant qu’auparavant pour ménager sa clientèle de décervelés.
Le reste, je ne connais pas, car je ne veux pas le connaître, si ce n’est quelques rares articles dans des sites esseulés, réalisés par des similaires à moi-même…
Tant de technologie pour en arriver là, c’est angoissant…
Je vous recommande, si vous avez Netflix de regarder le documentaire sud Africain concernant une pieuvre, c’est beau et émouvant, un vrai plaisir d’une heure.
Il y est depuis un an, je me disais au moins chaque semaine : “Ahhhh je vais voir ce docu dont tant de bon est écrit”…
C’est tombé il y a 2 soirs et c’est beau à en avoir les larmes aux yeux de ne pas disposer d’un temps infini pour communiquer avec les animaux.
Notez que mon Blacky est communicatif de sentiments…
Mon père (décédé) me disait que lorsque je préfèrerai les documentaires, c’est que j’aurais atteint l’âge qu’il avait…
Dans le fond tout cela est un cycle, autant s’y faire et y voir du bonheur sans plus s’inquiéter de tout er rien…
A ce sujet, je suis mort 3 fois au CHU de Fréjus il y a quelques années et ai été réanimé 3 fois et gardé quasi 3 mois tellement je m’en faisais des injustices belges avec le vol de ma LéaFrancis… Outre mes diatribes juridiques,cCela m’a poussé à écrire tout librement avec de l’humour comme lubrifiant.
Voilà… Je vais terminer un article totalement givré sur une Porscherie 935 de presque 2 millions de $… Que de conneries…
Sur le point automobile, je n’utilise plus mes bagnoles, plus d’intérêt, de toutes façons je sais d’avance ce qu’elles me réservent, donc j’ai mes 2 déplaçoirs avec le Jeep Gr Chéro et la Smart… Pas même une fois par quinzaine… Intérèt nul… Le bonheur de ne plus avoir de frais d’essence et LPG…
C’est quelque part totalement fou de tant écrire de mémoire et de ne plus vouloir me déplacer en déplaçoirs…
Je suis surement un extraterrestre…
@ pluche ami Docteur…
Au fait..; C’est grâve ?
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